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Critique de Arimbo


Arimbo
23 septembre 2021
De Balzac, qui est depuis mon enfance un de mes auteurs favoris, à part La peau de chagrin et le Colonel Chabert, je n'ai lu que les grands romans: Eugénie Grandet, le père Goriot, la Cousine Bette, le Cousin Pons, Splendeurs et Misères des Courtisanes, La recherche de l'Absolu, etc…en n'oubliant pas bien sûr, l'incontournable le Lys dans la vallée, qui m'a un peu troublé dans ma jeunesse.
J'avais laissé de côté les nouvelles, que beaucoup (dont mon cher Marcel Proust) considèrent comme mineures.

C'est en furetant sur Babelio que j'ai pu lire les commentaires enthousiastes de mes ami-e-s (ou pas ) Babeliotes.
C'est ce qui m'a décidé à franchir le pas, et j'ai débuté mes lectures par Gobseck (téléchargeable gratuitement sur internet!), et je ne l'ai pas regretté!

Gobseck, extraordinaire nouvelle, tant par le contenu, la profondeur psychologique que par la construction. Une merveille concentrée en un court récit.

On y retrouve l'avoué Maître Derville (présent dans de nombreux romans De Balzac dont le Colonel Chabert et Splendeurs et misères des courtisanes) qui intervient dans une conversation dans laquelle la vicomtesse de Grandlieu dit désapprouver l'amour de sa fille Camille avec Ernest de Restaud, car ce dernier est le fils d'Anastasie de Restaud née Goriot, qui dilapide l'argent du ménage dans une relation extra-conjugale avec le comte Maxime de Traille.
Derville raconte alors les péripéties tumultueuses de la relation entre la famille de Restaud et Gobseck, un usurier parmi les plus riches et les plus féroces de Paris, qu'il a fréquenté à son début de carrière, alors qu'il n'était que second clerc d'avoué.

Sans entrer dans les détails de l'intrigue racontée par Derville et qui se conclut par le fait que le jeune Ernest de Restaud va pouvoir hériter de la fortune de son père récemment décédé, le récit est remarquable d'abord parce qu'il dresse l'extraordinaire portrait d'un usurier, on pourrait dire de l'Usurier. Un homme doué d'une finesse d'analyse psychologique exceptionnelle, féroce mais un peu justicier puisqu'il est sans pitié pour les puissants par la noblesse ou par la richesse, et plutôt bienveillant à l'égard des modestes par le rang social ou la fortune. Mais aussi un homme qui progressivement sombre dans la folie d'amasser les richesses (et le reste), tout en ne dépensant rien.

Et puis, le récit nous dresse un tableau cruel du couple des de Restaud, un mari qui hait sa femme, un père qui veut déshériter les enfants du premier mariage de son épouse, une épouse haïssant son mari et qui se ruine dans une relation avec un bel homme sans scrupules, et une mère qui établit une emprise sur son fils.

Et enfin (nous sommes dans La Comédie Humaine), Balzac nous décrit de façon impitoyable la société de la Restauration, où les nobles revenus sur le devant de la scène sociale n'en sont pas moins obligés de composer, voire d'arranger des mariages, avec les riches bourgeois, l'argent prime sur tout le reste.

En lisant ce texte magnifique, j'ai repensé à l'excellente analyse de l'oeuvre De Balzac que fait Marcel Proust dans son Contre Sainte-Beuve.
D'abord son regard amusé sur le leitmotiv de l'argent dans les romans de ce cher Honoré. C'est vrai, il y a toujours une affaire de gros sous dans les romans ou nouvelles, on y brasse des millions, on vous explique comment on peut se faire ou se refaire une fortune, ou la dilapider.
Mais Proust a parfaitement compris à quel point Balzac a été capable de saisir les rouages et les dérives de cette société dévorée par l'argent, et plus généralement à savoir décrire, en quelques phrases, en quelques allusions, les travers et parfois les qualités des humains.
Eh bien! Je crois que tout cela est, en concentré, dans Gobseck.
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