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EAN : 9782874951633
96 pages
André Versaille éditeur (07/09/2011)
4/5   2 notes
Résumé :

Dans sa croisade contre le terrorisme, l'administration Bush a-t-elle sciemment enfreint les lois américaines et internationales en autorisant la torture : pratique de "simulacres de noyade " dans les interrogatoires de membres présumés d'Al Qaïda, "disparition" de prisonniers ou renvoi vers des pays où ils étaient torturés, prisons secrètes dirigées par la CIA...?
Deux noms symbolisent à eux-seuls ces exactions : Abou Ghraib et Guantanamo.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le titre du livre de Reed Brody et sa photo de couverture montrant un George W. Bush hautain et péremptoire sont trompeurs. Ils laissent augurer un brûlot anti-américain à charge listant les infamies commises par l'Oncle Sam et plaidant sans retenue pour que s'abattent sur lui les foudres de la justice internationale. Fort heureusement, les extraits du rapport de Human Right Watch « Torture et impunité : l'administration Bush et les mauvais traitements infligés aux détenus », brillamment introduits par Jean-Paul Marthoz et Reed Brody ne tombent pas dans cette grossière caricature.
le rapport proprement dit, rendu public le 11 juillet 2011, documente avec précision les crimes reprochés à George Bush et à son entourage (le vice-président Cheyney, le secrétaire à la défense Rumsfeld, le directeur de la CIA Tenet). le premier est d'avoir autorisé l'usage de la torture dans les centres de détention de la CIA. le second est d'avoir couvert le programme de transfèrement (renditions) des détenus vers des pays connus pour leur pratique systématique de la torture. le rapport contient des témoignages insoutenables de détenus ayant subi le supplice de l'eau (waterboarding), privés de sommeil, enfermés nus dans des cellules glacées, menacés par des chiens, obligés de porter autour du cou des photos de femmes dénudées …

Juger George Bush ? La formule est provocatrice. Inlassable « chasseur de dictateurs », Reed Brody reconnaît d'ailleurs bien volontiers qu'elle est irréaliste. On imagine mal l'ex-président de la première puissance mondiale traîné devant les tribunaux comme un vulgaire criminel.
La question éthique qu'il soulève n'en reste pas moins redoutable. Quoi qu'on pense en effet de l'hyperpuissance américaine et des modalités de son intervention en Afghanistan et en Irak, on est forcés de reconnaître que le monde se porte mieux sans Saddam Hussein ni Oussama Ben Laden. N'est-il pas dès lors inéquitable de traiter le président américain comme le dictateur irakien sans scrupules ? La bonté innée des Etats-Unis, la justesse des thèses qu'ils défendent n'autorisent-elles pas ses dirigeants à s'exempter des contraintes du droit international ? Posée autrement : la nature démocratique d'un régime et la pureté des fins qu'il poursuit doivent-elles conduire à accorder les circonstances atténuantes à ses dirigeants obligés de se salir les mains pour venir à bout de dictateurs ou de terroristes qui, eux, ne s'embarrassent pas de respecter les droits de l'homme ou la légalité internationale ?

Outre sa prohibition par la Convention de 1984 signée et ratifiée par plus de 150 pays dont les Etats-Unis, il y a plusieurs raisons pour critiquer l'usage de la torture. La première est bien sûr morale. « La torture, c'est la torture » répond Reed Brody. Son interdiction est absolue. Aucune « morale de la nécessité » ne la justifie. Elle est tout autant haïssable à Benghazi qu'à Guantanamo, à Homs qu'à Abou Ghraib.
La deuxième, plus cynique, est son inefficacité. Au scénario fameux de la ticketing bomb qui va exploser si le prisonnier ne révèle pas rapidement son emplacement, l'expérience militaire oppose l'inutilité sur le long terme de l'usage de la torture dans les guerres contre-insurrectionnelles. Elle braque les populations civiles, sape le moral des troupes et mine la caution populaire sans laquelle un pays démocratique ne peut mener une guerre : « Massu a gagné la bataille d'Alger mais cela signifiait perdre la guerre » (P. Teitgen cité p. 38)
La troisième est la plus fondamentale. Lorsque les démocraties y ont recours, elles renient les principes qui les fondent et minent leur légitimité. Pendant la guerre d'Algérie déjà, les opposants à la torture en avaient contesté l'usage pour ce motif : « Si le civilisé, pour lutter contre la barbarie, se fait lui-même barbare, c'est que la barbarie a déjà gagné » écrivait puissamment Pierre-Henri Simon en 1957 (cité p. 35). Certains Américains hostiles aux méthodes des neocons leur adressent le même reprochent : « S'il y a une victoire d'Oussama Ben Laden, c'est le tort que l'Amérique s'est fait à elle-même en contournant ses propres lois » (J. Randal cité p. 11).
En autorisant la torture, George Bush n'a pas seulement remis en cause les fondements de la démocratie américaine et terni l'honneur des démocraties. Il a également affaibli leur légitimité à demander des comptes aux dictateurs leur fournissant une parade imparable aux accusations dont ils pourraient être l'objet : depuis Klaus Barbie jusqu'à Carlos, en attendant demain peut-être Gbagbo ou El-Bechir, la manoeuvre est connue qui consiste pour les accusés à renvoyer aux accusateurs leurs accusations.
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