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Citations de Pierre Desproges (964)


Bonne année à tous mes amis Babeliotes !

BONNE ANNEE MON CUL
3 Février 1986
Il était temps que janvier fit place à février.
Janvier est de très loin le mois le plus saumâtre, le plus grumeleux, le moins pétillant de l'année.
Les plus sous-doués d'entre vous auront remarqué que janvier débute le premier. Je veux dire que ce n'est pas moi qui ai commencé.
Et qu'est-ce que le premier janvier, sinon le jour honni entre tous où des brassées d'imbéciles joviaux se jettent sur leur téléphone pour vous rappeler l'inexorable progression de votre compte à rebours avant le départ vers le Père-Lachaise...
Dieu merci, cet hiver, afin de m'épargner au maximum les assauts grotesques de ces enthousiasmes hypocrites, j'ai modifié légèrement le message de mon répondeur téléphonique. Au lieu de "Bonjour à tous", j'ai mis "Bonne année mon cul".
C'est net, c'est sobre, et ça vole suffisamment bas pour que les grossiers trouvent ça vulgaire.
CHRONIQUES DE LA HAINE ORDINAIRE.
de Pierre DESPROGES
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Pierre Desproges
Un mot qui vient bien, ça peut tuer ou humilier, sans qu'on se salisse les mains.
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Lettre ouverte à monsieur le chauffeur du taxi immatriculé 790 BRR 75

"Je ne vous oublierai jamais. C’était par un de ces matins d’avril parisien, tout frémissant de printemps sous les platanes vert tendre où l’imbécile et le poète se prennent à trouver la vie belle.

Ainsi allais-je, du pas crétin de ma démarche alexandrine, l’esprit bourgeonnant de pensées éclatantes, quand vous parûtes, monsieur, et m’assombrîtes soudain la tranquillité.
Vous vous êtes rangé le long du trottoir à dix mètres devant moi. La porte arrière côté trottoir s’est entrouverte avec une lenteur infinie, sous la pression désordonnée d’une main fébrile que prolongeait un bras nu décharné.
C’était une main effroyablement tordue par les rhumatismes, désespérément crochue pour ne pas lâcher la vie, une main translucide parsemée de ces étranges taches brunes et lisses qui dessinent parfois d’improbables mouches sous la peau des vieillards finissants. Au prix d’un effort pictural surhumain, de sa main jumelle, cette main pitoyable rutilait par cinq fois de l’éclat saugrenu d’un vernis cerise, dérisoire coquetterie de la très vieille dame qui devait constituer, à l’évidence, la partie cachée de ce membre à peine supérieure.
Je ne le dis pas à votre intention, monsieur le chauffeur du taxi 790 BRR 75, car il me plaît de penser que la sérénité de votre abrutissement global ne vous autorise pas à hisser votre entendement au-dessus d’une rumination céphalogastrique de base, mais il me semble que nous ne devrions pas sourire de cette ultime tentative de plaire qui incite les vieillards au bord du grabat à continuer à se peindre. C’est peut-être une expression de l’instinct de conservation. J’ai entendu un jour Mme Simone Veil faire observer que la plupart des rescapés des camps de la mort nazis avaient puisé la force morale et physique de survivre dans un souci quotidien de fragile dignité qui les poussait à continuer de se tailler la moustache ou de se tresser les nattes jusqu’au fond de leur enfer.
De la portière que la première main maintenant tant bien que mal entrouverte, la seconde a jailli, fébrilement cramponnée à une sobre canne blanche qui battait l’air en tous sens à la recherche aveugle d’un bout de trottoir ou de caniveau. En même temps, la tête et la jambe gauche de votre cliente, monsieur le chauffeur, tentèrent une première sortie de l’habitacle enfumé e gauloises et tendu de skaï craquelé qui vous tient lieu de gagne-pain automobile.
C’était une jambe de vieille de vieille, autant dire un tibia décharné, avec un gros genou ridicule en haut, et, à l’autre extrémité, un escarpin noir dont la boucle dorée tentait en vain d’apporter un éclair de gaieté pédonculaire à ce mollet posthume.
Incapable de s’extraire seule de votre taxi, cette si vieille dame lançait tant bien que mal, à petits coups comptés de sa nuque fripée, une tête ratatinée de tortue finissante dont les yeux usés appelaient à l’aide en vain, au-dessus d’un de ces sourires humbles des vieux dont Brel nous dit qu’ils s’excusent déjà de n’être pas plus loin.
Enfin elle apparut à la rue tout entière, en équilibre au bord de la banquette, hagarde, en détresse, les bras tendus vers rien, les jambes ballantes au-dessus du bitume, le corps brisé, péniblement fagoté dans un sombre froufrou passé, suranné, elle apparut, ridicule, enfin, comme la mouette emmazoutée qui ne sait plus descendre de son rocher.

Cette scène, d’une consternante banalité pour qui sait regarder la rue, ne dura pas plus d’un instant, et j’y mis fin moi-même en aidant la vieille dame à toucher le sol, mais cet instant me parut s’éterniser jusqu’à l’insoutenable à cause de vous, monsieur le chauffeur du taxi 790 BRR 75. Pendant tout le temps que cette dame semi-grabataire vécut en geignant son supplice ordinaire, vous ne bougeâtes pas d’une fesse votre gros cul content de crétin moyen populaire, et vos pattes velues d’haltérophile suffisant ne quittèrent pas une seconde le volant où vos doigts pianotaient d’impatience. Pas une fois votre tête épaisse de con jovial trentenaire ne quitta le rétroviseur où vos petits yeux durs de poulet d’élevage ne perdaient rien de ce qui se passait dans votre dos.
Dormez tranquille, monsieur le chauffeur du taxi 790 BRR 75. Il ne viendrait à personne l’idée de vous inculper, à partir de mon témoignage, de non-assistance à personne en danger. Vous n’avez strictement rien fait de mal ou d’illégal. Vous n’avez pas laissé un enfant se noyer. Vous n’avez pas regardé un piéton blessé se vider de son sang devant votre capot. Vous êtes irréprochable. L’infinie médiocrité de votre lâcheté, l’impalpable étroitesse de votre égoïsme sordide et l’inélégante mesquinerie de votre indifférence ne vous vaudront d’autre opprobre que celui du passant quelconque qui, dans l’espoir de vous voir un jour tomber de béquilles pour avoir l’honneur de vous ramasser par terre, vous prie d’agréer, monsieur le chauffeur du taxi 790 BRR 75, l’expression de mes sentiments distingués. »
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Pierre Desproges
Les animaux sont comme des bêtes. D’où leur nom. Ne possédant pas une intelligence supérieure, ils passent leur temps à faire des bulles ou à jouer dans l’eau au lieu d’aller au bureau.
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Bonheur

Il ne suffit pas d'être heureux. Encore faut-il que les autres soient malheureux.
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Pierre Desproges
Sans l'ennemi la guerre est ridicule
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Noël célèbre la naissance de Jésus Christ, fils de Dieu, venu sur terre pour effacer les péchés du monde, mais il avait oublié sa gomme.
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Par ailleurs, la naïveté grotesque des enfants fait peine à voir, surtout si l'on veut bien la comparer à la maturité sereine qui caractérise les adultes. Par exemple, l'enfant croit au Père Noël. L'adulte non. L'adulte ne croit pas au Père Noël. Il vote.
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L'homme est un être doué d'intelligence. Grâce à son intelligence, l'homme peut visser des boulons chez Renault jusqu'à soixante ans sans tirer sur sa laisse. Il arrive aussi, mais moins souvent, que l'homme utilise son intelligence pour donner à l'humanité la possibilité de se détruire en une seconde. On dit alors qu'il est supérieurement intelligent.
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La fille Tabouret épouse le père Lachaise. (je dis ça, c'est pour meubler.)
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Ce matin encore, j'ai été frappé par cette incompréhension réciproque entre les humains et moi. J'étais allé avec ma femme acheter quelques bouteilles de vin au cœur du vieux Bercy, chez un petit négociant qui vous fait goûter ses crus avec un quignon de pain et une rondelle de saucisson.
D'ailleurs, je ne comprends pas qu'on achète du vin sans l'avoir goûté au préalable. Il ne viendrait à personne l'idée d'acheter un pantalon sans l'essayer avant. Alors, Dieu me tire-bouchonne, ne refusez pas à votre bouche ce que vous accordez à vos fesses.
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“Le "tendre penchant" peut se manifester à tout moment et en tout lieu, au bal, à la fête foraine, dans l'autobus, plus rarement au cours d'une mêlée ouverte dans le Tournoi des cinq nations.”
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bleu,e adj et n.m.[bloï, blo, blef, blou, bloue, blau, bla.XI e siècle].
qui est une couleur voisine du rouge, mais pas très : un ciel bleu, des yeux bleus, les flots bleus, une Opel Kadett bleue. fig. Bouch : un steak bleu; s'emploie pour désigner un steak rouge. fig. Mar : bizut; "faut pas me prendre pour un bleu" (Rackhame-le-Rouge).
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Pierre Desproges
"Faute avouée est à moitié pardonnée", disait Pie XII à Himmler.
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La presse française , unanimement , a déploré les lourdes pertes pour l'esprit et le talent de ce pays qu'ont été les disparitions presque simultanées de Simone de Beauvoir et Jean Genet , six ans apres Sartre . On regrettera longtemps ces écrivains mineurs qui ont couché leurs plus belles pages à la terrasse du Flore pendant que les cons faisaient de la Résistance . Et qui n'hésitèrent pas , à leur tour , à prendre le maquis dès 1946 .
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Elle était moyenne avec intensité, plus commune qu'une fosse, et d'une banalité de nougat en plein Montélimar.


Malgré le grand couteau à viande qui l'avait saignée à blanc en la perforant du plexus au nombril et qui restait planté là, dans son ventre triste, elle conservait dans la mort cet air con des mercières mesurant l'élastique à culottes.
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Pierre Desproges
Le jour de la mort de Brassens j'ai pleuré comme un môme. J'ai vraiment pas honte de le dire. Alors que – c'est curieux – mais, le jour de la mort de Tino Rossi j'ai repris deux fois des moules.

Textes de scènes (1988)
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Pierre Desproges
L'intelligence, c'est comme un parachute : quand on n'en a pas, on s'écrase !
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Torture :

nom commun, trop commun, féminin, mais ce n'est pas de ma faute. Du latin tortura, action de tordre.
Bien plus que le costume trois-pièces ou la pince à vélo, c'est la pratique de la torture qui permet de distinguer à coup sûr l'homme de la bête.
L’homme est en effet le seul mammifère suffisamment évolué pour penser à enfoncer des tisonniers dans l’œil d’un lieutenant de vaisseau dans le seul but de lui faire avouer l’âge du capitaine.La torture remonte à la nuit des temps. A peine eût-il inventé le gourdin, que l’homme de Cro-Magnon songeait aussitôt à en foutre un coup sur la gueule de la femme de Cro-Magnonne qui refusait de lui avouer l’âge de pierre.

Mais il fallut attendre l'avènement du christianisme pour que la pratique de la torture atteigne un degré de raffinement enfin digne de notre civilisation. Avant cet âge d’or, en effet, la plupart des supplices, en Haute - Égypte et jusqu’à Athènes, relevaient hélas de la plus navrante vulgarité. Les Spartiates eux-mêmes, au risque d’accentuer la dégradation des sites, n’hésitaient pas à précipiter leurs collègues de bureau du haut des falaises lacédémoniennes pour leur faire avouer la recette de la macédoine.

Quant à l’invasion de la Grèce par les légions romaines, on en retiendra que la sanglante boucherie au cours de laquelle le général Pinochus se fit révéler le théorème de Pythagore en filant des coups de pelles aux Ponèses.

Pour en revenir aux chrétiens, on n’oubliera pas qu’après avoir été, sous les Romains, les premières victimes de la torture civilisée, ils en devinrent les plus sinistres bourreaux pendant l’Inquisition. Aujourd'hui encore, quand on fait l'inventaire des ustensiles de cuisine que les balaises du Jésus ' fan Club n'hésitaient pas à enfoncer sous les ongles des hérétiques, ce n'est pas sans une légitime appréhension qu'on va chez sa manucure.
Aux portes de l’an 2000, l’usage de la torture en tant qu’instrument de gouvernement se porte encore bien,merci. Même si, sous nos climats, elle a tendance à tomber en désuétude. Pour citer un pays occidental, au hasard, nous sommes en mesure d’affirmer qu’à Monaco, par exemple, le nombre des bourreaux par habitants est actuellement de zéro pour mille. D’ailleurs, on voit mal quelles raisons pourraient pousser un croupier à empaler un milliardaire.
Hélas, quand on s’écarte un peu plus de l’Hexagone, que ce soit vers l’ouest, vers l’est ou vers le sud, on rencontre encore, dans des contrées exotiques pourtant ouvertes au progrès, à trois pas de la piscine du Hilton, ou dans les steppes démocratiques les plus populaires, des empêcheurs de penser en rond qui cognent et qui charcutent, qui enferment et qui massacrent, qui souillent et qui avilissent, et même — ah, les cons !—qui arrachent les ailes des poètes au nom de l’avenir de l’homme
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Pierre Desproges
Tout dans la vie est une affaire de choix, ça commence par la tétine ou le téton, ça se termine par le chêne ou le sapin.
Pierre Desproges ; Textes de scène (1988)
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