Comme l’ont montré les anthropologues Laurie Denyer Willis et Clare Chandler, les antibiotiques constituent des « quick fix », des solutions rapides face à des problèmes d’hygiène qui ne peuvent être simplement expliqués par les comportements individuels, contrairement à ce que l’on affirme le plus souvent, mais qui, articulés à la question des inégalités qui structurent ces sociétés, apparaissent comme la conséquence d’un ensemble de réformes néolibérales, d’ajustements structurels et de politiques de marginalisation des populations les plus pauvres et les plus vulnérables ; Les antibiotiques sont donc des solutions rapides dans des paysages marqués par les pénuries, les incertitudes et les inégalités où ils permettent de résoudre des problèmes de productivité, en remettant les humains au travail plus rapidement quand ils sont malades […] Ainsi, les antibiotiques sont déployés pour masquer les problèmes pour masquer les problèmes structurels à long terme qui minent la prestation de soins, pour favoriser l’augmentation de la productivité et corriger les problèmes d’hygiène causés par des inégalités bien ancrées.
L’étude des virus bactériophages, mais aussi de certains des savoirs existants sur les rétrovirus, permet donc de dégager une conceptualisation de ces entités bien différente de celle qui se cache parfois de façon anodine, presque innocente, derrière l’image du « chasseur de virus ». Les virus, entités relationnelles dont les potentialités paraissent désormais infinies, ne sont pas extérieurs aux autres entités biologiques : ils les traversent, les façonnent, les transforment de multiples façons, ils écrivent avec elles des microgéohistoires qui brouillent, ou du moins redéfinissent, les frontières entre certaines catégories. S’il fallait à tout prix trouver une analogie, ce serait bien plutôt du côté de la cueillette que de la chasse qu’il faudrait la chercher, dans l’activation différenciée des potentialités des virus en fonction du type de contenant dans lequel ils viennent prendre place, non dans une traque qui, si excitante qu’elle puisse être, n’autorise à penser les relations aux virus que sous un seul mode.
Composteurs de monde et brasseurs de gènes, entités aux potentialités phénoménales, [les virus bactériophages] n’en sont moins fréquemment dépeints comme des « tueurs professionnels » ou des « snipers » qui « injectent » leur ADN, « pénètrent » dans la cellule hôte, « se cachent » ou « se dissimulent », « agents dormants » dans l’ADN bactérien. Quant au mécanismes de coévolution entre phages et bactéries, on les décrit le plus souvent comme une « course aux armements » (arms race) faisant ainsi de la lutte et de la compétition le mode privilégié d’interaction entre ces deux entités : vocabulaire de la transgression, de la violation, du conflit insidieux et de la destruction, alors que, dans les pratiques, les comportements des phages sont souvent qualifiés très différemment, parfois même par les chercheurs qui parlent de leurs potentialités incroyables, voir de leurs pratiques sexuelles coquines.
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