Un petit livre idéologiquement orienté, on s'en doute aisément, mais c'est pleinement assumé.
Les auteurs rappellent d'ailleurs, dès le début, que c'est sur le terrain des idées qu'ils entendent se placer pour mener leur combat. Cet ouvrage poursuit deux buts : expliciter, de façon clair, les mécanismes et l'idéologie qui régissent le fonctionnement des IFI (Institutions Financières Internationales), principalement le FMI et la Banque Mondiale, et faire des propositions pour réformer ce fonctionnement.
J'avais trouvé "l'Empire de la Guerre Permanente", toujours publié chez Mille et une Nuit pour le compte d'Attac, et qui traitait de la politique étrangère des États-Unis, moins pertinent dans son approche car désireux de s'emparer d'un objet d'étude trop vaste pour un format si court et qui nécessitait une visée pluridisciplinaire plus marquée. Et puis, si on va par là, on pouvait tout aussi bien critiquer la politique extérieure de la Russie, de la Chine, de la France etc...
En revanche, en ce qui concerne les IFI, on sent l'association pro taxation des transactions financières davantage en terrain connu. De plus l'objet de la critique est objectivement plus aisé à remettre en cause. Le rappel du pourquoi les IFI, au lendemain de la seconde guerre mondiale (stabiliser les taux de change pour éviter les crises financières et financer la reconstruction) ne fait que mettre en perspective la dérive d'instruments qui se voulait au service de la paix et qui se sont retrouvés au service de l'idéologie néo libéral et, il faut bien le reconnaître, des puissances occidentales, en particulier les États-Unis. Le seul bémol est que le bouquin date de 2002, il aurait été intéressant d'intégrer l'arrivée de l'euro dans cette réflexion. Néanmoins, il reste d'une brûlante actualité lorsque l'on observe la situation en Grèce et les "ajustements structurels" que l'on impose à marche forcée.
En bref, un petit livre fort instructif, édifiant la plupart du temps et qui saura ouvrir le débat sur des questions fondamentales, en terme de modèle de société.
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L'expression "consensus de Washington" est née au début des années 1990, sous la plume de l'économiste britannique John Williamson. Elle désigne, et couronne, la doctrine néolibérale qui a été imposée par la communauté financière internationale aux pays en voie de développement pour les amener à s'ouvrir au processus de mondialisation libérale. Elle repose sur une série de principe, dont les plus importants sont :
-la discipline fiscale, c'est-à-dire l'équilibre budgétaire et la baisse des prélèvements fiscaux.
-la libéralisation financière, avec la fixation des taux d'intérêt par le marché et l'abandon des taux d'intérêt administrés en faveur des investissements prioritaires.
-la libéralisation commerciale avec la suppression des protections douanières
-l'ouverture totale des économies aux mouvements de capitaux et, en particulier, à l'investissement direct.
-la privatisation de l'ensemble des entreprises.
-la dérégulation, c'est-à-dire l'élimination de tous les obstacles à la concurrence.
-la protection légale des droits de propriété intellectuelle des multinationales
Ces deux institutions [Banque Mondiale et FMI], dites de Bretton Woods, se sont cependant progressivement éloignées des fonctions qui leur avaient été initialement attribuées : stabiliser les taux de change pour éviter le retour des désordres monétaires des années 1930 et financer la reconstruction à la suite de la guerre. Elles se sont muées, au fil des décennies, en des instruments à travers lesquels le capitalisme transnational impose aux pays dépendants et endettés ses préceptes d'organisation, que recouvre le terme d'"ajustement structurel".
L'ajustement structurel a été imposé comme une évidence aux élites internationales, aux gouvernements de la majorité des pays, avant de gagner les experts et les médias. Cette évidence repose à la fois sur une réalité et une supercherie. La réalité est qu'il faut bien s'attaquer aux déséquilibres ; la supercherie est de faire croire qu'il n'y a qu'une seule manière de rétablir les équilibres - l'ajustement au marché mondial - et une seule politique possible : l'ajustement structurel et la libéralisation complète.
Les États-Unis décident en 1971 de suspendre la convertibilité du dollar contre de l'or, et ils laissent flotter leur monnaie à partir de 1973 [...] Le dollar reste l'étalon du système monétaire international, que ce soit dans les réserves des banques centrales, dans la facturation du commerce international ou dans le libellé de la dette des pays en voie de développement. Mais, dorénavant, les États-Unis n'ont plus l'obligation de rembourser le dollar avec de l'or : c'est la porte ouverte à un endettement illimité des États-Unis, qui se poursuit jusqu'à ce jour.
Yacoub Bitocho (Attac au Bénin), au Forum social de Dakar .Yacoub Bitocho (Attac au Bénin), au Forum social mondial 2011 de Dakar (Nina Montagné).