Citations sur Vie de ma voisine (51)
Quand on les laisse libres, les enfants ont des tas d’idées, ils inventent, ils ont la capacité de s’opposer, ils reconnaissent l’autorité légitime. Ce n’est pas un credo, c’est Le résultat de dizaines d’années d’expérience, d’observations si nombreuses qu’on se demande comment il se fait que tant de personnes croient à la hiérarchie et à l’autorité.
Mais les humains sont ainsi faits qu’il n’entendent simplement pas ce qui les dérange.
La rencontre avec Jenny est très touchante, le voyage dans sa mémoire est formidable ! L'écriture de l'auteur est d'une grande finesse, rien de pesant comme dans certains ouvrages qui font oeuvre de "devoir de mémoire". Deux grandes âmes se sont rencontrées pour notre plus grand bonheur de lecteur.
Le communisme de guerre n'est qu'un autre nom pour dictature, pour violence. S'il faut supprimer la démocratie chaque fois qu'il y a du gros temps, jamais le peuple n'aura le pouvoir. (p.125)
Mais moi je mens aussi, remarque Jenny. J'écris des : on va bien, on mange bien, on dort bien, ne vous inquiétez pas. Je n'écris pas pour donner des nouvelles mais pour les rassurer.
(...)
Ils écrivent : tout va bien, soyez sages, et j'écris tout va bien, on vous attend. Notre profonde vérité : mentir. (p.107)
Pour d'obscures raisons de paresse, par goût pour la légèreté, je jette les objets et les papiers comme on déleste une montgolfière de ses sacs de sable pour ne pas s'écraser. (p.106-107)
Jenny se lève et elle glisse vers un placard où sont rangés les documents, les papiers, les coupures de journaux, les photocopies, les lettres, les dossiers.
Tu es une véritable archiviste, dis-je, songeant à mon grand-père qui classait ainsi les traces de nos vies, les dessins, les lettres, les bulletins, les photos. (p.106)
Ce voyage s’est imprimé dans sa mémoire comme un point lumineux qui servira à interpréter sa vie.
Il y a tout déjà : l’Allemagne nazie, la Pologne perdue, le judaïsme traditionnel qui la rejette et lui donne à observer le terrible destin des filles obéissantes. Son frère si agaçant, un type de sept ans qui joue avec les garçons catholiques de la rue pendant qu’elle s’ennuie, et qu’elle se sent mal comment savoir pourquoi. (p.54)
Les bonbons sont une chose importante dans la vie des enfants. (p.41)
En écoutant la voix lointaine de Léon Blum, en écoutant Jenny, je pense que les manifestations ont été le principal langage de résistance du cruel vingtième siècle.
Ont-elles été vaines, ont-elles fait leurs preuves ?
Elles incarnent, en 1934 comme en 1936, une manière de transformer les mots, les articles, les pétitions, les tracts en marée humaine.
Avoir une opinion sans prendre la peine de descendre dans la rue pour en témoigner s'apparenta longtemps à de la lâcheté. Les manifestations de rue étaient l'arme du peuple, le peuple en marche, la forme concrète de l'instinct populaire, la vague.
C'est Pessah pour les juifs, et pour tout le monde le jour du Souvenir des déportés. Nous ne nous joignons à aucune cérémonie. Jenny m'apporte une livre qui commence à peu près par ce vers : Mon souvenir des souvenirs s'égare.
Nous buvons un verre de thé. Elle me félicité, les impatiences se portent bien. J'ai probablement rencontré la première vraie pédagogue de ma vie.
Je plonge dans les souvenirs d'une autre que moi. J'imagine ce 16 juillet. J'essaie.
Une jeune fille est entièrement tendue vers sa mère. Celle-ci parle sans s'arrêter , pressée par le temps, puisqu'elle ne sait pas de combien de minutes elle dispose pour tout dire à sa fille, tout lui dire sur tout.