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Critiques de Stefan Hertmans (173)
Le coeur converti

Roman historique écrit grâce aux archives d'une synagogue du Caire parlant d'une convertie de Moniaux , village de Provence.

Sur les traces d'une jeune femme chrétienne convertie au judaïsme en l'an mille , l'auteur nous en raconte le périple de Rouen au Caire.
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Guerre et Térébenthine

En lisant le billet de Dominique je m’étais fait une promesse, mettre ce livre dans ma liste, puis dans ma pile à côté de mon lit, et puis finalement de le lire. Promesse tenue. J’ai bien aimé cette lecture dont un bon tiers est occupé par le récit de la guerre 14⁄18 vu du côté des Belges. Stefan Hertmans a voulu redonner vie à un grand-père très digne et très pieux. Il a voulu aller plus loin que son apparence d’homme sévère habillé en costume et portant tous les jours une lavallière noire et un borsalino. Il a trouvé un homme meurtri par la guerre et qui ne s’est jamais remis des souffrances qu’il a ressenties dans son corps et celles qui ont blessé et tué de façon horrible ses compagnons. La force avec laquelle sont racontés ces combats m’ont permis de me rendre compte de l’héroïsme de cette armée dont je savais si peu de chose avant de lire ce roman. Un autre aspect que j’ai découvert, c’est la domination à l’époque du français sur le flamand (les temps ont bien changé !). Les pauvres soldats flamands non gradés devaient donc obéir à des ordres parfois absurdes et qui, surtout, pouvaient les emmener à la mort donnés par des officiers qui ne s’exprimaient qu’en français d’un ton le plus souvent méprisant. Plusieurs fois, dans ce récit on ressent la langue française comme une façon de dominer les flamands. Comme ce lieutenant qu’il entend dire derrière son dos



Ils ne comprennent rien, ces cons de Flamands



Au delà des récits de guerre, on découvre un homme Urbain Martien (prononcez Martine) qui a aimé et a été aimé par ses parents. Son père, grand asthmatique, lui a donné le gout du dessin mais malheureusement, il laissera trop tôt sa femme veuve avec ses quatre enfants. Urbain connaîtra la misère celle où on a faim et froid et pour aider sa mère il travaillera dans une fonderie sans aucune protection et dans des conditions effroyables. Finalement il s’engagera à l’armée et sera formé au combat ce qui le conduira à être un cadre sous officier pendant la guerre.

Il connaîtra l’amour et sera passionnément amoureux d’une jeune femme qui ne survivra pas à la grippe espagnole ; il épousera sa sœur et ensemble, ils formeront un couple raisonnable.



J’ai eu quelques réserves à la lecture de cette biographie, autant le récit de la guerre m’a passionnée car on sent à quel point il est authentique : nous sommes avec lui sous les balles et les des canons ennemis, on patauge dans la boue et on entend les rats courir dans les tranchées. Autant la vie amoureuse de son grand-père m’a laissée indifférente. En revanche, sa jeunesse permet de comprendre cet homme et explique pourquoi la religion tient tant de place dans sa vie. Pour la peinture puisque c’est l’autre partie du titre disons que le talent d’un copiste même merveilleux n’est pas non plus très passionnant, la seule question que je me suis posée c’est pourquoi il n’a que copié des tableaux et n’a pas cherché exprimer ses propres émotions.
Lien : http://luocine.fr/?p=10823
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Le coeur converti

Lorsque l’auteur apprend que Monieux, le petit village provençal où il a élu domicile, a été le théâtre d’un pogrom il y a mille ans et qu’un trésor y serait caché, il part à la recherche d’indices. Il va alors se retrouver dans les pas de Vigdis, jeune noble normande tombée amoureuse de David, étudiant à la yeshiva de Rouen. Au péril de sa vie, elle le suit dans le Sud, commence à prier son dieu et devient Hamoutal. Son père ayant promis une forte somme à qui la ramènerait, des chevaliers se lancent à sa poursuite. Puis les croisés, de plus en plus nombreux sur le chemin de Jérusalem, semant mort et destruction dans leur sillage, s’intéressent à cette femme aux yeux bleus.

C’est le début d’un conte passionnant et d’une reconstruction littéraire grandiose du Moyen Âge. S’appuyant sur des faits et des sources authentiques, cette histoire d’amour tragique, menée comme une enquête, entraîne le lecteur dans un univers chaotique, un monde en pleine mutation….. Au fil des pages et des épreuves l’auteur imagine, ressent ce que Vigdis a vécu et le lecteur s’attache profondément et tristement à cette jeune femme prise dans la tourmente de son époque !
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Le coeur converti

Si je ne bouge pas, la mort ne me voit pas



Un homme, un village et son passé lointain. Une recherche en fin du XIème siècle. La reconstitution plausible de la vie d’une femme, née fille de Normand se mariant à un fils de rabbin. Vigdis devenue Hamoutal, « La porte de la liberté s’ouvre en grand, mais c’est un piège ». Une double traversée des lieux et des temps (avec quelques anachronismes comme ces mots pogrom et antisémitisme d’invention beaucoup plus tardive ; je m’interroge aussi sur ces sentiments amoureux qui semblent venir d’une époque plus moderne) par l’auteur et son personnage. Stefan Hertmans indique : « Ce livre s’inspire d’une histoire vraie. Il est le fruit à la fois de recherches approfondies et d’une empathie créative ».



Donner ou redonner vie à des personnages relève en effet d’une empathie créative, « Je sais qui ils sont. Je sais qui ils fuient ».



Le Moyen Age n’est pas cette légende noire construite plus tard et réexaminée de manière très critique par des historiens tels Marc Bloch ou Georges Duby. L’auteur nous invite dans des villages et des villes, des refuges aux personnes de passage et aux fugitifs, des communautés juives et des yeshiva ou des synagogues, Rouen et Narbonne. Un récit sombre, non linéaire, fait de détours et d’interrogations, d’inscriptions et de conjonctures, « les mettre hors de portée des chevaliers chrétiens que le père normand de la jeune femme a lancés à sa poursuite avec l’ordre de la ramener », de sentiments amoureux et religieux, de refus et d’accueil, de fuite, « Ici, Hamotal doit prendre peu à peu congé de Vigdis Adélaïs », de liberté et de danger de mort, de présence et de création, « Mon illusion, mon désir de percevoir le moindre détail de cette femme aboutissent à la constatation qu’aujourd’hui elle n’est présente nulle part en dehors de mon imagination ». Il est loin et compliqué le chemin de Rouen à Narbonne lorsque l’on se cache, lorsqu’on se convertit ou que l’on quitte sa communauté de naissance.



Narbonne, puis Arles et Avignon, « On est encore en 1091. Le monde occidental glisse lentement vers une catastrophe, une fracture dans l’histoire, et personne ne le voit venir . Le contemporain ne sait rien », Moniou, la naissance de Yaakov puis de Justa, le calme et des chevaliers à la porte.



Le monde bousculé par Urbain le pape des catholiques et la volonté de croisade, le mouvement de chevaliers aux cris de « Dieu le veut ! », le carnage, l’enlèvement des enfants, la fuite à nouveau mais cette fois seule et pour une destination encore plus lointaine. Aller à Yerushalayim.



Je souligne les approches des traces de l’auteur, le passé au présent, la présence absence, les lieux dans les lieux.



Les nouvelles routes et la volonté de retrouver ses enfants, « Le pourtour de la Méditerranée bouillonne d’activités confuses qui accompagnent les récentes migrations », Gênes, Palerme, Alexandrie, le Caire, « j’ai compris que je ne pourrais me rapprocher d’Hamoutal qu’en oubliant tout ce que je voyais autour de moi », les traces et les reconstitutions, les communautés et les refuges, « Elle prend conscience plus que jamais que nulle part elle ne pourra encore être vraiment en sécurité », la nouvelle que les enfants sont en vie et à Rouen…



La fin de tout repos, « si je ne bouge pas, la mort ne me voit pas », Najera, la perte et la folie, les récits des « pogroms » et les destructions, la mort.



Ailleurs et ce qui permet de (re)construire une partie de l’histoire, « Le monde tourne, mais quand on retient un instant sa respiration, il s’immobilise »…



Un beau portrait de femme, de résistante à l’ordre masculin et chrétien du monde. Un conte tantôt grimaçant tantôt souriant dans le chaos des vies. La force de l’espérance.
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Le coeur converti

L'auteur vit dans un village où il y aurait un trésor caché , il a des siècles !Sa curiosité le mène sur le chemin de Vidgis qui autrefois en 1099 aurait , par amour, suivit un rabin . Une histoire réelle que l'auteur à découvert en remontant le temps et en allant jusqu'à reprendre les routes et les chemins de son aventure .Un livre passionnant qui nous livre une histoire pleine de surprises et qui nous fait voyager .

A lire absolument !
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Le coeur converti

J’ai commencé à suivre avec beaucoup d’enthousiasme le destin de la jeune Adélaïs. Au XIe siècle, cette jeune chrétienne normande destinée aux plus beaux partis tombe amoureuse d’un jeune juif. Ensemble, ils s’enfuient et elle se convertit au judaïsme pour pouvoir vivre pleinement son amour avec le jeune David.



J’ai été charmée par cette plongée historique au temps des croisades, par la jolie plume (ou en tout cas sa traduction) du belge néerlandophone Stefan Hertmans.

Le voyage des amoureux se superpose avec celui du narrateur qui marche dans leurs pas et cela donne une prose très esthétique, très visuelle.

J’étais conquise ... jusqu’à ce que je ne le sois plus du tout. Un événement dramatique survient dans la vie de la jeune femme qui est contrainte de fuir une fois de plus.

Son exil est long, très très long. Toutes les horreurs qui peuvent advenir à une femme seule sur la route semblent lui tomber sur le nez une par une, elle va d’horreur en maladie, de famine en désespoir,... Bref, j’ai trouvé son agonie (car voilà ce qu’est son voyage, une agonie) longue et pénible. Le dernier tiers de ce roman m’a donné mal au ventre et j’ai parcouru les derniers chapitres en diagonale.

Certes, sa ténacité, son abnégation forcent le respect, mais ça n’en est pas moins très laborieux à découvrir...

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Le coeur converti

La Feuille Volante n° 1358 – Juin 2019.



Le coeur converti – Stefan Hertmans – Gallimard.

Traduit du néerlandais par Isabelle Rosselin.



Au début du XI° siècle, à l'ère des croisades, Vigdis, une belle jeune fille de la bonne bourgeoisie rouennaise catholique, noble par sa mère, se convertit au judaïsme par amour pour David, étudiant à Rouen, le fils du grand rabbin de Narbonne. Elle devient donc Hamoutal. Elle a envie de liberté et rejette la vie rangée qui lui est promise et suit donc David. C'est une remise en question radicale en ce haut Moyen-Age, une percée dans l'inconnu et le danger. Ils fuiront ensemble jusqu'à Narbonne entre les pogroms, le lancement de la 1° croisade par Urbain II, et les conflits internes dans les régions traversées. Ils doivent se méfier de tout le monde, déjouer les pièges et braver les dangers. le père de Vigdis ne l'entend pas de cette oreille et demande aux croisés de la rattraper. Les deux amants doivent donc les éviter autant que possible et ne pas éveiller l'attention des personnes rencontrées en chemin, mais David est assassiné à Monieux, en Provence, où ils se sont réfugiés et ses deux enfants enlevés par les croisés. Vigdis va dès lors devenir un fuyarde à leur recherche et ses pérégrinations l'amèneront jusqu'au Caire en passant par la Sicile. Telle est l'histoire de la fille chrétienne d'un viking qui devient la belle-fille d'un grand rabbin du sud de la France puis plus tard l'épouse d'un juif important du Caire. le narrateur qui fait, mais en voiture puis en bateau, quelques siècles plus tard ce chemin d'errance, communique au lecteur les périls rencontrés par les deux amants puis plus tard par Vigdis seule guidée par l'espoir de retrouver ses enfants.

Tout ce récit part d'un authentique document historique, notant l'existence de cette femme et de son choix exceptionnel pour l'époque, évidemment romancé, découvert par l'auteur dans les archives du village de Monieux où il réside et où, mille ans plus tôt a été perpétré un pogrom consécutif à l'esprit de la croisade. En effet, par ces massacres, il convenait de punir les juifs d'avoir condamné le Christ et aussi les châtier pour leurs richesses. Plusieurs siècles plus tard, il a suivi cette femme jusqu'en Égypte où l'auteur a découvert un document attestant du périple d'une jeune noble normande. Son long travail de recherche s'est doublé d'une démarche d'empathie à son égard, d'une belle érudition et d'un style somptueux.



Je suis bouleversé par cette preuve d'amour de Vigdis envers David ; il m'est difficile d'imaginer que cela est possible. Sa dangereuse pérégrination me rappelle que l'aventure humaine est mystérieuse, longue pour certains et brève pour d'autres et ce sans aucune raison et que l'explication qu'on peut y donner se perd entre hasard, chance et destin sans qu'on soit capable d'en démêler les fils. Ce roman évoque aussi l'antisémitisme qui est la forme la plus ancienne du racisme, solidement ancré dans l'espèce humaine. Je me suis toujours demandé pourquoi ce sont les juifs, un communauté tranquille, qui étaient à l'époque l'objet de ces tueries et de cette haine. Certains d'entre eux étaient des banquiers et en les tuant on tuait aussi leurs créances mais il y avait chez eux aussi des pauvres qui n'échappaient pas pour autant au massacre. Au Moyen-Age l'emprise de l'Église catholique était telle qu'elle gouvernait les institutions et les consciences, manipulait l'opinion, et il lui a été facile de susciter cette détestation des juifs qu'elle considérait comme les meurtriers du Christ. Elle était surtout l'incarnation de l'intolérance, voyait la marque du diable partout et la justice expéditive qu'elle exerçait ou suscitait sans aucun discernement ne jurait que par le bûcher. L'esprit de la charité chrétienne et de l'Évangile était bien loin de ses actes. C'est peut-être cela aussi, avec également l'indulgence plénière, qui a motivé les chevaliers à partir en croisade délivrer le tombeau du Christ, encore que, auparavant, les occidentaux vivaient sur les terres d'Orient en relative paix avec les musulmans et les croisades n'ont pas atteint leur but, certaines s'arrêtant en chemin pour tuer et piller les villes, notamment Constantinople. Elles se sont révélées, non comme un pèlerinage armé, mais comme des opérations militaires dont l'époque était coutumière et qui s'inscrivaient dans le cadre de la lutte défensive contre l'expansion arabe en occident. On pourrait penser que les choses ont aujourd'hui changé, que les mentalités ont évolué avec le temps mais aux pogroms du Moyen-Age a succédé la Shoah et les attaques actuelles contre les juifs prouvent que ce vieux fond d'antisémitisme est bien ancré dans nos civilisations.

J'ai bien aimé ce roman, cette fresque historique est particulièrement émouvante.

©Hervé Gautier.http://hervegautier.e-monsite.com
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Le coeur converti



Amours tragiques sous fonds historiques réels : pogroms dans un petit village provençal, et, persécutions des juifs au Moyen Age.



Au travers les portraits de deux jeunes gens - l'un juif, l'autre chrétien - Stefan Hertmans donne vie à toute une communauté, et, plus particulièrement la communauté juive qui essaye tant bien que mal de vivre en paix dans le respect de ces traditions. C'est tout un monde fait de violence ainsi que de solidarité, d'amour qui prends vie sous les yeux des lecteurs avec moult détails, et, précisions historiques. En effet, de longues recherches ont été effectuées par l'auteur. Celui ci a essayé tout au long de son périple, de comprendre le pourquoi du comment concernant les diverses croisades ainsi qu'aux persécutions "stupides" des juifs au cours du Moyen Age.



Un roman dur, voire très dur, mais, extrêmement émouvant ... ... qui laisse des traces, et, qui peut en perturber certains.

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Le coeur converti

Fin 11ème siècle. Reconstitution de cette période du Moyen Age à travers le destin de Vigdis, normande descendante de Vikings, en fuite de Rouen à Narbonne avec un fils de Rabbin , reconvertie à sa religion par amour. Ils devront ensuite fuir Narbonne pour se cacher à Monieux dans le Lubéron pourchassés par les chevaliers normands envoyés par les parents de Vigdis .

Mais les juifs sont persécutés par les fanatiques religieux en partance pour libérer Jerusalem . Les dangers sont donc de tous bords. Ils vivient néanmoins une période relativemetn heureuse au sein des remparts de Monioux sous le Mont Ventoux.

Dans ce récit , nous suivons le périple du couple puis celui de Vigdis devenue Hamantal /Sarah.... dans un contexte violent de croisades et de pogroms.

Instructif quant à cette période de l'histoire .
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Le coeur converti

Mille ans après, Stefan-Hertmans marche dans les pas de Vigdis, jeune catholique de Rouen convertie au judaïsme par amour pour David. De leur fuite pour rejoindre la famille du jeune homme au terrible drame qui brise sa vie, une grande histoire d'amour.

L'auteur cherche à chaque étape de son parcours à imaginer les lieux traversés et les émotions ressenties par les personnages et à nous les faire partager.

Un éclairage intéressant sur une période tourmentée de l'histoire de France.
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Le coeur converti

Stefan Hertmans présente ici un curieux travail : il entreprend une recherche sur un personnage qui a vécu au XIIe siècle et nous raconte ses investigations sous la forme d'un roman. Ainsi vont se mêler deux histoires interdépendantes : « recherches approfondies » et « empathie créative » comme l'auteur nous en prévient en exergue, le tout raconté essentiellement au présent de manière non linéaire.



Tout commence à Monieux, petit village médiéval du Vaucluse, où l'auteur belge néerlandophone réside régulièrement depuis 22 ans. Quand on tape « Monieux » dans un moteur de recherche, la suggestion « Monieux pogrom » apparaît tout de suite, car l'histoire est connue depuis longtemps. Quand Stefan Hertmans s'installe dans le village, il entend parler du « trésor de Monieux » et d'un cimetière juif dont on ne connaît pas l'emplacement. Un de ses voisins lui donne l'article, datant de 1969, d'un universitaire de Chicago, Norman Gold, article dans lequel il explique ses recherches sur un manuscrit retrouvé au Caire (reproduit et traduit en français aux pages 203 à 207 du roman). Il s'agit en fait d'une lettre de recommandation, demandant aux diverses communautés juives d'accueillir avec bienveillance une « prosélyte » auparavant chrétienne, veuve de David Todros, fils de Richard Todros (considéré comme le roi juif de Narbonne). Elle est recherchée par sa famille normande et, fuyant Rouen puis Narbonne, le couple est installé à Monieux depuis 6 ans. Mais à ce jour son mari a été tué, ses enfants faits prisonniers, tous leurs biens saccagés. La lettre est signée du grand rabbin de Monieux, Joshua b. Obadia. À partir de ces maigres renseignements, Stefan Hertmans va s'appliquer à inventer une biographie à Vigdis Adélaïs, devenue Sarah Hamoutal par amour pour David Todros.



J'ai été très intéressée par l'aspect historique du roman sur une époque que je connais mal. Il se déroule pendant la Reconquista et la première croisade. Les communautés juives prospèrent alors, mais la ferveur religieuse, l'ignorance et une forme de jalousie des chrétiens vont pousser ces derniers à d'horribles et nombreuses exactions, comme le pogrom qui a lieu à Monieux en 1096. Les conditions de découverte du fameux manuscrit sont passionnantes et je comprends l'enthousiasme de l'auteur et sa curiosité. Si je n'ai eu aucun mal à le suivre dans ce domaine, je serai beaucoup plus circonspecte sur les aventures rocambolesques (tant pis pour l'anachronisme !) qu'il attribue à Hamoutal. J'ai très vite cessé d'y croire, ce qui a finalement détruit l'empathie que j'avais pour le personnage au début. Il n'en reste pas moins que l'auteur décrit magnifiquement et passionnément les paysages du Lubéron, fasciné par les endroits où le passage des siècles n'a pas laissé de traces apparentes. Le choix de la narration au présent pour les deux époques fait que les récits se télescopent parfois, perdant le lecteur et l'obligeant à revenir quelques phrases en arrière pour vérifier s'il se trouve au XIIe siècle ou au XXIe… Malgré ces réserves, je recommande la lecture de ce beau roman : ce qui m'a déplu ravira d'autres lecteurs et c'est tant mieux !



Lu dans le cadre du prix des Lecteurs de Cognac 2019
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Le coeur converti

Le cœur converti (on dirait un Arlequin historique !) – le titre original « la convertie » (de berkeerlinge) est moins orienté - aurait pu être un bon récit car le procédé narratif synoptique était bien trouvé.



De même, les paysages semblent juste « résumés » et les personnages manquent de profondeur psychologique. Si ces éléments avaient été plus développés, le roman aurait gagné en profondeur et en souffle.



Dans le même ordre d'idée, la conversion qui est le fil conducteur du récit est dépeinte comme le simple passage d’une religion à une autre. Cela donne l’idée qu’il n’est pas question de foi mais juste de respect de rites, ce qui ne correspond ni à la réalité du Moyen-Age, ni au vécu des croyants. Une croyante du Moyen-Age qui doit se convertir même par amour a dû souffrir beaucoup plus. Et cela n'est pas montré : le roman est un peu faible sur cet aspect pourtant central (le titre original est "la convertie" rappelons-le).



Les éloges journalistiques de la quatrième de couverture (« un livre capital qui bouleversera les cœurs et les esprits ») sont à mon avis surfaits.

On se demande même si certains ont lu le livre en entier. Sinon, comment expliquer ce « le portrait d’une femme à la volonté en fer » d’un journal bruxellois comparé au « Hamoutal a près de vingt-sept ans et elle n’est plus personne, une femme en errance, dans un monde qui n’est pas le sien. » du livre.



Bref, ce livre se place juste un peu au-dessus des milliers d’autres livres publiés à la même période.

A posteriori, c’est même une bonne chose qu’il n’ai pas eu le prix Fémina 2019.



Cependant, ce qui m’a vraiment énervée dans ce livre est la charge constante contre le catholicisme et les croisades.



Tout d’abord, l’auteur répète une interprétation de l’Histoire typique d’un certain courant de pensée français contemporain.

En effet, il donne une fausse interprétation de la première croisade et du rôle d’Urbain II dans celle-ci. Celui-ci n’a pas lancé la première « croisade » (le mot n’apparaîtra d’ailleurs qu’au XIIIème siècle, donc bien après) de sa propre initiative mais pour répondre à l’appel au secours d’Alexis Comnène.

En effet, au Moyen-Age il y avait d'importants flux de pèlerinages vers les Lieux Saints où Jésus avait vécu et était mort.

Les Musulmans toléraient les Chrétiens "natifs" même s’il fallait qu’ils paient un tribut particulier et qu’ils portent un insigne distinctif les faisant reconnaître du reste de la population.

En 800, les califes abbassides avaient même confiés à Charlemagne la tutelle morale des Lieux Saints.

Au début du XIème siècle (époque où se déroule l’histoire), les Chrétiens travaillant dans l’administration sont forcés à se convertir à l'Islam et un calife fait détruite le Saint-Sépulcre (le tombeau de Jésus Christ).

Ensuite, quand les Turcs Seldjoukides s’emparent de Jérusalem, les pèlerinages deviennent par conséquence pratiquement impossibles car trop dangereux. C’est donc en tant que riposte à l’expansion militaire de l’Islam sur des terres chrétiennes et à l’implantation des Turcs Seldjoukides dans les régions berceaux du christianisme que la première croisade a été lancée.



Ensuite, quant à la thèse de la "croisade origine du djihad", il suffit d’étudier un peu l’histoire pour voir que ce n’est que de la recherche de sensationnalisme.



Pour finir, dans le même ordre d’idée, le croyant chrétien est systématiquement moqué, mais jamais le croyant juif ou le croyant musulman.

Par exemple, il y a une tempête, il fait nuit. Au loin, on voit le volcan Stromboli en éruption et l’auteur écrit : « Plusieurs passagers dévots sont terrifiés. » Mais, mon Dieu ! Dans de telles circonstances, il n’y a pas besoin d’être dévot pour être terrifié !



Cependant, le livre est intéressant comme histoire d'amour entre un néerlandais et son petit village de Provence où il s'est enraciné. Dans les dernières pages consacrées à son village - qui sont les meilleures, selon moi - Stefan Hertmans nous fait sentir l'odeur des vieilles rocailles au soleil et la nostalgie de savoir qu'on sera enterré dans cette terre où des hommes et des femmes ont vécu leurs vies humaines des années, des décennies et des siècles avant nous.



En résumé, c'est dommage que les prises de position anti-chrétiens implicites de l’auteur gâchent un joli récit qui aurait pu être plus abouti.

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Le coeur converti

C’est à une plongée au coeur d’un Moyen Age du début du XIe siècle, empreint de religion, de superstition et de violence que nous invite Stefan Hertmans dans cette reconstitution de l’histoire de la « prosélyte de Monieux » dont l’existence, attestée par les historiens, reste cependant un mystère. L’auteur imagine donc la vie de cette jeune Normande, descendante des Vikings, qui tombe amoureuse d’une jeune étudiant juif, originaire de Narbonne, et s’enfuit avec lui. Leur fuite, leur installation dans le petit village de Monieux, la nuit de massacre par les croisés qui les sépare à jamais, l’errance de la jeune femme jusqu’en Egypte puis son retour, folle et seule, dans ce village où elle fut, quelques temps du moins, heureuse, telle est la matière du roman de S. Hertmans. Mais aussi la nature, grandiose et sauvage, que traverse la jeune Hamoutal, née Vigdis Adélaïs, l’intolérance des hommes comme la force de la communauté juive, les tourments d’une âme profondément religieuse qui change de Dieu sans pouvoir s’empêcher, à maintes reprises, de les confondre, les traces de l’histoire…. En un mot un livre riche, dans lequel on se laisse prendre, et ce - c’est là le seul reproche que je lui ferai - la lenteur de certaines descriptions émaillées de tant de détails que l’imagination finit par s’y perdre.
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Le coeur converti

J'ai du mal à y croire jusqu'au passage où j'apprend que l'auteur s'inspire d'un texte d'époque : des suppositions et des retours à aujourd'hui. Je continue malgré tout...
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Le coeur converti

L'histoire est racontée par un habitant du village de Monieux (l'auteur himself, propriétaire d'une résidence secondaire) qui y découvrant les vestiges d'une communauté juive au moyen âge décide d'enquêter. Il tombe alors sur un document très court mentionnant une jeune catholique, Vigdis, qui s'est enfuie de Rouen en 1088 avec le fils du grand rabbin de Narbonne. La jeune fille, convertie au judaïsme par amour, est tombée enceinte pendant le long périple entre Rouen, Narbonne puis Monieux (Vaucluse). Ensuite... non, je vous laisse découvrir la suite assez... rocambolesque.



Ce jeune couple est charmant qui coure parmi les petites fleurs, les ruisseaux et les oiseaux chantant. Mais leur traversée d'une France imaginée au moyen âge par Stefan Hertmans est fort longue et pour tout dire assez fastidieuse. D'autant que l'auteur se met en scène et alterne son propre périple à la recherche d'indices avec celui des deux amoureux poursuivis par les chevaliers du père de Vigdis. Que dire de la suite où les croisés se mêlent à l'affaire et poussent la jeune mère à partir à la recherche de ses enfants kidnappés.



Je dois avoir un problème avec les romans historiques se passant au moyen âge. Le Coeur converti pas plus qu'en son temps Du domaine des murmures ne m'ont vraiment convaincue. Ici trop d'invraisemblances, trop de suppositions, trop de baguenaudages dans la campagne ont eu raison de mon intérêt. Mais au vu des critiques très positives je pense que je n'ai pas su saisir la substantifique moelle de ce roman.
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Le coeur converti

Pas tout à fait un roman, pas tout à fait un documentaire, un peu tout cela, on part en voyage, itinéraire très précis, écriture très détaillée, on va du présent eu passé et on repart au présent. Une chronique de vie des hommes, avec leur part d'horreur encore et toujours. A lire.
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Le coeur converti

L'histoire se déroule au 11eme siècle, les croisades battent leur plein. Adelais Vigdis, chrétienne, tombe éperdument amoureuse de David Todros, juif. Les deux tourtereaux sont obligés de fuir Rouen pour laisser libre cours à leur amour. Ils traversent la France jusqu'à Narbonne où la jeune femme est convertie au jadaïsme. Le père de la jeune femme lance des chevaliers à sa recherche et le couple est, à nouveau obligé de fuir. Stefan Hertmans s'est inspiré de deux documents historiques, de son lieu de villégiature et de ses voyages pour écrire ce roman. Le roman est intéressant pour son caractère historique. J'aurais cependant préféré une plongée dans l'esprit de l'héroïne pour comprendre le cheminement de ses pensées plutôt que de lire les anecdotes de voyage de l'auteur sur les traces de son héroïne.
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Le coeur converti

Je retrouve Stefan Hertmans avec un nouveau roman-récit, moins touchant que « Guerre et Térébenthine ». Et donc moins convaincant.



Dans « Le cœur converti », Hertmans imagine la vie d’une jeune rouennaise convertie au judaïsme à la fin du XIème siècle qui aurait séjourné dans le village où l’auteur a décidé de se retirer. Pourquoi a-t-elle quitté sa famille, son milieu et ses richesses ? Pourquoi s’est-elle convertie au judaïsme ? Pourquoi retrouve-t-on sa trace en Egypte ?



Hertmans mène l’enquête près de mille ans plus tard, prend la route et tente de retracer la vie de cette jeune femme, dans une Europe en pleine crise, en plein chaos, et en proie aux fanatismes religieux, à l’intolérance et à la colère du peuple affamé et exploité. Il démystifie les Croisades, rappelle les nombreux pogroms qui ont eu lieu en France dans ces temps troublés du Moyen Age, et l’intérêt historique de ce roman est indéniable. L’auteur aime l’Histoire, pas de doute là-dessus, mais peut-être aime-t-il plus l’histoire des lieux (à nouveau quelques anecdotes savoureuses sur des lieux lourdement imprégnés d’histoire) et des événements que celle des hommes …



Et c’est là que le bât blesse … car ce n’est pas l’homme de « Guerre et Térébenthine », l’homme doté de sens et de cœur, qui écrit ici, mais plutôt l’homme cultivé qui donne sa vision de cette époque, avec précision, certes, mais sans empathie. La pudeur présente dans « Guerre et Térébenthine » s’est muée en froideur. Même l’œil du peintre, qui nous avait décrit si joliment les tableaux de la Flandre du début du XXème siècle, a disparu.



Du coup, j’ai eu du mal à croire à cette histoire. On sait très peu de choses sur ce que l’héroïne ressent, sur ce qu’elle pense, sur le chemin spirituel qui l’amène à la conversion. Je la suppose passionnée, amoureuse, tremblante pour son homme et pour ses enfants. Et probablement éprise de liberté, voulant décider elle-même de sa vie, de son destin, obstinée même peut-être. Une femme hors du commun qui abandonne sa famille d’ascendance nordique et flamande, sa région pluvieuse, son milieu de riches commerçants, sa religion, bref tous ses privilèges, tous ses acquis pour l’amour d’un jeune Juif, érudit, originaire du Sud de l’Europe. Une femme qui fait des choix et qui les assume. Une histoire d’amour passionnel mais probablement plus encore.



Non l’héroïne de Hertmans est bien pâle. Certaines de ses réactions ou de ses décisions sont assez incompréhensibles, comme lorsqu’elle voit arriver les Croisés au village, avec indifférence presque … Ou lorsqu’elle décide de s’établir en Egypte …



En résumé, je n’ai pas vibré. Pourtant je suis sûre que la vie de cette femme, que les paysages traversés, que les personnes rencontrées se prêtaient à la poésie, à la musique, au lyrisme, à l’émotion. Un très bon livre historique, mais un roman tout à fait dispensable…

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Guerre et Térébenthine

Nostalgie et émotion dans ce récit de Stefan Hertmans, personnage jovial et passionné de la littérature belge que j’ai eu le bonheur de rencontrer à la bibliothèque de ma commune.



Hertmans rend un bel hommage à son grand-père, le héros de son enfance. On y retrouve une Flandre aujourd’hui disparue, extrêmement pauvre, industrieuse et sans cesse humiliée par la bourgeoisie.



Le roman est composé de trois parties, avant-pendant-après la Première Guerre Mondiale, et je dois avouer un certain ennui pour la seconde partie, assez riche en faits de guerre et en batailles. La troisième partie évoque avec beaucoup de pudeur la vie sentimentale du grand-père. La première partie est, selon moi, la plus réussie : Hertmans dépeint de très beaux tableaux, colorés, olfactifs et vivants, de la vie ouvrière au début du XXème siècle, comme celui de la forge, ou celui de la fonderie, sans oublier le mémorable (en tout cas je m’en souviendrai longtemps) épisode de la visite à l’usine de gélatine …



Cet épisode sera tellement marquant qu’il révèlera au grand-père de sa vocation, la peinture, cet art qu’il aura pratiquée toute sa vie sans vraiment devenir l’artiste qu’il aurait pu être … Du coup, on ne peut qu’être interpellé par l’affirmation qu’il fait à son petit-fils « Tu peux tout faire, du moment que tu en as envie ». Douloureux mensonge ? Non, je crois plutôt que ces mots sont ceux de l’espoir fou, et totalement compréhensible, de voir nos enfants s’épanouir et réaliser leurs rêves, là où nous avons dû abandonner les nôtres…

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Le coeur converti

Stefan Hertmans, qui réside dans le village de Monieux, nous conte le destin d’une jeune fille normande qui mille ans auparavant, avait trouvé refuge pendant quelque temps en ce lieu.

Vigdis, fille d’un chevalier normand tombe amoureuse à Rouen d’un jeune juif, fils du grand rabbin de Narbonne. Cette relation entre une chrétienne et un juif est sacrilège, les amants prennent la fuite et traversent toute la France; ils sont prudents car ils sont recherchés.

Mille ans plus tard, Stefan Hertmans suit le même parcours et nous décrit les lieux où ils sont passés, ce qu’ils sont aujourd’hui et ce qu’ils devaient être à l’époque.

L’intérêt de ce livre est multiple :

* historique car nous voilà plonges au onzième siècle à l’époque des croisades et des premiers pogroms. J’ai été frappé par l’intense recherche à laquelle s’est livré l’auteur, consultation de documents anciens, rencontre avec des spécialistes de cette période. C’est extremement bien documenté

* intéret géographique également; à de nombreuses reprises, la description minutieuse des lieux traversés à suscité mon désir de les découvrir (je pense notamment à Clermont-Ferrand)

* intérêt littéraire évidemment ! La construction du roman, alternant les deux parcours, celui de la jeune femme et celui de l’auteur, la précision et la beauté des descriptions, la richesse du vocabulaire m’ont plu

* intérêt romanesque enfin. J’ai éprouvé beaucoup d’empathie pour les personnages de ce magnifique livre.

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