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Une si longue lettre a été écrit en 1979. Ramatoulaye vient de perdre son mari. Obligée de rester chez elle, pour respecter la période de viduité de quatre mois et dix jours, selon le rite musulman, elle écrit à son amie d'enfance, Aïssatou, divorcée et qui travaille pour l'ambassade du Sénégal aux Etats-Unis. Dans ce court roman épistolaire, elle raconte et compare leur histoire.

Aïssatou, fille d'un forgeron, a épousé Mawdo, un médecin. Mais sa belle-mère ne peut supporter cette mésalliance et prépare sa vengeance. Elle élève alors Nabou, sa jeune nièce, la fille de son frère et la propose à son fils comme seconde épouse. Même s'il n'est pas d'accord, il cède au chantage de sa mère et Aïssatou quitte le domicile conjugal avec ses quatre enfants et part en France puis aux Etats-Unis.

Ramatoulaye a épousé Modou, qu'elle a rencontré dans des réunions politiques, alors qu'ils étaient étudiants. Contre l'avis de sa mère, qui lui affirmait qu' "une femme doit épouser l'homme qui l'aime mais point celui qu'elle aime ; c'est le secret d'un bonheur durable." Ils ont été mariés trente ans et ont eu douze enfants. Elle tient la maison et enseigne également. Elle découvre, le jour même du mariage, que son mari a pris comme seconde épouse une amie de leur fille aînée, Binetou, sous l'influence de sa mère. Modou va alors quitter la maison pour vivre avec elle. Ramatoulaye, qui a fait le choix de rester pour ses enfants, vit d'une manière indépendante, va seule au cinéma et apprend à conduire.

Après la mort de son mari, plusieurs hommes proposent de l'épouser, mais elle les refuse. Même si Daouda, ancien prétendant et favori de sa mère, et avec qui elle discute avec plaisir de politique, semble un choix raisonnable, elle ne veut pas être pour son épouse Aminata, celle qui détruira leur couple, comme elle l'a expérimenté elle-même. Elle regarde autour d'elle et voit peu à peu la condition des femmes changer. Ainsi, le mari de Daba, sa fille aînée, la considère comme une femme, pas comme une esclave ou une servante. Elle reste persuadée que le bonheur passe par l'amour dans le couple.

Ce roman est un témoignage poignant sur la vie des femmes africaines, le poids des traditions, perpétrées malheureusement souvent par elles-mêmes et la difficulté à changer les mentalités. Certes le texte date de la seconde moitié du vingtième siècle et les conditions de vie sont différentes, mais l'égalité entre les hommes et les femmes est encore loin d'être acquise. Un texte essentiel, qui ne peut pas laisser indifférent.
Lien : http://dviolante5.canalblog...
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Merci
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J'ai dévoré cette longue lettre qui reprend de façon très sobre le fil de vie de deux femmes sénégalaises confrontées toutes deux à la polygamie et ayant réagit différemment face à la situation. C'est un texte magnifique évitant le ton larmoyant et décrivant très bien les sentiments contradictoires qu'une femme peut ressentir. Superbe ...
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Ramatoulaye nous emporte à travers cette lettre qu'elle écrit a sa meilleure amie Aïssatou. Elle nous partage l'intimité des femmes qui font face au poids des traditions telle que la polygamie.
Son mari la délaisse, après son deuxième mariage. Un dimanche matin, il demande tout simplement de ne pas l'attendre pour le déjeuner. Elle apprendra l'après-midi qu'il a épousé la jeune amie de leur fille aînée.
Ramatoulaye encaisse, elle accepte la situation. Elle doit désormais élever seule leur 12 enfants.
Le malheur n'arrive jamais seule, son mari décède peu de temps après.
Ramatoulaye va vivre l'épreuve de perdre l'homme qu'elle a tant aimé, mais aussi celle du partage des biens jusqu'aux vêtements, les demandes en mariage dont celle du frère du défunt.
Aïssatou sa grande amie a aussi connu la polygamie, elle a préféré se séparer de son mari et quitter son pays.
Le livre est très bien écrit et d'une manière très simple, je n'ai pas le lâcher avant d'arriver à la fin de la lettre. Je conseille vivement découvrir cet oeuvre simple.
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Premier des deux seuls et uniques romans écrits par Mariama Bâ avant sa mort en 1981, Une si longue lettre n'en demeure pas moins une oeuvre d'une grande sagesse déployant une écriture belle et affirmée. Ce roman épistolaire a été écrit sous le mandat du premier président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor, une vingtaine d'année après l'indépendance du pays jusqu'alors sous domination française. On y découvre non seulement une société régie par un système de castes et de superstitions, de syncrétisme entre islam et animisme mais également une population avide d'éducation et de progrès, notamment par l'évocation de l'importance du système scolaire au sein de l'ouvrage. Ce contexte général ne fait que mettre en lumière le thème dominant du roman : l'évolution du rôle et de la condition de la femme en Afrique de l'ouest, où la polygamie est encore monnaie courante.

C'est par une longue lettre adressée à son amie d'enfance Aïssatou, que Ramatoulaye relate leur expérience commune de la trahison conjugale, celle d'avoir été abandonnées par leurs maris à la faveur d'une seconde épouse plus jeune. Modou, époux de Ramatoulaye, vient de mourir, cette dernière écrit donc durant sa longue période de veuvage. Au cours de celle-ci elle devra affronter la présence de sa coépouse, sacrifier tous de ses biens à sa belle-famille et découvrir les dettes pharaoniques accumulées par Modou pour l'entretien de la famille de sa dernière compagne. L'histoire douloureuse des deux sénégalaises est ainsi contée, entrecoupée de magnifiques apartés sur les thématiques de l'éducation, l'amitié ou la maternité.

J'ai été particulièrement frappée par la beauté qui se dégage de l'écriture de Mariama Bâ ainsi que la grande sagesse avec laquelle elle pose un regard si singulier sur les différents types de relations humaines. le lecteur ne retiendra pas forcément la haine ou le ressentiment qu'aurait pu engendrer la situation de Ramatoulaye mais plutôt la grande clairvoyance dans son analyse du traitement de la femme sénégalaise. le sort de la co-épouse, Binetou, dont la jeunesse est en quelque sorte sacrifiée sur l'autel de l'ascension sociale, est également identifié comme une forme d'asservissement. le roman ne s'adresse pas seulement à la population féminine du Sénégal mais à toutes les femmes, à la fatalité de l'âge et l'injustice du désintéressement masculin. Un monologue du mari d'Aïssatou à propos de la domination de l'instinct de l'homme sur son intelligence, incapable de rester de marbre face à l'appel de la chaire peut laisser songeur. On pressent toutefois que l'auteure n'adhère qu'à moitié à cette réalité. Une si longue lettre est bien plus que l'expression d'une souffrance psychologique, le roman est également un discours d'espoir, celui de l'indépendance, de la résistance et de la réussite de la femme d'âge mûr faisant le deuil du couple. La narratrice, résolument moderne, se retrouvera malgré elle en proie à une lutte intérieure contre les traditions destructrices de sa propre culture afin de préserver l'amour qu'elle porte à sa fille…
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Dès les premières phrases, je sens que je vais aimer ce livre et son auteur :
« La confidence noie la douleur. »
« le passé féconde le présent. »
« Et dire que j'ai aimé passionnément cet homme, dire que je lui ai consacré trente ans de ma vie, dire que j'ai porté ses douze enfants. L'adjonction d'une rivale à ma vie ne lui a pas suffi. En aimant une autre, il a brûlé son passé moralement et matériellement, il a osé pareil reniement. »

Ramatoulaye, la narratrice et héroïne de cette lettre, est une femme sénégalaise, musulmane, qui pourrait être l'auteur elle-même, née en 1929. Quand Mariama Bâ-Ramatoulaye écrit cette lettre, elle n'a peut-être pas encore cinquante ans, et un passé déjà si riche. Elle a vécu la décolonisation, a été à l'école et au lycée, contre les préjugés des années 1950, quand beaucoup ne comprenaient pas qu'une jeune fille apprenne, les méprisaient, même, disant que « l'école transforme les filles en diablesses » ! Qu'importe, Ramatoulaye a suivi son propre chemin, elle a étudié et est devenue enseignante ; puis elle s'est mariée, un mariage d'amour dont elle a eu neuf enfants tout en continuant à travailler, …

« La femme qui travaille a des charges doubles (travail, et maison et enfants) aussi écrasantes les unes que les autres, qu'elle essaie de concilier. Comment les concilier ? Là réside tout un savoir-faire qui différencie les foyers. »

… jusqu'à ce qu'un jour, soudainement, son mari épouse une deuxième femme, une toute jeune fille, l'amie de sa propre fille !
Tant de coutumes me révoltent dans ce livre, témoignage d'une époque et d'un pays :
La polygamie qui est le noeud de cette longue lettre ;
La survivance d'une noblesse que je croyais hors d'âge et qui s'insurge quand le fils ne se marie pas dans son rang,

« Royalement accueillie (dans sa famille), … on ne lui parlait que genoux à terre. Elle (la vieille tante) prenait ses repas seule ; servie de ce qu'il y avait de meilleur dans les marmites… Les visiteurs vinrent de partout pour l'honorer, lui rappelant la véracité des liens du sang. »
L'ignorance totale que peuvent avoir certains adultes face aux enfants qu'ils ne considèrent pas comme des êtres humains mais comme des objets utilitaires que l'on peut vendre ou donner :

« Elle (la même vieille tante) convoqua son frère.
J'ai besoin, lui dit-elle, d'une enfant à mes côtés pour meubler mon coeur ; je veux que cette enfant soit à la fois mes jambes et mon bras droit. Je vieillis…
Qu'à cela ne tienne, rétorqua Farba Diouf… Les jeunes d'aujourd'hui sont difficiles à tenir. Prends la petite Nabou, elle est à toi. Je ne te demande que ses os. »
Et mon coeur se serre en pensant à cette toute petite fille, emmenée très loin de chez elle, loin de sa maman, par une vieille tante qu'elle n'avait jamais vue avant ce jour. Et mon coeur se serre en pensant à la femme de ce Farba Diouf, l'une de ses quatre femmes, à qui l'on prend son enfant sans lui demander son consentement.

Et je ne comprends pas comment les Hommes peuvent être aussi insensibles. Insensible est un mot terrible et très lourd de conséquences, quand on prend le temps de s'arrêter sur lui et d'y réfléchir.
Révoltant encore, les frères des maris défunts qui ont prétention à épouser la veuve, et j'en passe.

Pourtant, dans les années 1950, une jeunesse plaine de l'espoir d'un avenir radieux pour le pays a vécu de beaux jours faits de bonheurs simples ― et parfois poétiques sous la plume de Mariama Bâ :
« Sur le sable fin rincé par la vague et gorgé d'eau, des pirogues peintes naïvement, attendaient leur tour d'être lancées sur les eaux. Dans leur coque, luisaient de petites flaques d'eau pleines de ciel et de soleil. »
« Nous vivions… nous avions le secret des bonheurs simples, cures bienfaisantes dans la tourmente des jours ! »
« Nous vivions. Debout, dans nos salles de classe surchargées, nous étions une poussée du gigantesque effort à accomplir, pour la régression de l'ignorance. »

Pourtant la force des femmes, parfois, dans ce livre, réjouit mon coeur, le gonfle d'un orgueil par procuration, d'une fierté d'être femme, comme Aïssatou qui, après quatre enfants et un mariage heureux, fait d'amour et de partage, voit son mari céder lâchement à la pression familiale, pour épouser une deuxième femme, sa toute jeune cousine ! Mais Aïssatou prend son courage, ses quatre fils et sa vie en main et quitte son mari, quitte sa ville, quitte son pays. Elle étudie et, seule, réussit sa vie et celle de ses enfants.
« Aïssatou, comme j'enviais ta tranquillité lors de ton dernier séjour ! Tu étais là, débarrassée du masque de la souffrance… le passé écrasé sous ton talon. Tu étais là, victime innocente d'une injuste cause et pionnière hardie d'une nouvelle vie. »

Bien qu'« on ne vient pas facilement à bout de pesanteurs millénaires, » l'espoir de la nouvelle génération est incarné par Daba, la fille de l'héroïne, Daba réussit son mariage. Son mari qui prend sa part des tâches ménagères déclare : « Daba est ma femme, elle n'est pas mon esclave ni ma servante. »
Quant à Daba, je la rejoins tout à fait quand elle déclare :
« Je ne veux pas faire de politique. Non que le sort de mon pays et surtout le sort de la femme ne m'intéressent. Mais à regarder les tiraillements stériles au sein d'un même parti, à regarder l'appétit de pouvoir des hommes, je préfère m'abstenir. »

J'ai aimé, dans ce texte, qu'au travers de multiples personnages, femmes, hommes, de générations différentes, Mariama Bâ nous fait comprendre pourquoi certaines choses arrivent, pourquoi, par exemple, des jeunes filles consentent à épouser des hommes plus âgés, déjà mariés et pères de nombreux enfants. Il est difficile de résister au poids de la société et sans doute encore plus au poids de sa propre famille.
J'ai plus aimé encore la profondeur et l'endurance des femmes, la grandeur d'âme de certaines d'entre elles.

PS : J'aurais aussi pu vous dire toute l'importance de l'amitié des deux femmes dans le livre, un beau passage sur les livres, mais je vous laisse le plaisir de découvrir !
Le futur est féminin, c'était hier, c'est plus que jamais aujourd'hui, c'est partout dans le monde !©
Gabrielle Dubois ©
Lien : https://www.gabrielle-dubois..
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C'est la première fois que je lis un roman épistolaire. J'ai bien lu Dracula. Mais celui-ci était constitué, en plus des lettres, des fax et des factures, tout le contraire de ce roman, dont l'histoire est bien plus facile à suivre.


Comme le titre l'indique, ce roman n'est constitué que d'une seule lettre écrite en 28 chapitres. Elle est écrite par Ramatoulaye à sa meilleure amie Aïssatou, pendant sa réclusion traditionnelle après la mort de son mari. Pendant ces 42 jours, Ramatoulaye fait le point sur sa vie, depuis son adolescence, le début de son mariage puis la trahison de son mari jusqu'à la mort de celui-ci. Elle se livre corps et âme. Tout y passe : ses espoirs, ses regrets, et même les vérités qu'elle n'osait pas s'avouer. En même temps, elle évoque la vie d'autres femmes comme Aïssatou, sa rivale, et bien d'autres encore, tout en menant une réflexion approfondie sur les conditions féminines dans son pays.

Sa lettre fait revivre cette période si charnière dans l'histoire du Sénégal qu'est le lendemain des Indépendances. La jeune République est à ce moment écartelée entre modernité et traditions. Celles-ci sont très bien dépeintes et pèsent lourd sur les épaules des femmes.

Ramatoulaye semble être au début à l'image de cette société. Bien qu'ayant fait des études et refusé de se plier à un mariage de raison, elle a fini par accepter la polygamie de son mari, par respect des traditions et aussi par peur d'un avenir incertain. Sa vie et celle de sa meilleure amie sont ainsi en miroir. Les deux ont eu des parcours sensiblement égaux, mais ont fait des choix opposés à la croisée des chemins. Ramatoulaye a choisi de se conformer aux traditions et aux attentes de la société, au risque de jeter sa fierté aux orties, tandis que Aïssatou a refusé la polygamie, a préféré divorcer et a refait sa vie dans un autre pays. Malgré leurs choix opposés, les deux amies continuent de se soutenir mutuellement, sans jugement, en dépit des distances qui les séparent.
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Une si longue lettre est un grand roman,très grand qui traite de la société africaine dans son ensemble,à travers la société sénégalaise,la culture les traditions et les problèmes famillaux.
Je prends le cas de Mawdo Bâ médecin qui épouse sa cousine parce que sa mère le veut,en ces temps là ,la parole paternelle et maternelle pesait plus lourdement qu'aujourd'hui dans l'orientation des destinées,on se pliaient à des exigences familiales qui allaient parfois à l'encontre de nos désirs et intérêts.Les femmes acceptent la polygamie quand c'est elles qui viennent s'ajouter dans la masse,mais la prémière épouse n'accepte jamais,elle si consente quand elle a beaucoup d'enfants comme c'est le cas de Ramatoulaye,moi je ne suis pas contre la polygamie si le respect y est.

J'attends avec impatiente la biographie de MARIAMA BÂ ET LES ALLEES D'UN DESTIN;
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Cette "longue lettre" lue lors de mon enfance est pour la littérature africaine l'un des grands classiques. Ce livre décrit la condition féminine africaine dans les années 70. Les mentalités ont bien changé de nos jours!
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Voilà le récit de la vie affective et matérielle de cette Peule que je comprends dans ses choix. Destinées compliquées pour ces femmes qui n'ont pas droit à la parole et qui se font rayer d'un coeur et d'une vie du jour au lendemain alors qu'elles ont tout donné, toujours... à lire pour entrer dans les mécanismes d'un certain mode de vie.
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