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EAN : 9782955811603
326 pages
La favorite (01/06/2017)
3/5   1 notes
Résumé :
Célibataire de longue date, Jean-Philippe Badin rêve du grand amour, celui dont on parle dans les livres. Mais voilà, cette utopie n'en est plus une lorsqu'il la rencontre Elle, cette jeune femme à la beauté surnaturelle, au regard si pénétrant et... à la parole absente... Après tout, peut-être n'est-elle qu'un songe ? Mais Jean-Philippe s'en moque car pour la première fois de sa vie il est heureux. Hélas, à peine a-t-il goûté à ce bonheur tout neuf qu'Elle se volat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Quand on fait la connaissance du narrateur de ce roman, on découvre un personnage qui ne respire franchement pas la joie de vivre. Jean-Philippe Badin, trentenaire qui bosse comme bibliothécaire, vit au coeur du quartier de Fourvière à Lyon. Célibataire avec peu ou pas d'amis, il est très introverti depuis la mort de son père lorsqu'il avait 10 ans et porte un regard sévère sur lui-même et le monde qui l'entoure.

Et pourtant, il voudrait bien vivre le grand amour ! Mais comment imaginer qu'une femme s'intéresse à lui alors que lui-même se juge si peu intéressant... Il passe alors ses après-midis libres à flâner dans ces vieux quartiers lyonnais qu'il affectionne, et à rêver...

Survient cependant ce sentiment d'être suivi. Les lieux sont identiques, et pourtant différents. Est-ce son imaginaire qui le travaille ou se passe-t-il quelque chose ? Après tout, l'architecture et les recoins des ruelles de ce vieux quartier sont propices à l'imagination pour qui est un peu rêveur comme lui...

Le doute s'efface lorsqu'Elle se présente à lui. Cette jeune femme à la beauté exceptionnelle l'envoute chaque soir, et ils vivent une passion sulfureuse jusqu'au matin, s'évaporant alors tel un songe merveilleux. Rêve ou réalité ? Qu'importe tant que l'ivresse est là, se dit Jean-Philippe...

Sauf que lorsqu'elle ne revient plus, notre narrateur est affolé et désespéré. Il ne cesse alors de la chercher. Introuvable, il envisage même une explication paranormale et oriente ses recherches en ce sens...

A travers les yeux de notre narrateur, l'auteur Jérôme Ancey va nous balader au coeur de ce quartier de Lyon, mais aussi dans les ruelles étroites et secrètes de Crest dans la Drôme, et jusqu'à Taipei, capitale de Taïwan, dont on découvrira aussi bien les jardins luxuriants, les marchés nocturnes que des lieux plus «privés» proposant exotisme et luxure.
Parcours initiatique pour le J-P, on s'interroge comme lui tout au long de ce périple. Est-on dans le réel, l'onirique ou le fantastique ? Il faudra aller au bout de cette lecture pour se faire une idée...

A noter que l'éditeur propose sur son site des documents et photographies relatifs à l'histoire. Prolongement intéressant car les photographies sont très belles, mais à ne consulter qu'une fois la lecture achevée car trop explicite sur le dénouement du roman.
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On entre l'air de rien dans ce roman. Comme on pousse une porte entrebâillée. Et sans y prendre garde, on a tourné la dernière page... Entre temps, l'auteur nous a fait déambuler dans une ville et dans une âme (ou l'inverse ?).
Que dire de plus que : j'ai aimé ce livre du début à la fin ; aimé me laisser conduire par l'auteur, avec cette écriture à la fois minutieuse et souple. Ce livre a pris une place de choix dans ma bibliothèque, et je l'offre à chaque occasion.
En bref, un vrai coup de coeur par surprise, comme on aimerait en avoir tous les jours. Et le petit plus, c'est le pousse café : la virée qui se prolonge online.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Il sentit alors un poids sur sa poitrine, puis un visage s’approcha tout près du sien. Il sursauta. Penchée au-dessus de lui, une superbe jeune femme l’observait. Ses cheveux roux, finement bouclés, pendaient de part et d’autre de son visage et lui donnaient un air de madone. Elle était tellement proche qu’il respira son souffle. Il eut l’impression d’être un noyé qu’on ramenait à la vie en lui insufflant de l’air. Hypnotisé par cette beauté surnaturelle, il plongea son regard dans le sien. Ses yeux, d’un noir d’onyx, étaient d’une profondeur insondable et sans limite. Il tenta d’y déceler des secrets mais n’y vit que son propre reflet. Ses lèvres, quant à elles, étaient d’une volupté diabolique et semblaient deux cerises tout juste mûres. Elles étaient une invitation au baiser, une incitation au péché. La férocité animale qui émanait d’elle contrastait avec l’innocente pureté de sa virginale figure, car bien qu’elle eût tous les attraits de la Vierge, sa sensualité démoniaque en faisait une vierge tentatrice, une vierge noire.
(P73)
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Elle était belle. Ses yeux, fermés, ne laissaient transparaître aucune inquiétude ou terreur. A la voir ainsi, on aurait pu penser qu’elle dormait. De grands cheveux noirs et soyeux s’étendaient sous sa tête et lui tenaient lieu d’oreiller. Il s’imagina passer ses doigts dans sa toison. Sa bouche, d’où ne sortirait plus aucun soupir, était légèrement ouverte. Ses lèvres, sans vie, étaient d’un rose pâle mortel. Elles étaient une invitation au baiser. S’il l’avait pu, il l’aurait embrasser. Il regardait son cou veiné de bleu lorsqu’il eut l’impression de voir sa gorge se contracter. Elle venait de déglutir. Il recula. C’était impossible, c’était un mannequin de cire. Autour de lui, personne ne paraissait avoir rien vu. Il revint près de la vitre. Elle était là, immobile, figée dans sa non vie puisque n’ayant jamais vécu. Il se massa la tempe en la regardant. Il avait dû rêver.
(P53)
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Des hordes de mères venaient chercher leur progéniture. Telles des zombies, elles se dirigeaient vers l'école en une longue marche mécanique et maladroite. Elles poussaient des poussettes comme un bousier roule une boule d'excréments. (...) Ces femmes étaient épuisées. La plupart du temps, elles tenaient d'une main la poussette et de l'autre un enfant assez grand pour pouvoir marcher tout seul. D'autres encore, de nouveau enceintes, voyaient leur dos se courber sous le poids du prochain arrivant.
(P42)
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Elles n’étaient plus des femmes, elles étaient des mères. Ce rôle-là serait le dernier de leur vie. Leur place sociale était acquise mais à quel prix. Leurs enfants étaient leur joie de vivre, leur raison d’être. Pour Jean-Philippe, elles étaient des «femmes-piège», des créatures qui avaient su se faire désirables juste le temps de se faire engrosser et de pondre leur oeuf, but ultime de leur existence. Et pourtant, secrètement, plus d’une regrettait l’esclavage volontaire dans lequel elle s’était enfermée. Plus rien n’y pouvait faire, même au fond du pot de Nutella, il n’y avait pas d’issue.
(P43)
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Leurs fesses étaient grosses et leurs yeux fatigués. Extirpées de leur sommeil par les hurlements stridents du nourrisson qui réclame sa pitance, elles avaient des nuits courtes et des journées interminables. Tout leur corps était las. Mal habillées et négligées, on pouvait deviner sous leurs habits la peau flasque de leur ventre distendue par les grossesses successives. Des plis de chair morte coincés entre le soutien-gorge et l’aisselle les empêchaient de plaquer les bras le long du corps, et des mamelles pendantes supportaient des tétins meurtris par les succions incessantes d’insatiables poupons. Leurs cheveux étaient gras, mal peignés, et leur maquillage, pour celles qui en avaient, était grossier et fait à la hâte.
(P42-43)
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