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Citations sur La Frontière (39)

- Alors on va faire un tour. Je peux conduire ?

Zambudio objecta timidement que la VW de location n’était sans doute pas assurée pour elle.

- Guero, ici c’est le tiers-monde, on ne s’assure pas. Si on a un problème avec les flics, on arrangera ça avec une mordida à 100 pesos, ça coûtera moins cher, lança-t-elle d’un ton définitif en s’asseyant à la place du chauffeur.
Vous savez quel est le deuxième pays le plus corrompu au monde ? Le Mexique. Et le premier ?

Comme Toni la regardait d’un air interrogateur, elle éclata de rire en répondant :
- Le Mexique, cabron, mais nous avons payé le jury très cher pour être deuxième.

Elle venait de griller un feu rouge.


Version longue (elle c’est Guadalupe Vidal, Toni c’est un journaliste espagnol)
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- Vous savez quel est le deuxième pays le plus corrompu au monde ? Le Mexique. Et le premier ?
Comme Toni la regardait d’un air interrogateur, elle éclata de rire en répondant :
- Le Mexique, cabron, mais nous avons payé le jury très cher pour être deuxième.


Version courte (elle c’est Guadalupe Vidal, Toni c’est un journaliste espagnol)
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Enfin, toujours est-il qu'au fond d'elles-mêmes ce ne sont encore la plupart du temps que des enfants, fascinées autant qu'effrayées par l'onde de choc que provoquent leurs déhanchements provocateurs et leurs oeillades assassines. (p.28)
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Zambudio avait coupé à droite, par un sentier, une ruelle sans nom, comme le lui avaient indiqué les gosses, puis il était descendu vers un groupe de cabanes en contrebas. Tous le regards convergeaient vers lui. A mi-pente, il s’était arrêté, avait pénétré dans une petite allée entre deux huttes de carton. Un homme assez jeune étai occupé à fracasser à coups de marteau une vieille batterie de voiture, tandis qu’un autre, plus vieux, contemplait le crépuscule naissant dans un fauteuil à bascule qui avait connu des jours meilleurs, quelques années plus tôt. A l’extérieur de la cahute, une vieille femme s’escrimait à allumer, avec des brindilles, un four de fortune en terre séchée pour y cuire des tortillas de maïs. Toni avait lancé un timide « Bonjour ! » à la ronde. Un bébé dormait dans un berceau bricolé à l’aide de bois de caisses d’emballage. Sur le flanc de la couche de fortune, un plaisantin avait écrit : « Ne pas déranger, les mecs. Je bosse. »
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Les mexicains l’appelaient le « Mur de la honte », demandant avec ironie si le président des USA viendrait un jour de ce côté de la frontière pour déclarer : « Soy mexicano », comme Kennedy naguère à Berlin.
Les sans-papiers traversaient désormais par le désert, risquant la mort par insolation en été, par hypothermie en hiver, pour échapper aux hélicoptères, aux chiens et aux jumelles à vision nocturne de la migra.
En un peu plus de deux ans, près de quatre cents infortunés candidats avaient laissé leur peau à ce jeu sordide du chat et de la souris.
Zambudio descendit vers la berge. Des remugles écœurants montaient de l’eau noire. Une immense fresque représentant Che Guevara était peinte à même le sol en pente, narguant l’Amérique.
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Camerón s’était d’abord montré persuadé de la culpabilité de Fouad El Aziz :
— C’est une personne très instable. Lorsque j’ai accepté de le défendre, je n’avais pas d’idée préconçue. Mais il était assez rapidement passé aux aveux. Bien sûr les interrogatoires de la police sont parfois très musclés, mais on n’avoue pas une chose aussi grave si l’on est innocent, même sous la pression. Aussi avais-je pris la décision de plaider coupable. Surtout avec des antécédents pareils. Cependant, d’une façon incompréhensible, il s’est rétracté, malgré mes conseils, et je n’ai jamais pu l’en faire démordre. Il ne voulait rien entendre. J’ai donc fait mon travail, qui s’est borné à partir de là à dénoncer les violences dont il se prétendait victime auprès d’associations de défense des droits de l’homme.
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Au fur et à mesure qu’ils roulaient, la physionomie urbaine se modifiait. Passé les rutilants grands magasins Sanborn’s, le boulevard se rétrécissait, les immeubles devenaient bas, mal entretenus.
Il se fit déposer à l’angle de l’avenue Guerrero. La chaleur était un peu tombée, les ombres d’antiques demeures aux façades d’adobe s’allongeaient sur le trottoir à la lueur naissante des réverbères. Il contempla un moment la perspective de la rue, les fenêtres protégées par des grilles de fer forgé, les ornements de stuc entrelacés en motifs compliqués, les toitures à l’espagnole, en tuile romane.
Tout ici était comme nimbé de poussière. À Juárez, elle recouvrait également le sol, les toits, les feuilles des rares arbres et même, semblait-il, les gens, drapant la ville entière d’un linceul poudreux qui atténuait les couleurs les plus vives. C’était la façon qu’avait le désert de se rappeler à vous, même quand vous ne pouviez pas le voir.
Sur le trottoir d’en face, un carrossier fermait son éventaire. Peinte sur le rideau de fer, la gueule bleutée d’un revolver de deux mètres de haut mettait le passant en joue. Sous la fresque, le commerçant avait écrit en grandes lettres rouges : « Ceci est un avertissement. »
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En reconstituant les dernières heures des victimes, nous en étions arrivés à la conclusion que certaines d’entre elles avaient fréquenté les bars du centre-ville.
— Vous voulez dire les bars de la Zona Roja, de la zone de prostitution ? s’était étonné le journaliste. Ça cadre mal avec l’idée qu’on se fait de la jeune fille mexicaine traditionnelle.
— Oh là là, détrompez-vous, señor Zambudio. L’eau du Río Bravo a coulé sous les ponts. Comprenons-nous bien. Je n’accuse pas les ouvrières d’être des prostituées, mais certains bars qui ne sont pas officiellement des cantinas, qui peuvent même être des discothèques chic de la Zona Rosa, sont propices aux rencontres, et, vous le savez, les petits cadeaux entretiennent l’amitié.
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Tous les corps avaient été transportés après le décès. On n’a pas retrouvé d’arme à proximité. Toutes ces jeunes filles appartenaient à des familles pauvres, la plupart étaient des ouvrières des maquiladoras, comme Catalina Cruz. Au mois de mars 96, nous en étions arrivés à dix-neuf victimes et le pays était en ébullition, vous savez, le syndrome « que fait donc la police ? ». Nous avions sur le dos tous les jours le maire, les associations des familles de victimes, les féministes et que sais-je encore. La situation politique est réellement très compliquée ici. Le PAN s’est emparé une première fois de la mairie avec l’appui des catholiques. Puis le PRI leur a repris la municipalité. Je vous laisse imaginer les réactions du PAN qui ne demande qu’à reprendre le pouvoir : vous n’êtes même pas capables d’assurer la sécurité de nos femmes, et patati !… Tout le tremblement, en somme.
— Il vous fallait un coupable.
— Et de toute urgence, nous étions tous sur des sièges éjectables.
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Elle avait été violée, on avait ensuite enfoncé divers objets dans son vagin avant de l’étrangler. Et pour finir on l’avait décapitée. Dans les semaines qui ont suivi, nous avons découvert onze autres corps, derrière des bâtiments industriels, dans le désert, à proximité des colonias. Certaines de ces filles étaient à peine des adolescentes, quatorze ans tout au plus. Elles présentaient toutes les mêmes caractéristiques : minces, de type indigène ou métis, les cheveux longs. Nous avons compris très vite que nous étions en présence d’un tueur en série doté de fortes tendances fétichistes. Plusieurs de ces cadavres étaient dans un tel état que nous n’avons même pas pu toujours savoir de quoi elles étaient mortes, ni même les identifier. Finalement, nous avons eu la chance, si j’ose dire, de tomber au printemps 96 sur sept nouveaux corps, en meilleur état. Celles qui n’avaient pas été étranglées avaient été achevées de plusieurs coups de couteau. Elles présentaient des traces de morsures profondes à l’intérieur des cuisses et aux seins, des morsures humaines, et leurs tétons avaient été arrachés.
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