Pierre Bourdieu, à la fin des années 90, se lance dans une analyse exhaustive des mécanismes de domination entre les sexes, ou comment l'homme à travers l'histoire a légitimé sa supériorité (qu'elle soit symbolique, sociale, ou dans les rapports amicaux, de travail, amoureux...) sur la femme.
La domination masculine s'exerce de façon inconsciente, il faut bien s'en rendre compte pour sortir de ses schèmes préétablis par la société patriarcale.
L'intelligence est dévolue au sexe masculin, il ne reste pour le sexe féminin que les émotions ou l'intuition. Par exemple, lorsque
Hannah Arendt fit publier son essai sur le procès de Heichman, beaucoup lui reprochèrent son manque de chaleur et d'émotion, refusant par-là même à une femme le droit à l'analyse intellectuelle. Selon la société, les femmes doivent restées cantonnées aux rôles qu'on leur a attribué, c'est-à-dire en tant que ménagères, cuisinières, objets symboliques ou comme procréatrices afin de perpétuer la lignée filiale. Elles sont pour cette raison « exclues de tous les lieux publics, assemblée, marché, où se jouent les jeux ordinairement considérés comme les plus sérieux de l'existence humaine. »
Les hommes, en revanche, se trouvent prisonniers de cette domination car ils doivent en toute circonstance affirmer leur virilité face à leurs congénères par des jeux stupides, souvent violents, allant parfois jusqu'à mettre leur vie en péril afin de prouver qu'ils ne sont pas des « mauviettes » ou des « femmelettes ».
L'éducation a joué et joue toujours un rôle certain dans le maintien de cette domination, notamment par la famille, l'Église et l'École. Pour la famille, il n'y a qu'à fréquenter les magasins de jouets pour enfants pour s'en rendre compte par soi-même. Entre la caisse-enregistreuse, la table et le fer à repasser et les ustensiles de cuisine pour jouer à la dînette, le choix est vite restreint. L'École est aujourd'hui le deuxième facteur important dans ce conditionnement parce que les enseignants auront tendance à encourager les filles à davantage s'engager dans certaines filières que d'autres. L'Église a longtemps joué un rôle de connivence avec l'École ou est-ce l'inverse.
Ce qui a changé aujourd'hui, c'est surtout que
la domination masculine ne s'exerce plus de façon aussi claire et directe qu'autrefois. Certaines caractéristiques demeurent : les hommes préfèrent les femmes plus petites de taille qu'eux ou encore lorsqu'une femme vient d'obtenir son permis, vous pouvez être sûr qu'il y aura une personne pour lui conseiller de commencer par conduire une petite voiture. C'est par ce genre de petits détails que la domination se perpétue malgré nous sans même que l'on s'en rende compte. Il y a tout de même, de nos jours, plus de femmes qui accèdent à l'enseignement supérieur bien qu'énormément d'inégalités subsistent encore.
Comme à son habitude, le sociologue s'exprime dans un jargon peu accessible. Ce qui le coupe d'emblée d'une partie de son lectorat potentiel, c'est-à-dire ceux qui seraient susceptibles d'être intéressés par le sujet mais qui ne possèdent pas le vocabulaire adéquat pour tout comprendre.
C'est là tout le paradoxe de Bourdieu. C'est un livre vraiment très bien pensé et documenté que tout le monde devrait lire.