Raphaël Krafft présente "
Les Enfants de la Clarée" aux éditions Marchialy.
Rencontre animée par Sarah Polacci et réalisée dans le cadre du festival Effractions organisé par la BPI (Bibliothèque pubique d'information) du centre Pompidou https://effractions.bpi.fr/
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les-enfants-de-la-claree
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Les enfants ont le ventre vide. Ils regardent vers les cimes, là où se dessinent tour à tour les silhouettes des mélèzes à demi-nus et des crêtes rocheuses sous la voûte étoilée en une confusion de bleu et de noir. Un spectacle nouveau – un de plus sur leur chemin sans limites -, un spectacle conforme à leur humeur aussi : ils ont échoué dans leur ultime passage, mais au moins ont-ils humé la terre de France. (page 10)
J’ai atterri deux heures plus tôt à l’aéroport de Gbessia, construit dans l’est de la presqu’île de Conakry, au cœur de la capitale guinéenne. Lors de l’approche de l’avion, j’ai pu avoir un premier aperçu de la ville vue du ciel, un assemblage anarchique de bâtiments défraîchis et d’habitats aux toits de tôle, reliés par des ruelles de terre et traversés par des routes défoncées, avant d’en prendre la pleine mesure dans le taxi rafistolé qui m’a emmené chez Nadine. (page 80)
« Les Névachais et les Briançonnais, respectueux de la loi, sont prêts à travailler avec les services de l’État pour trouver des solutions, à condition que l’État accepte de les entendre, ce qui n’a pas encore été le cas, et de les entendre sans vouloir en faire des auxiliaires de police ! Nous pourrons alors retrouver la fierté de nos cimes et redonner à notre pays l’honneur qu’il est en train de perdre et que nous perdons tous avec lui. »
Bernard Liger, citoyen de Névache 05100. (page 210)
Ils (Salif, Antoine, Thierno et Mamadou) obéissent sans un rictus aux ordres qui leur sont donnés, ainsi qu’ils l’ont fait avec nous dans le col et partout ailleurs durant leur épopée, sans trahir dans leurs regards aucune inquiétude ni surprise, comme rompus à la comédie grotesque des grandes personnes. Ils ne font pas le dos rond, mais au contraire manifestent une certaine hauteur face à la tragédie dont ils sont les victimes indolentes. (page 180)
En résumé, l’OIM est payée par l’Union européenne pour dissuader la jeunesse africaine d’émigrer sur une route qu’elle a elle-même contribué à rendre plus dangereuse avec l’argent du contribuable européen, un peu comme les panneaux « Attention danger » des clôtures électrifiées qui ceinturent les prisons. (page 146)
Au-delà des patrouilles classiques effectuées sur les routes carrossables comme celle du col de l’Échelle, la police, la gendarmerie et l’armée ont déployé tout un arsenal composé de motos et de quads en été, de motoneiges en hiver, d’hélicoptères et équipés de diverses technologies de vision nocturne pour interpeller les migrants dans la montagne. Au-delà de la gêne provoquée par certains de devoir traquer des personnes pacifiques et sans défense, de l’effarement des touristes et des gens du cru qui ont vu leurs montagnes se militariser, le dispositif a eu pour conséquence de rendre plus dangereuse encore la traversée des Alpes. (page 45)
Il faut que tu saches que les hommes et les femmes qu’on reçoit ici sont passés par le col de l’Échelle et ne sont pas en état de continuer leur chemin. Ici, on voit arriver des gens en très mauvais état. Des gelures – il y a eu, comme je te le disais, des amputations l’année dernière -, des femmes enceintes même, qui ont traversé le col en petites chaussures. Donc il faut les ravitailler, il faut les sécher, ils n’ont pas bouffé. On fait du sauvetage, on pourrait dire que c’est du super-secours en montagne. (page 49)
Tous les anthropologues, hydrologues, psychologues, géologues, zoologues, entomologistes, ornithologues, épidémiologistes, géographes et j’en passe, que l’on peut trouver sur le territoire guinéen travaillent tous ou presque pour des sociétés d’études d’impact qui trustent les juteux marchés de la prospection et de l’extraction minière ou de l’exploitation forestière. (pages 96-97)
- Des barrages ?
- Oui, des barrages. Les anciens du village comparent la situation à celle de la Seconde guerre mondiale : la montagne a été complètement militarisée. Lorsque vous descendez faire vos courses à Briançon, la police vous arrête et fait ouvrir votre coffre. Franchement ! Comme si nous allions nous abaisser à planquer les Africains dans nos coffres ! Il n’y a rien d’illégal à prendre des gens en stop même s’ils ont la peau noire, à ce que je sache ? (page 20)
L’aide au développement que les décideurs européens corrèlent à la maîtrise des flux migratoires est un mensonge. Au contraire, les migrants sont des acteurs à part entière du développement et des changements politiques de leurs pays d’origine… et de destination par leurs apports intellectuels, financiers, techniques et culturels. Qu’importe, avec l’argent du contribuable européen, l’OIM finance des artistes porteurs de cet unique message : il est préférable de rester en Afrique pour contribuer à son développement. (page 145)
OIM : Organisation internationale pour les migrations.