Je lis régulièrement de la poésie, mais n'en fais jamais de retour par ici – je trouve cela assez impossible. N'ayant pas fait d'études de lettres, je n'ai que mes ressentis intimes pour en parler – c'est déjà pas mal, me direz-vous ; mais ma timidité s'inquiète toujours de légitimité et ma pudeur aussi met son véto – pas envie de me dévoiler l'âme à l'air en place publique.
Pour
Sortir de la lumière, néanmoins, me voici en train de rédiger un billet pour le blog. Parce que je connais l'autrice et qu'avec Aline (@lili_desbellons sur Instagram), notre amitié scintille de bleu, d'écoute et de sourires – j'ai envie de parler de son texte récemment publié chez le chat polaire. Assise devant mon clavier et mon écran (je viens de taper « cran », d'ailleurs, héhé, coucou joli lapsus !), je réfléchis à ce que je vais bien pouvoir vous dire de la beauté et de la puissance saisissantes de ce texte.
La présentation éditeur : « [Le] travail poétique [d'
Aline Bonnier] mêle prose et forme versifiée, narration lyrique et fragment lapidaire. Les rythmes et les formes du texte s'alternent et dialoguent pour explorer, sous le prisme de la fiction, les émotions ambivalentes des espaces transitoires de l'existence.
Sortir de la lumière, premier recueil publié au Chat Polaire, raconte l'un de ces espaces-là, entre une mère et sa fille. »
J'ai relu
Sortir de la lumière plusieurs fois, déjà. Pas à la suite, non, car chaque lecture me laisse un peu sonnée. Je l'ai relu chaque jour et à chaque fois en entier, n'ayant eu envie de m'arrêter nulle part en chemin – je soupçonne certains passages d'avoir des choses essentielles à me dire encore. Peut-être ceux à la lecture desquels mon coeur se serre et mes yeux picotent. Je sens mon cerveau essayer de mettre en idée ce que mon coeur et mon âme ont déjà perçu. Alchimie des mots, des phrases comme des poupées gigognes : du sens dans du sens dans du sens.
« Tu souffres parfois, c'est un fait. Je te vois en cachette porter le monde plus lourd, enrouler ton dos, souffler comme un bagnard. Je te laisse cachée dans ta souffrance car nul ne mérite d'être dénudé à ce point. Je ferme les yeux sur ces grimaces qui retiennent encore ta peau captive et font de toi une boule d'os à peur et à raison. Puisqu'en souffrance, aucune échappatoire possible : se faire vague, devenir oiseau. »
Sortir de la lumière est de cette trempe de poésie qui ouvre une porte vers d'autres dimensions. Les mots d'Aline sont un vecteur qui permet d'y tomber, d'y accéder, d'y voyager. de s'y perdre aussi, peut-être, mais avec un espoir tenace de s'y croiser bientôt, à nouveau – enfin ? Cette porte ouverte pour conduire à nous, à soi, à je.
L'écriture d'
Aline Bonnier est intense et habitée. Et ce recueil bénéficie d'un très joli objet livre, presque carré mais pas tout à fait, au papier épais, doux et ferme au toucher, avec quelques illustrations en noir et blanc de
Laurie Joly en contrechant (et un marque-page canon !). Pour moi, un nouveau livre de chevet.
« Nous avons cessé d'être une pour venir à la vie, porter à la bouche les baies du monde, susurrer à l'aveugle le cri des rois, être deux vies du monde, en grandeur égales, et tâter l'ardeur du chemin avec doigts et poumons. »
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