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EAN : 9782070376223
288 pages
Gallimard (02/01/1985)
3.9/5   126 notes
Résumé :
L'Hiver de force est un de ces livres confession proche de Miller ou de Kerouac. Les deux héros, André et Nicole, sont « sur la route », même quand ils ne bougent pas de l'appartement où ils se saoulent des films de la télé. Il y a leurs amis, Toune, Laïnou, Roger, Catherine, le bavardage lyrique.

Il y a le travail de correcteur d'épreuves, les chansons de Charlebois et surtout le merveilleux personnage d'André, si proche de l'auteur, rêveur éveillé ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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J'imagine une étendue blanche, de la neige en abondance, de la glace qui coule du nez. Même ma bière est gelée. Je me rabats sur un verre de rhum ou mieux, une bouteille de vodka glacée. A ces températures extrêmes, il faut savoir survivre en milieu extrême pour rentrer dans « l'hiver de force ». Mais comment tourner les pages à ces températures-là, lorsque mon majeur devient tout bleu. Voilà une question que je me pose, de force ? Mais ce n'est pas la seule. Qui est ce Réjean Ducharme que je découvre ici. Un récit alambiqué, sorti de son alambic, même en suçant la tire, j'ai pas tout compris. Je ne suis donc pas encore prêt à recevoir mon passeport québécois. En plus j'ai pas l'accent, et j'arrive même pas à comprendre Céline Dion quand elle braille.

J'ai pas tout compris, certes. La lecture fut parfois complexe, ardue même, face à tant d'élucubrations huluberluesques. Pourtant, j'ai aimé. J'ai été sous le charme de Ducharme. Cela doit faire partir d'une sorte de rite initiatique qu'ont les québécois, pour nous autres français, avant d'oser nous accepter. Il faut passer par Réjean Ducharme si tu veux faire partie de cette confrérie des buveurs de broue - et d'Unibroue. Comme celui d'écouter Robert Charlebois.

Le charme de la frette. Mais aussi celui de la plume – de lagopède à queue blanche – et de l'auteur. Il y a une telle musicalité dans sa prose, avec ces deux héros perdus dans ce monde trop civilisé capables d'écouter pendant des heures sur leur mange-disque l'album blanc des Beatles. Moi, pendant que je poursuis ma lecture, des mélodies trottent dans ma tête, genre « Je reviendrai à Montréal, Lindberg » ou « La complainte du phoque en Alaska ». Phoque, je serais bien sortie prendre l'air, la graine au vent, mais elle risque de geler… Alors, je me réchauffe des aventures d'André, d'après ce que j'ai compris, un double littéraire de Réjean, ce qui me fait penser que l'auteur est un doux rêveur, même en hiver, parce que quoi de plus beau que de regarder cette étendue presque vide d'homme mais chargée en âme.

« Hey poupée, t'irais pas me chercher une bière dans l'frigo ? » Tabarnak, ça serait quand même sympa de ta part… le temps que je finisse cet extravagant roman du terroir de Montréal avant que finisse le cul gelé sur la banquise avec le gosier asséché. C'est que je ne voudrais pas manquer le char de ces deux aventuriers, correcteurs de métier, dans ce monument de la littérature québécoise. Ils sont à la rue ou presque. Ils sont comme des losers, ou presque, pendant que leurs amis réussissent outrageusement leurs vies. Mais, je crois surtout qu'ils sont heureux comme ils sont, belle philosophie de la vie, le genre à apprécier le silence quand celui-ci s'impose, genre face à l'amour ou à la vue d'une banquise, dans le frette. Genre le fonne c'est platte. Et c'est en ça que j'ai apprécié cette lecture hivernale.
Lien : https://memoiresdebison.blog..
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L'action du roman, se déroule dans les années 70 au Québec. La situation économique et sociale de la province ne cesse alors de se détériorer, le taux de chômage atteint des sommets. C'est dans ce contexte particulièrement difficile que Réjean Ducharme choisit de placer ses deux principaux personnages : André et Nicole. Ces deux personnages sont des nihilistes qui refusent de se fondre dans une société dans laquelle les valeurs prédominantes sont la possession et le goût pour tout bien matériel.
Dès les premières lignes du roman, on apprend que Nicole et André, qui sont d'ailleurs bien souvent traités par l'auteur comme un seul et même individu avec l'emploi majoritaire du pronom « on », ont pour vocation première de dire du mal de tout.
Au fil des pages, et après la rencontre d'un personnage qu'ils baptiseront la Toune, ils vont renoncer à tout ce qui est matériel, travail, biens, puis finalement logement, pour se consacrer uniquement et de manière obsessionnelle à elle. On peut alors s'interroger sur la finalité de ces deux protagonistes, sont-ils simplement deux marginaux imbéciles et naïfs ou ont-ils pour fonction de dénoncer la société de cette époque ?
Dans ce roman on retrouve bien l'écriture si particulière de Réjean Ducharme, pleine d'aphorismes, néologismes et autres jeux de mots ainsi que de nombreuses références cinématographiques, musicales et littéraires.
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Ducharme, c'est notre Jean-Pierre Martinet québécois... Pas connu pour pas connu, on peut le dire. Si l'on préfère parler pour se faire entendre, que les maux dis soient entendus, on peut, sans se gêner, parler de Céline, pas d'y-t-on, mais le Céline de chez vous, pas chénous, celui qui se trémoussait sur sa chaise et pas dans une TV couleurs à lancer ces syllabes ! Dans l'hiver de force, on le savoure notre Ducharme, c'est comme du sirop d'érable, ça colle au palet, ça dégouline, ce n'est pas bon pour la ligne, mais ça réchauffe le coeur. C'est aussi un test pour savoir si votre oreille est capable d'attraper le Québécois, correct ou même de travers, c'est faux-nez-tique, c'est fonne à lire !

L'histoire se passe dans la belle province avec tout ce qui va avec ; des gros mots, des pirouettes sur la glace glacée jusqu'au bout du nez, des traversées du lac en barque, des pinottes dans la caboche, c'est pour dire comme c'est fonne ! Ils sont drôles, André et Nicole, à chercher à ne pas être comme les autres... s'effacer jusqu'à ne ressembler à personne, c'est un peu pour ça, que ce qu'ils préfèrent par dessus tout, c'est de ne rien faire, Rien avec une majuscule, ce n'est pas accessible à tout le monde ce rien là ! Ce n'est pas facile d'échapper à tout. Ce n'est pas juste de la paresse, il faut être tenace, être prêt à tout : rien ce n'est pas rien qui nous dirait André.

Le style Ducharme est ici tendu comme un arc. 270 pages travaillées au couteau, patiemment, travail d'orfèvre qui fait que ça se lit d'une traite, un respire, en une nuite. Nos bouts de doigts s'usent à tourner les pages pour suivre ces deux joyeux-lurons qui cherchent à perdre le nord, à perdre la face dans les rues de Mouréal avec toute la jet set qu'ils cherchent à éviter. C'est d'ailleurs pour ça qu'ils restent dans leur appartement et qu'ils le vident par petits bouts, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien, sauf le chat, qui partira de lui-même, c'est un chat surdoué, faut pas l'oublier !

Malgré tout ce lyrisme, malgré les personnages complètement à côté de la plaque, volontairement, se dessine une belle histoire entre André et Nicole, parler d'amour serait peut-être trop simplifier la chose, ce n'est pas non plus de la simple loyauté, ni seulement de la tendresse, tout ça et un peu plus. Avoir quelqu'un sur qui compter, quand il ne reste plus rien, quand tout se vide, ça n'arrive pas si souvent que ça que ça mérite qu'on le dise, car ce n'est pas eux qui vont nous le dire...
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De ce roman que j'ai lu il y a plusieurs années, j'ai beaucoup plus retenu le style que le récit en soi. C'est que l'écriture de Réjean Ducharme frappe l'imaginaire par ses figures de style, ses jeux de mots, ses expressions très colorées et poétiques . Je me souviens aussi des deux principaux personnages et de leur manière de vivre plutôt spéciale (un de leur loisir préféré étant de lire La Flore laurentienne). J'ai beaucoup apprécié ce roman très différent de tout ce que j'ai lu.
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D'après le compteur de mon Kobo, Rejean Ducharme se sert 53 fois de mot "fucké "dans "L'Hiver de Force" ce qui est beaucoup même pour un écrivain Québécois. Celui qui le prononce dans une conversation française se fait marquer à vie comme étant un imbécile par 90% des francophones qui l'entendent et par 100% des anglophones présents. Je suis de la deuxième catégorie. Alors je considère l'auteur plus abject que son livre.
Parce que Ducharme est dans le panthéon québécois des incontournables, les professeurs de littérature française le mettent souvent au programme probablement parce qu'ils trouvent que c'est ennuyant d'enseigner "L"Avalée des avalés" l'année après l'autre et que "L'Hiver de Force" illustre très bien aussi le génie de Ducharme.
Je crois cependant que "L'Hiver de Force" va éventuellement perdre cette mission pédagogique car il va devenir impossible à comprendre. Dans "L'Hiver de Force", il y a énormément des références aux célébrités de la culture populaire et les produits à la consommation qui ont disparu depuis quarante ans. Je suis un vieux à la retraite. Je sais que Yuban a été un marque de café instantané qui était sur le marché pendant les années soixante. Je sais que Road Runner était un personnage du dessin animé Bugs Bunny. Finalement, je m'en rappelle de l'époque où les appareils téléphoniques étaient attachés physiquement au réseau et que les seules les gens dans un état de furie les arrachaient du mur. Un jeune lecteur ou lectrice se sentira perdu dans cet océan des références obscures. Dans dix ans ce sera pire.
"L'Hiver de Force" raconte la vie de deux perdants-nés qui vont nulle part et passent leur vie à penser aux choses qu'ils achètent à l'épicerie ou qu'ils voient à la télévision. Je ne nie pas que ce roman ne reflète pas une certaine réalité mais quand on le lit, on est plongé dans une banalité absolue.
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Citations et extraits (44) Voir plus Ajouter une citation
Soudain, un malotru parut, arracha la bouteille de la bouche de Nicole, en but le quart, puis, d’une façon qu'on voit tout le temps au cinéma, se versa le reste sur la tête.
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Un chauffeur de taxi âgé mange une sorte de flaque de jambon grise et triste comme la figure du premier ministre Bourassa sur Montréal-Matin.
Il raconte à Nikos comment l'hiver c'est mieux que l'été. "Prends le mercredi par exemple. L'hiver je serre mon char à six heures. Me lave, me change, me repose, mange un bon steak, j'ai tout fini vers sept heures et demie. M'assis, m'allume une bonne cigarette, puis 'Le Ranch de Willie' commence au canal 10. Des bonnes chansons de cowboys, des bonnes farces, j'ai un fonne noir. Après, juste le temps de me lever pour aller tourner le piton : la partie de hockey commence au canal 2.
puis là je suis bon pour jusqu'à dix heures et demies onze heures moins quart, puis là je me couche puis je dors. L'été 'Le Ranch à Willie'
tombe, le hockey tombe, y'a plus rien, c'est mort, pas le goût de revenir à la maison, pas le goût de rien faire, me parke au stand puis j'attends puis je niaise..."
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Quand Nicole fait basculer sa tasse pour prendre une gorgée de café, tout le café, sans exception, s'incline, monte vers sa bouche. Pas une particule qui reste en place, qui ne fasse corps ; le café, d'une seule pièce penche. Sa bouche s'arrondit, ses lèvres se plissent, elle aspire. On ne boit pas les premières gorgées d'un café, on les siphonne, on les teste... "C'est chaud. " Oui, Nicole. Oui ! Oui ! C'est vrai : c'est chaud. C'est chaud et puis c'est tout ; il n'y a que ça.
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Qu’elle a passé la fin de semaine stone. Qu’elle a pris trois caps d’acide, que c’était du mauvais stock, qu’elle a fait des bads trips. Que c’est sur le hasch qu’elle a les meilleurs flashes. Qu’il n’y a rien pour la mettre dans le groove comme quelques bonnes sniffées de hasch. Que l’acide, man, c’est pas son bag, que ça fuck son cosmos, que là son cosmos est aussi fucké qu’il peut. Qu’elle s’excuse mais qu’elle est encore toute shakée par les mauvaises vibrations. (Ma grammaire undergound fait dur.) Puis boutonne, déboutonne…
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Nous avons descendu sans rien dire l'escalier du Thalassa Bar. Nous avons marché sans rien dire, la parole coupée pour toujours, jusqu'à l'avenue du Parc. Dans la nuit froide, devant la montagne lisse et nue où la lune blanchoyait comme une dernière couche de neige, nous avons couru pour héler le taxi Diamond qui fonçait pour ne pas manquer sa verte. J'ai ouvert la portière gris fer du Chevrolet Biscayne 1969. Elle est montée sans rien dire, tête première, pliée en deux. Et je n'ai jamais rien vu de moins sexy que ses petites culottes, qu'elle a montrées sans faire exprès, comme toutes les femmes qui montent en auto.
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Videos de Réjean Ducharme (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Réjean Ducharme
"C'est un monstre sacré de la littérature canadienne qui est mort cet été.Réjean Ducharme avait su conquérir le monde francophone avec seulement 9 romans en 50 ans d?existence."
Réjean Ducharme - le conseil d'Emmanuel Khérad https://www.franceinter.fr/emissions/la-librairie-francophone
Dans la catégorie : Littérature dramatiqueVoir plus
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