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Citations de Vanessa Springora (513)


Depuis tant d’années, je tourne en rond dans ma cage, mes rêves sont peuplés de meurtre et de vengeance. Jusqu’au jour où la solution se présente enfin, là, sous mes yeux, comme une évidence : prendre le chasseur à son propre piège, l’enfermer dans un livre.
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Et, en effet comment admettre qu’on a été abusé, quand on ne peut nier avoir été consentant?
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Pour me donner du courage, j’ai fini par m’accrocher à ces
arguments : si je voulais étancher une bonne fois pour toutes ma colère et
me réapproprier ce chapitre de mon existence, écrire était sans doute le
meilleur des remèdes. Plusieurs personnes me l’avaient déjà suggéré au
fil des années. D’autres au contraire avaient essayé de m’en dissuader,
dans mon intérêt.
C’est l’homme que j’aime qui m’en a finalement convaincue. Parce
qu’écrire, c’était redevenir le sujet de ma propre histoire. Une histoire qui
m’avait été confisquée depuis trop longtemps.
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Lorsqu'à son sujet les pires accusations parviennent à mes oreilles, une infinie naïveté me pousse à croire que la fiction inventée par G. le caricature, que ses livres sont une exagération grimaçante de lui-même, qu'il s'y avilit et s'y enlaidit par provocation, comme avec un personnage de roman dont on force le trait
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A cette époque, à l'égard du sexe, j'oscille entre la toute-puissance et l'aboulie. Je suis tantôt traversée par un sentiment d'ivresse, tout ce pouvoir ! C'est si facile de rendre heureux un homme. Puis soudain, au moment de jouir, je fonds en larmes sans raison apparente. Trop de bonheur, c'est tout ce que je trouve à répondre quand il s'inquiète de mes sanglots. Des jours entiers, je ne supporte plus qu'il me touche. Et puis le cycle infernal repart, je me rappelle ma mission dans ce bas monde, donner du plaisir aux hommes. C'est ma condition, mon statut. Alors j'offre à nouveau mes services, avec zèle et une conviction feinte dont j'arrive à me persuader moi-même. Je fais semblant. Semblant d'aimer faire l'amour, semblant d'y prendre du plaisir, de savoir à quoi riment tous ces gestes. Au fond de moi, j'ai honte de les exécuter avec autant de naturel, quand d'autres n'en sont qu'à leurs premiers baisers. Je sens bien que j'ai sauté une étape. Je suis allée trop vite, trop tôt, pas avec la bonne personne. Tous ces moments d'intimité, j'aurais préféré les vivre avec Youri pour la première fois. Qu'il ait été, lui, mon initiateur, mon premier amant, mon premier amour. Je n'ose pas l'avouer. Je n'ai pas encore assez confiance en moi, en lui.
Et surtout, je ne peux pas lui dire que l'image impossible à chasser, chaque fois que je fais l'amour avec lui, c'est celle de G.
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« Dix ans avant ma rencontre avec G., vers la fin des années soixante-dix, un grand nombre de journaux et d’intellectuels de gauche ont en effet pris la défense d’adultes accusés d’avoir eu des relations coupables avec des adolescents. En1977, une lettre ouverte en faveur de la dépénalisation des relations sexuelles entre mineurs et adultes, intitulée « À propos d’un procès », est publiée dans le Monde, signée et soutenue par d’éminents intellectuels, psychanalystes et philosophes de renom, écrivains au sommet de leur gloire, de gauche pour la plupart. On y trouve entre autres les noms de Roland Barthes, Gilles Deleuze, Simone de Beauvoir, Jean Paul Sartre, André Glucksmann, Louis Aragon… Ce texte s’élève contre l’incarcération de trois hommes en attente de leur procès pour avoir eu (et photographié) des relations sexuelles avec des mineurs de treize à quatorze ans. « Une si longue détention préventive pour instruire une simple affaire de mœurs, ou des enfants n’ont pas été victimes de la moindre violence, mais, au contraire, ont précisé aux juges d’instruction qu’ils étaient consentants (quoique la justice leur dénie actuellement tout droit au consentement) nous parait déjà scandaleuse », peut-on y lire notamment. »
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En réalité, à l’échelle de l’existence de G., je savais maintenant que ce désir pour moi était infiniment redondant et d’une triste banalité, qu’il relevait de la névrose, d’une forme d’addiction incontrôlable.
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Le rôle de bienfaiteur qu’aime se donner G. dans ses livres consiste en une initiation des jeunes personnes aux joies du sexe par un professionnel, un spécialiste émérite, bref, osons le mot, par un expert . En réalité, cet exceptionnel talent se borne à ne pas faire souffrir sa partenaire. Et lorsqu’il n’y a ni souffrance ni contrainte, c’est bien connu, il n’y a pas de viol. Toute la difficulté de l’entreprise consiste à respecter cette règle d’or, sans jamais y déroger. Une violence physique laisse un souvenir contre lequel se révolter. C’est atroce, mais solide.
L’abus sexuel, au contraire, se présente de façon insidieuse et détournée, sans qu’on en ait clairement conscience. On ne parle d’ailleurs jamais d’« abus sexuel » entre adultes. D’abus de « faiblesse », oui, envers une personne âgée, par exemple, une personne dite vulnérable . La vulnérabilité , c’est précisément cet infime interstice par lequel des profils psychologiques tels que celui de G. peuvent s’immiscer. C’est l’élément qui rend la notion de consentement si tangente.
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M’avoir transformée en personnage de fiction, alors que ma vie d’adulte n’a pas encore pris forme, c’est m’empêcher de déployer mes ailes, me condamner à rester figée dans une prison de mots. G. ne peut l’ignorer. Mais je suppose qu’il s’en moque éperdument.

Il m’a immortalisée, de quoi pourrais-je me plaindre ?

Les écrivains sont des gens qui ne gagnent pas toujours à être connus. On aurait tort de croire qu’ils sont comme tout le monde. Ils sont bien pires.

Ce sont des vampires.
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Ce mensonge, c'est celui de trop. J'ai beau avoir tout juste quinze ans, je ne peux m'empêcher d'y voir une insulte à mon intelligence, un déni de toute ma personne.
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Par la suite, jamais G. ne s'intéressera à mon journal, ne m'encourager à à écrire, ne m'inciter à à trouver ma voie. L'écrivain, c'est lui.
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Version moderne du portrait de Dorian Gray, son œuvre serait le réceptacle de tous ses défauts, lui permettant de revenir à la vie ressourcé, vierge, lisse et pur.
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Pour prendre le chasseur à son propre piège, il faut l'enfermer dans un livre.
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Pourquoi tous ces intellectuels de gauche ont-ils défendu avec tant d'ardeur des positions qui semblent aujourd'hui si choquantes ? Notamment l'assouplissement du code pénal concernant les relations sexuelles entre adultes et mineurs, ainsi que l'abolition de la majorité sexuelle ?
C'est que, dans les années soixante-dix, au nom de la libération des mœurs et de la révolution sexuelle, on se doit de défendre la libre jouissance de tous les corps. Empêcher la sexualité juvénile relève donc de l'oppression sociale et cloisonner la sexualité entre individus de même classe d'âge constituerait une forme de ségréga-tion. Lutter contre l'emprisonnement des désirs, contre toutes les répressions, tels sont les mots d'ordre de cette période, sans que personne y voie à redire, sinon les culs-bénits et quelques tribunaux réactionnaires.
Une dérive, et un aveuglement dont presque tous les signataires de ces pétitions s'excuseront plus tard.
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Le manque, le manque d’amour comme une soif qui boit tout, une soif de junkie qui ne regarde pas à la qualité du produit qu’on lui fournit et s’injecte sa dose létale avec la certitude de se faire du bien. Avec soulagement, reconnaissance et béatitude.
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Le manque, le manque d’amour comme une soif qui boit tout, une soif de junkie qui ne regarde pas à la qualité du produit qu’on lui fournit et s’injecte sa dose létale avec la certitude de se faire du bien. Avec soulagement, reconnaissance et béatitude .
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Le manque, le manque d'amour comme une soif qui boit tout, une soif de junkie qui ne regarde pas à la qualité du produit qu'on lui fournit et s'injecte sa dose létale avec la certitude de se faire du bien. Avec soulagement, reconnaissance et béatitude.
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Sauf que je ne suis plus qu'une boule de rage qui s'épuise à faire comme si tout allait bien, à donner le change. Cette colère, j'essaie de la taire, je la cache en la redirigeant contre moi. La coupable, c'est moi. La paumée, la pute, la Marie-couche-toi-là, la complice d'un pédophile (...).
A cette époque, à l'égard du sexe, j'oscille entre la toute-puissance et l'aboulie. Je suis tantôt traversée par un sentiment d'ivresse, tout ce pouvoir! C'est si facile de rendre heureux un homme. Puis soudain, au moment de jouir, je fonds en larmes sans raison apparente. Trop de bonheur, c'est tout ce que je trouve à lui répondre quand il s'inquiète de mes sanglots. (...). Et puis le cycle infernal repart, je me rappelle ma mission dans ce bas monde, donner du plaisir aux hommes. C'est ma condition, mon statut. Alors, j'offre à nouveau mes services, avec zèle et une conviction feinte dont j'arrive à me persuader moi-même. Je fais semblant. Semblant d'aimer faire l'amour, semblant d'u prendre du plaisir, de savoir à quoi riment tous ces gestes. (...)
Et surtout, je ne peux pas lui dire que l'image impossible à chasser, chaque fois que je fais l'amour avec lui, c'est celle de G.
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Soudain, une des convives, une seule, s'en prend à cette belle harmonie et, sans ménagement, se lance dans une véritable exécution en règle. Son nom est Denise Bombardier, c'est une auteure canadienne. Elle se dit scandalisée de la présence sur une chaîne de télévision française d'un personnage aussi détestable, d'un pervers connu pour défendre et pratiquer la pédophilie. Citant l'âge des fameuses maîtresses de G.M. ("quatorze ans!"), elle ajoute que dans son pays, une telle aberration serait inenvisageable, que chez elle, on est plus évolué quant au droit des enfants. Et comment s'en sortent plus tard toutes ces filles qu'il décrit dans ses livres? Quelqu'un a t-il pensé à elles?
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Toute l'ambiguité de se sentir complice de cet amour qu'on a forcément ressenti, de cette attirance qu'on a soi-même suscitée, nous lie les mains plus encore que les quelques adeptes qui restent à G. dans le milieu littéraire.
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