La noble description que fait
Henri Bosco de l'âne donne l'image d'un animal venu du paradis : c'est le cas, car il vient du domaine des Belles-Tuiles, dans la montagne, où le vieux Cyprien, qu'on dit magicien ou sorcier, a fait un jardin comme un paradis sur terre. Pour le garçon rêveur Constantin, c'est l'endroit qu'il veut trouver, malgré l'interdiction de ses grands-parents. L'adolescent est élevé par eux à Peïrouré, en plaine, en compagnie d'un pâtre, d'une servante et d'une petite orpheline appelée
Hyacinthe. Il ne tarde pas à apprendre que celle-ci se rend souvent à Belles-Tuiles. Un beau jour, l'âne Culotte guide Constantin là-haut : "... je faisais corps avec l'âne ; sa chaleur se glissait tout le long de mes cuisses et passait dans mes reins ; le jeu du moindre de ses muscles était sensible aux miens. Il ne marchait plus ; je marchais moi-même, et nous formions comme un grand être tiède touché par le printemps, un quadrupède humain, heureux de voyager sous les pins et les rouvres, dans l'éclosion du pollen roux et le parfum de la résine."
Le récit a pour décor les paysages du Lubéron, terre magnifique de paysans et vignerons qu'affectionne l'auteur. Il est étonnant de voir ce conte [illustré par
Philippe Mignon, 1983] publié dans la collection
Folio Junior, sous prétexte, sans doute, que s'y promène un âne qui porte culotte. Car il s'agit d'un texte énigmatique, fabuleux et mystique, dont l'intelligence peut ne pas se révéler d'emblée à un esprit trop jeune.
Est-il possible de réaliser un paradis hors le ciel prêché par l'abbé Chichambre ? Où peut mener cet orgueil ? Des questions au coeur du livre d'
Henri Bosco.
Suite à quelques transgressions, le monde idyllique de Belles-Tuiles apparaît soudain désenchanté. L'âne est devenu un âne comme un autre. Puis cette phrase "On ne retrouva jamais
Hyacinthe" hante le lecteur. Il espèrera dès lors découvrir ce qu'est devenue l'étrange fille, proche de Constantin, en se tournant vers les suites de ”L'âne Culotte” : "
Hyacinthe" (1940) et "
Le jardin d'Hyacinthe" (1945).
Ces deux volumes, moins accessibles, complètent le premier récit pour former une trilogie. Ils côtoient le songe, le souffle de l'Esprit et une quête de la pureté – encore et toujours le paradis dont
Hyacinthe serait le symbole.
Henri Bosco s'est exprimé sur son personnage : « [
Hyacinthe] est mon livre clef et je l'ai écrit non point pour faire un livre, mais pour fixer par écrit à mon usage, un état d'âme, qui fut mien, et dont j'essaie de me dégager. Plus je vis plus je me persuade que l'oeuvre d'un écrivain digne de ce nom est en quelque sorte le journal de ses progrès spirituels » (Lettre à
Edmond Jaloux 9 juillet 1942).
J'ai lu une quarantaine de pages de ce second opus, puis l'ai mis de côté, considérant cette lecture peu appropriée à mes aspirations du moment. J'y retournerai. le style de
Henri Bosco est sublime et le niveau de ces textes mérite mieux qu'un survol.
Afin d'édifier le lecteur sur la trilogie, le site "Université Côte d'Azur" présente chacun des titres de façon concise et pénétrante.
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