Janvier 1998, le Québec fait face à une crise, le verglas emprisonne les protagonistes dans un huis clos explosif, des secrets minent les relations familiales et l'auteur a du talent pour créer l'intensité dramatique.
Malgré tous ces bons ingrédients, pourquoi ça ne prend pas tout à fait ? Pourquoi suis-je un peu déçue ?
Comme un maquillage de théâtre semble exagéré en dehors de la scène, il me semble ici qu'on a parfois forcé la note, « on beurre épais » comme pourrait le dire un des personnages du roman. Les dialogues utilisent un langage québécois caricatural et on ne sait trop si les nombreux clichés se veulent humoristiques. C'est la même chose au niveau de l'action : « Arthur se leva en faisant reculer sa chaise de plusieurs mètres. »(p.191) On voit bien un Arthur très en colère et sa chaise… mais plusieurs mètres ?
Au contraire, loin de s'étendre en longueur, les descriptions et les enchaînements ne sont pas toujours explicites. On vient par exemple de dire qu'il n'y a plus d'eau, c'est la panique, mais le paragraphe suivant, Marie fait la vaisselle. Une telle articulation aurait peut-être mérité un éclaircissement sur la provenance de l'eau de vaisselle…
Finalement, c'est un rappel d'un moment très particulier, une saute d'humeur de l'hiver qui a marqué la vie des Québécois, mais ce petit roman qui se lit rapidement tient davantage du vaudeville que de la tragédie.
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J'y étais... en plein dans le triangle noir... j'ai manqué d'électricité pendant 1 mois et quelques jours. Heureusement que nous avions un petit poêle à la maison, sinon, nous aurions été obligé de se relocaliser ailleurs. Mais cela aurait été périlleux, étant donné la zone où nous nous trouvions... Des fils électriques qui pendent, des branches d'arbres partout, de la glace, de la glace et encore de la glace. C'est plutôt mes deux frères, leurs femmes et enfants et ma tante qui sont venus chez moi... Étrangement, je garde de cette période des souvenirs heureux... Des repas improvisés, des parties de cartes à la chandelle... Bref, une période heureuse... Pas comme les personnages de ce roman. Habitant un appartement sans électricité, ils décident de se rendre chez la mère de la femme. Il y a là aussi un frère auquel elle ne parle plus... Un huis-clos où tous les souvenirs seront racontés, mais surtout, où tous les secrets de famille seront dévoilés... Et pas des moindres. Anctil a bien réussi à décrire ce sentiment d'enfermement que la nature a créé par les chutes de verglas. Je me suis pris rapidement d'affection pour Jean, le fils du couple, qui se retrouve au milieu de ces affrontements et confrontations, et qui, sans le vouloir s'y retrouvera au centre. Une bonne lecture.
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J'ai beaucoup aimé ce roman. Il parle d'une catastrophe naturelle, l'une des plus grande du Canada, si ce n'est LA plus grande qui ait frappé le pays. Je me souviens encore de passages télévisés qui nous en parlait et nous montrait des images qui s'apparentait à des scènes d'apocalypse. Je n'étais pas directement touchée mais ce n'était vraiment pas loin de chez moi.
Le roman reprends cette catastrophe les faits énoncé sont bien documenté mais le récit n'est que fiction. Un huis clos familial, où personne n'est vraiment content de se côtoyer. Secrets, mensonges une belle histoire.
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Suspense bien maîtrisé. Écriture précise. Personnages forts.
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Il vociféra :
— Ostie de saint-ciboire de sacrament de saint-câlisse d’épais de tabarnak d’imbécile de junior de câlisse!
Il entra dans la cuisine telle une tornade, crachant ses sacres de rage, l’écume au bord des lèvres, les yeux injectés de sang, la moustache ruisselante, le front plissé et en sueur, le manteau entrouvert, le corps surchauffant dans un nuage de vapeur.
(p. 161)
La beauté d’Ève était fulgurante: elle était grande et mince, elle avait des cheveux brun café et des yeux d’un vert presque turquoise, océaniques, uniques. Elle était si belle que les gens se retournaient sur les trottoirs pour pouvoir l’observer quelques secondes de plus.
Passionnée de la langue française, elle récitait de longs passages des monologues de Sol et connaissait les Fables de La Fontaine par cœur. Les premières histoires qu’elle avait racontées à son unique petit-fils avaient été Le corbeau et le renard, Le rat de ville et le rat des champs ainsi que La cigale et la fourmi. Jean se souvenait de son éclat de rire qui suivait immanquablement les derniers vers de cette fable: «Vous chantiez? J’en suis fort aise: Eh bien! dansez maintenant.»
Il y avait peut-être là quelque chose de profond, une fierté d’avoir travaillé aussi intensément toutes ces années, d’avoir suffisamment amassé, comme la fourmi, pour pouvoir se bercer en toute tranquillité au soir de sa vie.
Enfant, Jean était fasciné par ces animaux qui parlaient si bien, alors que l’important pour Irène résidait dans la leçon de vie, la morale qu’elle tentait patiemment de lui expliquer.
Quand on est jeune, on se croit invincible. Y a rien de plus faux… C’est pas fin, fin de s’attaquer à une tempête; vaut mieux la contourner, la fuir, la déjouer, mais pas l’affronter de plain-pied…