En prévention, il conviendrait de réduire drastiquement les populations de sangliers pour éviter toute propagation incontrôlable lorsqu'une épidémie se déclare. Quand cela s'avère être le cas, les alternatives sont nulles : on applique la même solution. Les populations concernées sont abattues, puis leurs cadavres détruits. Les sangliers propagateur sont, dans cette affaire, aussi bien les perturbateurs et les victimes d'un système agroalimentaire fondé sur l'économie de marché et la globalisation des échanges. Un système qui lui-même solidaire de ce qui l'a enfanté, soit la reproduction infinie du capital, quelle que soit sa nature, et la validation de cette relation marchande aux animaux par une idéologie néolibérale.
La zoopolotique est un mode de subjectivation - non une métamorphose. "Gibiers", "nuisibles" ou "bêtes noires" sont des statuts ou, plutôt, des identités en apparence transparentes et évidentes. Or faire des animaux des sujets politiques doit permettre de les extraire de cette assignation et contester la naturalisation de la place qui leur est attribuée.
Si l'on avançait, voici deux cents ans, qu'il fallait protéger les bêtes des braconniers, on argue désormais qu'il convient de défendre les animaux d'eux-mêmes -- et bien peu sont les espaces qui échappent à cette volonté gestionnaire. A rebours des fantasmes de mises sous cloches progressives de l'espace rural, l'essentiel du territoire français est exploité et transformé par les humains, y compris les espaces protégés. Le monde cynégétique use habillement de la croyance en une propriété exclusive et absolue dès lors qu'il est contesté ; pourtant, cette forme de propriété, comme une juriste (Sarah Vanuxem, La propriété de la terre) l'a démontré, n'est en rien la règle dans ce pays.
Toutefois, reconnaître leur autonomie et éviter toute colonisation exclusive de leurs territoires de vie conduit également à se garder d'une forme de gestion paternaliste de leur vie.
En ce sens, si la zoopolitique peut naître des appels récurrents à « agir pour le vivant », elle ne s'y fond pas tout à fait. Elle entend d'abord doté de capacité politique ces animaux qui nous entourent, là où la seconde attribue souvent aux espèces et aux fonctions écologiques une posture de victime de processus les dépassant.