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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
En Irlande, il n'y a pas que le temps qui pleure.
Un ancien flic profite d'une retraite pépère et méritée dans une station balnéaire. Comme les côtes de la mer d'Irlande n'ont pas grand-chose à voir avec celles de la Floride ou de la côte d'azur, il fréquente davantage les fantômes et les cormorans que les casinos et les chihuahuas à sa mémère. Veuf, l'homme a également perdu ses deux enfants et il n'aspire qu'à se passer en boucle les vieux disques de ses souvenirs heureux. Ses défunts lui tiennent compagnie et sa réalité se limite à quelques rencontres fortuites avec son propriétaire et quelques voisins.
Les drames qui ont émaillé son existence remontent à la surface et polluent l'écume de sa plage déserte quand de jeunes enquêteurs le contactent sur une vieille affaire de prêtres pédophiles. Tom Kettle a été lui-même abusé dans un orphelinat et sa défunte épouse a elle-même été victime d'un certain Père Matthews dont le corps a été retrouvé dans une montagne. Les soupçons pèsent sur l'ancien flic qui peu à peu, exhume son passé douloureux.
J'ai trouvé le roman de Sébastian Barry d'une puissance rare et d'un style aussi perturbant qu'envoutant. le sujet est difficile et âpre mais l'auteur fait prévaloir la mémoire sur le polar. Alors que la plupart des romanciers auraient fait le choix d'un récit centré sur l'évocation des scandales de pédophilie dans certains orphelinats d'Irlande qui ont défrayé la chronique il y a quelques années, le choix de confiner la narration dans l'esprit du flic permet de révéler toutes les fêlures psychologiques qui résultent de ces crimes.
J'ai été bluffé par cette capacité de l'auteur à structurer sa prose comme une lutte intérieure, presque inconsciente comme une écriture de résistance, qui se traduit par des passages où le récit chevauche la réalité, le rêve ou l'hallucination dans une même page. Je me suis parfois perdu dans le récit car le narrateur a la mémoire qui flanche et un Alzheimer à la carte mais il grappine le lecteur dans l'ascension complexe de cette histoire grâce à son fil de survie : l'amour pour sa femme.
Ce n'est pas la comédie de l'année, difficile de faire une petite place à l'humour devant une telle accumulation de drames sur un seul personnage (c'est même un peu trop pour être crédible !) mais cette lecture n'est pas dépressive. Bon, évitez seulement d'avoir une corde ou une falaise à proximité, de lire ce magnifique livre par temps pluvieux en automne et gardez le numéro de votre psy à proximité.
Dans les lacs du Connemara, si on écoute Sardou le sardonique, autour des lacs, c'est pour les vivants. Chez Sebastian Barry, en bord de mer, c'est plutôt pour les morts.
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Écrire beau.

Deuxième incursion chez Sebastian Barry avec Au bon vieux temps de Dieu (traduit par Laetitia Devaux) et même sentiment de « me sentir bien dans ma lecture ». Au point, une fois n'est pas coutume, de prendre mon temps pour avaler ce court mais dense roman.

Récemment retraité de la Garda Síochána, la police nationale irlandaise, Tom Kettle vit sans vraiment vivre, dans le souvenir de sa famille disparue : Winnie sa fille, morte ; Joseph son fils, assassiné ; et June, sa femme tant aimée, dont le seul défaut fut de mourir trop tôt.

« Tout ça, c'était avant June : pas avant et après J.-C., mais avant et après June. »

Tourmenté de la vie, cherchant la force de continuer malgré tout, Tom est un être complexe qui se pose sans cesse mille questions sur son passé et son histoire, ses actions ou absences d'actions, ses omissions et petites compromissions. Sans que cela n'y change rien. Jusqu'à ce que…

Jusqu'à ce que son ancien chef le sollicite pour un court retour aux affaires destiné à faire tomber des prêtres pédophiles longtemps impunis. Mais loin de l'apaiser, cette mission replonge Tom dans les tourments de son passé.

Au bon vieux temps de Dieu est un régal de lecture tellement la langue est belle. Une écriture dense, resserrée qui convient parfaitement au rythme volontairement lent de Barry, ponctué de digressions comme autant de fulgurances resurgies dans la tête de Tom. Mais aussi de quelques aphorismes délectables jetés ci-et-là.

« Ils étaient d'humeur à ne parler de rien, mais à parler de rien aussi bien que possible, ce qu'ils firent. »

Amateurs de pageturner et d'intrigues addictives, passez votre chemin. Mais pour tous ceux qui « lisent beau », c'est un régal !

« Au bout d'un moment, c'est comme si les choses anciennes n'avaient jamais existé. Des choses autrefois fraîches, soudaines et terribles, qui finissaient par se dissiper dans ce bon vieux temps de Dieu… »
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Depuis sa retraite, Tom, ancien inspecteur, vit quasiment en ermite en bord de mer avec pour compagnie ses souvenirs. Sa tranquillité va être bouleversée quand des policiers viennent solliciter son aide sur une enquête.

Avec une immense finesse, Sébastien Barry nous parle du pouvoir de l'Église catholique en Irlande, des abus sexuels et des traumatismes infligés à un nombre incalculable d'enfants.

Il saisit les émotions et les profondeurs d'un homme solitaire qui souffre depuis longtemps.

Une histoire remplie de perte, de traumatisme et de chagrin, mais magnifiée par la beauté d'un amour inébranlable.

Un roman dans lequel rien n'est tout à fait ce qu'il paraît comme les histoires que nous nous racontons pour tenir le coup, comme le pacte que nous concluons avec nous-mêmes pour laisser derrière les souvenirs nuisibles.
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Tom Kettle est un inspecteur de police à la retraite. Alors qu'il est chez lui, en proie à l'oisiveté, il est soudain dérangé par un coup à la porte. Deux policiers en tenue se tiennent derrière. Que lui veulent-ils donc ? Un vieux dossier ressurgit sur la table, la tranquillité est terminée mais a-t-elle jamais commencé ? Tom Kettle, le sait, le passé refait toujours surface. Il est venu pour lui le temps de l'introspection.

Sebastian Barry nous plonge dans la tête de Tom Kettle, un homme à la retraite, serein aux premiers abords mais qui a pourtant tant souffert et vu la souffrance. Je suis à nouveau tombée en admiration devant l'écriture de cet écrivain irlandais (vous devez absolument lire Les jours sans fin). 
Ce roman aborde avec intelligence, un sujet grave, celui des abus sexuels au sein de l'Eglise catholique.

Je vous conseille vivement de le découvrir, en voici un petit extrait pour vous donner envie de le lire.


"Parce qu'avant toute chose, il faut croire un témoin. Bien des méfaits et des malheurs découlaient du fait qu'on n'avait pas cru les témoins. Qu'on avait d'emblée rejeté leur témoignage. Cette pauvre âme qui crache le terrible morceau, mais dont le récit paraît invraisemblable. Souvent, l'invraisemblable, c'était pourtant la réalité, et on s'en rendait compte trop tard." 
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Mais quelle plume ! Quel roman ! Quelle claque dans la gueule !
Tom Kettle est un policier retraité ; il vit à Dublin, et est plutôt solitaire. Il faut dire que ses enfants et sa femme manquent à l'appel désormais. Tout ce à quoi il aspire est la tranquillité… alors quand ses anciens collègues débarquent pour lui demander son aide sur une enquête liée à ses anciens dossiers, Tom n'est pas heureux et craint aussi de se replonger dans ses souvenirs toujours vivaces.
Au fil des pages, on découvre des pans de la vie de Tom et sa défunte femme June. Maltraités dans leurs enfances, ballottés d'orphelinats en maisons d'accueil, leurs blessures étaient trop profondes pour ne pas pourrir une partie de leurs vies.
Alors quand un prêtre est assassiné, tout lui explose à la figure… les coups, les viols, les brutalités et ce tourbillon d'émotions, de traumatismes, de rage font monter la tension dramatique… si bien qu'on tourne les pages, le coeur serré, et ce dernier au bord des lèvres.
Sebastian Barry invite le lecteur dans la tête de Tom, le plonge dans ses égarements (afin qu'il ne sombre pas !), et ses humeurs menaçantes.
Les souvenirs se mêlent au présent et la solitude de ces enfants devenus adultes est absolument bouleversante… la souillure anéantissant l'enfance qui n'est quasiment jamais surmonté, sans aide de la société qui ne sait pas comment entendre les enfants, ou impose la résilience alors que, le soir, l'adulte redevient un enfant apeuré, brisé, humilié, qui pense, encore, qu'il est responsable…
La force de roman est terrifiante, notamment si vous savez de quoi parle l'auteur, ce qu'il dénonce, et le soir, quand comme tout être humain vous êtes face à vous-même, il faut savoir affronter la solitude qui ramène toujours les démons… nos démons.

A lire en prenant son temps et avec une ouverture d'esprit et une bienveillance… sinon les égarements de Tom vous perdront et cela serait dommage, car vous ne comprendrez pas tout… ou alors vous vous voilez la face pour ne pas affronter le démon… car tout le monde a un démon, là, tapis dans le silence du coeur.
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Sebastian Barry est un auteur qui me bouleverse à chaque lecture. j'avais adoré "le testament caché" et ici, la même magie opère, malgré la noirceur du sujet.

l'auteur arrive à entremêler différentes époques, différents points de vue, sans que cela alourdisse l'intrigue ; c'est magistral !
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Sebastian Barry né en 1955 à Dublin, est un écrivain irlandais. Il est l'auteur de pièces de théâtre, de romans et de poèmes, publiés depuis le début des années 1980. Au Bon vieux temps de Dieu, son nouveau roman, vient de paraître.
Irlande au milieu des années 90'. Tom Kettle, inspecteur de police, retraité depuis quelques mois, s'est glissé dans une vie tranquille dans la banlieue de Dublin et peut imaginer qu'il en soit ainsi jusqu'à ses derniers jours. Hélas, le destin est toujours imprévisible et lorsque deux anciens collègues débarquent à l'improviste chez lui pour lui demander de l'aide au sujet d'une vieille affaire d'abus sexuels au sein de l'Eglise, Tom se retrouve douloureusement confronté à son passé…
Un passé terrible. Sa femme June, le grand amour de sa vie, suicidée ; son fils assassiné à Albuquerque aux Etats-Unis ; sa fille avocate, d'overdose. Et comme si cette charge de malheurs n'était pas assez lourde, antérieurement il y eut pire encore, June avait été violée régulièrement entre six et douze ans par un prêtre de son orphelinat, tandis que Tom lui-même élevé dans un autre de ces lieux avait été brutalisé et vu des sévices innommables sur d'autres enfants.
Si le cerveau de Tom avait réussi jusqu'ici à maintenir tous ses souvenirs dans une boite de Pandore intime, un déni salutaire à première vue, l'intrusion de ses ex-collègues venus lui demander conseil, ouvrira cette boite et un à un, les souvenirs reviendront à la surface, d'autant plus pénibles à réveiller que la police est aujourd'hui sur la piste d'un prêtre pédophile qui s'avère être le complice de celui qui a violé June !
Réalité ? Passé reconstruit, bricolé comme ça arrange Tom ? Sebastian Barry dresse le portrait psychologique d'un homme prisonnier de deux maux, les premiers signes tangibles de la vieillesse, la mémoire qui lâche doucement, cet autre nous-même qui nous devient étranger (« Tom ne reconnaissait pas les parties de son corps qu'il voyait dans le miroir »), et en dépit de ces trous dans son passé, ces remontées de souvenirs d'abord flous puis prenant de la consistance lentement, ce que lui mais surtout June ont enduré enfants, ce qui en a suivi et peut-être comment une certaine justice a été rendue ?
Même si globalement le lecteur suit le déroulé du récit déroulé petit à petit, la part d'ombre et de mystères subsistera car la parole de Tom reste sujette à caution sur certains points, d'une part parce que ses souvenirs ne sont pas très fiables et d'autre part parce qu'il a enfoui au plus profond de lui un secret concernant June. Roman sans fin, qui laisse le lecteur sonné : comment de telles souffrances peuvent-elles être causées par des hommes ? Et comment peuvent-elles être endurées et supportées par d'autres ?
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