Joe est un pianiste hors pair. Vous ne l'entendrez jamais dans une salle de concert. Il ne joue que dans les lieux de passage, gares ou aéroports. Il attend quelqu'un, celle qui lui a dit qu'elle le reconnaitrait, où qu'il soit, s'il jouait aussi bien que la première fois qu'il avait joué devant elle.
Juillet 1969 : Alors que l'homme marche sur la lune et que
Michael Collins tourne autour, disparaissant derrière sa face cachée 47 minutes à chaque révolution, Joseph, tombé brusquement malade deux mois plus tôt, arrive aux Confins. Sa maladie n'est pas contagieuse, elle est incurable : il est orphelin.
« Je partis pour un lieu dont vous n'avez jamais entendu parler, puisqu'il n'est pas sur Terre. Je partis pour un lieu dont vous n'entendrez jamais parler. Il est fermé depuis longtemps.
L'orphelinat Les Confins. Je dis fermé, mais chez certains, il saigne encore »
Un établissement sinistre, dirigé par un prêtre, tout de noir vêtu, aux cheveux teints en noir, à l'âme tout aussi noire, digne héritier des inquisiteurs, secondé par la Grenouille ancien légionnaire sadique.
Comment survivre dans un endroit pareil ? Il y a la Vigie, petit groupe qui se retrouve sur les toits le dimanche, pour respirer un air pur, non contaminé par la cruauté de ce lieu. Et il y a Rose, que Joseph aime d'abord détester, Rose avec qui il va découvrir l'amour :
« Je songeai à Mina, à ses vêtements trop grands, ses bras enfouis jusqu'aux coudes dans une bassine pleine d'eau de vaisselle ou dans le cul d'une oie qu'elle venait de plumer, à cette reine décolorée par la vie, le vent, la lumière. Non, elle n'était pas belle, pas comme Rose l'entendait.
- Elle est magnifique
Rose glissa dans mes bras. Je venais d'apprendre à parler à une femme. »
Dans ce récit poignant, l'auteur nous décrit le passage à l'âge adulte de Joseph, qui deviendra Joe. Un récit qui ne devient jamais larmoyant, où l'auteur sait parfois insuffler un trait d'humour, où son écriture poétique et si réaliste à la fois vient magnifier des existences prêtes à sombrer, où la lumière est toujours là malgré la noirceur du décor et des hommes
Je persiste et signe :
Jean-Baptiste Andréa est un grand.