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Critiques de Sophie Divry (658)
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Fantastique histoire d'amour

Rentrée littéraire janvier 2024.



Depuis qu’Isabelle est partie, Bastien Fontaine, inspecteur du travail à Lyon, traîne sa peine. Voilà qu’il est appelé pour un accident du travail dans l’entreprise Plastirec, une boîte de recyclage de bouteilles plastiques vides. Un ouvrier est mort broyé dans la compacteuse.

Bastien apprend que l’accident est en réalité un homicide.

Maïa, elle, est journaliste scientifique, mais son emploi est menacé. Alors qu’il reste encore deux pages vides dans le magazine qui doit boucler dans trois jours, elle propose de rédiger un papier sur ces fameux matériaux magiques que sont les cristaux scintillateurs. C’est la spécialité de sa tante, Victoire Hussard chercheuse et maintenant haute responsable scientifique au Conseil européen pour la recherche nucléaire à Genève. Celle-ci accepte de la recevoir.

Elle apprend alors que ce nouveau matériau possède des propriétés qui déconcertent ses inventeurs et une expérience a mal tourné. La grande physicienne demande alors à sa nièce de l’aider pour se débarrasser d’un cristal devenu toxique.

Chacun des deux protagonistes, Bastien et Maïa, mène son enquête jusqu’à ce que leurs chemins finissent par se croiser et que cette double intrigue conduise à une sublime histoire d’amour.

Empruntant aux codes de la série et du thriller, ce roman se révèle terriblement addictif.

Une tension s’installe assez vite dans le récit et qui va crescendo. J’ai même éprouvé un sentiment de peur à l’idée de ce qui pourrait arriver à nos deux héros dans la suite du récit, une peur mesurée toutefois et relativisée par le plaisir à les retrouver.

Ce qui est très plaisant et contribue à augmenter le suspense, c’est que Sophie Divry a pris le temps, en amont des intrigues de nous livrer une belle analyse psychologique des deux personnages, nous faisant découvrir leurs qualités mais aussi leurs petits travers.

Chacun à sa manière vit avec des manques et est en quête d’amour tout en ayant plein d’amour à offrir, sans pouvoir le faire, retranché dans ses convictions.

Si nos deux héros se révèlent à la fois singuliers et très attachants, les autres personnages n’en sont pas pour autant falots ni dénués de caractère.

L’histoire pleine de rebondissements inattendus est particulièrement palpitante.

Elle m’a permis de revisiter Lyon, où vit d’ailleurs l’auteure, de faire une excursion à ce magnifique parc de la Tête d’Or et également de faire plus ample connaissance avec la physique des particules, les quarks, les hadrons, le boson de Higgs, bref, avec ce plus grand frigo du monde, l’accélérateur de particules qu’est le CERN.

Ayant moi-même travaillé à ce qui s’appelait encore la Médecine du travail, c’est avec plaisir que je me suis replongée dans le monde du travail dès les premières lignes avec Bastien cet inspecteur du travail et compati à son désarroi. Par manque d’effectif, il n’avait pu visiter l’entreprise où a eu lieu cet accident mortel et il ne peut s’empêcher de se sentir coupable…

Le roman décrypte aussi le monde journalistique avec la situation économique qui se tend et les relations avec les rédacteurs en chef qui, du coup, se dégradent.

S’il est un excellent thriller, absolument captivant, Fantastique histoire d’amour de Sophie Divry, comme son titre pouvait le laisser présager, est aussi, et je dirais surtout, une fabuleuse histoire d’amour qui s’installe très finement et très progressivement.

Mystère et romance s’entremêlent intimement pour donner un roman addictif qui a été pour moi un vrai coup de cœur.

Merci pour cela à Babelio et aux éditions du Seuil.


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Trois fois la fin du monde

À chacun sa vision de la fin du monde, pour Joseph Kamal, il va s’en faire une longue idée non pas une fois ni deux, mais trois fois.

Roman assez étonnant où l’enfer est ici à juste titre, les autres ou à défaut des autres, soi-même...

Incarcéré, Joseph se confronte au monde carcéral dans toute sa laideur et sa basesse. Harcèlement, fouilles intempestives, injures, Joseph suffoque entre ces gens qui ne semblent nourris que par la haine.

Survient une catastrophe nucléaire où la moitié de la population française est disséminée. Joseph se retrouve seul. Seul avec lui-même.

Cette partie regorge d’une poésie toute particulière trouvant son essence dans la nature environnante. Seul bémol dans la contradiction entre ce style onirique et le langage du personnage, souvent grossier et brutal.

Passé ce bémol, Sophie Divry dessine un roman où la nature est seule maîtresse des hommes. Joseph plonge cœur ouvert dans cette solitude où il délaisse peu à peu la haine des autres pour l’amour de son environnement. Chocolat, le bélier noir ou Fine la petite chatte sont autant de réconforts pour Joseph qui aura compris que souvent, on est bien plus heureux entourés d’animaux qu’auprès des hommes.
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La condition pavillonnaire

Alors de deux choses l’une, soit tu t’identifies à M.-A., personnage principal de « La condition pavillonnaire », et la dernière page tournée tu n’as plus qu’à te défenestrer pour cause de moral dans les chaussettes ; soit tu ne t’identifies pas et alors c’est le bouquin que tu as très envie de passer par la fenêtre.



Quelle que soit l’option retenue, cet ouvrage n’est pas du genre hilarant par conséquent.



De mon côté j’ai beau pavillonner depuis quelques années, « La condition pavillonnaire » m’est passée carrément au-dessus de la cafetière expresso nouvellement acquise à crédit chez Darty, dans le cas contraire d’ailleurs je ne serais plus là pour en parler (cf. premier postulat ci-avant).



Bref, nous voilà donc avec sur les bras une M.-A. Bovary façon vingtième siècle, insatisfaite chronique, pas très sympathique, un peu pathétique, moyennement épanouie dans sa vie domestique, et sûrement encore plein d’autres trucs en hic, excepté fantastique. Une vie gentiment étriquée narrée, de l’enfance à la sénilité, d’un trait factuel et sans âme censé illustrer – ai-je présumé dans ma grande indulgence – la routine conventionnelle de ce personnage ordinaire.



Or donc, le factuel dilué c’est peut-être un genre, mais quand la seule définition du mot automobile (voiture quoi) se répand en détails sur trois pages entières, on se demande quand même si Sophie Divry ne pousse pas le bouchon stylistique un peu trop loin. Ce doit sans doute être tendance, le réalisme à outrance – déjà repéré (entre autres) dans la fâcheuse liste des envies du sieur Delacourt (là je vais encore me faire plein de copines), et certains auteurs de talent tels que Maylis de Kerangal excellent dans l’art de cet étirement particulier des détails, mais ici pour moi ça ne fonctionne pas. Simplement j’ai trouvé ce roman littérairement inesthétique, et par-dessus tout hélas, effroyablement amer.



Ҩ



Quoi qu’il en soit, merci à Babelio et aux éditions J’ai Lu pour cet envoi dans le cadre de l’opération Masse Crit’hic de septembre.






Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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Fantastique histoire d'amour

Enquête policière, thriller, romance et histoire fantastique : Sophie Divry mélange les genres sur fond très contemporain de solitudes, de souffrance au travail et de recherche scientifique, pour un épais roman aussi singulier qu’addictif.





Inspecteur du travail trouvant un réconfort approximatif dans une fréquentation accrue de la bouteille et des églises depuis que sa femme l’a largué, Bastien est amené à enquêter sur la mort d’un ouvrier, avalé par une compacteuse dans une usine de récupération de plastiques de la banlieue lyonnaise. Atteinte de « disparitionnite » au point d'en perdre son ordinateur professionnel et de se faire virer du magazine scientifique où, pigiste, elle s’efforçait de résister à la vague lucrative du sensationnalisme, Maïa s’intéresse aux travaux de recherche de sa tante dans les laboratoires du CERN à Genève et se retrouve impliquée dans la disparition d’échantillons de cristaux scintillateurs aux propriétés aussi dangereuses qu’inattendues.





Entre ces deux-là, rien de commun, si ce n’est que leurs deux enquêtes parallèles, nous plongeant au passage dans un piquant diptyque mariant analyse sociologique et vulgarisation scientifique, finissent par se rejoindre et, après avoir malicieusement fait lanterner le lecteur dans une suite haletante et rythmée de rebondissements, justifier les promesses du titre. Très fleur bleue, cette dernière partie viendrait presque faire retomber le soufflet, si l’ensemble du récit n’était porté par une plume vive à tendance corrosive, ébarbant à peine ses pointes de noirceur au contact d’une mélancolie tristement drôle.





Alors, fermant les yeux sur les aspects les plus faciles de la romance, l’on retient au final le plaisir d’une lecture détente, tendue par un suspense légèrement fantastique, délibérément romantique, mais dont on comprend qu’il masque à peine une lucidité abrasive sur les travers sociaux contemporains. Mieux vaut parfois rêver que pleurer…


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Trois fois la fin du monde

De l’enfer au paradis ?

Le dernier opus de Sophie Divry commence comme un roman noir : le narrateur, Joseph Kamal, est condamné à être emprisonné pour sa complicité dans un braquage, braquage au cours duquel son frère a trouvé la mort. Il va subir l’enfer carcéral : la promiscuité, la saleté, la violence, les humiliations, le sadisme des matons, la protection ambiguë des caïds…

Le style adopté par l’auteure correspond tout à fait au statut du narrateur, un jeune homme sans éducation qui s’exprime par des phrases courtes et des notations crues pour décrire l’abjection.

Et puis intervient l’impensable : une catastrophe nucléaire irradie la moitié de la France ((Joseph ignorant les détails concernant l’explosion, le lecteur n’en apprendra pas plus), la prison est évacuée et Joseph en profite pour s’évader. Il décide de vivre seul, en pleine nature, à l’écart d’un genre humain qui a révélé toute sa bassesse et pour ne pas être repris par les autorités.

La suite du roman, écrite à la troisième ou à la première personne, décrit une renaissance, la renaissance d’un homme qui redécouvre ce dont il a été privé par son incarcération, les mille merveilles de la nature : c’est un véritable chant du monde, pour reprendre le titre d’un roman de Giono, que l’auteure exprime en nous faisant partager les sensations et les sentiments de son personnage.

Mais, pour ce Robinson misanthrope, la solitude se fait parfois très pesante, la vie n’est pas toujours facile, notamment en hiver, il faut aller toujours plus loin pour trouver de quoi se nourrir : les nuages s’accumulent sur le paradis que s’est construit Joseph...

Une belle réussite romanesque et poétique.

Merci à Babelio et aux Editions Noir sur Blanc pour cette découverte.
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La condition pavillonnaire

M.A ... Tu nais dans les années 50, à Chambéry et passe les premières années de ta vie dans le petit village de Terneyre, dans l'Isère. Papa et maman s'occupent bien de toi, même si petite fille, tu t'ennuyais beaucoup. Fille unique, tu te fais quelques amies, tu connais ton premier flirt derrière le gymnase. Tu travailles bien à l'école, ce qui fait la fierté de tes parents. Ton bac en poche, tu vas étudier à l'université de Lyon. En économie. Là, tu t'installes dans un petit appartement. Tu ne te lasses pas de regarder les lumières de la ville, toi qui désirais tant quitter le cocon familial. Mais bien vite, là encore tu t'ennuies. Tu fais alors la connaissance de Chloé. Devenues inséparables, vous emménagez ensemble la deuxième année de vos études. Lors d'une soirée entre copains, tu fais la connaissance de François. C'était en 1974. Il t'apparaît comme l'homme que tu attendais. Une véritable idylle entre vous. Presque une évidence... S'ensuivent le travail, les déménagements, les enfants, les diners entre amis, les vacances...

M.A. ... Tu regardes toutes ces photos aimantées sur la porte du réfrigérateur, ces cartes postales de tes proches expédiées d'ici et d'ailleurs, comme autant de témoins de ta vie passée...



Une couverture, évidemment, peu encourageante... Avons-nous, à l'instar de ce poisson rouge, l'intention de tourner en rond dans notre vie ? Chercher une issue ? Un but quelconque ? Trouvons-nous réellement que la vie nous comble ? Sommes-nous satisfaits de notre vie, puisse-elle avoir été désirée ainsi ?

M.A. vit sa vie. Plus exactement semble la subir. Une vie régie par les habitudes, les coutumes. L'on fait des rencontres, amicales ou amoureuses. L'on se marie, fait des enfants, les regarde grandir, l'on déménage, l'on travaille, l'on connaît une relation extra-conjugale pour pimenter notre quotidien. A côté de François, un homme calme, rassurant, tiède, presque trop prévisible, M.A. est enfermée dans ce bocal. Elle s'ennuie. Profondément. Une Emma Bovary des temps modernes. L'auteur décrit minutieusement la vie de cette héroïne, à la loupe, passant des petits tracas du quotidien à la force qui semble l'animer. L'on se sent d'autant plus proche que Sophie Divry utilise la deuxième personne du singulier, procédé accrocheur. Elle nous livre un roman profond, sentimental et très sensible sur la condition féminine.



La condition pavillonnaire... la condition féminine ?
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Trois fois la fin du monde

Joseph Kamal, marginal presque par accident, connaît après un braquage raté la violence et l'abjection en prison. Puis miraculeusement sauvé de l'enfer carcéral par une catastrophe qui tue la moitié des Français, Kamal découvre, en même temps que la liberté, la beauté de la nature, mais aussi la difficulté de vivre seul.



La prison, une catastrophe nucléaire, la solitude : trois fois la fin d’un monde pour le héros de Sophie Divry. L'enfer, c'est les autres disait le célèbre borgne, l'enfer c’est l’homme détruisant la planète, l'enfer c'est être seul face à soi-même. Sans toutefois éviter l'écueil des clichés, des thématiques développées (ou pas) avec pragmatisme par Sophie Divry qui, avec Trois fois la fin du monde, illustre parfaitement la dualité de l'homme qui, cherchant à échapper à sa condition et aux autres, se trouve confronté à la solitude, donc à lui-même. Plus personne à haïr, ni à aimer... « C’est terrifiant, s’il y pense, l’idée d’être le dernier. »



Merci à NetGalley et aux Éditions Noir sur Blanc pour leur confiance.
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Trois fois la fin du monde

Retrouver Sophie Divry romancière est un plaisir car elle m'avait surpris dans La cote 400 puis amusé avec Quand le diable sortit de la salle de bain. Ensuite, dans Rouvrir le roman, elle avait développé ses idées, au plus près de son métier d'autrice. La revoilà donc avec Trois fois la fin du monde, roman d'anticipation plein d'enseignements.



Comme le titre l'indique, le monde va s'effondrer trois fois pour le héros dont le nom complet n'est pas tout de suite délivré. Par contre, sa première épreuve, la prison, est terrible et c'est bien que Sophie Divry rappelle tout ce que cette épreuve fait subir à des êtres humains, coupables ou innocents : « L'horreur de la prison s'immisce en moi. Je n'arrive pas à me rendormir. »

Il faut lire ce qui se passe derrière ces murs, ce qui va bien au-delà de la privation de liberté. Sophie Divry le fait bien et ne se prive pas de dire tout ce que son héros subit de la part de ses congénères mais, pire encore, de la part de ses geôliers.

Intitulée La catastrophe, la seconde partie m'a plongé en plein accident nucléaire dont seuls quelques immunisés ont pu survivre. Notre homme est toujours là, se défend et ne veut plus se laisser prendre car il a pu échapper à l'horreur de l'enfermement et se retrouve livré à lui-même.

Alternant descriptions et pensées de son héros, Sophie Divry nous fait partager la vie de ce Solitaire qui tente de survivre, même si cette solitude lui pèse. Nous sommes dans le Lot, sur le causse où toutes les interdictions, panneaux divers et variés, paraissent complètement ridicules.

Enfin, c'est une véritable ode à la nature, cette nature que découvre notre homme, dans cette ferme où il a élu domicile. Dès qu'il peut écouter de la musique, grâce à des piles récupérées, la vie repart avec émotions, travaux saisonniers et approvisionnement dans les maisons abandonnées. L'hiver est une rude épreuve mais quelles pages merveilleuses sur le printemps ensuite ! Magnifiquement décrit, si bien mené, c'en est juste sublime de clarté et de justesse.



Même si elle nous laisse un peu en suspens, Sophie Divry mène son roman avec talent, combinant habilement séquences traumatisantes, très dures, puis avec cette nature qui reprend le dessus quand l'homme disparaît. Quant au héros, personnage attachant victime de la bêtise humaine, de l'incarcération abrutissante, il se révèle un compagnon de lecture passionnant. Sa façon de récréer un petit monde autour de lui avec Fine, sa chatte, et Chocolat, son mouton, émeuvent et ouvrent en même temps les yeux sur tout ce que nous avons oublié dans notre mode de vie dit moderne.
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La condition pavillonnaire

Flippant! Carrément flippant! Et ça, sans crime, sans délits (ou des délits très mineurs), peu de morts, et toutes naturelles ou accidentelles, pas de fantômes, même pas dans les placards!

Le sujet en lui-même suffit à créer un malaise existentiel : c’est notre vie, banale, formatée par notre époque et nos héritages biologiques ou sociaux, cheminant sur des rails prédestinés, les choix n’étant que des changements d’aiguillage qui au final n’induisent que peu de variantes.



Pour illustrer l’ambiance, deux exemples :



cette vidéo qui a été partagée sur Facebook, un diaporama accéléré qui fait défiler les photos d’une vie, de la première beuverie, en passant par le mariage et les enfants pour se terminer sur la clôture du compte. Flippant

la chanson de Benabar, Quatre murs et un toit, dans laquelle se succèdent les générations, en quelques minutes. Flippant.



Ici, pas de vidéo, ni de musique, mais des chapitres, qui font défiler le temps, très vite aussi, inexorablement, sur trois ou quatre générations. La petite fille devient ado, étudiante, mère de famille, grand-mère…



Le titre déjà, était un avertissement : la condition pavillonnaire : il y a quelque chose d’enfermant, de carcéral dans ces termes qui évoquent les alignements uniformes des maisons faites en tikitaki de la chanson de Graeme Allwright, et soulignent la quasi-impossibilité d’y échapper.



La force de ce roman (?) réside d’une part dans l’écriture qui souligne le tourbillon, qui fait de notre existence une lutte permanente contre l’entropie : l’auteur conjugue indifféremment au passé, au présent , rarement au futur, celui-ci vient tout seul bien assez vite, et d’autre part dans la précision des observations : impossible de ne pas se reconnaître au cours des différentes étapes qui constituent une vie d’occidental moyen. D’autant que l’auteur souligne bien le décor social, au travers des modes vestimentaires ou des décos des fameux pavillons. Même l ’évolution économique est évoquée, avec la mutation du monde du travail que ce soit dans son accessibilité ou dans sa précarité grandissante.





Il faut un moral d’acier et une bonne dose d’optimisme, ou alors être un adepte du carpe diem, un taoïste convaincu que tout est dans l’instant présent pour ne pas en ressortir laminé, prêt à se jeter sur la première tablette de chocolat qui prend le risque de s’aventurer hors du placard, puisqu’après tout, les efforts sont vains, aboutissant à un résultat unique quel que soit le chemin.



La conséquence la plus immédiate va être le choix de ma lecture suivante : une fiction, une vraie, une pas possible, thriller ou science fiction, peu importe, pourvu qu’elle me procure des frissons qui ne seront pas les miens.
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Quand le diable sortit de la salle de bains

A la réception de ce livre j’ai été surprise et ma curiosité éveillée. La couverture rouge orangée alliée au papier beige m’a séduite. Puis en le feuilletant j’y ai découvert des apartés étonnantes comme les intrusions de Lorchus diable lubrique, démon personnel de l’auteur qui affole la typographie ou des pages à découper selon les pointillés contenant des scènes « propres à choquer la sensibilité d’un jeune public ».



Beaucoup d’éléments disparates viennent se glisser dans le récit mais ces digressions, souvent très drôles, s’intègrent très bien à la situation et en allègent le tragique sans l’esquiver.



L’héroïne de cette histoire est au chômage. Elle doit survivre avec 40 euros. A l’impossibilité de se nourrir correctement avec une telle somme ou se distraire viennent s’ajouter toutes les difficultés administratives qu’engendrent les incompréhensions de sa situation par les employés de Pôle emploi qui eux s’en tiennent aux règlements et ne peuvent répondre, sans dossier à jour, à ses demandes d’avance sur les aides auxquelles elle a droit.



Mais elle est aussi écrivain et à ce titre s’autorise, dans l’élaboration de son livre, toutes les fantaisies pour la plus grande joie du lecteur.



Dès le sous-titre « Roman improvisé, interruptif et pas sérieux » le lecteur sait où il met les pieds et la dédicace est à l’avenant : Aux improductifs, aux enfants, aux rêveurs, aux mangeurs de nouilles et aux « défaits », je dédie ce livre.



L’humour et la fantaisie n’empêche pas la dénonciation des travers de notre société, la famille est elle-aussi égratignée même si un intermède au sein du cocon familial fait parfois du bien en permettant de ne pas sombrer.



J’ai aimé les listes débridées, adoré le voyage en TGV où elle s’endort après avoir ouvert un livre de Pierre Bergounioux et que ce dernier lui apparaît dans son sommeil « un grand homme extrêmement maigre engoncé dans une robe de bure, une tête en forme d’épingle dissimulée sous un sombre capuche. Cette apparition me fit une frousse bleue. » S’ensuit un dialogue impayable entre les deux qui se termine dans un grand rire…



Dans le bonus offert à la fin, sur des pages de la même couleur que la couverture, Sophie Divry nous donne à lire sa lettre à la responsable de la résidence De Pure Fiction, Isabelle Desesquelles dont je cite un extrait :



« Le quotidien d’une héroïne qui se débat sans argent, sans emploi, peut facilement être triste, or je ne voulais pas un livre plombant. J’ai commencé à écrire ce texte pour m’amuser. Après le travail d’alliage des contraires que m’avait demandé « La Condition pavillonnaire », j’ai voulu prendre un chemin opposé et laisser libre cours à mon imagination, sans rien m’interdire. Les objets se sont mis à parler, le diable à apparaître, les listes à s’allonger dangereusement , la typographie à s’agiter. C’est ainsi que, alors que j’ai intellectuellement grandi sous l’influence d’une écriture blanche ou plate, en tous points sérieuse, j’ai abouti à son exacte contraire, une écriture gondolée, pour ainsi dire.

Mais ne nous y trompons pas : ce n’est pas le chômage qui est drôle, c’est la littérature qui peut être une fête. »



Le lecteur lui-aussi « se gondole » et passe un très bon moment grâce à cette surprenante lecture pleine de verve et d’originalité.



Merci à Babelio et aux éditions Notabilia / Noir sur Blanc qui m’ont offert ce livre qui me donne envie de prolonger la découverte de cette auteure


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Fantastique histoire d'amour

Coup de cœur ! ● Bastien Fontaine, la quarantaine, est inspecteur du travail à Lyon et doit enquêter sur le grave accident qui s’est produit chez Plastirec à Vénissieux, une entreprise de traitement et de recyclage du plastique : un ouvrier a été broyé dans une compacteuse et est mort ; mais ce fait va être requalifié en homicide par le procureur. Maïa di Natale est journaliste scientifique à la revue Comprendre ; son poste est menacé par la mauvaise posture financière de l’entreprise de presse. Elle propose de faire un article sur les cristaux scintillateurs au CERN (Centre Européen pour la Recherche Nucléaire) à Genève, où sa tante Victoria Hussard exerce dans une position élevée et pourra aisément lui fournir des informations ; c’est un matériau complexe qui a des propriétés déconcertantes et potentiellement très dangereuses. ● De Sophie Divry, j’avais beaucoup aimé La Condition pavillonnaire et absolument détesté Quand le diable sortit de la salle de bains. ● Le moins qu’on puisse dire est qu’elle se renouvelle complètement avec cette Fantastique Histoire d’amour, qui est un grand roman populaire extrêmement maîtrisé plein de suspense et de rebondissements et vraiment très réussi. ● J’ai adoré me laisser couler dans le fleuve de cet épais roman et me passionner pour ces personnages fort bien campés, riches, profonds. ● C’est vraiment un page-turner addictif et on a tout le temps envie de connaître la suite. La tension narrative est constante. Je n’ai mis que deux jours à dévorer les cinq cents pages. ● Le scénario est d’une précision d’horlogerie, le lecteur se laisse berner avec délices par des fausses pistes, c’est impeccablement fait. ● C’est aussi une « fantastique histoire d’amour » entre deux êtres très différents, avec de très belles pages sur l’amour. Bien sûr l’adjectif « fantastique » prend aussi un autre sens, avec des éléments surnaturels, mais solidement reliés à un terreau scientifique documenté (les cristaux scintillateurs existent vraiment et ce qu’en dit l’autrice est globalement exact). ● Ma seule réserve est que Sophie Divry ne peut s’empêcher des remarques d’ordre politique qui n’ont pas leur place et surtout sont très manichéennes – par exemple les patrons sont tous des salauds ; justice et police sont en collusion totale avec le patronat… ● Malgré ce détail, je me suis régalé et je conseille vivement ce roman foisonnant, palpitant et délicieux. ● Je remercie Babelio et les éditions du Seuil de m’avoir permis de le lire dans le cadre d’une masse critique privilégiée.
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Trois fois la fin du monde

Une attaque à main armée d’une bijouterie par deux malfrats tourne mal. Lorsque les policiers interviennent, l’un des bandits tire et il est aussitôt abattu. L’autre est arrêté. Il s’agit de Joseph, son frère, qui est conduit en prison où tout est fait pour l’humilier. Gardiens et détenus font assaut de brutalité.

Joseph était un type bien. Il avait un boulot : « J’étais le chouchou de la boîte d’intérim. » Mais il s’est senti obligé d’aider son frère pour braquer la bijouterie, celui-ci étant dans une mauvaise passe. « C’était impossible de le laisser tomber face à ses amis. Ces mecs-là, ils auraient été capables de le descendre, s’il s’était défilé. »

En prison, Joseph va devoir courber la tête et s’adapter. « Ici les gardiens sont capables de vous laisser crever, les amis de vous trahir. » Il n’en peut plus. On ne sait s’il va pouvoir supporter cet enfer. C’est une explosion nucléaire qui va le libérer : la moitié de l’Europe irradiée, la moitié de la France évacuée. Cette catastrophe lui a donc permis d’être évacué de la prison, puis de s’enfuir.

Il va se retrouver seul en zone interdite et, au début, va vivre dans une petite maison comme un rat. Il se terre la journée pour ne sortir qu’au couchant pour aller boire et chercher de l’eau au ruisseau. Il rapporte aussi quelques provisions récupérées dans les maisons vides. Sa hantise est d’être aperçu par un drone.

Mais, petit à petit, il va reprendre de l’assurance et tenter de vivre normalement, n’hésitant pas à faire pousser des légumes, tendre des pièges pour les lapins…

Les paysages décrits par Sophie Divry sont magnifiques et la nature enchanteresse. La faune et la flore sont décrites de manière extrêmement poétique.

Si Joseph est sensible à cette beauté de la nature, il éprouve néanmoins beaucoup de difficultés à vivre seul. Alors qu’au cours de son incarcération, il dit lui-même : « Combien je donnerais pour ne plus voir personne, pour ne plus les entendre, ces hommes, ces détenus… » Voilà que maintenant la solitude lui pèse atrocement.

Par chance, un mouton et un chat qu’il parviendra, grâce à la nourriture, à approcher, deviendront ses compagnons de vie jusqu’à la troisième fin du monde qui va le frapper.

Trois fois la fin du monde est un livre romanesque et poétique, une véritable ode à la nature. Il pose la question suivante : vivre avec les autres est souvent un véritable enfer mais vivre seul est-il supportable ?

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Trois fois la fin du monde

Sophie Divry est une auteure protéiforme : si l’on repense à Le diable sort de la salle de bain ou encore à La Condition pavillonnaire, les sujets et le style étaient déjà très différents. Et c’est avec Trois fois la fin du monde un nouvel exercice de style : la parole est donnée à Joseph, qui s’est fait chopé lors d’un flag, sur un braquage qui a mal tourné : son frère Tonio a été abattu par la police et Joseph se retrouve sous les barreaux.

C’est tout un univers que découvre le jeune homme : avec sa cruauté, ses trahisons, les choix impossibles, la violence, qu’elle vienne des co-détenus ou des matons. De quoi se forger une armure psychique , avec le risque que ce qui restait de bon en vous disparaisse à tout jamais.

C’est un événement inopiné, mais une bonne aubaine pour Joseph, l’explosion d’une centrale nucléaire, qui lui permet d’échapper à l’univers carcéral, pour découvrir une extrême liberté, qui a tout d’une robinsonade . Seul dans les ruines d’un monde qui semble disparu, Joseph apprend la survie et découvre le manque des autres.

Le récit alterne le monologue intérieur du héros et la narration externe. Joseph utilise un lexique de petite frappe, auquel s’ajoutera le parler de la tôle. Et c’est une constante tout au long du récit, même lorsqu’adapté au cadre de solitude qui est le sien, et nourri de ce que les ruines lui offrent comme ressources de stratégie pour suivre, Jo reste un gamin paumé. Si l’enfer a pu être les autres, l’enfer est aussi présent sans les autres, sans infos, sans rumeurs, sans présence humaine même médiatisée.



Beau récit que l’on pourrait affiler au nature writing des anglo-saxons. Robinson des temps modernes, dont le passé lui interdit à jamais la recherche de ses semblables, Joseph s’est bien involontairement isolé, pour se retrouver face à lui-même au coeur d’une nature qui ne lui fait pas de cadeaux.



Un tout petit bémol, très personnel : c’est la voix de Sophie Divry, que j’écoute avec plaisir dans Les papous dans la tête, que j’entendais en parcourant le récit. Difficile alors de laisser Joseph se dessiner au fil de son monologue, et de permettre à l’histoire d’exister pour elle-même.
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La cote 400

Je ne ferai pas un long commentaire et remercie une amie de Babelio pour m'avoir fait découvir " la cote 400 "que ni ma médiathéque préferée , ni ma libraire à qui je l'ai commandé ne connaissaient ....

C'est l'histoire d'une bibliothécaire confrontée à la solitude, cultivée, cantonnée dans son"sous- sol", au rayon géographie, un matin comme les autres, elle découvre un lecteur égaré dans les rayons....S'ensuit un long monologue tantôt érudit, parfois exalté, mordant, incisif, une mine de réflexions , pour nous, lecteurs.!

Elle y expose la vision de son métier, la classification Dewey, la hiérarchie, les collégues, le silence et l'ordre apaisants, le calme studieux de la bibliothéque....elle montre son utilité sociale, un lieu d'échange , un lieu de rencontre,un lieu de savoir oú se croisent retraités, chômeurs, sdf, étudiants, marginaux, chacun dans son univers, mais aussi des références culturelles riches: Maupassant, Durkheim,Simone de Beauvoir, la Révolution..... l'idée magnifique que La Bibliothéque doit apporter un supplément de culture au lecteur en l'aidant dans ses choix..ne pas le paralyser, l'accueillir avec simplicité..

Un opus instructif à l'humour cynique qui aide à ouvrir l'esprit du lecteur passionné et curieux ......un cri d'amour envers tous ceux qui fréquentent les bibliothèques, une fantaisie, un divertissement , une trés belle découverte , à lire avec du recul, bien sûr !

Je n'ai pas retrouvé du tout le personnel de ma médiathéque, les intervenants sont affables, souriants, prêts à répondre à toutes mes questions , à aller dans la "Réserve " me chercher un ouvrage oublié! À me téléphoner pour l'oubli d'un de mes carnets!
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La condition pavillonnaire

"La condition pavillonnaire", comme on pourrait dire la condition carcérale, dissèque la condition féminine, et plus largement, la société française des années 1960 à nos jours. Le "pavillon" est érigé en symbole d'une prison confortable dans laquelle on s'enferme volontairement en se persuadant que toutes les conditions sont réunies pour être heureux.



Ce roman raconte la vie de M.A. Marie-Ange ? Marie-Agnès ? Peu importe. Il faut entendre "Emma", car cette femme née dans les années 50 est une sorte de Mme Bovary moderne. La référence à Flaubert est explicite, avec toutefois quelques différences : M.A. travaille, n'a pas les rêves de grandeur d'Emma ni sa passion pour la littérature ; elle arrive malgré tout à survivre au départ de son amant, et aime ses enfants. Mais elles partagent une insatisfaction profonde, une quête inassouvie du bonheur auprès d'un conjoint choisi pour sa stabilité mais décevant par son manque d'imagination et de virilité.



Après une enfance plate et solitaire dans une bourgade de la région lyonnaise, M.A. a réalisé ses ambitions de jeunesse : un mari aimant, un bon métier, une maison, deux enfants... Pourtant la plénitude ne dure pas. Dans les gestes sans surprise et répétés du quotidien pointe un malaise, une soif d'aventure. L'insatisfaction la consume, la poussant à l'adultère, puis à d'autres passe-temps moins dangereux, tout en restant incapable, au fond, de partir ou de changer de vie.



Dans ce récit incisif et bien construit, qui bascule au milieu du livre, Sophie Divry s'adresse à M.A. à la deuxième personne du singulier. Tout en étant original, cela facilite l'identification du lectorat féminin. Néanmoins, messieurs, ne négligez pas ce livre, il vous apportera un éclairage assez cru sur la psychologie féminine.



L'auteur se distingue par une singulière observation du quotidien, faite de petits détails (la description d'un réfrigérateur ou d'un cycle de machine à laver) ou de distanciation (chronique sur le développement de l'automobile en France). Bien loin de Flaubert, la narration est plus proche d'Annie Ernaux dans "La place", avec l'évocation de l'ascension sociale dans une petite ville de province, la relation à son père dont M.A. a un peu honte, ou de Michel Houellebecq dans sa peinture désabusée du progrès et des rapports sociaux.



En dépit de quelques anachronismes (par exemple, en 1994 un plan social ne s'appelait pas encore "plan de sauvegarde de l'emploi", cette dénomination n'est apparue qu'en 2002), Sophie Divry, née en 1979, porte un regard d'une remarquable acuité sur une époque plus représentative de la génération de ses parents. En seulement 250 pages, le destin ordinaire de M.A. figure celui de millions de femmes avant elle, et, soyons réalistes, après elle.



Un grand merci à Babelio et aux éditions Noir sur Blanc - NOTAB/LIA pour cette opération spéciale de masse critique. "La condition pavillonnaire" est une de mes meilleures lectures de cette année; décapante, certes, mais terriblement juste.
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La cote 400

Acariâtre, névrosée, maniaque de l'ordre et du rangement, obsessionnelle, élitiste, vindicative, frustrée, et surtout très seule… tel est le portrait que brosse Sophie Divry de cette bibliothécaire vieillissante que sa hiérarchie (on se demande bien pourquoi !) a condamnée à végéter dans le sous-sol de la bibliothèque, assignée au rangement du fonds des 900-910 : les ouvrages de géographie.



Quelle vieille bique ! Ayant découvert au matin un lecteur enfermé par mégarde depuis la veille dans ledit sous-sol, elle se répand sur le malheureux égaré en un soliloque ininterrompu où elle déverse en vrac toute sa hargne. Tout y passe… les hommes, la vie, les décisions “arbitraires” (la cote 400 vidée de son contenu… Impardonnable !), le déclin de la culture, sa hiérarchie, ses collègues… et surtout les lecteurs, à qui elle voue - c'est un comble ! - une haine féroce : ils font du bruit, annotent les livres, arrachent les pages, bref, un fléau dont elle ferait volontiers l'économie car “de toute façon, les hommes, les lecteurs, ça n'apporte que du désordre, que du désordre. Et moi qui ne supporte pas l'anarchie, j'ai tiré un trait dessus, un trait bien net. Je préfère la compagnie des livres”. Mais on se rend compte, au fil de son discours (qui évolue d'ailleurs d'une manière assez paradoxale), que ce n'est pas si clair, et pas si simple...



Je ne sais pas quel épisode traumatique a bien pu subir Sophie Divry au cours de ses pérégrinations en bibliothèque… Toujours est-il qu'avec “La cote 400” elle signait il y a dix ans un premier roman assez drôle et quelque peu corrosif. Mais au-delà de l'humour et du pamphlet - et c'est ce qui ajoute de l'intérêt à ce tout petit livre - elle se sert également de cette caricature de bibliothécaire particulièrement mal embouchée pour apporter aux non initiés un éclairage, pour le coup tout à fait sérieux, sur la classification décimale de Dewey, le travail en bibliothèque, les évolutions du métier, la valeur culturelle des médiathèques et leur utilité sociale en tant que “troisième lieu” - espace refuge aux contours assez flous offrant un moment de réconfort, d'écoute et de partage à la détresse et à la solitude.



En ces temps de confinement où le virus, par la force des choses, me prive de la médiathèque où je travaille et de mes chers lecteurs (car oui nous les aimons, nos lecteurs, comme nous aimons notre métier, riche, vivant, joyeux et sans grand rapport avec le tableau déprimant qu'en dresse “La cote 400” !), je me suis agréablement divertie avec l'humour grinçant de Sophie Divry… comme quoi, je ne suis pas rancunière ! Un tout petit livre d'une soixantaine de pages, plus anecdotique qu'autre chose, mais qui a eu au moins l'avantage de me faire sourire. Et ce d'autant plus que, derrière l'humour et l'ironie, "La cote 400" est également un très bel hommage aux bibliothèques, à leur mission, aux livres et à la culture.



[Challenge Multi-Défis 2020]

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Trois fois la fin du monde

Ce livre est trés différent des autres oeuvres de Sophie Divry.



"Trois fois la fin du monde" nous surprend par sa construction intelligente et parfaitement maîtrisée, tout d'abord la brutalité du monde carcéral où notre héros : Joseph, naïf et gentil, âgé de 22 ans, se retrouve après un braquage avec son frére Tonio qui y perd la vie,.



L'auteur nous décrit avec un réalisme effrayant la vie en prison : promiscuité et violence inouïe , harcèlement continuel , effacement de la personnalité et intimidation , espèce de survie terrible au quotidien, fouilles humiliantes, vacarme , insultes , tutoiement systématique , cris des matons et coups bas des caïds, l'enfer de l'enfermement .....



Puis la mort vient un matin, deuxième partie: une catastrophe nucléaire survient.



Troisième partie : Joseph se cache dans la zone interdite , recherche la solitude absolue , s'installe dans une ferme désertée .



Il retrouve la maîtrise de son temps, organise une vie au sein de la nature comme un Robinson Crusoé , le vent, les odeurs, la terre qui respire, la nuit qui prend le domaine, des moments incroyables au contact de la nature sauvage , d'animaux : la tendresse de Fine la chatte et Chocolat le mouton. ....



Cette vie de solitude qu'il ne partage avec personne le pousse à réfléchir au fait qu'il ne peut se passer des autres , le contact lui manque , l'homme est un animal social qui ne peut se passer de ses semblables ...." Y a t- il encore des hommes quelque part ? "

L'auteur est une magicienne des mots.



Ce récit est à la fois intime et universel, puissant, prenant , d'une intensité psychologique et d'une justesse saisissante , poétique et envoûtant, original dans sa forme même si nous ne saisissons pas tout à propos de la catastrophe et des radiations ......Petite restriction....

C'est une ode à la nature . L'écriture est imagée et fluide. Le lecteur visualise l'écoulement des saisons et ses variations ....à l'infini....



Cet ouvrage ressemble à une espèce de parabole à propos de la Liberté et de la Solitude ! L'auteur a l'art de nous surprendre et de se renouveler .



Quels rapports entre" la cote 400"," la condition pavillonnaire" , "Quand le diable sort de la salle de bain" ?
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Fantastique histoire d'amour

Toi t'existais depuis toujours

Moi j'te cherchais comme une excuse

Médicament sans ordonnance

Evidement t'es l'évidence....



Fantastique histoire d'amour

L'amour sur fond de polar fantastique

L'amour se fait attendre, désirer

Elle murmure cette histoire d'amour, elle se devine,

On la sent comme une évidence !



Deux solitudes :

Bastien la quarantaine malheureux après sa rupture, il se sent seul. Son métier, inspecteur du travail, il le fait bien, défenseur des gens au travail, mais déplore son impuissance à aider plus, par manque de moyens.

Catholique comme une ultime trace de son enfance,

comme un message de paix et d'amour.

Catholique "normal" il en prend, il en jette, ses questions, ses doutes...

Alcoolique comme un remède à cette mélancolie : après s'être fait plaquer, "il n'a pas repris la cigarette, maintenant il boit" ...

Il est en manque d'amour, de tendresse. Il a besoin "du peau à peau",

ce premier contact entre l'enfant et sa mère.

Maïa seule, indépendante assumée, elle aime son métier de journaliste scientifique, refuse de tomber dans le sensationnalisme, se fait virer sans préavis après la perte de son ordinateur professionnel.

Elle souffre de ce qu'elle appelle "la disparitionnite", sa manie de tout perdre.

Côté sexe, elle satisfait ses appétits grâce à des applis de rencontres. Son besoin, c'est le corps à corps pour réguler son humeur, lui donner de l'énergie. Elle veut juste un homme pour coucher avec. Des coups d'un soir ! Elle les trouve aussi décevants les uns que les autres car leurs rapports "c'est Lui-elle-lui ou plutôt Lui-lui-lui."



Ces deux quadras habitent Lyon et fréquentent le parc de la Tête-d'Or. Ils ne se connaissent pas.

Bastien observe Maïa mais elle ne le voit pas.

Cela dure une seconde mais cette seconde le bouleverse.

Elle attire les oiseaux : une mésange jaillit d'un cèdre et vient se poser sur le bout de ses doigts.



Il faudra attendre pour la rencontre !



Ce livre c'est "un mille-feuilles"

Deux enquêtes en parallèle et de nombreux personnages gravitent autour.

Maïa doit réaliser une enquête au CERN à Genève auprès de sa tante Victoire, scientifique responsable des recherches du cristal.

Ces diamants d'une étrange beauté, d'un bleu intense, deviennent une drogue mortelle.

Bastien, autre enquêteur, essaie de comprendre ce qui a amené la mort d'un ouvrier dans une "compacteuse", machine monstrueuse d'une usine de recyclage.

Des scientifiques qui se transforment en mafieux, un ex-taulard ingénieur, un flic, un prêtre, un libraire ...

Et puis le père de Maïa, Giorgio di Natale le vieil anarchiste Italien qui rencontrera l'inspecteur du travail catholique ! Et ils auront beaucoup de choses à se dire !



Ce roman captivant, truffé de rebondissements est addictif au point d'avoir envie de sauter les lignes pour savoir plus vite !

Et pourtant ça va vite, cinq cent pages avalées d'un trait :

C'est délirant, émouvant, caustique et drôle !

Ce récit présente de multiples horizons, ce qu'il dit de notre monde, des valeurs d'entraide et de solidarité, du respect pour les gens humbles, de la méfiance envers les puissants. Une grande qualité littéraire !

Le titre n'est pas trompeur :

Elle existe bien la "fantastique histoire d'amour" !



.................

Tu sais c'qu'on dit y'a pas d'amour

Y'a que des preuves d'après le juge

Toi t'existais depuis toujours

Moi j'te cherchais comme une excuse

Médicament sans ordonnance

Evidement t'es l'évidence

Téléguidé par tes pouvoirs

Près de toi chaque jour est victoire

J'veux m'endormir à tes tés-cô

Eternité coeur en dépôt

Terrain miné s'ra notre histoire

Terminé de douter pour une fois

Histoire d'amour...

J'ai trébuché, je suis tombé

Tu m'as touché, j'ai succombé

Obsolescence déprogrammée

Je t'aime à la perpétuité

Même si le monde est contre nous

Je serai fort près contre toi

J'me fous de la mort qui dénoue

On s'dira oui comme autrefois

Elles poucavent les étoiles entre elles

Ont balancé c'que j'voulais t'dire

Toutes les belles choses que portent le ciel

Ne font qu'imiter ton sourire

Vivre sans toi c'est mimer la vie

Gaël Faye Histoire d'amour

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Fantastique histoire d'amour

Cela ne va pas fort pour Bastien. Plaqué par Isabelle, il n'a que le travail à se mettre sous la dent et quand celui ci lui fait rencontrer une compacteuse, la situation ne va pas s'arranger.

Maïa semble mieux se porter. Pourtant, son travail est précaire, sa vie sentimentale n'est faite que d'horizontalités assumées et sans lendemain et sa Provence natale la débecte, même si c'est pour y retrouver son père.



Ils se connaissent sans le savoir , Bastien regardant Maïa nourrir les mésanges dans un parc Lyonnais.



Très bon roman , qui prend bien le temps de camper ses personnages et de nouer une énigme autour d'eux qui peut paraitre un peu rocambolesque mais qui finalement tient très bien la route.



On côtoie la science dans ce qu'elle a de meilleur, le sacrifice d'une vie pour faire avancer l'humanité, mais aussi dans ses travers , à savoir l'exploitation , mercantile ici, de toute découverte.

le lien entre sciences et bijou est d'ailleurs très intéressant et d'actualité puisque le diamant 'de laboratoire' est visiblement en train de gagner du terrain.

Bien sur, et le titre un peu nunuche du roman nous prévenait, il y a de l'amour, plein d'amour. de l'amour à donner , à recevoir, à consommer . de l'amour filial aussi avec le très beau personnage de Giorgio. de l'amour à apprivoiser surtout.



500 pages de divertissement, de plongée dans le quotidien de deux écorchés mais aussi au milieu des véreux, des scientifiques , des ultra riches !

Une très belle découverte d'un roman d'une auteure que j'avais déjà appréciée par ailleurs.

Merci à Babelio et aux éditions du Seuil pour leur confiance.
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Quand le diable sortit de la salle de bains

Ce roman raconte " la misère" d'une jeunesse contemporaine en perte de repères: il conte l'histoire en trois chapitres et à la première personne de Sophie, la trentaine, chômeuse en fin de droits, en recherche d'emploi.

Le lecteur est pris à la gorge: il n'a aucun répit, Sophie est souvent affamée, soucieuse d'écrire son roman....

C'est un ouvrage trés original, parfois pas sérieux, désopilant , digressif, interruptif, improvisé qui porte bien davantage sur la façon incroyablement drôle, parfois grave malgré tout dont l'auteure raconte les péripéties haletantes, hilarantes, drôles que sur les aventures elles - mêmes.....

Sophie nous embarque avec incongruité, cocasserie et burlesque dans ses turpitudes, elle subit son isolement par sa condition " d'ascète forcée".....

La question centrale posée au lecteur dans cet ouvrage est celle - ci : Quelle est la place de l'homme ou de la femme au chômage dans notre société???

Forcée par son destin ou par elle ?

Désopilante ou caustique, consciente de la dérision liée à la fameuse modernité, l'auteure ne laisse rien passer à ses personnages, elle les utilise pour faire sans concession une violente critique caustique, décapante, des besoins de l'homme pour se fondre dans la société moderne, le travail et la famille....pour finalement s'embourgeoiser!

Chacun aspirerait- il à s'embourgeoiser?

Elle nous interpelle à sa manière avec ce roman.....on rit jaune de cette dérision

car elle n'épargne personne, ni sa famille, ni les autres. Au contraire , elle met en relief, cruellement les mesquineries, les combinaisons, les tracasseries ubuesques de la nature humaine et de ses petits comptes mesquins....A Moi tout!

Rien pour les autres!

Un livre trés difficile à critiquer car la forme désopilante, excessive, déstabilise et laisse sans voix! Sur un fond de gravité qui en dit fort long sur notre époque!

Décapant! Déstabilisant ! Salutaire ! Je ne sais.....

Merci à Babelio pour cet envoi et à Masse critique!

J'avoue que j'ai préféré "la cote 400 "et "la condition pavillonnaire" plus classiques...

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