Vingt ans après la première lecture, le charme opère encore.
Le narrateur de ce court roman se prénomme Boris. Né en Russie au début du vingtième siècle, il vient d'obtenir son bac, en France, au moment où commence cette histoire. Pour passer les mois d'été, il est invité par son ami de Lycée,
Jean-Paul, dans un château qui appartient à la famille de ce dernier. le lieu se nomme
Roquenval. Il n'est occupé, habituellement, que par une très vielle comtesse et son domestique. Mais cet été là, outre les deux garçons, trois autres personnes vont venir profiter de ce cadre d'un autre temps : deux cousines de
Jean-Paul et une amie de l'une d'elle.
Par une écriture délicate, simple, précise,
Nina Berberova nous donne à observer, au travers de ses personnages, des thèmes pourtant variés et très forts. Il y a, évidemment, la découverte du premier amour (et de la jalousie), mais
Roquenval est surtout un roman sur la mémoire et les différentes attitudes que l'on peut adopter vis-à-vis d'elle : rechercher des signes pour raviver son passé ou, au contraire, tout faire pour masquer ses origines, brouiller ses souvenirs, dissimuler certaines personnes ou certains évènements gênants.
Et puis, bien sûr, en mettant en scène cette vieille dame et ces cinq adolescents,
Nina Berberova nous présente ce douloureux contraste entre une vie qui s'achève, solitaire, dans un vieux château délabré, et ces autres vies qui éclosent… et ne font que passer à
Roquenval.
Cela fait beaucoup pour un roman de moins de 90 pages ; mais c'est justement le talent de
Nina Berberova de parvenir à révéler tellement de choses avec une telle économie de moyens.