Ce qu'il y a de marrant avec le courage, c'est que ce sont toujours ceux qui risquent le moins qui en parlent le plus.
(…) le superficiel est parfois indispensable. Si on ne s’occupe plus que du nécessaire, on ne sait plus comment s’émerveiller et on n’a plus rien à espérer. (Charly)
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- Mais comment tu fais, June ? Tu viens à peine d’arriver, tu as déjà un travail mieux payé que nous deux réunis et, comme si ça suffisait pas, tu as des idées affreuses pour tous nous faire punir !
- Oui, c’est June ! s’esclaffa Charly.
La vraie gentillesse, ça demande du courage. Ça n’est pas de ne pas faire de vagues, ça n’est pas de respecter les règles, en tout cas je ne crois pas. Faire ce qui est bien, je crois que ça demande de se salir un peu, des fois. Alors, aujourd’hui, c’est ce que je fais. (Dodeline)
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Il paraît qu'avant toutes les grandes batailles, le plus insupportable, c'est l'attente. Une espèce de guerre des nerfs qui vous vrille la cervelle. Il faut alors s'astreindre au calme et attendre.
Dans le sud de la France, le mois de novembre arrivait chaque année en défonçant la porte. C'est-à-dire que tout le monde se promenait en manches courtes, jusqu'au jour où le mistral débarquait de sa lointaine Sibérie, posait d'un coup ses valises et chatouillait les gens sous leurs vêtements avec ses doigts venteux et indésirables. À ce moment, malgré l'insolent ciel bleu, il fallait multiplier les pull-overs pour résister au froid.
Alors qu’il les couvait d’un regard, un chant puissant s’éleva des gradins :
- SAINT-FOU ! SAINT-FOU ! SAINT-FOU !
ON VA VOUS PÉTER LE COU !
AHOUUUUUUU !
Charly leva les yeux au ciel, les oreilles en souffrances
- Mais pourquoi ? geignit-il.
- T’aime bien, au fait ? demanda June fièrement. C’est moi qui est écrit les paroles !
- Jeune fille, si vous gagnez cette partie, je vous confie l’entretien de mes licornes !
- C’est bien payé au moins ?
- Outrageusement.
- Alors je veux le double.
- Par les quatre sabbats, vous êtes dure en affaires !
- Et en plus, vous avez aucune chance : je triche mieux que vous !
- Le premier niveau, c’est peau d’balle ! rebondit Karib. C’est le coup de semonce, quoi.
- Ouais, c’est clair que Dunkel est pas le type le plus agréable du monde pour passer une nuit blanche, mais bon, ça va, ajouta Silas. Par contre, le deuxième niveau… -Le deuxième niveau, il te fait faire trois tours du lac pendant la nuit, dit Karib. À la nage, évidemment. D’après notre cher directeur, ça forge le caractère et ça fortifie le corps. Charly tourna un visage sceptique vers Karib qui avait gardé une respiration sifflante depuis son retour au petit jour, complètement trempé. - Tu avais mis toute la nuit à faire trois tours ? lui demanda t-il étonné. - Je sais pas nager, d’accord ? J’ai dû faire tout le trajet à la berge, j’ai cru que j’allais crever de froid. Et heureusement, la Bouillonne m’a tiré avec un bâton pour le dernier tour, sinon je serais mort, noyé là-bas.
– Ouais, c’est pas de la rigolade, admit Panus, mais le vrai problème, c’est le troisième niveau.
– Le troisième niveau, le directeur de coupe une phalange, souffla Klafidie.
–Et la donne à bouffer à Dunkel, vu que les croquemitaines adorent les doigts, ajouta Silas.
- Vous blaguez, j’espère ? s’alarmaCharly.
C’est carrément de la torture !
- Non, mais ça non plus, c’est pas le problème en soi, poursuivit Panus. Le dirlo fait ça très bien. C’est sans douleur et il t’applique un sortilège cicatrisant en même temps. Le problème, c’est qu’après, il te manque une phalange.
- Et du coup, tu peux plus jeter de sortilèges ! ricana franchement Thorus.
Vous aurez droit à deux moires par mois, pas plus, dit-il avec délectation. Voilà qui devrait museler vos ardeurs délinquantes.