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Critiques de Viviane Forrester (43)
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L'horreur économique

Le titre de cet essai n'a rien de ronflant ni d'exagéré... et son contenu, qui déroule la constante imposture de l' économie de marché, reste d'une morne actualité plus de vingt ans après. il y est démonté et démontré l' appropriation de la valeur Travail, comme asservissement inclusif, par les puissances financières transnationales de plus en plus hors de contrôle.

Avec le spectre d'un avenir d'humains de moins en moins "utiles".

Même si des consciences se font timidement jours depuis quelques temps, l' essai de Viviane Forester est lucide, qui annonce une idéologie encore timide de la décroissance: celle qui vient après un constat lucide et sans concessions.

Ce livre mériterait une version 02, par un collège de philosophes et d' économistes alternatifs et divergents.

Mais en l' état, c'est encore un ouvrage passionnant.
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L'horreur économique

« La vérité est trop nue, elle n'excite pas les hommes. » - Jean Cocteau - Le poète a raison.

Il a raison mais pas entièrement.

Parce que l'horreur est immense, à la hauteur du mensonge.

Le livre de Viviane Forrester est sans doute ce qui a été de mieux écrit, décrit, saisi, analysé depuis des années concernant l'état de notre monde.

Ce n'est pas un essai de stratégie économique, ni un traité politique. C'est l'annonce de la réalité. D'une vérité que nous ne pouvons, ou nous ne voulons pas comprendre, puisque tout nous empêche de la porter à la lumière de notre raison.

C'est un livre effroyablement juste. L'horreur économique. Cette horreur qui depuis des dizaines d’années ne cesse d'avaler peu à peu notre intelligence, nos rêves, nos espoirs, et si silencieusement des millions de vies.

Et que celle ou celui qui se dit ouvertement heureux, bien content, serein, celle ou celui qui se voit comme l'animal de génie que porte ce siècle divin, que ceux là, ceux qui dorment repus, au chaud, contents, ceux qui méprisent, ceux qui rejettent, ceux qui acceptent consentent participent et s'extasient devant la dictature du profit et qui rampent au pied du grand autel du mérite, à ceux là : ce livre vous congédie.



La vérité est difficile à entendre et portant elle est tellement saine à comprendre.

Il faudra bien un jour faire face à l'absurdité d'un monde qui est entrain de nous dévorer. Et si nous n'y prenons pas garde , pourrait être le grand fossoyeur.

Imaginons.

Imaginons une planète qui durant des millénaires a vu son peuple se courber sous le poids des fardeaux, s'atteler aux charrues, pousser des wagons, ramper dans les fosses, travailler comme une bête pour pouvoir espérer survivre en passant chacun de ses hivers.

Imaginez ce peuple, si peu fait pour habiter cette planète, employer son cerveau à inventer des machines capables de le décharger de sa peine.

Imaginez ces machines travaillant à la place de ce peuple, le déchargeant de son état de bête de somme.

Un peuple qui aurait pu voir devant lui pour la première fois de son histoire se dresser un espoir.

Mais le peuple na pas pensé au pouvoir des machines, et n'a pas pris garde à qui elle donnait le pouvoir de commander aux machines.

Plus de machines, moins de travail. Plus de temps libre...

Moins de peine, davantage de place pour la vie ?..

Mais le peuple n'avait pas compris.

Pas compris qu'avec leurs machines ces hommes allaient leur voler le droit de survie en faisant beaucoup et énormément de profit.

Et que ces hommes allaient peu à peu créer un empire monstrueux qui viendrait coloniser avec férocité et sauvagerie tout le village du peuple.

L'empire fut industriel et puis très vite il devint financier.

S'auto-alimentant lui même tout en imposant son droit, ses règles, et toute la cruauté de son jeu.

Et plus les machines devenaient et plus le travail disparaissait.

Et plus le travail disparaissait plus le peuple se devait d'en trouver.

La place du peuple devenait chère, de plus en plus rare, de plus en plus chère.

Un peu ici, beaucoup là bas,

un peu plus ici …

et davantage là bas.

Et puis un jour cela fut partout.

Un ordre qui marche ne se désavoue pas.

Un ordre de marche, une course folle au profit, qui ne dit pas son nom .

Qui ne se prononce pas, qui ne se dit pas.

Le désemploi.

Les hommes des machines enseignèrent et imposèrent au village un seul mot : Chômage....



Ce livre vous dira l'histoire de ce peuple, et le visage de ceux qui imposèrent la terreur au village.



Il fallait bien plus que de l'audace pour écrire ce livre, il fallait de l'intelligence et du courage, pour venir nous rappeler la réalité des faits qui se sont peu à peu imposés à nous.

Pour nous dire que nous sommes colonisés par un empire financier qui nous fait croire que les emplois reviendront, alors qu'ils ne reviendront JAMAIS.



Pour dire, qu'à force de nous répéter, de nous faire entendre que ceux qui n'en ont plus sont des charges et des parias, il nous vient méchamment dans l'idée qu'ils nous sont inutiles et qu'à ce titre on risque de donner bêtement bonne conscience à tous les crimes. Et d'oublier que chaque jour un peu plus nous avançons dans la file de ceux qui se verront sacrifiés au seul profit des maîtres de l'Empire.

Et que plutôt que de nous laisser voir les faits, de nous laisser libres d'y réfléchir, on nous gave de mensonges, de promesses, et d'illusions. Et qu'on nous prive de la seule possibilité qu'il nous reste : concevoir une autre façon de vivre.



Ce livre ne nous donne pas de solution. Les solutions sont celles que nous souhaiterons voir s’inscrire sur le visage de notre avenir. C'est à chacun d'entre nous de dessiner son futur.



Mais ce livre est un début, juste la tentative d'un éveil de notre conscience.

Pour que nous nous rendions compte dans quelle gueule d'empire nous nous sommes livrés, et dans quel infernal merdier on nous a laissés tomber si bas.



Publié en 1996, ce livre pourrait être écrit demain matin.



Reste à savoir combien seront encore là pour le lire.



Ce livre est basé sur des faits réels.



Astrid Shriqui Garain

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L'horreur économique

Il y a bientôt vingt ans, Viviane Forrester jetait ce pavé dans la mare si calme de ce désespoir annoncé," l'ensemble des êtres humains est de moins en moins nécessaire au petit nombre qui façonne l'économie et détient le pouvoir".

Force est de constater que son discours était juste et même en deça de la situation actuelle. Son livre avait fait grand bruit à l'époque et paraissait bien trop futuriste mais hélas ces vingts dernières années ont démontré le contraire. Vivianne Forrester, dans cet ouvrage économique très bien documenté et très abordable, dénonce comment les politiques successives ont caché au plus grand nombre le désastre que nous subissons de nos jours.
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Virginia Woolf

Depuis ma rencontre avec Virginia Woolf grâce à la lecture d'Une chambre à soi, j'ai pour elle une attirance que je n'arrive pas toujours à expliquer, même à moi-même. J'ai lu plusieurs de ses livres (et il m'en reste encore à découvrir) et à chaque fois c'est une admiration pour l'écriture, sa beauté, sa précision et la recherche du mot juste et également un univers très différent dans chacun de ses récits même si on y retrouve toujours un petit "parfum" commun..... 



Alors je me faisais une joie d'avoir sur mes étagères cette bibliographie de Viviane Forrester que l'on m'avait vivement conseillée, que j'avais trouvé dans un désherbage de bibliothèque et j'en ressors très partagée.



En effet sur le fond j'ai découvert des facettes de cette écrivaine auxquelles je ne m'attendais pas (et là l'auteure n'y est pour rien) comme sa haine des juifs et quel couple elle formait avec son mari, Leonard, qui, même si je savais que le couple avait une relation assez particulière, faite de respect, d'amitié mais pas forcément d'amour dans tous les sens du terme, j'ai trouvé cette partie de l'ouvrage assez violente et à charge. Certes elle dévoile un Leonard assez sombre, menteur et manipulateur dès le début de leur mariage et il y sûrement une part de colère de la part de Viviane Forrester devant l'injustice faite à l'écrivaine anglaise et  pour rétablir les faits avec force arguments. On se demande d'ailleurs comment le couple a pu rester soudé pendant plus de 20 ans.



Mais finalement il s'agissait plus d'un mariage de raison pour les deux parties plus que d'amour. Viviane Forrester débute sa biographie avec ces points capitaux pour elle et qui auraient en partie jouer dans le mal-être et peut-être son suicide de l'écrivaine (entre autres).



Viviane Forrester retrace ensuite son enfance marquée par les deuils successifs, les agressions sexuelles, puis sa vie dans le groupe de Bloomsbury où elle a sûrement passé ses plus belles années  laissant libre cours à sa créativité, son originalité, à son humour et ses relations amicales avant de rentrer dans le rang en se mariant. Elle termine son ouvrage en évoquant une autre piste sur les raisons de son suicide.



Venons-en à la forme du récit ...... J'ai eu beaucoup de mal avec l'écriture de Viviane Forrester. Une écriture alternant les styles, parfois fluide, parfois plus "hachée" avec laquelle elle fait de nombreux aller-retours qui peuvent être nécessaires pour comprendre les implications psychologiques de certains événements dans la vie et l'œuvre de Virginia Woolf, des redites nombreuses sur certains faits, certes importants mais qui alourdissent la lecture. J'ai aimé découvrir tout ce qu'il y a de personnel dans certaines de ses romans comme Vers le phare  mais aussi Orlando, Mrs Dalloway ou Trois Guinées, les romans que j'ai lus jusqu'à maintenant.



Une écriture à charge, violente parfois dans le comportement de Leonard, sur la manière dont il entourait sa femme, assurant la protéger mais lui ôtant toute autonomie et liberté. J'avais déjà eu des soupçons sur son rôle à travers le Journal d'un écrivain, car légataire de son œuvre, il a créé un mythe et a laissé que ce qu'il souhaita qu'il restât, ayant sélectionné ce qu'il voulait qu'on sache, de savoir qui était vraiment Virginia Woolf.



Ici la biographe "casse" l'image que l'on peut avoir du couple, du tempérament de chacun, de ses réactions et comment Leonard à soumis son épouse, les blessures morales ou psychologiques infligées à celle-ci et comment l'image que l'on attribue à cette écrivaine peut être tout autre, surtout quand on évoque ses amitiés et sa vie au sein de groupe de Bloomsbury. 



Pour résumer j'ai trouvé parfois que l'ensemble était brouillon, me perdant dans les relations amicales, extra-conjugales certes très nombreuses et parfois collatérales entre les couples, ami(e)s et autres. Ayant déjà lu beaucoup sur elle, j'en connaissais beaucoup comme la complicité qui unissait Virginia à sa sœur Vanessa, teintée parfois de jalousie et de non-dits.



Qui était Virginia vraiment ? Des suppositions, des pistes, mais une femme dont on connaîtra peut-être jamais la vraie personnalité, ses troubles et surtout leurs origines et comment ne pas penser que toute personne ayant traversé de telles épreuves en ressorte indemne. Folie, peur, mélancolie finalement peut-être un peu de tout cela mais cela ne m'empêche pas de lui garder toute mon admiration, comme d'ailleurs Viviane Forrester, pour la qualité de son écriture, ses combats (le féminisme en autres) et également pour la femme qui se cachait derrière ce visage mélancolique mais qui a été également une femme forte de ses convictions, de ses choix amoureux et littéraires.
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Une étrange dictature

Viviane Forrester ne nous amuse plus ! Quatre ans après le stupéfiant succès de "L’horreur économique", elle reprend sa paranoïaque croisade antilibérale. Critique littéraire au Monde, membre du jury Femina, romancière, biographe de Virginia Wolff et de Van Gogh, Viviane Forrester n’est pas économiste et s’en fait fort. Comme en témoigne l’absence désarmante de toute bibliographie, de toute utilisation, horresco referens, aux travaux des économistes et des sociologues, qui ont réfléchi depuis vingt ans à la société post-industrielle et à la fin du travail, Viviane Forrester, qui s’auto-proclame le porte-drapeau d’une majorité silencieuse et opprimée, nourrit sa réflexion de la lecture des pages saumon du Figaro (p. 123) et des émissions du dimanche matin de Radio Notre-Dame (p. 85). Aux critiques maniaquement pointilleuses qui lui reprocheront de confondre les millions et les milliards de francs (p. 12), de prétendre que Rhône-Poulenc a fusionné avec Axa (p. 66) ou que Nelson Mandela a connu les geôles de l’apartheid pendant 28 et non 18 ans (p. 221), cette auteur exaltée a par avance répondu qu’elle refusait «de tripoter, sous le contrôle de ceux qui les exploitent, les données dépassées qu’ils mettent en avant et de jouer ainsi avec eux le jeu que l’on combat» (p. 27). Façon «stalinienne», s’il en est, d’interdire le débat avec le régime «d’ordre stalinien» (p. 21) qu’elle dénonce pourtant.



Si l’on en croit Madame Forrester, l’idéologie ultra libérale aurait réussi a instaurer une étrange dictature. Faisant de la globalisation la cause inéluctable de son règne, ce «discours dictatorial» (p. 21) agit dans l’ombre. Il ne cherche pas à prendre le pouvoir, mais à avoir tout pouvoir sur ceux qui le détiennent. Il repousse, nous dit Viviane Forrester, ses opposants aux marges de l’intelligence : «quiconque n’admet pas l’économie de marché comme modèle unique de société, comme définition même de la démocratie, est un autiste retardataire doublé d’un excité dangereux» (p. 51). D’ailleurs, l’auteur de cette note de lecture, en poursuivant de sa vindicte la courageuse Madame Forrester, qui s’assigne de «refuser d’être dupe ... [de] déceler l’imposture, [de] résister à la complicité» (p. 49), n’est-il pas l’allié inconscient et manipulé de ce «régime mortifère» (p. 197) et de «ses points de vue monomaniaques, obsessionnels, que diffusent ses propagandes» (p. 214) ? Là encore, en discréditant à l’avance la critique, Viviane Forrester clôt l’espace démocratique qu’elle prétend réhabiliter.



L’objet de sa révolte est celui-même contre lequel elle avait déjà pris les armes en 1996, dans son style inimitable : une «économie de casino, indifférente aux actifs réels» (p. 22), une «pseudo-économie basée sur des produits sans réalité, qu’elle invente en fonction du jeu spéculatif, lui-même clivé de tout actif réel, de toute production tangible» (p. 23), une «économie hystérique, inopérante, fondée sur du vent, à des années-lumière de la société et, par là, de l’économie réelle» (p. 23). La phrase est belle ; elle a du souffle ; mais a-t-elle un sens ? L’économie boursière que Viviane Forrester voue aux gémonies n’est pas toute l’économie. Notre brillante pamphlétaire se soucie-t-elle de savoir que la vie économique, en France comme dans tous les pays de l’OCDE, c’est à la fois des petits entrepreneurs, dans l’agriculture, l’industrie ou le tertiaire, et des services publics qui n’ont que faire de la Bourse et de ses «produits dérivés» (lesquels au demeurant facilitent le financement des entreprises cotées, et, partant, leur croissance et l’emploi ; car on ne sache pas qu’une entreprise qui s’ouvre de nouveaux marchés n’ait pas besoin peu ou prou d’embaucher pour servir ses nouveaux clients) ?

Cette «économie de casino» nous dit Viviane Forrester, ne crée pas d’emploi. Pire, elle n’en a plus besoin. D’ailleurs, cette main d’oeuvre excédentaire, dont l’ultra-libéralisme ne sait que faire, sera demain «parquée ... dans des réserves ou des camps» (p. 81), avant après-demain d’être tout bonnement liquidée (p. 47).



Le propos de Viviane Forrester devient illogique sinon confus lorsqu’elle aborde la question de la fin du travail. D’un côté, elle s’insurge - et comment ne pas la suivre sur ce terrain - d’un système économique qui n’offre pas à tous un travail, alors même que le travail, aujourd’hui, socialise et dignifie. Mais, dans le même temps, elle n’a pas de mots assez durs, pour les «petits boulots» et autres «emplois placebo» (p. 99) que la collectivité offre à nos jeunes privés d’avenir.

De deux choses l’une, a-t-on envie de lui répondre. Soit il faut faire son deuil du plein emploi et apprendre à vivre durablement avec un fort volant de chômage. Chômage dont il faut s’accommoder et surtout gommer le caractère stigmatisant. Et Viviane Forrester n’a pas tort de clamer que «si la dignité d’un homme ou d’une femme dépendait du fait d’occuper ou non un emploi, elle n’aurait pas grande valeur» (pp. 83-84). Soit, l’on refuse un système à deux vitesses, où l’emploi devient l’apanage d’une élite, où le chômage, la marginalisation et l’oisiveté humiliante deviennent le lot commun de tous ceux dont notre économie ne veulent plus. Et alors, si l’on est un tant soit peu cohérent - ce dont Viviane Forrester ne s’embarrasse manifestement pas - on ne répugne pas aux petits boulots, fussent-ils mal payés, aux emplois placebos qui certes réduisent, artificiellement, les chiffres du chômage. Mais qui ont une autre vertu, ô combien bénéfique : grâce à eux, des populations fragilisées, victimes d’une formation inadaptée, retrouvent pied dans le monde du travail et se donnent les moyens de postuler demain à un emploi plus stimulant et mieux rémunéré. A trop critiquer, comme le fait Viviane Forrester, les emplois McDo aux États-Unis ou la politique française d’allégement du coût du travail, on oublie que ces postes faiblement rémunérés constituent - les chiffres le montrent - un marche-pied vers l’emploi pour des populations qui, à défaut, se verraient irrémédiablement marginalisées. Si l’on refuse la société à deux vitesses (et nous ne doutons pas que Viviane Forrester la refuse), il n’y a pas d’alternative ... est-ce être intoxiqué par la Pensée unique dominante que de le dire ?





Le problème du pamphlet de Viviane Forrester est qu’il s’épuise en une stérile diatribe. Il critique, mais ne propose rien. Il détruit vainement, mais ne construit pas. L’auteur le reconnaît bien volontiers. Pour elle, la priorité est au refus de l’horreur économique. L’heure n’est pas à la «proposition d’un autre modèle, d’un kit de remplacement» (p. 213). Et à ceux qui, d’aventure, lui reprocheraient la stérilité de sa thèse, Viviane Forrester dénonce par avance la «ruse» consistant à discréditer la critique dénuée de «solution de remplacement prête à l’usage» (p. 214). Qu’elle nous pardonne si, précisément, nous tirerons argument de son refus de se projeter dans l’avenir. Il nous semble, en effet, que son courroux, somme toute sympathique, contre un soi-disant complot ultra-libéral qui, au nom de la prospérité générale laisse encore trop d’individus au bord de la route, révèle son inanité dans son incapacité à proposer, fût-ce sommairement, une alternative.

C’est une chose de critiquer la «pensée unique libérale». Cette critique ne doit pas être considérée avec mépris. Qu’elle ait touchée, en 1996, un lectorat nombreux, que rebutait la littérature économique, est révélateur d’un malaise. Mais c’en est une autre de proposer, positivement, un meilleur système. En y échouant, Viviane Forrester révèle la faillite de sa tentative.
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L'horreur économique

Sur le fond, Vivianne Forrester fait un constat très juste et dont on parle trop peu alors que c'est une tendance de fond depuis le début de la révolution industrielle : celui de la disparition du travail. Il est vrai que les progrès techniques, les gains de productivité, les techniques de management mais aussi le libre-service, tout cela nuît à l'emploi. Tout cela aurait mérité d'être développé. Au lieu de cela, l'auteur préfère s'étonner d'un paradoxe qui se comprend aisément. Si le travail est sur-valorisé c'est justement parce qu'il disparaît.



Dans la vision dépassée de Vivanne Forrester, le travail est présenté comme une souffrance or il est de moins en moins perçu comme une aliénation mais comme une dignité (pour les pauvres) ou un épanouissement (pour les bobos) . Il faut dire que sa nature même a changé (tertiarisation, économie de la création et de l'innovation).

Le travail est donc présenté comme un dogme, une obsession. Il reste une valeur importante de nos société mais les gens s'en libèrent peu à peu, il y a un engouement pour le temps libre, les loisirs. Cependant les gens ne se sont pas encore libérés de ce que pensent les autres, il reste important de « faire quelque chose de sa vie ».



Afin que les mentalités changent et qu'on évolue vers un autre modèle où on pourra enfin dissocier travail et revenu, il est important de lire ce pamphlet, véritable cri du coeur. Dans sa forme, ce court essai n'est certes pas très structuré ou argumenté mais son ambition est ailleurs, celle de montrer qu'on autre monde est possible, un monde où le travail salarié aurait une place moins centrale et où les êtres humains serait utile à autre chose qu'à produire et consommer.
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L'horreur économique

Cet essai publié en 1996 est d’une actualité étonnante. Si son auteure, disparue en 2013, vivait encore, elle ne pourrait constater qu’amèrement la justesse de son constat de l’époque.

Ce livre apporte un recul nécessaire et salutaire sur l’état catastrophique de la société dans laquelle nous sommes plongés, auquel, consciemment ou non, nous souscrivons. Ce constat porte principalement sur la disparition du travail. Le chômage, depuis les années 80/90 ne cesse de préoccuper nos élites politiques. Selon l’auteure, il ne s’agit là que de comédies. Si le chômage était conjoncturel (donc provisoire) depuis l’époque où Marx analysait les « crises capitalistes » jusqu’à la fin du XXème siècle, il est devenu, d’une part en raison des progrès techniques, d’autre part en raison des délocalisations, aujourd’hui irréversible (en tout cas en Occident, selon moi). Le plein emploi, c’est fini ! Il faut se mettre cela dans la tête. Les grandes sociétés licencient à tour de bras. L’inverse n’arrivera pas. C’est évident, on ne va pas démonter les machines qui ont remplacé des centaines de bras, comme non plus on ne va pas créer de l’emploi dans nos pays occidentaux, alors qu’une main d’œuvre servile et bon marché existe partout ailleurs ! Et ce, malgré toutes les gesticulations empressées de nos élites politiques et leurs vaines promesses !



Ce que souligne Viviane Forrester, c’est le désarmant paradoxe suivant : le travail disparait, mais le loisir n’augmente pas pour autant ! Tout se passe comme si plus l’on manque de travail, plus on le cherche ! Toutes les idées selon lequel le progrès technologique entraînerait nécessairement une vie plus libre, moins « aliénée » par le travail, est balayée par les faits. Le progrès technologique n’a jusqu’ici que mis à la porte des millions de vies, laissées sur le carreau, et ces laissés pour compte n’en profitent nullement, obsédés par le désir de retrouver un travail qui n’existe pas.



Tout cela remet en cause notre vision de la société, nos préjugés sur les chômeurs « assistés », sur les discours théâtralisés des politiques… Viviane Forrester porte un regard lucide sur l’état alarmant dans lequel notre société plonge tête baissée depuis deux ou trois décennies. Et ce regard lucide, c’est ce qui fait notre dignité, notre qualité d’être humain. Même si nous ne pouvons apporter de réponse à cette tragédie, il nous reste au moins cette dignité. Voilà ce que m’a appris ce livre.

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Virginia Woolf

Étonnante biographie qui nous permet de découvrir avec plus de justesse l'univers woolfien. Viviane Forrester revisite la légende sans reconstruire un mythe. Les gens heureux ne font pas d'histoire.. ...voici donc l'histoire de Virginia Woolf.



Astrid Shriqui Garain

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Van Gogh ou l'Enterrement dans les blés

Une analyse très poussée des différents facteurs qui ont pu conduire Van Gogh au suicide. Sa vie y est retracée avec détail, le parcours qui l'a mené à la peinture, sa vie affective très pauvre et bien sur la relation très étroite qu'il entretient avec son frère Théo.
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Virginia Woolf

Viviane Forrester s'était déjà penchée sur l'œuvre de V.W. dans sa préface de " Trois guinées " qui était très marquée par une féminisme assez radical des années 70. Cette biographie est plus " grand public ", le ton est plus mesuré, mais la fascination pour le personnage de Virginia Woolf est toujours là, avec un questionnement très intéressant sur la place réelle de Léonard dans la vie - mais surtout dans la construction de l'histoire officielle de Virginia. Forrester a l'avantage de connaître toute l'œuvre de Virginia et elle sait faire entrer en résonance ses livres et sa vie. Quelques bémols toutefois : des répétitions, une construction aléatoire (pas de chapitres, pas de notes, beaucoup de digressions), et une insistance un peu lourde sur l'inceste. Le lecteur, même averti sur le sujet, glane certaines informations peu connues et est amené à considérer la vie de Woolf sous un angle un peu différent. Sûrement la meilleure des biographies de Virginia Woolf en français : elle insiste notamment sur son travail d'éditrice, ce qui n'est pas le cas des biographies moins fouillées de A. Lemasson ou de A. Desarthe et G. Brisac.
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Virginia Woolf

Viviane Forrester ne craint pas la polémique et c'est ce qui fait la force de ses livres. La complexe personnalité de Virginia Woolf a largement imprégné tous ses livres. Sa souffrance s'immisce dans chaque phrase, dans chaque mot et je comprends que Viviane Forrester ait voulu la préserver et même la soigner mais pourquoi la déresponsabiliser à ce point ?! Son mari, Leonard Woolf, n'a certainement pas été un compagnon idéal mais de là à le rendre presque coupable de tous les maux de Virginia ne m'a pas vraiment convaincu. C'est cependant un point de vue exposé avec force et avec une argumentation solide et sans compromis. Certains passages sont restés illisibles pour moi. A lire par les grands admirateurs de Virginia Woolf pour ne pas dire par ses spécialistes.
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Ce soir, après la guerre

Viviane Forrester née Viviane Dreyfus aurait pu appeler son récit "Une femme se souvient" mais elle a choisi ce beau titre "Ce soir, après la guerre" qui est comme un étirement du temps entre le soir, moment court et précis dans une journée, et l'après-guerre qui représente un temps long et beaucoup plus vague dans sa durée.

Ce soir-là n'est donc pas comme les autres puisqu'elle se souvient de ce qu'est « être juif » pendant la deuxième guerre mondiale.

Sa famille est aisée et va se réfugier dans le sud de la France pour échapper aux rafles. Cela ne l'empêche pas de prendre conscience des arrestations de la Gestapo et des déportations de juifs dans les camps d'extermination.

Sans concession, elle dénonce le régime de Vichy voire la complaisance de certains proches et témoigne aussi de ce sentiment de culpabilité, celui d'être toujours en vie.

C'est aussi l'histoire d'une petite fille qui s'interroge sur Dieu et la religion : pourquoi les catholiques veulent la punir alors qu'elle n'a rien fait?

Le sujet ne manque donc pas d'intérêt mais la construction du texte m'a parfois semblé désordonné, peut être comme les pensées qui nous échappent quand on tente de se souvenir du passé.





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L'horreur économique

Une réflexion pertinente sur le « travail ».

L'auteur montre que le chômage, la pauvreté, sont acceptés, traités avec indifférence par la société. Pour elle, ce constat désespérant permettra seul, peut-être, de réagir et d'inventer une vie sans travail aliénant.
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L'horreur économique

Un pamphlet contre l'économie de marché ! Viviane Forrester fut parmi ceux qui ont été les premiers à dénoncer les dérives de l'économie néo-libérale, mais ça manque de profondeur d'analyse , de proposition alternative.
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L'horreur économique

Édifiant, dérangeant (dans le bon sens du terme) et, sans doute, prophétique.
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La promesse du pire

Le chiffre au détriment du nombre. Peu importe le nombre pourvu que s'établisse le chiffre.

Voilà peut être l'aspect le plus significatif de cette inversion de valeur qui nous oblige à interroger l'intelligence du résultat des opérations économiques mondiales.

La promesse du pire fait suite à l'horreur économique, précédent ouvrage de Viviane Forrester. Sommes nous encore aujourd’hui dans une logique capitaliste ?

Le pouvoir économique repose t il encore sur l'appropriation des matières premières et des outils de production ?

Le schéma est il toujours aussi simple ?

Technologie et mécanisation poussent peu à peu un cheptel humain vers l’obsolescence. Est elle programmée ?

Tel est le pire annoncé. Quels en sont les indices ? Peut être dans l'emploi des mots . La logique du « Plan social » efface le chaos du « licenciement ». « Le chiffre du chômage » : un indice , « le nombre de chômeurs » : une charge.

Qui peut comprendre aujourd'hui la virtualité des richesses?

L'effondrement d'un système a t il commencé ?

Crise, dette, crise de la dette, données inévitables?

Quel est donc la nature du buisson d'épines que nous dissimule la coupe franche des rameaux sacrifiés?

Foisonnement de question qui répondent à la multitude des problèmes que nous devons affronter, mais qui n'est rien comparé aux récifs qui nous attendent si nous ne nous interrogeons pas sur l'intelligence de ce que nous vivons.

La spéculation effrénée malmène la notion même de profit. Quant à la nature de son chiffre...c'est peut être sur cela que nous devons travailler avant que notre nombre ne soit effacé.



« L'univers est un coffre-fort dont l'humanité cherche le chiffre. » Mythologies -Roland Barthes



Astrid Shriqui Garain
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Van Gogh ou l'Enterrement dans les blés



Biographie très poussée du peintre dans laquelle la psychologie et la psychanalyse ont largement leur place.

Vincent van Gogh est né un an jour pour jour après un frère aîné mort-né, qui portait le même nom. L'auteure voit dans cet élément une explication possible du tourment dans lequel le peintre a vécu.

On découvre la relation du peintre avec ses parents, son frère mais aussi ses « confrères ».

On y voit un homme mal aimé (ou qui se ressent comme tel), tourmenté, en tout cas, il pense souvent ne pas être à sa place. Sa passion pour la peinture, sa solitude et sa misère le conduiront à la folie.

Ce livre est bien documenté.

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Virginia Woolf

Dans cet ouvrage collectif, des écrivains mais aussi des universitaires se proposent de revenir sur la vie et l’œuvre de Virginia Woolf. Publié aux éditions du Magazine Littéraire, ce livre revient sur des éléments biographiques précis mais contient aussi des analyses d’œuvres écrites par Virginia à travers 24 articles.



L’ouvrage se divise en 3 grandes catégories: la vie de Virginia, son ancrage dans son époque, l’analyse de ses œuvres. Si la dernière partie est peut-être la plus difficile à saisir parce qu’il faut avoir lu les livres de Virginia, les deux premières sont passionnantes. En effet, chaque écrivain ou universitaire donne son point de vue, son analyse sur ce qui a été dit de Virginia.



Dans la première partie, consacrée à sa vie, les auteurs de l’article s’appesantissent tour à tour sur son enfance, ses débuts dans la vie littéraire, sa vie de femme et son suicide. Virginia est née dans une famille nombreuse. Elle perd sa mère à l’âge de 13 ans et fait une première dépression. Elle est élevée par un père qui lui laisse accès à sa bibliothèque et c’est grâce aux livres qu’elle dévore, qu’elle va se construire une pensée, une culture. Virginia et sa sœur Vanessa n’iront pas à l’université car celle-ci n’est autorisée qu’aux hommes. Peu importe, Virginia est bien décidée à étudier, à se cultiver et surtout à écrire. Un peu plus tard, elle emménagera avec sa sœur et son frère Adrian à Londres. La chose est scandaleuse à l’époque car ils n’ont pas de chaperon! Ils fonderont un club où des peintres, des penseurs, des écrivains se réuniront pour parler d’art, de littérature et de sexualité! En effet, Virginia avait un esprit ouvert et curieux et sentait qu’il était de sa génération de faire changer les choses.



Plus tard, encouragée par son époux Léonard, elle se mettra à écrire et connaîtra le succès. Les deux époux fonderont la célèbre Hogarth Press, publieront T.S Eliot mais refuseront le Ulysse de Joyce!! Loin de l’image de la femme hystérique ou complètement folle que les médias ont peut-être parfois véhiculé, Virginia était une femme certes fragile et malade mais consciente de son état. Et c’est toujours consciente de la folie qui la guette qu’elle décide de se suicider dans la rivière Ouse en 1941.



Les auteurs des articles tissent chacun à leur manière une petite partie de la vie de Virginia et la font apparaître comme une femme fragile et forte à la fois, libre, entêtée mais surtout géniale! Elle a du génie dans son écriture, bien sûr, puisqu’elle invente une certaine manière de dire le monde. Elle a du génie dans la manière d’aborder les choses et de voir que la société anglaise se sclérose. Elle n’hésite pas à encourager l’impressionnisme, à prendre partie pour l’éducation des femmes. La deuxième partie du livre nous offre la vision d’une femme moderne, curieuse de tout.



La dernière partie de l’ouvrage s’intéresse aux ouvrages de Virginia Woolf. Les articles rendent hommage à son talent, à son génie mais m’ont apparu parfois obscurs et trop techniques. Le jargon universitaire de certains auteurs est employé à toutes les sauces et rendent parfois les propos incompréhensibles.



Cette étude sur Virginia Woolf reste cependant très intéressante et stimulante. A noter en fin d’ouvrage, une biographie synthétique mais très fidèle et une bibliographie très enrichie.



Pour en savoir plus, je vous conseille la lecture de la superbe biographie sur Virginia Woolf écrite par Viviane Forrester que j’ai d’ailleurs chroniquée.
Lien : http://carolivre.wordpress.c..
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La promesse du pire

« D’où vient cette impression de nous débattre incrustés dans un état de fait inerte, d’être comme écrasés sous un enchevêtrement de faits accomplis, agglomérés sans appel depuis la nuit des temps, d’être comme consignés dans une structure économique échafaudée de telle sorte qu’en supprimer, en déplacer la moindre pièce ou même en frôler le socle ferait tout s’effondrer - et nous sous les décombres ? » Telle est la question qui aurait pu donner lieu au second volet, plus de vingt ans passés, du bestseller de Viviane Forrester, « L’horreur économique ».

Malheureusement, elle nous aura quitté trop tôt et laissé un travail inachevé. Ce petit livre avait l’ambition, encore une fois et comme elle a su si bien le faire auparavant, de pointer les contradictions d’un système qui a la capacité de se renouveler au fur et à mesure des crises qui le traversent.

Même sous la forme d’un « manifeste politique », Viviane Forrester arrive à démonter ces « jeux de substitution » qui ne font même plus réagir les syndicats, les salariés et la gauche. Comment peuvent-ils eux-même les utiliser dans leur langage ? s'indigne l'auteure. A ce propos, l’exemple de la transformation lexicale du licenciement en « plan social » est lumineuse. Il faut lire les pages 36 à 39 sur ce glissement sémantique; cette forme sournoise d’acceptation des rapports de domination. Et on le sait depuis Pierre Bourdieu, la domination est à son paroxysme lorsqu’elle est intériorisée. N’est-ce pas là le pouvoir le plus insaisissable du capitalisme ?
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Van Gogh ou l'Enterrement dans les blés

Je ne garde pas un très bon souvenir de ce livre alors qu'habituellement je m'intéresse à la psychologie et la psychanalyse. J'étais peut-être trop jeune ? J'ai le souvenir d'un texte larmoyant et qui n'en finissait pas mais je suis une piètre lectrice et de surcroit difficile dans mes goûts. C'est la 1ère bio du peintre que j'ai lue (jusqu'à la fin ? je ne sais plus) et depuis j'en ai lu d'autres que je recommande plus chaudement. Toutefois la vie de Van Gogh est tellement intéressante et atypique que je recommande également la lecture de ce livre car le sujet est inépuisable.
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