Je ne me lasse pas de l'univers d'
Henri Bosco. Après une dizaine de bouquins en l'espace de quelques mois à peine, cet engouement ne se dément toujours pas. L'âne culotte est un des romans les plus populaires de l'auteur, je suis surpris de ne pas l'avoir lu plus tôt. Peu importe. Dès les premières pages, j'y retrouve cette atmosphère si précieuse qui m'avait plu ailleurs. Il y a les paysages de Provence, les hauts plateaux, les rivières, les villages reculés, avec ses petites maisons en pierre, ses ponts. le tout dans un style si poétique, un vocabulaire très précis et évocateur. Ses descriptions parfois longues (dans certains cas, de quelques paragraphes) ne me paraissent jamais lourdes. Et puis, il y a ces touches d'étrangeté, de mystère. Par exemple, cet âne culotté, qui semble vous regarder droit dans les yeux, comme s'il pouvait lire vos pensées…
Malgré mes premières appréhensions (avec cet âne en apparence si sympathique, presque comique, qui donne son nom au titre, et cet enfant qui le monte), j'avais l'impression qu'il s'agissait davantage d'un roman pour les plus jeunes. Un peu à la manière de
L'enfant et la rivière, même si un adulte peut apprécier ce dernier. Eh bien, non. Placer L'âne culotte entre les mains d'un gamin peut s'avérer hasardeux.
On y suit Constantin Gloriot, un garçon qui vit chez ses grands-parents, des gens différents des paysans des environs, aisés, qui emploient des domestiques. Avec lui, on découvre ce coin de pays, sa géographie, ses habitants. Certains sont des visages familiers, comme le curé, etc. Il se lie avec la petite
Hyacinthe, de son âge, silencieuse, orpheline gardée par les domestiques des Gloriot. Enfin et surtout, il y a Monsieur Cyprien, qui habite plus haut dans les montagnes, qui possède un jardin secret (paradis perdu) et des habilités spéciales (minéraux, végétaux et animaux semblent lui obéir, dont le fameux âne). Ce bonhomme particulier détecte quelque chose, un don, une prescience chez ces deux enfants qui seront entrainés dans une série d'aventures qui prennent des allures d'initiation. Il est difficile de résumer davantage ce roman.
Comme je l'ai écrit plus haut, j'adore l'atmosphère qui se dégage des romans de Bosco. Ce roman n'y fait pas exception. Je me suis laissé entrainer dans l'histoire de Constantin et
Hyacinthe, j'ai partagé leurs joies, leurs craintes, leurs peines et leurs espoirs. Leurs aventures, anodines d'abord, sont rapidement empreintes de spiritualité, de mysticisme, presque de religion. Dans tous les cas, on y détecte un je-ne-sais-quoi de fantasmagorique. Oui, fantasmagorique, le mot est à retenir. Tant par les thèmes que l'atmosphère, ça me fait penser aux films du réalisateur Miyazaki, que j'adore.
Toutefois, si l'univers me fascine, là où j'ai moins accroché, c'est à l'intrigue elle-même. Elle est difficile à cerner. Pendant toute la première partie du roman, elle me glissait entre les doigts. Tout finit par s'emmêler et trouver un sens mais, pendant une grande partie de ma lecture, je me demandais quel en était le moteur. Bien sûr, on peut dire que c'est un roman d'apprentissage, que Constantin doit trouver sa place dans le monde, mais…. Sans vouloir réduire un roman à son schéma actantiel, quelle était la mission du garçon? Eh bien, en arrivant à la fin, on découvre qu'il n'a pas réussi sa mission et que
Hyacinthe joue un rôle plus important qu'on ne l'aurait cru. Et, même là, quelque chose m'échappe. Qu'étais-je sensé retenir de cette lecture? Je ne suis pas certain, et ce n'est pas une mauvaise chose non plus. Les livres n'ont pas à fournir toutes les réponses à toutes les questions. Dans tous les cas, L'âne culotte aura réussi à me dépayser, à me divertir et à me faire rêver et réfléchir à la fois.