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Critiques de Rivers Solomon (167)
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Sorrowland

J'ai découvert ce livre lors d'un de mes passages en bibliothèque, la quatrième de couverture narrant une jeune femme s'échappant d'une secte cela m'a tout de suite donné l'envie de lire celui-ci.



Malheureusement j'ai très vite déchanté car je n'ai pas du tout cru en ce que je lisais en effet Vern s'échappe en étant enceinte et de plus elle est poursuivie par une mystérieuse créature mais elle parvient à accoucher seule de jumeaux sans jamais se faire repérer, à se nourrir, nourrir ses enfants et tout cela durant un bout de temps.



Même si elle possède de superbes connaissances de la forêt dû au fait qu'elle est était des années dans une sectes et qu'elle connait donc pas coeur la forêt, les plantes etc de celle-ci.



Je me doute bien du côté fantastique du récit mais dés le début ici le côté crédibilité m'a perdu, encore plus quand Vern se rend par la suite en ville,qu'elle arrive à s'en sortir comme si de rien ne s'était passé.



Elle s’intègre tout de même formidablement bien pour quelqu’un ayant vécu à la marge de la société durant un bout de temps.



Même si le récit est bourré de thème plus qu'intéressant le racisme, le féminisme, l'homosexualité etc, je n'ai pas réussi à rentré dans cette histoire du début à la fin.
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Sorrowland

Depuis quelques temps, j’ai l’impression d’avoir trouvé un nouveau motif qui me plaît dans mes lectures d’imaginaire : celui des destins de femmes bafouées par les hommes qui luttent avec force contre le patriarcat mais au travers la plume poétique et imagée de leurs autrices et auteurs. Sorrowland est dans cette veine aux côtés de Rouge ou encore du Dieu dans l’ombre et je les adore !



Avec dans chacune de ses éditions des couvertures toujours percutantes, Sorrowland me permet de découvrir Rivers Solomon, un-e écrivain-e américain-e non binaire, qui s’est déjà fait remarquer pour deux textes forts évoquant racisme et ségrégation : L’incivilité des fantômes et Les Abysses, qu’il va me falloir découvrir de toute urgence, tant j’ai aimé celui-ci. Avec sa plume simple mais tranchante, rude mais poétique, iel m’a fait vivre une sacrée expérience de lecture dans l’Amérique inventée qu’iel a mis en scène qu’on ne peut malheureusement que trop rapprocher de celle qu’on connaît. Malgré quelques maladresses finales, j’ai été frappée par sa facilité à instaurer une ambiance étrange et inquiétante, et moi, j’adore ça !



C’est avec une belle finesse qu’iel nous plonge dans un univers qui semble au départ sortir d’un vieux livre d’histoire ou d’un vieux conte de fée, où l’héroïne Vern, s’est enfuie de là où elle vivait pour trouver refuge dans la forêt et y donner naissance à des jumeaux. Le lecteur est d’abord saisi par la rudesse de sa vie, puis par la force de caractère de cette toute jeune femme et par le lieu singulier où elle évolue. Il peut alors s’attendre, peut-être, à une lecture du domaine de la fantasy, mais petit à petit, un récit encore plus riche se dévoile.



Sorrowland est un texte qui porte à merveille son nom tant l’univers où évolue l’histoire est gris, dangereux et étrange. On pourrait facilement se laisser aller à la morosité mais ce n’est pas le choix de Vern, qui va se battre pour ses enfants, afin qu’ils ne connaissent pas le même destin qu’elle. Et quel destin ! Elle vivait jusqu’alors au sein d’une communauté noire raciste, patriarcale et homophobe où son mari, une sorte de pasteur, avait la main mise spirituelle sur tous les habitants, mari qui l’a épousée à même pas 14 ans et qui n’a que des réflexions archaïques sur la vie et les femmes ! Mais Vern est un personnage comme je les aime. Malgré son handicap, elle est albinos de naissance et voit très mal, la révolte a toujours couvé en elle et aussi bien son âme que ses désirs dérangent. Son choix de s’enfuir m’a donc semblé parfaitement logique et le récit de sa survie fut lumineux car exemplaire !



Bien que dans un univers très sombre, j’ai aimé voir le récit porté par le positif courage de l’héroïne qui lutte envers et contre tous pour le futur de ses enfants et le sien, et ce malgré son jeune âge. Alors que d’habitude ce n’est pas mon truc, j’ai aimé me retrouver face à un récit de survie où Rivers Solomon écrit magnifiquement la vie en forêt, entre rudesse et source de vie. C’est beau et dangereux à la fois, fascinant et proche également. C’est un très bel exemple de nature writing. J’ai adoré y voir évoluer Vern et ses jumeaux : Hurlant et Farouche, dont elle taie le sexe, voulant les élever dans la non-binarité, une trouvaille fabuleuse ! Et des pages superbes sur la protection et l’éducation d’enfant en milieu naturel + milieu hostile. ❤



Cependant Rivers ne se contente pas de cela, même si ça aurait déjà fait une superbe histoire. Iel imagine une intrigue plus complexe autour de l’ancien foyer de Vern et de ce qu’elle y a vécu ainsi que les autres habitants, l’occasion de revenir sur les sectes et leurs ravages, mais aussi de virer de bord et de partir vers un très beau récit entre fantastique, thriller et body horror. Fascinant ! Rivers nous amène avec beaucoup de subtilité vers ces points de bascule qui vont tendre son récit à deux reprises et le faire évoluer, passant d’un récit de survie dans la nature, à un fantastique tendance body horror, pour finir par un thriller vengeresque. Que d’ambiances différentes et que de réussites à chaque fois ! Le récit est donc plein de surprises et à part un petit coup de mou au milieu quand Vern et ses enfants trouvent un nouveau refuge où se poser, j’ai tout aimé et pardonné, même les grosses ficelles et raccourcis finaux.



Il faut dire que Sorrowland est un récit puissant, qui marque, ravage et fait réfléchir. Il montre comment on peut dévoyer une utopie. Il raconte le courage incommensurable d’une mère pour ses enfants. Il dénonce le racisme, l’homophobie et le patriarcat et appelle à la non-binarité, à la liberté de ressentir et assouvir ses désirs, à l’ouverture à l’autre. Rivers Solomon fait preuve de pages et de pages puissantes pour mettre cela en scène dans des lieux qu’on ne peut oublier et des situations perturbantes qui restent en tête, comme la transformation qui se produit chez Vern au fil des pages. C’est très singulier.



Même son écriture des personnages est réussie. Comment résister à cette jeune mère courage, perdue, handicapée et pourtant toujours là pour ses enfants et ceux qu’elle aime, même s’ils l’ont parfois trahie. Impossible de résister également à ses chers chérubins tellement attachants, aux noms si parlant. J’ai adoré la sagacité de Hurlant, et la force de Farouche, qui bien que plus fragile, suit toujours son jumeau. La rencontre avec un duo de femmes non-jugeantes au milieu de l’histoire m’a fait un bien fou. Elles furent l’ancre et notre jeune famille et ont tellement apporté à chacun pour se trouver, s’instruire et avancer. Je suis juste un peu déçue par les antagonistes de cette histoire, ma foi, très manichéens mais c’est le cadre aussi de cette utopie manquée qui veut ça, je pense. Il faut des antagonistes en tout point détestables pour dénoncer ce que dénoncer l’auteur-trice.



Sorrowland entre donc à son tour dans la courte liste (pour le moment) de ces titres revendicateurs pour la femme et les minorités avec une plume puissante, étrange et poétique, qui prend aux tripes. Ici, c’est à l’aide d’éléments de nature writing et de body horror fascinants et glaçants que Rivers Solomon aura su me convaincre et me marquer. Je me souviendrai longtemps de cette petite famille prête à tout pour survivre au milieu des racistes, des homophobes et des patriarches d’un autre âge. Force et courage à ceux luttant contre l’oppression alors même qu’on veut leur faire croire qu’ils vivent dans un paradis. Ça devrait nous interroger sur notre propre réalité.
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L'incivilité des fantômes

C'est un roman dystopique que j'ai beaucoup aimé pour son univers auquel je me suis attachée même si les exactions inhérentes aux régimes autoritaires avec une forte hiérarchie de classe sont toujours aussi horribles et inacceptables.

Dans une société future qui a dû fuir une Terre rendue invivable plusieurs siècles auparavant, les humains vivent à bord d'un vaisseau spatial, le Matilda, dont les ponts étagés et désignés alphabétiquement (du sommet A aux ponts les plus inférieurs) abritent des classes sociales par niveau avec des degrés de confort correspondant (les riches, bien nés, éduqués et oisifs dans les ponts supérieurs ne croisent presque jamais les ouvriers et agriculteurs proches de l'esclavage parqués dans de misérables cabines dans les bas-fonds - pardon, bas-ponts !).

Aster est une bas-pontienne mais sa mère était éduquée et en grandissant, différente, marginale, elle se révèle douée pour les sciences et la recherche. Aster est hantée par le fantôme de sa mère disparue trop tôt, laissant dans son sillage un mystère persistant.

Je ne veux pas en dire plus parce que le récit est tellement riche qu'un résumé ne saurait lui rendre honneur. Le personnage de l'héroïne est extrêmement fort et une des forces du roman est également à mon avis de suggérer sans les détailler le contexte et l'environnement dans lequel évoluent les protagonistes (l'Histoire socio-politique des matildiens, l'organisation des "avantages" et des relations hommes-femmes entre les différentes classes sociales, les spécificités des différents ponts, leurs modes de vie et compétences spécifiques...). L'auteur a su créer un monde riche dans lequel pourraient naître d'autres histoires en suivant d'autres personnages.
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L'incivilité des fantômes

Il y avait très longtemps que je voulais lire « L’incivilité des fantômes » de Rivers Solomon. L’histoire me semblait passionnante. j’ai également lu beaucoup de choses très positives sur ce roman. Lors des dernières imaginales, j’ai entendu l’auteurice parler de son œuvre et de son approche et j’avais vraiment hâte de lire l’un de ses roman.



Rivers Solomon place son histoire dans le futur. L’humanité a dû quitter la Terre mourante à bord d’un énorme vaisseau spatial, le Matilda. Déboussolée, il n’y a apparemment pas fallu beaucoup de temps pour qu’une partie de la population prenne le pouvoir. Les riches blancs vivent richement dans les hauts-ponts, pendant que les autres sont exploités dans les ponts agricoles. Vivant dans des conditions difficiles, ils sont violentés par les gardes et méprisés par une bonne partie de la population. On retrouve les mécanismes de la domination qui a été connue pendant l’esclavage : les noirs sont considérés comme inférieurs aussi bien pour des raisons biologiques que religieuses, infantilisés ou déshumanisés. Il y a même quelque chose d’encore plus cruel dans le fait que l’histoire ait lieu en huis-clos, sans échappatoire apparente.



Matilda est le nom du dernier navire qui a traversé l’océan avec des esclaves. Le vaisseau spatial donne une impression paradoxale d’immobilisme. On a l’impression que les passagers du Matilda sont coincés dans un système sans espoir de s’en sortir. Les bas-pontiens sont surveillés en continu et ne peuvent pas changer de Pont sans autorisation. Ils sont dans un vaisseau qui erre dans l’espace sans réelle destination, qui a lui-même des problèmes techniques. A l’intérieur, les populations commencent à se rebeller, d’autant plus lorsqu’un changement de pouvoir aggrave la situation de manière incontrôlable. Cet aspect peut donner à l’histoire un parfum de fable, d’autant plus que beaucoup de contes populaires sont aussi racontés dans le roman. Mais toujours des contes cruels.



Le roman propose un univers dans lequel les hommes blancs ont tout le pouvoir. L’incivilité des fantômes met en scène un ensemble de personnages qui n’appartiennent pas aux classes supérieures. Beaucoup d’entre eux ont des identité fluides ou alternatives. C’est le cas du personnage principal, Aster, identifié par la société comme une femme mais dont le comportement est beaucoup plus fluide, physiquement comme mentalement. Elle a également des troubles autistiques, qui sont souvent motifs aux moqueries. J’ai beaucoup apprécié son caractère loyal envers ses proches et rebelle envers l’autorité, mais aussi sa vision très pratique des choses. Theo, l’autre personnage principal, vit sur les hauts ponts mais ses manières peu viriles lui font également subir des injures, bien que son statut privilégié lui épargne les pires traitements.



Tous les autres personnages diffèrent de la norme d’une façon ou une autre, qu’ils soient gays, aromantiques, asexuels ou simplement atteint de troubles mentaux. C’est une vision très intersectionnelle qui est proposée. La société du Matilda est profondément divisée par une idée de ce qui est correct et tient de la loi, et de ce qui ne l’est pas. Et beaucoup de choses ne le sont pas. Outre l’esclavage, les femmes ont également peu de pouvoir. En effet, l’essentialisme est très présent. Cela aboutit à une violence très dure de la part des autorités : viols, torture… Rivers Solomon ne mâche pas ses mots pour décrire un monde profondément blessé.



J’ai beaucoup aimé ce roman, bien qu’il soit très dur et sombre. Le récit construit une société très clivante, mais son originalité est d’être mise en scène dans un environnement anxiogène. La population du Matilda est coincée dans un système politique violent et discriminatoire. Solomon Rivers décrit un monde en huis-clos, violent et désespéré. Les personnages principaux n’appartiennent pas à la norme dominante, car noirs, neurodivergents ou non hétérosexuels. L’histoire est ponctuée d’événements traumatiques, les scènes sont dures mais permettent de saisir la portée du danger que vivent les personnages.




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Les Abysses

Étrange lecture... très éloignée de mes goûts... je m’y suis tout de même aventurée et me voici bien désarmée pour vous en parler.



Durant l’esclavage et le commerce triangulaire des milliers de femmes esclaves ont été jetées à la mer pendant la traversée qui les amenait de l’Afrique vers l’Amérique. Rivers Salomon imagine une mythologie dans laquelle elles auraient donné naissance sous l’eau à des enfants, fondateurs d’un nouveau peuple, une nouvelle société sous marine, les Wajinrus.

Yetu est une de ces Wajinrus. Mais elle est surtout l’historienne de son peuple. C’est elle qui conserve en mémoire toute l’histoire et les douleurs, préservant ainsi chacun des traumatismes du passé. Ce rôle est exigent et éprouvant. Elle se souvient pour les autres, et les souvenirs, terribles, la détruisent. Elle va fuir ses responsabilités et rejoindre la surface, pour échapper aux souvenances, aux attentes des siens.



J'ai un ressenti très mitigé sur ce livre. J’ai adoré l'idée d’un peuple sous marins issu d'esclaves africaines enceintes et c'est ce qui m'a vraiment poussé à le lire.

Dans cette histoire il y a beaucoup de thèmes autour de la mémoire qui donne matière à réflexion, mais le développement de ces thèmes m’a semblé un peu mince et le rythme trop lent (surtout que c’est un livre relativement court). Je n'ai jamais eu vraiment l'impression que ce roman donnait son plein potentiel.

Je suis peut-être passé à côté de quelque chose tant je suis peu habituée aux univers fantastiques mais malgré tout sortir de ma zone de confort littéraire est toujours aussi enrichissant.



Traduit par Francis Guévremont
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Les Abysses

Les Abysses... Un fort propos en très peu de mots. Mêlant récit initiatique, mythologie sous-marine et une des plus noires pages de notre Histoire, Rivers Solomon propose un très court récit tout en simplicité. Au-delà de l'aspect fantastique de l'histoire, c'est une formidable réflexion sur l'Histoire et les racines, le poids du passé et la volonté d'aller de l'avant, l'espoir de jours meilleurs ainsi qu'une apologie du collectif et de l'individu qui règne dans ces pages. Malgré quelques faiblesses narratives par endroits, c'est simple, efficace, touchant. Peut-être même que l'on pourrait qualifier quelques traits de naïfs. Et pourtant, malgré mon cynisme naturel, j'ai passé un plaisant mais trop court voyage dans les froides et obscures profondeurs océaniques parmi ces Wajinrus.
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L'incivilité des fantômes

J'ai attendu quelques jours pour digérer et donner mes impressions sur ce roman. Mon indécision reste égale à celle du jour où j'ai achevé ce livre. Selon moi, l'histoire en elle-même reste en second plan, comme si l'auteur nous entraînait dans un décor uniforme, à travers le vaisseau Matilda, ses ponts X,Z,Y etc, ses couloirs uniformes, ses gardes tortionnaires, ses champs de travail, et la masse d'esclaves qui vit au rythme d'un pouvoir totalitaire qui divise leur civilisation en deux, les hauts -Pontiens et les bas-Pontiens, un monde déjà bien connu à nos yeux.

Les personnages sont crus, sauvages, déséquilibrés, martyrisés. Aster, Giselle, Mélusine , Pippa et Mabel sont les manifestations différentes de cette souffrance féminine confinée et ghettoïsée. Aster la rebelle qui défit le pouvoir, Giselle la victime prise dans des élans de folie, Mélusine la protectrice, et les deux amantes loyales Pippa et Mabel.

Parmi cette nuée de personnages féminins, l'auteur nous livre deux personnages masculins aussi opposés que la lune et le soleil. Théo le Général-Chirurgien, dont le côté féminin est exalté par ses actions protectrices. Et le tyran de ce monde, haineux et imbu de son pouvoir, Lieutenant.

Et ce titre alors me demanderez-vous? On peut le découvrir dans cette phrase de Mélusine: "les fantômes en fait, c'est le passé qui ne veut pas qu'on l'oublie".

Le fantôme d'Aster c'est sa mère Lune qui a disparu et qui a laissé des indices à sa fille pour qu'elle continue son œuvre.

Ce qu'il faut retenir de ce roman c'est la rage contenue dans cette écriture qui sait vous arracher les tripes au bon moment, crue, passionnée, c'est cette marque qui fait de ce roman un moment de lecture inoubliable.

A chacun ses fantômes...











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L'incivilité des fantômes

C'est un avis très mitigé, très paradoxal...



Ce livre est à la fois une bonne et une lecture banale.



Le postulat de départ est qu'une partie de l'humanité a embarqué sur l'immense vaisseau-arche Le Mathilda (en référence au Clotilda, dernier navire négrier, je suppose) composé de vingt-six ponts numérotés de A à Z. A la conquête de la Terre promise, ces migrants ont quitté la Terre et voguent vers leurs destins. A bord, les haut-pontiers (riche, blanc, etc.) et les bas-pontiers (noir, homosexuel, etc.). Au milieu, les gardes qui humilient sauvagement (parfois) les bas-pontiers et protègent le grand chef à plume.

Parmi les ponts inférieurs, il y a Aster, une jeune personne noire, transgenre, à la fois guérisseux(se), apprenti(e)-médecin, asocial(e), privé(e) de son appareil "de reproduction", qui traîne le poids de la disparition tragique et inexpliquée de sa mère, 25 ans plus tôt ; autour d'elle, Gisèle, sa meilleure copine (qui subit les affres des gardes), Mélusine (qui lui sert de "mama" sans en avoir l'envie) et Théo, le "chirurgien", bâtard haut-pontier, avec qui elle entretient, au fil des pages une histoire d'amitié/amour un brin étonnante.



L'idée m'a attiré... puis, l'intrigue s'est imposée à moi... une seule... comprendre pourquoi sa mère s'est suicidée à partir de ses carnets intimes, codés (mais, bon pas tant que ça!).

La réponse arrivera, bien sûr, mais ce n'est pas ce qui sera le plus important à savoir car, personnellement, j'ai décroché sur cette partie... Cela aurait pu, même, m'inciter à renoncer à la suite.



Parce que ce roman, comme mon avis, est pour moi, paradoxal. D'un côté, il est très intéressant, de l'autre, lent, brouillon et il est très facile de l'abandonner ; cela serait dommage car les trois chapitres tenus par les trois autres protagonistes (Théo, Mélusine, Gisèle) sont excellents et m'ont arraché les tripes.



Car, au final, malgré les hauts et bas, le manque d'intrigue, le côté un peu brouillon, stéréotypé et les ponts (d'où la thématique de l'union fait la force qui est une réalité... dans toutes les guerres, il a été noté cette propension à ce qu'un petit groupe d'hommes arrivent à contrôler la masse par manque de rébellion et d'union), ce roman est bouleversant par touche.



Parce qu'il parle de racisme social, ethnique, éthique, de religion et de viols, de banalisation sexuelle, d'esclavage, de pauvres et de riches, d'amour et de haine, bref, de la vie.



L'incivilité des Fantômes est le reflet d'une société, la nôtre ; celle qui est au bord du précipice et qui menace de nous entraîner vers l'abîme... car, nous, contrairement aux personnages du livre, nous n'avons pas de Mathilda... Même injustement répartie...

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Les Abysses

J'ai emprunté ce roman à une amie. Son titre et sa couverture m'ont intrigué. Je l'ai lu, vite, en quelques jours, je suis rapidement entrée dans l'histoire. Cela faisait longtemps qu'un roman ne m'avait pas autant plu, cela fait du bien de retrouver l'envie de lire, de finir un livre.



L'héroïne Yetu, est donc une historienne, une sirène historienne. Attention, on est très loin des sirènes de Disney ou de la Lorelei, mes seules références en sirène. Yetu est une historienne, c'est à dire qu'elle porte toutes les souvenances de son peuple et ne leur redonne que quelques jours par an. Elle porte donc la souffrance de son peuple depuis la 1ère née, Zoti Aleyu.



Lors du commerce triangulaire des esclaves, quand une femme tombait enceinte sur un vaisseau négrier, elle était jetée à la mer. Mais en fait, toutes ces femmes ne mouraient pas. Certaines ont survécu, se sont transformées en sirènes et ont oublié cette histoire traumatique. Un jour, l'une d'entre elles, Yetu, va le leur rappeler, dans ce roman d'émancipation, magique et réflexif, sur la condition noire et sur l'impossibilité d'une justice, en l'absence de vérité.



Coup de cœur de ce début d'année 2024 !
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L'incivilité des fantômes

Dès le départ le décor est planté, transidentité et intersexualité sont du voyage.

Il a fallu que je m'habitue au pronom "iel" que je n'avais jamais concrètement lu nulle part jusqu'ici.



Les humains ont quitté la terre pour un voyage dont ils ignorent s'il aura un aboutissement, s'ils trouveront un jour un endroit où se poser, à bord d'un vaisseau dont le gigantisme est inimaginable. Toutes les couches de la société, y travaillent, cultivent et font de l'élevage, séparés par leurs niveaux de pauvreté ou de richesse. On dirait un vaisseau-monde, tellement immense que c'est difficile de se le figurer.



C'est une société de fin du monde effarante, où quittant une Terre agonisante, ils sont partis à la recherche d'un nouveau monde en prenant bien soin que conserver toute l'iniquité de l'ancien monde : le racisme avec la notion de races inferieures et les classes sociales très basses au service des classes sociales élevées, l'extrême richesse et l'extrême pauvreté, au lieu de tirer des leçons de leurs erreurs. Il y a les haut-pontiens, qui se prennent pour la crème de l'humanité et les bas-pontiens, qui ne comptent pas.

Ils ont aussi emporté la religion avec tout ce qu'elle peut comporter d'intolérance, de misogynie et de préjugés. Sans oublier l'homophobie et la transphobie. Il s'agit là d'un monde totalement rétrograde. Ça m'a d'ailleurs énormément fait penser au système de castes en Inde.



Aster, métisse née fille mais non binaire, vit dans le souvenir de Lune, sa mère qu'elle n'a pas connue et qui a laissé un journal codé.

Elle est amie avec Gisèle, étrange personnage, un peu folle et bipolaire, cynique, cruelle, révoltée et survoltée, et Théo le chirurgien, introverti et très pieux, qui a fait voeu de chasteté et dont elle est l'assistante. Et puis il y a Mélusine, sa tante qui l'a élevée mais qui n'a pourtant aucun instinct maternel.



On découvre une société cauchemardesque qui vit depuis un temps infini dans Matilda, ce vaisseau qui doit les amener vers la terre promise mais qui pour les bas-pontiens est surtout une prison de fer, antichambre de la mort depuis les nombreuses coupures de courant qui les privent de chauffage et leur font endurer des températures glaciaires, pendant que les haut-pontiens vivent dans une opulence indécente. Ce monde futur est arrieré, cruel et violent. J'ai trouvé cette option intéressante car inhabituelle il me semble.



Aster cherche quelque chose, aspire à comprendre, à découvrir le message secret de Lune, qui sans doute lui apportera bien des réponses.



J'ai aimé l'histoire, toujours étonnée que je suis par la force vitale qui anime tout ce qui est, même dans les pires difficultés de l'existence et la résilience dont certains sont capables même quand l'espoir est si ténu qu'il est quasi inexistant. Et j'ai aimé les réflexions sur le subjectif, le futile, la superficialité, et la vanité de tout ça.

C'est un bel écho à notre société, qui hélas nous laisse penser qu'on n'a aucune chance de s'améliorer, qu'il y aura toujours des tordus machiavéliques et cruels, des despotes, des tyrans imbus d'eux-mêmes. Car quelle que soit l'époque dans laquelle on vit, l'humanité reste ce qu'elle est.


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Les Abysses

Création d’un mythe :



Cette population sous-marine est apparue d’abord dans les chants du duo de techno-électro Drexciya de Détroit qui s’interroge sur la possibilité que des êtres humains puissent respirer dans l’eau comme les foetus dans le ventre de leur mère. Ce questionnement vient du fait que des milliers d’esclaves africaines étaient jetées par-dessus bord lors de la traite négrière quand elles étaient en train d’accoucher, ces foetus n’ayant jamais respiré d’air pourraient-t-ils avoir survécu et peuplé les océans ? Le groupe Clipping reprend ce récit dans sa chanson The Deep pour explorer avec plus de profondeur le thème car le premier groupe était surtout axé sur la musique plus que sur les paroles, puis Rivers Solomon ‘est à on tour approprié cette histoire en ajoutant sa pierre à l’édifice et a choisi de mettre en scène ce peuple des abysses, les Wajinrus.



L’intrigue :



Au plus profond des océans, dans une nuit noire perpétuelle, vit un peuple marin unis grâce à l’esprit de collectivité sur lequel ils se sont fondés. Tous, sauf une, Yetu est l’Historienne des Wajinrus, là où tous les autres individus peuvent vivre l’instant présent sereinement, Yetu est le réceptacle vivant de la mémoire de tout un peuple. 600 ans d’Histoire qui la hantent et lui meurtrissent l’esprit autant que le corps, cette Histoire est trop grande, trop traumatisante pour son corps menu. Les souvenirs, appelés Souvenances, accaparent tant son esprit qu’elle se perd et a peur de devenir folle. Sa libération arrive une fois l’an, les Wajinrus ont créé le Don de mémoire qui permet au peuple entier de se rappeler leur création, leurs ancêtres jetées des bateaux négriers et leurs enfants métamorphosés en sortant de leur corps pour vivre sous l’eau, les débuts dans la plus grande solitude pour peu à peu se regrouper et s’allier. Ce Don de mémoire est nécessaire au Wajinrus qui se sentent peu à peu perdus et vides sans ces souvenirs, mais ce Don est également extrêmement douloureux, raison pour laquelle un seul d’entre eux est choisi pour les conserver. Mais Yetu n’en peut plu, et cette fois elle va profiter de la confusion créée par le Don de mémoire pour s’enfuir loin de son peuple.



L’importance de l’Histoire :



La thématique de ce roman est l’importance pour un peuple d’avoir accès à son Histoire. Pour débattre de cette idée, Rivers Solomon utilise deux personnages, Yetu qui fuit cette Histoire, la juge trop destructrice et pense que cela l’empêche d’être elle-même, qui souhaite être sans entrave d’aucune sorte, elle aspire à se trouver, à découvrir sa véritable nature sans ce Don qui était vécu comme une malédiction. Au contraire, Oori qui est la dernière survivante de sa communauté juge sévèrement le choix de Yetu, il ne reste rien du peuple d’Oori, à sa mort ce sera comme s’il n’avait jamais existé. Même si ce Don crée de la douleur, au moins elle pourrait trouver du réconfort à voir revivre même quelques instants seulement ses proches disparus, quand bien même ce passé est douloureux, il permet de façonner le présent et de préparer l’avenir.



Et aussi… :



Il y a également d’autres thématiques moins mises en avant mais qui ont leur importance tout de même. Le peuple des Wajinrus n’est pas binaire comme les humains, ils ont l’ensemble des organes génitaux mâles et femelles à disposition et c’est d’un commun accord qu’ils s’accordent lors de l’accouplement de qui féconde qui. Quand Yetu sera échouée à la surface, un personnage qu’elle va rencontrer n’aura pas de pronom genré non plus, d’un premier coup d’oeil elle ne sait dire s’il s’agit d’un mâle ou d’une femelle donc lorsque Suka sera auprès d’elle, elle pensera Il ou Elle dit ceci, Il ou elle fait cela, sans jamais se permettre l’impolitesse de demander son genre à Suka étant donné que ça ne la perturbe pas le moins du monde et que ça n’a pas la moindre importance, seule compte la personne.



Au niveau de la communication des Wajinrus, tout se fait par courants électromagnétiques, ils sont habitués à ne rien voir donc ils se reconnaissent de cette façon, avec une signature électrique qui leur est propre à chacun et ils peuvent se comprendre et se parler de cette façon. De même, ce don avec l’électricité dans l’eau leur permet également d’agir sur les éléments et créer de gigantesques tempêtes, on aura un aperçu dans une souvenance de cette rage qui les a animé contre un des bateaux négriers.



En bref :



J’ai été un peu déstabilisée par ce roman où j’avais compris au départ qu’il était question de vengeance et donc j’en avais conclu qu’il y aurait de l’action mais en fait…pas du tout, attendez vous surtout à un roman assez philosophique, Rivers Solomon a utilisé un morceau de l’Histoire de l’esclavage tout en apportant d’autres thématiques actuelles et nous offre un essai plus qu’un roman de science fiction sur l’importance pour un peuple d’avoir accès à son Histoire. Quand bien même je n’y ai pas trouvé ce que je pensais de prime abord, j’ai beaucoup aimé découvrir son approche et ses idées, j’ai enchainé avec son premier roman traduit, L’incivilité des fantômes.


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L'incivilité des fantômes

Une partie de l'humanité a embarqué sur l'immense vaisseau-arche Le Matilda composé de vingt-six ponts numérotés de A à Z. A la conquête de l'Eldorado, ces derniers migrants ont quitté la Terre dévastée à la recherche d'une planète pouvant les accueillir pour un nouveau départ. Le pitch est pratiquement un copier-coller de celui d'Aurora de Kim Stanley Robinson et c'est à peu près le seul point commun entre les deux romans. Deux traitements différents pour un même sujet. Le point fort essentiel autour duquel tourne tout le roman est la ségrégation qui s'est installée sur le vaisseau en fonction des ponts. Les Hauts-Pontiens sont les riches, blancs, hétérosexuels qui vivent dans l'opulence et le confort que les Bas-Pontiens ne connaîtront jamais. Ces derniers sont traités comme des esclaves, ils sont noirs et/ou homosexuels. Parmi eux, Aster, une personne transgenre, noire, autiste qui essaye de découvrir pourquoi et comment sa mère est morte 25 ans plus tôt.



Je n'ai quasiment trouvé que des défauts à ce roman... et une seule qualité qui rend à elle seule cette lecture indispensable.



Tout d'abord l'intrigue principale (et la seule d'ailleurs !) qui tient en deux lignes. Aster cherche à comprendre ce qui est arrivé à sa mère vingt-cinq ans plus tôt et trouver le lien avec les évènements qui se passent aujourd'hui sur le vaisseau arche. C'est très léger et les réponses sont à la hauteur des questions, pauvres et improbables !



Ensuite c'est le rythme général du roman qui pose problème, il est très inégal. Le premier tiers se dévore, ensuite ça s’enlise, ça se répète, ça se perd. On retrouve dans les dernières pages la verve du début, cette pression qui prend à la gorge. Une certaine fulgurance réanime de temps en temps le lecteur, en particulier quand la parole revient à trois autres protagonistes Théo, Mélusine, Gisèle. Mais juste le temps d’un chapitre chacun, vraiment trop peu pour pouvoir développer pleinement ces écorchés vifs et c'est bien dommage !



Et pour finir le manque de crédibilité scientifique plombe le récit. Je veux bien que le vaisseau-arche ne soit qu'un prétexte mais l'existence même du vaisseau tient du miracle. Je ne sais pas si le fait d'avoir lu Aurora il y a quelque temps a faussé mon jugement.



Le propos est ailleurs et ce roman est une gigantesque claque émotionnelle. Ça retourne les tripes. La violence insidieuse, banalisée fait mouche. La souffrance physique et/ou psychologique présente à chaque page marque les esprits. Tout est source de désolation dans cette immense arche qui se révèle être bien petite pour les opprimés. La différence comme moteur de haine. L'autrice ne tombe jamais dans la facilité ni dans le larmoyant, elle relate une cruelle et froide réalité. Le racisme social, ethnique, religieux et sexuel au centre du récit, au coeur de la vie. C’est le point fort, l’âme du livre.



Loin des clichés, L'incivilité des fantômes n'est que le reflet de notre monde avec une visibilité accrue du fait de l’espace réduit et de la conception du vaisseau. Une réussite qui, à elle seule, vaut la lecture de ce roman.




Lien : https://les-lectures-du-maki..
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L'incivilité des fantômes

D’après l’auteur, si vous avez l’extrême affront d’être né blanc et homme (« oh lalala, quelle horreur »), vous êtes au mieux un violeur, au pire un violeur-tueur-esclavagiste



Si vous êtes abonné à Télérama, auditeur assidu de France Inter et utilisez l’écriture inclusive, ce livre deviendra votre nouvelle bible

Si vous avez au moins trois neuronnes en état de marche, passez votre chemin
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Les Abysses

J'ai lu ce roman dans le cadre du challenge Mars au féminin et Les femmes sous la lune (instagram).



J'ai découvert Rivers Solomon avec son roman L'incivilité des fantômes, qui m'avait énormément plu. Je savais que je ne serai pas déçue avec Les Abysses, d'autant plus que le résumé du roman m'a tout de suite accrochée.



Ce roman d'anticipation est à la fois tragique et plein d'espoir. Il fait écho à ces femmes noires esclaves transportées sur des bateaux négriers qui étaient jetées par dessus bord lorsqu'elles tombaient enceinte, comme de vulgaire objets.



C'est un récit très fort dans lequel on découvre un peuple sirène, né de ces femmes jetées des vaisseaux négriers. Leurs enfants ont survécu dans les eaux et ont créé cette peuplade sous-marine, les Wajinrus, dont Yetu, l'héroïne, est dépositaire de l'Histoire des siens. Elle emmagasine dix siècles de souvenirs, c'est elle qui supporte les drames, la douleur, la souffrance, jusqu'à un rituel annuel où elle les renvoie à ses semblables, avant de les reprendre. Mais Yetu, avec ce poids sur les épaules, finit par craquer et fuir vers le monde des deux-jambes, à la surface.



Ce roman est plus qu'une simple histoire, c'est une véritable allégorie de la mémoire et de l'importance de se souvenir. Se rappeler du passé, c'est faire vivre sa culture mais c'est aussi un frein à se projeter dans l'avenir. C'est un magnifique voyage parabolique qui invite à se poser des questions sur sa propre identité, tout en incluant des messages très contemporains sur le genre, le racisme ou encore l'écologie.



J'ai trouvé le roman trop court. Beaucoup de thèmes y sont abordés et j'aurais aimé qu'ils soient creusés plus en profondeur. C'est dommage car ce sont des sujets qui méritent qu'on en parle et qu'on les développe, qu'on porte à la connaissance du monde ce que ces femmes ont vécu. Malgré tout, j'ai beaucoup aimé cette incursion dans le monde des Wajinrus, où tout est décrit de manière très symbolique.



Je ne peux pas terminer cette chronique sans évoquer la postface du roman, rédigée par Daveed Diggs, membre du groupe Clipping. L'idée originale de cette histoire ne vient pas de Rivers Solomon, mais d'un groupe de techno des années 90, Drexciya, qui a inventé ce mythe afrofuturiste d'une civilisation sous-marine issue des esclaves noires. Clipping a repris ce morceau dans son single The Deep. Rivers Solomon propose, dans ce court roman, une revisite à sa manière du mythe des Wajinrus.
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Les Abysses

Rivers Salomon nous offre ici une très jolie fable, des plus originales pour parler des horreurs de la traite négrière dans le commerce triangulaire.

Les femmes enceintes sur les bateaux esclavagistes étaient tout bonnement jetées à l'océan pendant le trajet, ce petit livre propose une issue magique et métaphorique à leur destin. En effet, imaginons que ces femmes s'étaient ensuite transformées en sirènes pour constituer une grande communauté sous-marine, mais ayant perdu cette mémoire des horreurs de l'esclavagisme ? C'est dans l'incarnation de ce personnage de Yetu que l'autrice répond à cette question.

J'ai apprécié l'originalité du genre pour parler de ce sujet, le style littéraire très immersif et discursif, je trouve qu'il manque néanmoins de profondeur.
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Soif de sang

Soif de sang et autres textes est un recueil puissant, parfois déstabilisant et troublant qui nous plonge avec une intimité presque brutale aux sujets qui traversent la vie et l’œuvre de Rivers Solomon. Entre fictions et récits personnels, ces textes inédits évoquent des sujets difficiles, où la vie côtoie souvent la mort, où le corps subit le poids des traumatismes autant que celui de la vie et où le vide engloutit tout sauf la colère. Impossible d’en sortir indemne.



Critique complète sur yuyine.be!
Lien : https://yuyine.be/review/boo..
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Les Abysses

Je souhaitais avant tout remercier David Meulemans et les éditions Aux Forges de Vulcain pour l'envoi de ce livre à un râleur invétéré (oui, moi).



Après L’incivilité des fantômes, dont j’avais autant apprécié la démarche militante que regretté l’histoire un peu en retrait, j’ai donc souhaité renouveler l’essai avec l’auteurice, dans une proposition plus courte mais pas moins engagée. Alors, remonte-t-on de cette plongée dans les abysses, ou touche-t-on le fond ?



Petit élément de contexte amusant : le roman est inspiré d’un morceau (The Deep, Clipping) lui-même hérité d’un groupe de musique électronique, Drexciya, qui avait imaginé une civilisation sous-marine née de l’assassinat lors de la traite négrière d’esclaves enceintes, jetées à la mer.



L’incivilité des fantômes m’avait véritablement marqué pour la rage qu’il dégageait. Solomon y abordait des sujets difficiles tels que l’esclavage, le racisme, les violences sexistes et sexuelles, la mémoire… Avec son deuxième essai, l’auteurice poursuit son exploration des ravages de la traite négrière et imagine donc tout un peuple aquatique né de la mort d’esclaves considérées comme inutiles. Ou comment se (re)construire après ça…



Avec une langue flirtant avec le conte, Solomon affiche une maîtrise stylistique que je ne lui avais pas trouvée dans son premier roman. Le format, plus court, lui permet d'éviter les quelques chutes de rythme ressenties avec L'Incivilité des fantômes. Le tout en proposant une densité thématique rare pour un livre de moins de 200 pages.



Mieux écrit, mieux maîtrisé, Les Abysses n'en oublie pas pour autant ce qui faisait les forces du précédent roman de Solomon : un engagement toujours très fort, et de l'émotion, beaucoup d'émotions. A la rage de L'Incivilité des fantômes s'ajoutent également une certaine mélancolie, une atmosphère parfois plus douce, qui donnent à l'ensemble un meilleur équilibre.



En bref, un roman parfaitement maîtrisé, qui laisse une impression douce-amère.



J’ai aimé :

- L’engagement de l’auteurice

- L’univers proposé

- La maîtrise de l’ensemble



J’ai moins aimé :

- …
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Les Abysses

Naaaaaan ! 😭 Je voulais TELLEMENT aimer ce roman. Il avait l'air si important. Et pourtant... C'est un demi flop.

L'écriture est vraiment très particulière et c'est ce qui m'a beaucoup plus. J'ai aussi beaucoup aimé "l'univers", le fait que tout se passe sous l'eau (oui... Ce sont des sirènes... Forcément...). J'ai aimé la légende, l'histoire, le postulat de départ. Mais il est si peu exploité ! Pourquoi ?

Yetu est une historienne, elle garde les "souvenances" de tous, puis leur rend une fois par an. Pourquoi ne pas avoir plus développer l'histoire de ces femmes noires, de ces reines à l'origine de tout ?

Tout comme on passe très rapidement sur le fondement de ce peuple des eaux, sur leurs débuts etc...

En fait le roman est surtout axé sur Yetu, sur sa peine, sur ses difficultés, sur les décisions difficiles qu'elle doit prendre. Et en ce sens, le pari est réussi, mais ça n'est pas vraiment ce à quoi je m'attendais.

Je suis un peu déçue, malgré quelques super points positifs.
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Sorrowland

Je laisse à d'autres le soin de spoiler à outrance comme si le plaisir de la découverte leur était uniquement réservé pour amener ici mon avis personnel.

Je crois comprendre que c'est l'esprit d'une critique.



Je m'effare, depuis L'incivilité des fantômes jusqu'à maintenant, de constater à quel point Rivers Solomon peut s'attirer de cinglantes critiques.



Pour ma part, chaque nouveau roman m'offre un plaisir croissant. L'inconfort, le mal-être de ses héroïnes me vont systématiquement droit aux tripes et j'épouse leur rage, leur violence, leur peur de croire naïvement de toute ma sensibilité.



Certes, iel est manifestement originale, au plein sens du terme. On en a tellement besoin dans un monde de plus en plus aseptisé et convenu !



Rivers Solomon offre une littérature violente et engagée, à fleur de peau, qui fait du bien à certains et qui en hérisse d'autres.



A moi, elle fait énormément de bien.



Merci Rivers.


Lien : http://christophegele.com/20..
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Les Abysses

La couverture de ce roman nous plonge immerge immédiatement dans l’histoire de ce peuple issu du trafique d’esclave. Des femmes enceintes et des bébés qui ont muté, des sortes de sirènes. Un peuple qui s’est crée tout seul par la volonté de certaines survivantes et qui s’est donné comme nom les « wajinrus ». Car pour exister il faut avoir un nom, pour survivre il ne faut pas être seul. La narratrice va comprendre l’importance des mots, du langage, des concepts plus abstraits.



Pour survivre il a fallu faire des concessions. Ces créatures ont mis en place un système de mémoire collective dont quelques porteurs appelés historiens sont les réceptacles. Les autres membres n’ont que qu’une mémoire partielle pour créer un peuple où le présent est basé sur les bonnes choses. Une fois par an les historiens déversent cette histoire commune et se rajoutent des évènements de l’année.



Cette fable pose beaucoup de questions. Qu’est-ce qui est gardé pour être transmis d’une génération à l’autre ? L’art des historiens de réécrire pour que ce soit facilement compréhensible et transmissible n’est pas sans danger. Que ce passe t-il si un historien disparait ? S’il ne supporte plus le poids de la souffrance de ce lourd passé ? et de là on passe à l’idée de destinée, une fois désigné comme historien c’est à vie… Il faut de l’abnégation, s’efface pour le groupe.



Quel lien reste t-il entre ce peuple des abysses et ceux de la surface, les deux-jambes ? que ce passe t-il lorsque ces deux mondes se croisent ?



J’ai beaucoup aimé tout ce qui touche à la mémoire. Ajoutez à cela mon autre thématique de prédilection « l’eau » : mémoire, temps, régénérescence, naissance et renaissance… et vous avez une lectrice qui plonge dans cette histoire.



La mémoire collective, la mémoire dans les corps, la relation face à la société… cela donne une communauté où la narratrice utilise le « nous » car elle est elle et elle est son peuple. Au début c’est surprenant lorsque apparaît ce nous, mais on a vite compris le sens profond.



Nous avons donc une nouvelle forme de société qui a débuté par des femmes, elles n’ont pas rejeté les hommes, elles ont trouvé une façon de survivre, pour procréer. Elles sont beaucoup dans l’accueil des autres femmes / enfants venus d’en haut.



Pour ce qui est de la constitution d’une société elles n’ont aucune base venue de l’autre monde. On est dans l’idée de collectif, le tout est un et un est le tout. Elles vont mettre leur modèle de société propre.



On va suivre plusieurs « expériences » ce qui va nous permettre de se faire une idée de ce que vivre dans les abysses implique.



Il y a de nombreuses émotions fortes dans ce roman il est question de vie et de mort, de souffrance et de reconstruction, d’identité et de communauté, de force et de faiblesse… Elle ne montre pas une société idéale ou idéalisée, elle regarde les choses en face.



Je vous laisse maintenant découvrir votre propre interprétation de ce qui est conté et ce qui n’est pas dit car c’est un roman qui fait appel à l’histoire personnelle de chaque lecteur.
Lien : https://latelierderamettes.w..
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