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3.53/5 (sur 33 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Sébastien Rongier est docteur en Esthétique. Il enseigne actuellement à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et collabore à diverses revues. Il a publié en 2007, aux éditions Klincksieck, De l’ironie, enjeux critiques pour la modernité. Il est l’un des animateurs du site et de la revue en ligne Remue.net. Il a préparé les dossiers consacrés à Michel Deguy, Jean-Michel Palmier et Eric Suchère.
(Pierre Ménard sur http://www.marelle.cafewiki.org)

bibliographie sur son site http://sebastienrongier.net/spip.php?rubrique17

Roman, récit
– 78, Fayard, septembre 2015.
– Ce matin, Flammarion, 2009.
– Au troisième étage, publie.net, 2007.

Essais
– Théorie des fantômes. Pour une archéologie des images, Les Belles-Lettres, octobre 2015.
– Cinématière. Arts et cinéma, Klincksieck, 2015.
– Littérature d’aujourd’hui. Cinq essais, publie.net, 2008.
– De l’ironie. Enjeux critiques pour la modernité, Klincksieck, 2007.
– Malgré le monde. Marie-Françoise Prost-Manillier, Editions Fage, 2006.
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
Tu te souviens de l'enfance, ton enfance, le quotidien du bar auxerrois. C'est un spectacle, une mémoire pour un visage d'enfance. La vie des bars est un trafic permanent. Les premiers travailleurs et les derniers fêtards, ils se croisent, s'admirent ou s'ignorent, le plus souvent en silence. (p. 64)
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On cherche à mesurer la valeur au moment de la porte qui s'ouvre: hasard, symbole, prémonition, geste anodin et quotidien. Ou alors le silence, le rien d'une ville de province un samedi soir au temps de Giscard. Lente dérive vers l'avant, vers ce moment précis du dos s'échappant dans le noir. (p. 11)
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Quand la porte s’est refermée, que le dos a disparu, le patron n’a pas levé la tête. C’est un client qui part alors que la plonge s’est accumulée et que la soirée commence à peine. Les samedis soir, on ne sait jamais vraiment quand cela se termine. Il y a tous ces hommes qui se retrouvent et ne veulent pas rentrer chez eux pour l’interminable tête-à-tête avec le quotidien, tous ces couples qui se rejoignent pour tracer des projets, toutes ces phrases mêlées aux éclats de rire ou aux coups de gueule des plus saouls. Il lave les verres dans l’eau brûlante, les rince et les pose sur l’égouttoir. Ses gestes sont une mécanique de précision, il n’en casse que rarement. À chaque fois qu’il change les séries de verres, parce que les clients, eux, cassent beaucoup, il doit réapprendre les gestes, modifier leur amplitude, recalculer les axes et la pression. Quand il aura terminé ces verres, il faudra retourner vers le groupe de quatre hommes accoudés au comptoir. C’est leur première tournée. Ils commencent. Et resteront longtemps, car les trois femmes qui les accompagnent sont attablées à gauche de la porte d’entrée. Elles savent que la soirée sera longue, et se sont installées comme pour tenir un siège. Max ne reconnaît qu’une femme. Il croit savoir que c’est l’épouse de Paul, mais il ne l’affirmerait pas. De toute façon, le métier lui a appris à ne pas se poser sébastien rongier 19 de question, à n’en poser à personne. Est-ce sa femme, sa maîtresse, autre chose ? Aucune importance. Il va servir des consommations toute la soirée, répondre aux blagues par des sourires, aux remarques par des coups de menton, et se tenir à l’écart des débats, des propos, des avances trop politiques de cette équipe qu’il observe avec une inquiétude rentrée.
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En choisissant Anthony Perkins, Alfred Hitchcock amplifie l'identité paradoxale de Norman Bates envisagé des sa nomination par Robert Bloch. En effet, Norman, c'est " nor man" c'est quelqu'un qui n'est ni un homme ni une femme "neither woman nor man", sous la domination d'une femme, sa mère, Norma qui n'est pas véritablement une mère non plus "nor Ma". L'identité de Norman est autant un piège par lequel il attire ses victimes, que l'appât (a bait en anglais signifiant "appât", or de bait à Bates, il n'y a évidemment qu'un pas).
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Quelque chose s’apaise pour Mary. Alors que l’Amérique craque, sa vie parisienne prend un tour nouveau. Marcel semble adouci. Entre tournois d’échecs et création, entre l’atelier de la rue Larrey et la maison de Mary, rue Hallé, un équilibre s’installe. Elle profite de l’engouement des milieux artistiques pour la reliure pour découvrir ce métier. Elle n’a pas le talent pour se lancer dans la peinture ou la sculpture mais trouve dans cette activité manuelle ce qui lui a toujours manqué.
Quelle merveilleuse idée ! s’est exclamé Marcel. Doucet connaît Pierre Legrain. Peut-être te prendrait-il comme apprentie ? Si on lui demande gentiment…
Duchamp connaît tout le monde ou sait trouver les bonnes personnes. Legrain est l’homme de la situation. Grand décorateur, il est capable d’habiller une pièce comme un appartement, fabriquant un mobilier raffiné pour la bourgeoisie parisienne. Il conçoit non seulement les meubles mais imagine également tous les objets qui trouveront leur place dans les espaces qu’il compose. Il a développé une activité de reliure, et ses travaux sont particulièrement appréciés. Il multiplie les reliures aux motifs géométriques. Elles rappellent l’esprit Art déco des meubles qu’il a réalisés pour l’hôtel particulier de Jacques Doucet. Victime d’une crise d’urémie en 1928, Pierre Legrain reste très affaibli. Il accueille Mary avec une grande joie et lui montre toutes les étapes et toutes les ficelles du métier. Il lui a surtout conseillé d’être aussi libre que son époque. Une reliure doit d’abord être un dialogue entre le relieur, l’oeuvre et l’esprit de son temps. Mary a trouvé dans cet art discret un moyen d’exprimer ses ambitions artistiques et un nouveau terrain d’échange avec Duchamp.
Ce qu’elle avait compris de Marcel, c’est que tout geste prend chez lui un sens et une tournure artistique. Elle a d’ailleurs lu un de ses courts textes qui l’exprime parfaitement : l’art devrait se charger de transformer les petites énergies perdues. Il égrène ensuite, avec une loufoquerie certaine, ces énergies gaspillées… de la pousse des cheveux au rire, en passant par le bruit du mouchage ou la chute des larmes. Mais, au fond, il est très sérieux. Toutes les formes d’une vie doivent participer d’une présence, d’un geste artistique. Henri-Pierre Roché l’a très bien résumé. Pour lui, le véritable chef-d’œuvre de Duchamp est l’emploi de son temps. La phrase est belle. Sans doute juste. Mais c’est aussi un raccourci car Duchamp n’est pas un artiste sans œuvre qui aurait passé une existence monacale à jouer aux échecs. Duchamp est un artiste qui aura travaillé comme un fou tout au long de son existence. Mary pourrait en témoigner. Travailler consiste à vivre en artiste tous les domaines de l’existence : la reliure devient donc un lieu d’échange artistique et amoureux pour Mary et Marcel.
Elle a gardé en mémoire les conseils de Legrain. Une reliure doit à la fois être l’esprit de l’auteur, du relieur et de son époque. Celles de Mary Reynolds seront dada : iconoclastes, drôles et provocatrices, à l’envers du goût et toujours à l’endroit du livre. Mary a appris les techniques pour déshabiller un ouvrage, découdre, recoudre. Elle aime façonner le dos, choisir et préparer les cuirs. Le milieu dans lequel elle vit l’invite d’abord à créer des formes originales, pas seulement à réparer des livres anciens. Cocteau lui confie de nombreux volumes. Mary reproduit sur les plats les étoiles dessinées par l’écrivain. Breton s’est souvent agacé de cette collaboration. Mais qu’est-ce que vous lui trouvez ? disait-il toujours, avec un accent de jalousie. Le couple de la rue Hallé avait décidé de ne jamais se mêler aux batailles surréalistes. De ces jeux d’avant-garde où le pouvoir s’exerce en clan et par exclusions incessantes, Duchamp gardait un souvenir cuisant. Ils ont décidé d’être ailleurs, définitivement dada, dans un contre-courant perpétuel. Ils sont amis de Breton et de Cocteau… mais pas ensemble.
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Un matin, elle est partie pour dire enfin ce monde béant qui dévore les vies. Et cela fait plusieurs vies qu‘elle attend, attend et attend encore. Et l‘attente fait oublier qu‘on attend, fait couler le silence un peu plus loin..
Elle n‘était ni différence ni même, ni différente, ni identique. Juste un individu perdu dans son gouffre, son silence. Juste une nuit de terre obscure. Une époque en elle avait commis sur elle ces monstruosités dont les contes, certains contes, nous parlent, juste avant les forêts
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Jacques et Raymond lui avaient demandé de retirer un tableau d’une exposition, un tableau qui n’était pas assez cubiste, une œuvre qui n’entrait pas dans les corsets des vieilles avant-gardes du moment. Marcel Duchamp décrocha sa peinture sans rien dire. Il n’en voulait pas à ses deux frères qui avaient été mandatés pour faire le sale boulot. Ils s’étaient mis en habit pour ce moment qu’ils sentaient solennel. C’en était un. Le décrochage de ce tableau allait initier la bascule de l’art moderne. Marcel Duchamp ne serait jamais un peintre français. Il ne serait bientôt plus peintre du tout, et finirait par ne plus être français non plus. Une chose était certaine, il ne serait plus l’homme de ce milieu. Jusqu’ici, il fallait faire partie d’un cercle pour exister, appartenir à un groupe, être un génie, ou un docile suiveur. Duchamp inventerait les portes de sortie, et construirait les moyens de s’échapper. Il irait là où, parfois, l’histoire s’invente par hasard. Il avait suffi d’un tableau, toujours le même : l’œuvre décrochée à Paris allait devenir à New York l’objet de toutes les attentions et de tous les scandales. C’est grâce à ce Nu descendant l’escalier que Duchamp allait passer d’un monde à l’autre. C’est curieux le hasard.
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un peu plus tard un jour, plus personne ne parlera, ne pensera ne dira d’elle quoi que ce soit. Parce que tout d’elle aura été oublié, parce qu’il n’y a aucune raison que l’on se souvienne de la fragilité d’une conscience éphémère, morte dans son propre corps, ce corps qu’elle était incapable d’accepter comme étant le sien
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un peu plus tard un jour, plus personne ne parlera, ne pensera ne dira d’elle quoi que ce soit. Parce que tout d’elle aura été oublié, parce qu’il n’y a aucune raison que l’on se souvienne de la fragilité d’une conscience éphémère, morte dans son propre corps, ce corps qu’elle était incapable d’accepter comme étant le sien
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La diffusion culturelle d’Alfred Hitchcock mériterait d’être étudiée. Elle est essentielle pour comprendre son influence. J’ai passé une année de mon adolescence à Chalon-sur-Saône. J’allais déjà beaucoup au cinéma. Je voyais tout ce qu’il m’était possible de voir, des grosses productions aux films d’art et essai récents ou anciens. Habitant loin du centre et des cinémas, je me déplaçais avec une vieille mobylette poussive. J’avais le temps de me souvenir des films sur le chemin du retour, mais aussi de sentir mon corps se glacer progressivement au fil de la route. Parce que l’hiver en Saône-et-Loire pique sévèrement. Le souvenir des trajets comme celui des salles qu’on fréquentait fait aussi partie de l’expérience du cinéma. Mais l’élève de troisième que j’étais, au fond d’un collège de la banlieue de cette ville qui a vu naître la photographie, se souvient surtout d’un professeur de français qui avait monté un petit ciné-club dans l’enceinte de l’établissement. Un soir, après les cours, il avait proposé de montrer Fenêtre sur cour. J’étais le seul à l’avoir déjà vu. Il avait apporté un gros projecteur à bandes. Je me souviens parfaitement du bruit du défilement des bobines et de la manipulation des boîtes en fer. Mais impossible de me rappeler si le film était diffusé en V.O. ou en V.F. Dans la confusion de la mémoire, entre les sons disparates de la projection, je crois me souvenir… pour la première fois, j’entendais la voix de James Stewart et de Grace Kelly. J’étais aussi très fier et un peu orgueilleux de reconnaître Raymond Burr et de le voir attaquer un homme en fauteuil roulant m’amusait aussi. L’ironie des castings cinématographiques me plaisait déjà. Cette heureuse expérience de cinéma est sans doute celle qui a permis une place si particulière d’Hitchcock dans mon existence. Je sais qu’elle est historiquement construite et culturellement valorisée. Mais écrire sur ce cinéaste, c’est aussi prendre conscience de cette imprégnation. C’est traverser les souvenirs d’enfance.
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