Mon cousin s'appelle Grégoire.
Quand j'étais petite, il y avait chez lui des disques de
Ménie Grégoire, et du haut de mes 6 ou 7 ans je croyais que c'était sa propre grand-mère, l'autre, celle qui n'était pas notre "Dadot" commune, qui lui racontait des histoires en disques, je trouvais ça fascinant !
Et je suis restée longtemps avec ce souvenir, sans jamais chercher à savoir qui était vraiment cette femme. Pour moi, ce devait être une narratrice qui lisait des histoires aux enfants dans les années 70.
Et puis l'an dernier c'est amusant, je repensais à elle, et la même semaine je tombe sur ce livre,
L'heure des femmes, sans savoir au début de quoi il s'agissait.
C'est ni plus ni moins l'histoire romancée par
Adèle Bréau sa propre petite fille, de
Ménie Grégoire, cette grande dame de la radio et du féminisme, qui a sauvé quantité de femmes de l'ignorance concernant leur sexualité et leurs droits.
Je l'avais dévoré, et comme il fait partie de la sélection pour le Prix du Jury magasin U/Livre de poche, je le re-lis avec vous bien volontiers.
Gros coup de coeur en approche ! 😀
Ménie :
"Une sacrée bonne femme. Qui a donné la parole à beaucoup d'autres en lançant son émission de libre antenne."
Marie, qui préfère qu'on l'appelle Ménie, et avec qui on fait connaissance, toute jeune, est née dans une famille de garçons, "hyper" catholique de Cholet. Et comme souvent à cette époque, sa vie est corsetée de principes d'un autre siècle.
On la retrouve après quelques pages, au milieu des années 60, grande bourgeoise parisienne, très chic, la petite cinquantaine, mère de 3 filles quasiment adultes, femme de Roger, haut fonctionnaire, dont elle est toujours amoureuse. Et pour autant, et malgré son éducation, une femme très moderne.
Son mari la laisse être journaliste pour des journaux féminins, sa marotte, elle est pigiste pour ELLE.
Elle adore les femmes et leurs parcours. Mais pas les bourgeoises qui ont tout, comme elles, les autres, "celles qui, depuis la guerre, ont choisi ou ont été contraintes de trouver un travail."
Mais aussi les femmes au foyer, celles qui subissent des violences (notez, tout cela peut se vivre dans la bourgeoisie !), et les jeunes de l'âge de ses filles, des jeunes adultes.
Philippe, patron des programmes de RTL l'approche, pour lui proposer d'écouter, et de parler aux femmes à la radio. Ménie accepte une émission en tout début d'après-midi, moment idéal pour que chaque femme puisse prendre son temps pour l'écouter.
Ça a été le début d'une petite quinzaine d'années riche en émotions.
Esther :
En parallèle, on suit à partir de 2021 une jeune femme, Esther, vraisemblablement désorientée dans sa vie, qui s'est sauvée et réside à Bréhat depuis 3 mois chez une amie.
C'est une jeune femme moderne, violentée et battue par son mec, Pietro, pour qui le dernier coup a été celui de trop.
Elle écrit, et va se retrouver à enquêter sur la vie de
Ménie Grégoire. Elle doit pour cela écouter les bandes audio des 15 années où cette dernière a fait de la radio, rencontrer des gens qui l'ont connue, lire ses livres.
Adèle :
Bien sûr le fait que ce soit la petite fille de
Ménie Grégoire qui écrive, et fort bien - j'ai d'ailleurs découvert une autrice que j'aime beaucoup et que je vais suivre - apporte au roman.
Elle le dit elle-même à la fin, elle a beaucoup romancé, elle a inventé plein de personnages, mais aussi pris appui sur les courriers et sur des bandes radiophoniques. Il en sort donc un roman extrêmement équilibré entre vérité et fiction, sur des sujets passionnants !
J'ai passé quelques heures exquises en compagnie de ces femmes toutes plus courageuses les unes que les autres, à commencer par celles qui témoignent de leurs difficultés au quotidien, par l'équipe soudée qui entourait
Ménie Grégoire, et bien sûr par elle.
Un roman agréable, que j'ai lu avidemment et facilement, des personnages attachants, les femmes comme les hommes évidemment.
L'alternance entre les courriers, la vie de Ménie, la vie des femmes qu'on va suivre comme Mireille ou sa soeur Suzanne, et la vie de Esther, apporte un bon dynamisme au livre.