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4,07

sur 1992 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Mémoires d'une jeune fille rangée retrace les premières années de la philosophe Simone de Beauvoir de la naissance à sa rencontre avec Jean-Paul Sartre.

Avant toute chose je suis frappée par le rythme, extrêmement régulier, et par le style que je qualifierais de distingué, à l'image de la jeune fille décrite. Je suis entrée dans le récit sans aucun à priori, ignorante de la vie de l'auteur. Je sais par ailleurs que ce livre a marqué nombre de lectrices. le rapport de Simone de Beauvoir à la littérature et à la philosophie, son indépendance d'esprit dans un cadre social et familial étriqué, ses choix amicaux, ses questionnements sur le mariage et les études, son ennui, interpellent. Cela dit, je n'ai pu me défaire de l'idée tout au long de ma lecture que j'avais sérieusement affaire à des problèmes de petite bourgeoise, certes bien réels mais pour lesquels ils m'étaient bien difficiles de me sentir concernée. Sans cesse, j'ai attendu la révolte, les cris, une réponse au carcan qui s'impose par cette indéniable régularité du rythme, en vain semble-t-il. Quoique les limites soient en permanence repoussées discrètement et presque naturellement, l'explosion ne se produit pas et ma patience est mise à rude épreuve. Je reste sur ma faim, interpellée mais inassouvie.


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Après avoir lu le deuxième sexe, j'étais curieuse d'apprendre comme une jeune fille de bonne famille en était venue à écrire le premier manifeste féministe (et choquant !) de son temps.
Beauvoir remonte aux souvenirs de sa petite enfance (ce qui est étonnant vu qu'elle a déjà 50 ans à la publication de ses mémoires...), se décrivant comme "une petite fille très gaie, protégée, choyée" et déjà "amusée par l'incessante nouveauté des choses". Bonne élève, elle a le goût d'apprendre et surtout aime être félicitée, ce qui l'encourage à toujours faire mieux mais l'enferme aussi dans le personnage de petite fille sage qu'elle s'est composée. Sûre de l'admiration de ses parents, elle fait beaucoup de caprices ("Je désobéissais pour le seul plaisir de ne pas obéir.") et commence déjà "à ne pas considérer comme insurmontables les règles". Son père, "acteur et homme du monde", l'ouvre à "la vie intellectuelle". Sa mère, fervente catholique, dirige sa "vie spirituelle". Toutes deux vivent "dans une sorte de symbiose" : "Elle m'inculqua le sens du devoir, ainsi que des consignes d'oubli de soi et d'austérité. J'appris de maman à m'effacer, à contrôler mon langage, à censurer mes désirs, à dire et à faire exactement ce qui devait être dit et fait. Je ne revendiquais rien et j'osais peu de choses." La fillette grandit donc au croisement de deux personnalités, deux modes de pensée quasi opposés, qui contribuent chacun à alimenter son être en devenir.

Plusieurs éléments vont venir perturber cet état des choses. Tout d'abord "les affaires de mon père marchaient mal" et voilà la famille obligée de déménager dans un logement plus modeste et de réduire considérablement son train de vie. D'autre part Simone entre dans l'adolescence et vit plutôt mal la période de la puberté ("Mon corps changeait; mon existence aussi : le passé me quittait"). Avec une mère pieuse, pas question de coquetterie (il faut être une dame "comme il faut") et Simone n'arbore ni jolie robe, ni coiffure soignée, ni maquillage, ce qui ne l'aide pas à se sentir épanouie. Cette période marque une rupture affective avec ses parents : elle se sent "à jamais déchue" aux yeux de son père qui la voudrait plus brillante en société (ce qui ne l'intéresse pas voire l'ennuie), et s'éloigne de sa mère dont elle ne partage plus le caractère pieux ("Ainsi reléguai-je Dieu hors du monde"). Les transformations de son corps et ses premiers émois sont d'autant plus difficiles à traverser que sa mère répugne à aborder "les questions physiques". Élevée au milieu des tabous sexuels ("L'inconvenance ne se confondait pas tout à fait avec le péché mais suscitait des blâmes"), Simone l'intellectuelle ne connaît ni ne comprend rien aux choses du corps.

Mais en même temps, cette période accentue son côté contestataire : "Les réponses: "Ça se doit. Ça ne se fait pas", ne me satisfaisaient plus du tout." La jeune fille a "un impérieux besoin" de savoir, et aussi de liberté. Deux personnes prennent, à partir de ce moment-là, une importance capitale dans sa vie : son cousin Jacques et son amie Zaza. Avec Jacques, Simone s'interroge sur l'amour. On trouve, tout au long de cette autobiographie, de longs et récurrents passages pendant lesquelles elle se demande si elle l'aime ou pas (et vice-versa). En tout cas une chose est sûre : "Je n'étais pas vouée à une vie de ménagère". La question féministe émerge en effet très tôt : si, petite, "je ne déplorais pas d'être une fille", "je considérais toujours avec déplaisir le mariage". "Quand j'évoquais mon avenir, ces servitudes me parurent si pesantes que je renonçai à avoir des enfants". Simone tient à son indépendance plus que tout et préfère "infiniment la perspective d'un métier à celle du mariage" parce qu'elle "autorisait des espoirs". Plus tard elle nuance ses propos : "Je ne me marierais que si je rencontrais mon pareil, mon double"... et Jacques, au final, ne semble nullement correspondre à ces attentes (mais lui aurait sûrement gagné à épouser une femme comme Simone...). Quant à Zaza, elle est le malheureux exemple de ces jeunes filles brimées de l'époque à qui l'on impose leur propre vie : on la voit au fil des années perdre cette vivacité et cette indépendance qui subjuguaient tant Simone, victime d'amours contrariées et "de ce que je considérais comme un abus de pouvoir" de la part de sa mère...

C'est aussi à cette période que la jeune Simone se met à écrire, dans un journal (qui a dû servir de support à la rédaction de ses mémoires car elle y cite des extraits ainsi que des passages de lettres), non sans arrogance : "J'avais spontanément tendance à raconter tout ce qui m'arrivait : si je relatais dans une rédaction un épisode de ma vie, il échappait à l'oubli, il intéressait d'autres gens, il était définitivement sauvé." Mais "la grande affaire de sa vie" (en dehors des études), c'est la lecture. le texte abonde de références littéraires qui l'alourdissent quelque peu. A cause de la piété de sa mère, Simone ne peut pas lire ce qu'elle veut et "aucun de ces ouvrages ne me proposait une image de l'amour ni une idée de mon destin qui pût me satisfaire", mais "malgré leur conformisme, les livres élargissaient mon horizon". Et puis avec l'âge, elle va peu à peu réussir à accéder à des "opinions subversives".

L'entrée dans les études supérieures marque un nouveau tournant dans la vie De Beauvoir. Dans son milieu, "on trouvait alors incongru qu'une jeune fille fît des études poussées; prendre un métier, c'était déchoir. Il va de soi que mon père était vigoureusement anti-féministe", cependant elle tient bon, s'accrochant à la perspective de quitter enfin le domicile familial. Et puis la philosophie, "discipline qui pose des questions", lui convient parfaitement, bien mieux que la filière littéraire. de nombreuses rencontres jalonnent ces années, et ses professeurs comme ses camarades étudiants (Pradelle, Garric, Nodier, Herbaud...) contribuent à faire évoluer sa pensée. On croise des noms célèbres comme Merleau-Ponty et Lévi-Strauss, mais aussi la brillante Simone Weil, première de ces "bêtes à concours". Les femmes sont rares dans le milieu ("Les femmes qui avaient alors une agrégation ou un doctorat de philosophie se comptaient sur les doigts de la main : je souhaitais être une de ces pionnières") et leur "'infériorité intellectuelle" admise par "beaucoup de mes congénères" mais Simone fait tout de même sa place et ses preuves, que ce soit dans les cours à la Sorbonne, les séances de révision à la (bibliothèque) Nationale ou les conversations enlevées autour d'un verre.

Malgré tout la jeune femme se sent "toujours très seule", habitée par des "angoisses métaphysiques" qui la plonge dans un état dépressif permanent : "Je me réveillais le matin dans l'ennui, et mes journées se traînaient tristement". Elle ressent la nécessité de "servir" mais "à quoi ? à qui ?". Autour d'elle, "les gens se résignaient à exister en vain, pas moi". Simone a besoin d'"être aimée, être admirée, être nécessaire ; être quelqu'un" mais elle a le sentiment que "personne ne m'admettait telle que j'étais"... Elle refuse de subir une voie tracée, ne voit aucun intérêt aux mondanités, sans pour autant réussir à combler ce manque par autre chose. Encouragée par Stépha, une Polonaise faisant fi des conventions, elle "s'enhardit", "allant boire au bistrot", se laissant "accoster dans les rues", cependant cette attitude ne lui ressemble pas vraiment. Elle revient à ses compagnons philosophes, se confrontant intellectuellement à eux : "Je m'étais aperçue que beaucoup de mes opinions ne reposaient que sur des partis pris, de la mauvaise foi ou de l'étourderie, que mes raisonnements boitaient, que mes idées étaient confuses", ce qui l'encourage à redoubler de travail.

Parmi eux, un certain Jean-Paul Sartre, étudiant "prodigieusement intéressant" qui, "sauf peut-être quand il dort, pense tout le temps" et chez qui "se trouvaient déjà en germe ses idées sur l'être, l'existence, la nécessité, la liberté". Pas de coup de foudre dévastateur, pas d'entrée en fanfare dans la vie De Beauvoir qui dans un premier temps, évite même le tête à tête qu'il réclame par amis interposés. Mais rapidement tout de même, au fil des discussions, Simone éprouve ce sentiment que "Sartre répondait exactement au voeu de mes quinze ans : il était le double en qui je me retrouvais". Et si ce premier tome se clôt sur un tragique événement concernant Zaza, on retiendra cette ouverture prometteuse de nouvelles et belles années à venir : "Avec lui, je pourrai toujours tout partager. Quand je le quittai au début d'août, je savais que plus jamais il ne sortirait de ma vie".
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Un classique de la littérature française. Pas besoin d'en rajouter, tout est dans le titre.
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Témoignage de l'enfance de Simone de Beauvoir, petite fille colérique se considérant comme incomprise.

-- Qui va découvrir des plaisirs de personnes adultes, comme la lecture ou les conversations importantes.


-- Simone va devenir une jeune femme qui rêve de liberté et d'émancipation.

Dans ce premier tome il y a surtout les questionnements sur les problèmes de la société ou de la religion que peut avoir toute personne qui rêve de s'affirmer. Simone se questionne déjà sur la question de la condition féminine dès ses premières années dans la vie d'adulte.

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Simone décrit sa jeunesse dans ce roman: d'abord, elle décortique son enfance, tout à fait à la manière de Sartre dans son roman “Les Mots”. J'y ai retrouvé les mêmes critiques acerbes, la même décortication presque scientifique, dénué d'affect, une réelle inspection plus détachée que toutes rétrospections.
Puis le roman s'élargit, parle à travers Simone de la vie et sa complexité, toute la littérature qui l'a éduquée, perdue ou retrouvée, enflammée ou révulsée. Et surtout les essais multiples, et bien souvent menant à l'échec, d'une adaptation de ses principes éthiques et vitaux, de ses croyances et conception philosophique, à la vie décevante, surprenante, inconnue malgré tout le savoir que Simone avait pu en tirer au travers de ses lectures et ses perceptions au filtre de ses parents, de son éducation catholique, des amis qu'elle vénère.
Je dirais que le roman a commencé à vraiment m'intéresser à partir de là 3eme partie: là, les enjeux amoureux, philosophiques, la vie à l'époque, y sont développés, analysés, dans une recherche toujours très personnelle sur le sens de la vie, l'essence humaine. Et surtout, j'ai adoré l'entrée de Sartre dont j'ai connu l'état d'esprit notamment à travers son roman autobiographique “les mots”, et que la description de Simone complète à merveille, bien que trop peu (mais c'est normal ça n'est pas du tout le sujet de son autobiographie !).
Et puis il y a eu aussi l'entrée et l'impact de Zaza et de Stépha qui m'ont beaucoup plu. Simone est passée par bien des phases pour beaucoup ont résonné en moi, et résonneront je pense en beaucoup de lecteurs qui s'intéressent à la littérature et la philosophie, ou encore la religion. Il faut s'accrocher tout de même dans les débuts, la lecture est relativement longue. Mais pour ma part ça en vaut la peine pour les dernières parties, qui soulèvent de grandes questions, donneront d'ailleurs peut-être des réponses à certains. Et puis la fin, sublime, une fin qui m'a émue malgré mon apparent détachement tout au long du livre. En réalité, je me suis attachée à Simone et Zaza… sans m'en rendre compte, imperceptiblement, presque à mon encontre. La place de la famille, de l'amour, de la société et des bonnes manières sont en perpétuels débats, et ce livre, bien que relatant l'époque entre les deux guerres, résonne encore dans ma tête, parce que la vie au final n'a pas changé. Les moeurs, le contrôle familial, certes oui; mais le sens et la quête de sens de la vie, l'amour, la dépendance en font encore bien partie! Alors, bien qu'au début j'ai hésité à arrêter, je suis ravie de cette fin !
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Autobiographie en quatre parties qui retrace l'évolution de la pensée de Simone de Beauvoir de son enfance à sa vie de jeune adulte en passant par les affres de l'adolescence. Cet ouvrage permet de découvrir le monde bourgeois et ses préjugés pendant la période de l'entre deux guerre. La partie qui m'a semblé la plus intéressante est celle qui décrit les débuts de l'amitié entre Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre.
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Cette autobiographie fut une lecture en demi-teinte pour ma part.

J'ai apprécié les souvenirs d'enfance de Simone de Beauvoir, sa relation avec sa soeur et la naissance de son amitié avec Zaza. Plus tard, sa rencontre avec Sartre (raconté peut-être trop brièvement à mon goût).

Sinon, j'ai trouvé le style un peu pompeux. de plus, je me suis parfois perdue dans la temporalité, peu de dates ou d'évènements auquel se raccrocher pour situer l'action. Et des longueurs, beaucoup de longueurs. De Beauvoir semble avoir passé beaucoup de temps dans sa jeunesse a se poser inlassablement les mêmes questions, avec si peu d'évolution (sur le mariage, la religion, sa place dans le monde, ses talents d'écrivaine). Je conçois que ce fut important pour elle mais c'est si lent pour nous ...
Enfin, De Beauvoir nous dépeint une souffrance : issue de la bourgeoisie, elle a cherché à dépasser les attentes de son milieu pour gagner sa liberté. Mais pour moi, ce qui manque à ce livre, c'est justement les descriptions qui nous permettent d'encrer le personnage principal (elle-même) dans un milieu social et ce qui fait qu'elle ait souhaité s'en affranchir. Très peu de choses sur la situation sociale et politique d'alors. Même si elle ne s'y intéressait pas, je doute que cela n'ait pas eu un impact quelconque sur sa vie ... Et si peu de descriptions sur le Paris de l'époque, il semble évident pour DeBeauvoir que le lecteur est un(e) parisien(ne) du début du 20e siècle : il faut connaître les jardins du Luxembourg, les rues de Paris, les cafés et tous les intellectuels qui ont fréquenté la Sorbonne à cette époque pour apprécier ce roman ...
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Très belle écriture pour la forme.
Pour le fond, c'est l'histoire d'une petite fille qui par sa force de caractère et son intelligence, fait tout pour s'en sortir. Sauf qu'on parle d'une petite bourgeoise qui essaye de s'extraire de son milieu; la notion d'héroïsme est donc très relative.
Et puis le destin de Poupette et de Zaza n'est pas forcèment très passionnant, quand on n'est pas de la famille.
L'auto-biographie s'arrête beaucoup trop tôt pour moi!
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Les mémoires de Simone de Beauvoir, de sa petite enfance à sa rencontre avec Sartre sur les bancs de la Sorbonne. On suit ici une jeune fille partagée entre une éducation très stricte, à l'influence catholique et ses envies sourdes d'indépendance et de liberté.

Dans ce premier tome de ses mémoires, Simone nous raconte ses jeux, ses lectures, ses premières réflexions sur la mort, la foi (qu'elle perd à quatorze ans), l'amitié (qui se symbolise par sa rencontre avec Zaza), l'amour, et surtout la peur de la solitude qui devient rapidement sa pire crainte.

Lien : http://mazel-livres.blogspot..
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