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EAN : 9791030800067
128 pages
Le Dilettante (12/02/2020)
3.94/5   9 notes
Résumé :
D’apprendre, comme nous le permet son préfacier Ghislain Pierre, que sous Alain Berthier se cache Alain Lemière (1901-1984), ami de Louis Guilloux, cofondateur du fugace vorticisme à la française et administrateur de la revue Bifur, cheville ouvrière des dictionnaires Quillet et auteur pour Hazan d’une tétralogie japonaise, à la fois nous renseigne et nous déroute. Car, avec Notre lâcheté, son unique roman paru Au sans pareil en 1930, il nous livre une de ces rares ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
"Mais cette débauche avec des prostituées ne me donna à aucun moment l'impression de déchoir, j'avais beau choisir toujours des filles plus laides et plus vieilles - forcées à plus de complaisances - je me trouvais normal et logique avec moi-même dans une vie normale et réglée. Et l'indifférence où mes fautes laissaient ces femmes les réduisait à rien : à leur propre valeur."

J'ai essayé, durant ma lecture, de retrouver une histoire aussi dérangeante que celle-ci. Je n'y suis pas arrivée, et au fond de moi, je suis contente d'avoir pu lire quelques choses qui me sortent de mes habitudes. Et quelle claque ! Cet état quasi-végétatif dans une vie qu'on ne souhaite pas, mais dans laquelle on se complaît m'a fasciné. Autant, je n'arrive pas à être raccord aux propos loin de moi, de mes valeurs, autant cette histoire m'a simplement captivée par sa force brute, son ton crue et sans concession. Mon attention était tout entière à cette lente déchéance, sans y trouver de plaisir morbide, j'ai vraiment aimé lire ce véritable extraterrestre littéraire.

Ce livre, paru une première fois en 1930, me semble intemporel, malgré un style et un vocabulaire soutenu. Intemporel, car les souffrances, subies ou consenties existent toujours, de la même manière. La prise de conscience du narrateur est telle qu'elle semble entrer dans une normalité. Ce qu'il vit semble n'être que le reflet des silences complaisants de la société, passée et présente.

Lorsqu'il finit par rencontrer cette femme fortunée, Paule, il ne fait que se laisser aller à une facilité de la vie : elle finit par lui mettre la bague au doigt, il s'emprisonne dans un mariage qu'il ne souhaite pas, mais il s'y complait. J'ai même l'impression qu'il se résigne à vivre dans ce qui le révulse : "Tout était fini. J'avais atteint une vieillesse véritable. Rien ne changerait plus. J'entrais dans l'immobilité éternelle : je m'étais accompli et rien ne pouvait m'arriver, puisqu'on n'a d'autre but que soi-même. le monde extérieur cessait d'exister, puisqu'il ne pouvait plus rien modifier de notre bonheur ni de notre malheur".

Les propos du narrateur concernant son épouse sont peu élogieux. Et pourtant, malgré le cynisme, la brutalité des mots, l'aversion que l'on ressent des personnages l'un pour l'autre et ce lien indéfectiblement cruel qui les unit, le tout donne à cette histoire une force littéraire. On est pris, serré par notre propre jugement, alors qu'on aimerait secouer cette fourmilière, on assiste impuissant à des décisions qui nous dépassent.

En bref :
Nous sommes loin de la littérature romantique. L'auteur met en exergue toute la condition dans laquelle le narrateur se trouve, résumé en un mot par le titre du livre. À lire !
Lien : https://lecturedaydora.blogs..
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Dans ces moments de confinements, la vie semble être une onde sombre pénétrant votre chair au confins de vos entrailles, les mots coulent dans votre corps se diffusant dans un brouillard inexplicable contradictoire, émergeant au loin un roman chiné peu de temps avant cet isolement sanitaire d'un désastre virale létale où la politique chavire dans son naufrage d'incompétence, Notre lâcheté d'Alain Berthier emporte avec effroi le temps statique d'un printemps joyeux s'évaporant vers une destinée libre de ses hommes enchainés, ce titre frissonne nos états d'âmes actuels, cette conscience collective s'égarant dans le tumulte d'un média Orwellien, Notre lâcheté est-elle personnelle comme ce personnage d'Alain Berthier, ou encrée au plus profond de notre civilisation !
Alain Berthier de son vrai nom Alain Lemière, natif de Saint Brieux en Bretagne, ami de Louis Guilloux, le gérant de la revue éphémère et chic « Bifur » jusqu'en 1931 et sera le directeur d'une encyclopédie de l'art japonais en quatre volumes parue en 1958 chez Hazan, son unique roman Notre lâcheté publié en 1930, presque oublié, renait de ces cendres tel le phénix des éditions le Dilettante, le rééditant dernièrement pour le grand plaisir des amateurs de la littérature, celle, jadis créatrice de proses sincères où la phrase primait sur l'histoire, où l'aventure littéraire était principale, dans ce court roman, le récit concentre une amertume acide, la perversité de cet homme cristallise le mal de l'être humain, celui allant vers la facilité de ces sentiments, cette pleutrerie vénale, cette férocité physique, cet homme devient le graal absolu de la faiblesse d'âme, cette bassesse sourde, cette méchanceté préfabriquée se diffusant dans tout son être, absorbant la noirceur pour un dégout de la vie et des autres, un nihiliste de la vie, une descente dans le gouffre de Dante, ces abimes de l'enfer qu'il va côtoyer pour chavirer son couple dans une sordide chute létale de violence.
C'est toujours étrange de trouver un roman chez son libraire indépendant, un roman ancien réédité, puis se dire voilà une rareté, une petite pépite à la découverte d'une nouvelle génération de lecteur, je découvre que ce roman est devenu en quelque temps la référence des critiques à faire, tout le monde y va de sa petite tambouille, pour dire à tous, vous voyez, nous aussi nous faisons la nôtre, une surenchère nauséabonde. Il faut être à la mode, ce roman le devient malgré lui, c'est un raz de marée vertigineux, je suis inerte à de bruit pour rien, car ce roman parle pour lui, ce n'est pas ses vautours consanguins qui vont ériger la stèle profonde de la puissance de ce roman, Notre lâcheté est là pour cracher sur ces critiques à la mode, ses messieurs à la ferveur sociétale, nous aussi, nous le savions… Je suis, malgré moi à la mode, je deviens l'air du temps, juste éphémère, une nano seconde, je lis la perle, celle éphémère d'une fraction de seconde, je dévore avec une petite lenteur cette confession d'un homme prisonnier de ces démons, un homme vile, un homme en proie à la lâcheté de vivre sa non vie.
Ce récit est l'anthropologie minimaliste d'un homme broyé par la société le dévorant dès son plus jeune âge. Bridé par ses parents et de leur statut sociale, ce garçon dérive vers un océan qui le submerge, pour s'y noyer, il devient le persécuté des autres acceptant ce supplice, il coule dans les profondeurs amers de ces pulsions, renonçant aux plaisirs de la chair, pour les assouvir avec des filles de joies sans plaisir, juste une perversité refoulée. C'est l'autopsie d'un homme soumis, résigné, Alain Berthier parle d'emmurement dont il ne pourra plus en sortir. le comble de cet homme c'est la gante féminine, cette salacité interdite des jolies filles, la timidité l'accapare au soin de sa chair meurtrît par les démons qui sommeillent dans ses gènes, cet homme aura comme amour la lâcheté de son être, celle de cette femme âgée.
Alain Berthier décompose son roman en deux parties, celle de la naissance d'un jeune garçon Hypocrite, un Tartuffien, la seconde la consécration maritale d'un homme lâche perdue dans sa faiblesse. Ce couple joue la comédie de l'amour, Alain Berthier de son héros sans conviction, cet homme glissant dans la vie sans la vivre, la subissant, fait une analyse psychologique complète de ce personnage. Tout le long du roman, sa voix s'entremêle à ses pensées, le guidant vers une destinée inéluctable, une vie sans force, une descente vers la paresse des sentiments, vers Notre lâcheté.
Ce personnage ivre de sa passivité, goutte au plaisir de la paresse, se vend physiquement à sa compagne, une femme laide, grosse, vieilles, les termes sont peu flatteur, Alain Berthier la nomme à travers son anti-héros, de « veille femme obèse et répugnante », ayant le « dégout de ses baisers », « ce corps empâté par l'âge allait devenir son univers. » , la trouvant « ignoble » sans ces artifices de beauté, l'ennui le console de son « dégout et de son mépris » pour cette femme, le considérant comme un reptile, comme un arbre, un paysage, cette femme n'est plus, son corps n'est qu'une immondice pour cette homme, son ennui, sa faiblesse, ce confort factuel d'homme entretenu, cette union de circonstance scelle une fin de ces deux êtres, l'une lâche de sa faiblesse d'âme, l'autre perdue d'un passé lointain, d'une beauté évaporée, cette femme méprise sa propre fin par accepter de se faire battre au quotidien pour prolonger encore son existence de femme, être l'objet de coups de mépris, de sauvagerie sexuelle. Cette femme devient le jouet du jouet qu'elle a choisi par sa pleutrerie, désirant le tromper avec des jeunes hommes qu'elle paie de cette fortune qui la rajeunit pas physiquement mais qui devient une monnaie pour jouir d'eux dans leur bras, exulter de cette jouvence achetée, maitresse de la jeunesse de ses amants, cette vieille femme en devient la proie vile de sa perversion, elle est l'esclave de son âge, son argent l'avilit. Ce couple se meurt de leurs vices, cet homme par sa faiblesse meurt sa jeunesse dans la mort de ce mariage machiavélique.
Alain Berthier avec ce petit précis d'écriture, cisèle avec beaucoup de rigueur la psychologie trouble de l'être humain face à sa faiblesse et ses démons. La peinture de la dérive de ce couple est l'apanage du malaise de deux âmes en perditions, je repense à une réflexion d'une amie sur ce roman que je lui ai plus ou moins résumé, lui rappelant un roman d'Albert Camus La chute.
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Notre lâcheté est un roman sordide et cruel qui élève avec style la noirceur au rang des beaux arts, un diamant pour les amateurs de littérature dépressive.
L'article complet sur Touchez mon blog, Monseigneur...
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
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critiques presse (1)
Bibliobs
05 mars 2020
Ce livre est le seul publié, en 1930, par le mystérieux Alain Berthier. Il raconte l’autodestruction d’un couple. C’est de l’or noir.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Tout était fini. J'avais atteint une vieillesse véritable. Rien ne changerait plus. J'entrais dans l'immobilité éternelle : je m'étais accompli et rien ne pouvait m'arriver, puisqu'on n'a d'autre but que soi-même. le monde extérieur cessait d'exister, puisqu'il ne pouvait plus rien modifier de notre bonheur ni de notre malheur.
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Mais cette débauche avec des prostituées ne me donna à aucun moment l'impression de déchoir, j'avais beau choisir toujours des filles plus laides et plus vieilles - forcées à plus de complaisances - je me trouvais normal et logique avec moi-même dans une vie normale et réglée. Et l'indifférence où mes fautes laissaient ces femmes les réduisait à rien : à leur propre valeur.
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Je mine de ma faiblesse, de mes peurs, de mes incertitudes ceux qui me font confiance. Les conseils que je donne les perdent, parce que je suis faible, mou, impur, incapable de suivre une ligne droite, et dépourvu de cette chaleur à vivre qui vous met au-dessus des événements. Et parce que je ne cherche, au fond, que mon repos et un divertissement à mon propre ennui.
Mais on s'accroche à moi, car j'ai le malheur d'être pitoyable, comme tous les êtres nerveux et sensibles.
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Tout petit, j’étais, paraît-il, violent et volontaire. Et, si lointain qu’il soit, je sens parfois encore en moi cet enfant d’un an ou deux qui, lorsqu’on lui refusait quelque chose, se cognait la tête contre le plancher jusqu’à ce qu’on lui cédât – ou qu’il s’évanouît. Il ne me reste pourtant de lui que cette poussée de sang, quand on le contrarie, et cette peine à me donner qui fait trembler mes mains…
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Et je me livrais aux pires excès, non pour rechercher le plaisir, mais pour retrouver, en quelques instants, toute la souillure de mes années de débauche.
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