Il est, dans l'histoire de tous les arts, des noms si grands qu'ils personnifient une époque et survivent, dans la mémoire des générations successives, aux œuvres mêmes qui leur ont autrefois valu cette renommée. Tel est en musique le nom d'Ockeghem, dont les compositions ne sont plus aujourd'hui connues que d'un petit nombre d'historiens ou de curieux : et cependant tout dilettante, si peu versé qu'il soit dans la chronologie artistique, sait au moins que ce maître illustre occupa dans le développement de son art une place prépondérante, et qu'il faut associer son souvenir au règne de Louis XI, comme celui de Du Caurroy à l'époque de Henri IV, ou celui de Lully au siècle de Louis XIV.
La prépondérance accordée par un grand nombre de compositeurs, et principalement, depuis 1850, par les héritiers de Berlioz et de Liszt, à l'élément littéraire sur l'élément musical, dans les œuvres mêmes qui ne font point appel au concours direct des paroles, a suscité de multiples discussions sur le pouvoir expressif et descriptif de l'art des sons, sur la « peinture musicale », et sur les limites de la poésie et de la musique.