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Citations sur Raturer outre (19)

Qui est-il, qui s'étonne, qui se demande
S'il doit reconnaître dans cette image ?
C'est l'été, vraisemblablement, et un jardin
Où cinq ou six personnes sont réunies.

Et c'était quand, et où, et après quoi ?
Ces gens, qui furent-ils, les uns pour les autres ?
Même, s'en souciaient-ils ? Indifférents
Comme déjà leur mort demandait d'être.
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L'idée d'un livre.

Ne désespère pas ! Vois, l'un près de l'autre,
Tu peux les voir penchés sur un même livre.
Un nom y est barré à toutes les pages,
Mais le trait qui le biffe, c'est la lumière.
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Le pianiste


II
Une main qui se risque, désirante,
Dans les remous d'une eau soit claire soit sombre,
Son image se brise, on pourrait croire
Qu'elle n'a plus la force de retenir.

Et cet autre, dans un miroir ? Elle s'approche
De la tienne, qui vient à elle, leurs doigts
 se touchent
Presque, mais dans le rien de cet écart
S'ouvre l'abîme entre être et apparence.

Ces doigts, au moins, qui émeuvent des cordes.
Une autre main va-t-elle, du fond des sons,
Monter les prendre dans les siens, pour les guider ?

Mais vers quoi ? Je ne sais si c'est amour
Ou mirage, et rien que du rêve, les paroles
Qui n'ont qu'eau ou miroir, ou son, pour
 tenter d'être.

p.25
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Le pianiste


I
Ce clavier, il y revenait chaque matin,
C'était ainsi depuis qu'il avait cru
Entendre un son qui eût changé la vie,
Il écoutait, martelant le néant.

Et ainsi allait-il un sol détrempé.
La musique, plus rien qu'une lueur
À l'horizon d'un ciel qui restait sombre,
Il croyait que l'éclair s'y amassait.

Il vieillit. Et l'orage l'enferma
Dans sa maison aux vitres embrasées.
Ses mains sur le clavier égarèrent son rêve.

Est-il mort ? Qu'il se lève, dans le noir,
Entrouvre sa porte, et sorte. Ne sachant
Si c'est le jour qui point ou la nuit qui tombe.

p.24
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Branches basses


II
Une seule prairie jusqu'à l'horizon,
Une seule pensée,
Ici nomme l'ailleurs par le vol des grues,
Je n'ai souci que de me souvenir

De l'à-présent qui monte, telle une vague,
De l'immense dehors réconcilié
Avec ce qui se fait et se défait
Ou se veut et deveut, dans la parole.

Vienne, petite fille en robe à carreaux,
La fin de tout, ce ne sera, riante,
Que le repli des mots sur la couleur.

De quoi s'envelopper dans la lumière
D'un jour d'été en pays étranger,
Serrant sur soi le vocable et son ombre.

p.36
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Branches basses


I
Instant qui veut durer mais sans savoir
Tirer éternité des branches basses
Qui protègent la table où clairs et ombres
Jouent, sur ma page blanche de ce matin.

Autour de ces deux arbres d'abord l'herbe,
Puis la maison, puis le temps, puis demain
Pour ouvrir à l'oubli, qui déjà dissipe
Ces fruits d'hier tombés près de la table.

Là-bas est loin. Toutefois, c'est surtout
Ici et maintenant qui sont inaccessibles,
Plus simple est de rentrer dans l'avenir

Avec, pour tout à l'heure, quelque peu
De ce fruit mûr, par la grâce duquel
Du bleu se prend au vert dans la nuit de l'herbe.

p.35
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Soient Amour et Psyché


I
Ces mains qui se prenaient à elle, dans la nuit,
Elle les ressentait sans nombre, ne cherchait
À leur donner figure. Il lui fallait
Ne pas savoir, désirant ne pas être.

Âme et corps, pour nouer vos doigts, unir
   vos lèvres,
Faut-il vraiment l'approbation des yeux ?
Peinent nos yeux, qu'oblige le langage
À déjouer sans répit trop de leurres !

Psyché avait aimé que ne pas voir,
Ce soit comme le feu quand il enveloppe
L'arbre d'ici des autres mondes de la foudre.

Éros, lui, désirait garder tout ce visage
Entre ses mains, il ne l'abandonnait
Qu'à grand regret aux caprices du jour.

p.39
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Eau et pain


Ce peu de toile, et déchiré ? Le ciel
Sur une lande où errent les bergers
Ave rien, à la nuit, que leurs appels
Pour troubler de leur bêtes le grand rêve.

Et je pressens que le peintre a voulu
Que l'ange qui répare l'injustice
Cherche des yeux, même dans un tableau,
Agar, et cet enfant qui fuit avec elle.

Et les voici, et l'ange est auprès d'eux,
Mais c'est ici que l'image s'efface.
L'invisible reprend à la couleur

Le pain miraculeux, le broc d'eau fraîche.
Ne reste, sur l'enfant, qu'une lueur
Qui fait rêver qu'en lui le jour se lève.

p.34
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Le lit, les pierres


Elle nomme le lit, qui est plus vaste
Que le pays qui s'étend devant eux,
Ce désordre de flaques et de joncs,
Et de lumières, où les ailes remuent.

Et lui nomme la pierre,
Ses masses fissurées, ses grands creux d'ombre,
Puis l'un et l'autre nomment la nuit qui vient,
Un pour la dire obscure, l'autre claire.

Que l'on donne deux noms à ce que l'on aime !
Écrire à deux le monde aurait quelque sens,
Dit à Adam rêveur Ève soucieuse.

Ils vont, ils ont nommé, tant les mots veulent bien,
Une maison, le safre, une huppe, un ravin,
Un lit au loin, déjà couvert de pierres.

p.32
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Dans le miroir


Imagine placé dans une chambre
Un grand miroir. La clarté des fenêtres
S'y prend, s'y multiplie. Ce qui existe
Devient ce qui apaise. Là, dehors,

C'est à nouveau le lieu originel.
Passent Adam et Ève, dont les mains
Se rejoignent ici, dans cette chambre,
Elle, tout une longue jupe, à falbalas.

J'ai pris un fruit, c'était dans un miroir,
L'image n'en fut pas troublée, le jour d'été
En éprouva à peine un frémissement.

J'en perçus la couleur, la saveur, la forme,
Puis le posai, dehors. Et vint la nuit
Dans le miroir, et les fenêtres battent.

p.33
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