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EAN : 9782764434093
148 pages
Les Éditions Québec Amérique (27/07/2017)
3.77/5   11 notes
Résumé :
Le livre qui a inspiré le film du même titre, réalisé par Luc Picard, dont la sortie en salle est prévue pour septembre 2017


Octobre 1970. Manon, adolescente sensible et délurée, apprend qu'elle et son petit frère qu'elle aime plus que sa propre vie seront placés en familles d'accueil. Jamais Mimi et elle ne seront séparés. Jamais. Elle l'a promis «?juré craché?». Devant la menace imminente, Manon choisit le chemin de la rébellion et de la fui... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Voici un court roman remarquable, et en même temps bouleversant !
Nous sommes à Montréal en 1970, à cette époque où les adultes font peu de cas des ados (le mot n'est même pas utilisé une seule fois), les considérant tout au plus comme de grands enfants qui n'ont de toute façon rien à dire, mais doivent aller à l'école en semaine et à la messe le dimanche, aider à la maison et obéir aux adultes. A l'époque, on ne répondait pas encore aux questions des enfants. nous dit-on dès les premières pages.
On est aussi en pleine Révolution tranquille, mais les pauvres n'en sont pas moins pauvres… C'est dans ce contexte que Manon, issue d'un milieu clairement défavorisé, super-protectrice envers son petit frère Mimi, vaguement amoureuse de son grand cousin Paul et complice des deux frères de ce dernier à peine plus jeunes qu'elle, tente peu à peu à de comprendre ce monde des adultes qui l'entourent. Mais elle fait face à ce qu'il a de pire : la lente dégénérescence de son père atteint d'un cancer, la dépression dans laquelle sa mère impuissante plonge peu à peu, la pauvreté de son oncle alcoolique et de sa famille (où seul Paul semble vouloir relever la tête), et un Dieu qu'elle implore mais qui reste éternellement silencieux. C'est alors que, avec Mimi et les deux jeunes cousins, ils décident de s'offrir une grand-mère (en la kidnappant !), et partent sur les routes vers une vie libre et meilleure. Mais évidemment, les choses ne se passent pas comme ils auraient espéré…

Vu le contexte, on aurait pu s'attendre à un roman désespéré – ou désespérant, ce qui revient peu ou prou au même. Mais non… L'auteure présente tout par le biais des yeux de Manon qui, du haut de ses 16 ans, voit le monde avec une certaine candeur, qui n'est pas de la naïveté pour autant. Elle ne cherche pas à cacher ses premiers émois adolescents, ses premières tentatives de féminité, tout comme elle a un sens de la justice exacerbé, très pur, enfantin presque, et entièrement dédié au bien-être de son petit frère.
Mais le vrai tour de force dans cette histoire plutôt triste, c'est qu'elle ne sombre jamais dans le mélo, car cette fraîcheur de la jeune héroïne se traduit par une écriture légère et lumineuse, et aussi à travers une bonne dose d'humour. Oh ! rien ne m'a fait franchement rire aux éclats, on n'est pas dans ce registre-là, mais certains passages m'ont fait très largement sourire, grâce à leur petit côté décalé. L'auteure va même plus loin : elle joue sur deux tableaux très différents, qui s'imbriquent l'un dans l'autre et se complètent. On a d'une part la narration même, écrite dans un français courant, parfois même soutenu, orné çà et là de quelques québécismes, mais de façon plutôt discrète. C'est dans cette narration que l'autrice (toujours à travers la voix de Manon) parvient à asséner en quelques mots, en quelques phrases apparemment innocentes, des réalités qui interpellent tout à coup, tant elles sonnent juste. J'ai relevé quelques passages, en voici un parmi ceux qui m'ont le plus touchée : A l'époque, on ne fermait pas encore les portes des églises à triple tour en dehors des heures de messes : Dieu nous faisait encore confiance. Je n'ai pas choisi cet exemple par hasard, à vrai dire. Certes, ça m'interpelle personnellement pour des raisons que je ne vais pas développer ici, mais l'auteure n'est pas tendre envers cette Église, hypocrite et bien-pensante ; plusieurs passages, toujours teintés de cet humour quelque peu caustique, relèvent ce silence étourdissant d'un Dieu en qui Manon voudrait encore croire pourtant, ou se moquent de la cupidité des prêtres, qui voient l'argent avant de voir l'Humain. On n'est jamais dans une attaque rangée contre cette Institution, mais clairement elle n'a pas bonne presse auprès de l'auteure !

D'autre part, le récit est ponctué de toute une série de dialogues, essentiellement entre Manon et ses cousins ou avec son frère, et là : bienvenue dans le Québec profond ! On a l'impression d'entrer ainsi dans ces reportages qu'on voit parfois à la télé, où l'on interviewe des autochtones canadiens et bien francophones, sur l'un ou l'autre événement, mais alors nos chaînes de télévision se sentent obligées de proposer des sous-titres, tellement la façon de parler des personnes interviewées peut paraître incompréhensible à nos oreilles européennes. On est bien au-delà d'un accent différent… pourtant nous parlons la même langue ! Alors, certes, ces dialogues-là restent tout à fait compréhensibles (pas besoin de sous-titre ou de notes de bas de page !), mais j'ai quand même parfois dû les relire plusieurs fois, me les imaginer à l'oral comme si ça allait les faire mieux passer, et parfois (souvent) rechercher la signification de l'un ou l'autre mot, ou expression – ce qui, comme dit plus haut, n'est pas nécessaire pour la partie strictement narrative. Mais alors, au lieu de devenir tout à coup gênants au milieu d'un texte très abordable, ces dialogues très typés en rehaussent encore davantage la saveur déjà bien présente, ils donnent cette petite touche de piquant qui accentue le plaisir de la lecture, sachant par ailleurs qu'ils sont eux aussi empreints de pas mal d'humour : Manon a un excellent sens de la répartie !

Par ailleurs, il faut aussi souligner le contexte politique, qui est omniprésent en arrière-fond du roman, sans être jamais étouffant. La Révolution tranquille… quésaco ? Eh bien, ma foi, ça aussi il a fallu aller chercher sur Internet, et me rendre compte au passage à quel point mes connaissances sur le Canada sont quasi-inexistantes ! A part le sirop d'érable (hum !) et quelques autres particularités culinaires, ou le fait qu'on y parle un français bizarre, dans ce pays où les francophones sont numériquement dominés par des compatriotes issus des lointains Ango-saxo-germains – une situation que certains aiment comparer à celle de ma petite Belgique, où les francophones minoritaires ont tendance à se faire bouffer par les Flamands majoritaires, mais une voix me dit que c'est bien différent, même s'il y a des similitudes -, en fait, ici en Europe, on ne connaît rien ni de l'Histoire ni de l'actualité du Canada ! Or, cette Révolution tranquille semble avoir été une série d'événements majeurs, qui a connu ses partisans et ses opposants, semant quelques morts au passage… Je ne dis pas que je vais tout à coup me passionner pour cette Histoire-là, mais en tout cas, cette prise de conscience que je ne connais rien d'un pays proche par la langue mais tellement éloigné pour le reste, c'est un peu comme un électrochoc sur l'étendue des choses encore à découvrir ! Et c'est aussi le bonheur de se dire que c'est la lecture, et ce beau roman en particulier, qui permet cette petite découverte qui pourra peut-être en amener d'autres, comme une piqûre de rappel toute en douceur.
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Quelle belle découverte ! Ce livre est réussi du tout au tout car il nous entraîne dans l'histoire d'une petite fille confrontée à la douleur et à la peur de perdre son petit frère : ils vont être séparés et mis en famille d'accueil car leur père est gravement malade et leur mère en dépression. Manon, notre héroïne, va vouloir déjouer le destin en accomplissant une action forte avec la complicité de deux cousins. Une belle émotion de lecture. Je recommande.
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Une lecture rafraichissante et amusante que ce court roman truffé de ces expressions typiquement québecoises.
Un livre plein de sensibilité ,de tendresse et d'humour .
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cousine de Diane qui l'a écrit
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critiques presse (1)
LeJournaldeQuebec
11 septembre 2017
Ce roman truculent raconte les années 1970 et la crise d’Octobre du point de vue d’une ado rebelle.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
"Je l'ai serré fort, très fort. J'aurais voulu que son corps pénètre à l'intérieur du mien, l'incorporer, le prendre tout entier en moi pour qu'il n'ait plus jamais peur, plus jamais froid et qu'il ne tremble plus"
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Mon père m’avait enseigné à faire très attention aux maniaques. Il disait qu’il ne fallait pas se laisser aborder par les inconnus, ne jamais accepter de bonbons des étrangers, ne pas s’approcher d’une voiture quand il y a un homme seul dedans, surtout si ses mains ne sont pas sur le volant, et d’éviter de se promener dans les coins sombres le soir. Véritablement obsédé par les maniaques, papa connaissait des histoires terribles qui étaient arrivées à des petites filles du quartier. Il nous les racontait pour que ça nous fasse peur et que ça nous serve d’exemple, mais il se rendait rarement jusqu’au bout de ses récits. C’était assez frustrant, parce qu’on ne savait jamais exactement ce qui était arrivé à la fille ni ce que le maniaque en question avait de sexuel.
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À cette époque, il y a de cela quelques années, j’ignorais encore ce qu’était la souffrance. À douze ans, la pire souffrance que je connaissais, c’était le mal de genoux : parce que j’avais grandi trop vite, je m’emmêlais constamment dans mes grandes jambes en courant dans la cour de l’école, et tombais sur les genoux. Ça m’arrivait au moins une fois par semaine et ça me faisait vraiment honte, parce que je devais passer la journée entière avec les collants déchirés ; déjà que dans la famille on avait l’air plutôt pauvre, c’était rien pour arranger les choses. Mon père, lui, avait mal tous les jours, comme un mal de genoux et une blessure d’orgueil dans tout son corps, mais je ne le savais pas.
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La langue de mon cousin, enfoncée dans ma bouche jusqu’à la luette, tournait maintenant comme un manège fou. Je savais que ça s’appelait un french kiss – les plus vieilles en parlaient souvent entre elles en gloussant comme des dindes –, je savais ce que c’était pour en avoir entendu parler, mais l’idée que je m’en étais faite se situait quelques crans au-dessus de cette gluante réalité. Du coup, les fourmis ont cessé d’escalader mon ventre, l’hélicoptère a survolé à nouveau la cabane, et je me suis sentie envahie, brusquement, par un sentiment d’angoisse étrange, comme on en ressent parfois à l’approche d’un grand malheur.
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e sais pas qui est l’espèce de lavette qui a dit qu’on s’habitue à tout, mais moi, je dis que c’est pas vrai. Est-ce qu’on peut sincèrement s’imaginer qu’à force de recevoir des claques derrière la tête, d’entendre des gens s’engueuler et d’être constamment empêché de faire ce qu’on veut, on va réellement finir par y prendre goût ? Celui qui a avancé cette théorie-là n’avait sûrement pas dans son entourage un Gaston ou quelqu’un de la même espèce, c’est sûr ! Moi, je ne m’habituais pas. Et je ne voulais pas m’habituer non plus.
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Vidéo de Nicole Bélanger
Bande annonce du film Les Rois mongols, adaptation du roman Salut mon roi mongol!, de l'auteure québécoise Nicole Bélanger
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