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Il y a déjà quelque temps que j'avais noté ce livre dans ma liste, et en lisant récemment "C'est moi François", je me suis enfin décidé à l'acheter.
Quelle destinée depuis la petite fille aux pieds nus qui courait dans les ruelles d'un village perdu de Hongrie jusqu'à la femme célèbre et honorée dans tant de cérémonies, et surtout quelle tragédie vécue dans notre vingtième siècle !
Tiszabercel est vraiment le lieu d'une enfance pauvre, tel qu'il apparaît dans certains poèmes de "Pourquoi ai-je survécu ?". La famille est parmi les plus pauvres du village, la mère élève les enfants, tout en croyant à la Providence divine, le père n'a pas de véritable profession. Elle est aussi mal vue par les autres juifs car elle ne pratique pas sa religion.
Même dans ce village reculé, l'antisémitisme gagne du terrain. Ensuite c'est l'enfermement dans un ghetto, puis la déportation à Auschwitz où la mère passe directement au four crématoire, encore d'autres camps, et finalement Bergen-Belsen. Si Edith survit, c'est grâce à sa soeur Judith qui prend soin d'elle même dans les situations les plus tragiques.
Après la guerre, comme pour tous les survivants de la Shoah, les deux soeurs subissent la difficulté de se faire entendre avant même d'être comprises, notamment par leurs autres frères et soeurs qui ont échappé à la déportation. Par la suite, leurs vies prennent des directions différentes : Judith, plus croyante, décide de s'installer en Israël ; Édith éprouve plus de difficultés pour se réadapter au monde. Elle essaie de retourner en Hongrie, puis d'émigrer en Israël, mais ce n'est pas vraiment la Terre promise dont rêvait sa mère. Elle se marie plusieurs fois, notamment pour échapper au service militaire en Israël,  elle divorce aussi plusieurs fois... Elle exerce plusieurs professions à Istanbul, à Athènes, à Zurich, avant de trouver une certaine stabilité en Italie, notamment grâce à l'écriture qui est quelque chose de très important pour elle depuis son enfance.
Edith Bruck a écrit cette autobiographie l'année de ses 90 ans, un peu avec un sentiment d'urgence car elle sent que sa mémoire commence à lui échapper. Elle se pose aussi toujours un peu la question : pourquoi avoir survécu ? Elle termine ce livre par sa superbe "Lettre à Dieu" qu'elle voulait écrire depuis ses neuf ans, dans laquelle elle évoque ses parents avec une certaine tendresse.
Aujourd'hui (je termine cette critique le 3 mai 2023), c'est l'anniversaire d'Edith Bruck. Je lui souhaite de pouvoir encore témoigner longtemps de son histoire !
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J'ai été un peu désarçonnée par le style et le ton qui accueillent le lecteur, par la simplicité évoquant un univers enfantin, avec son innocence, ses emballements, ses images toutes faites.
Ditke vit dans un village hongrois. Parce qu'elle est la dernière d'une fratrie de six, sa famille l'a surnommée Boulette, une allusion aux petites boules de pâte que la mère racle au fond du pétrin. Elle est vive et joyeuse, pleine d'une curiosité que d'aucuns trouvent "malsaine", et aime lire, notamment la poésie. le village n'appliquant pas les lois raciales à la lettre, elle est, bien que juive, la première de sa classe. La vie dans la petite maison familiale, marquée par la pauvreté, est néanmoins heureuse. La mère de Ditke, très croyante, a fait de Dieu un confident auquel elle s'adresse pour tout et ne jure que par la Palestine, qui représente selon elle le paradis sur terre. le père, discret, laborieux, s'use à la tâche et se fait souvent avoir.

L'antisémitisme s'invite dans le quotidien par des manifestations de plus en plus évidentes, et d'une violence croissante. Certains écoliers ne disent plus bonjour à leurs camarades juifs, puis certains scandent des chants nazis lorsqu'ils les croisent, ou leur lancent des insultes racistes.

Survient l'arrestation, brutale et inattendue ; la mère n'a même pas le temps de récupérer le pain mis à cuire dans le four. A treize ans, Ditke devient subitement adulte. Elle investit alors le récit : la narration passe du "elle" au "je". Tous les membres de la famille vivant encore chez les parents sont déportés : le père, la mère et trois de leurs enfants : Ditke, sa soeur aînée Judit et son petit frère Jonas. Seules les deux filles survivent.

Leur parcours s'inscrit dans celui de la déportation tardive des juifs de Hongrie, en 1944. le nazisme est alors à l'agonie, les Russes et les Américains aux portes des territoires allemands. Les SS entraînent les prisonniers dans leur débâcle, les transférant d'un camp à l'autre, de travail ou d'extermination. Ditke et Judit tiennent parce qu'elles sont deux, que leur audace les rend débrouillardes, et que l'éducation morale de leur mère les incitent à rester dignes et unies. Il y a aussi quelques rares mais salvateurs miracles qui, ici ou là, amènent une main tendue ou un coup de chance. Elles supportent ainsi tant bien que mal la faim, la peur, les poux, l'omniprésence de la mort, le spectacle des prisonnières qui se suicident contre les barbelés électrifiés. L'esprit focalisé sur la faim et son impossible assouvissement, elles n'ont pas le temps de pleurer leurs disparus…

Elles survivent, donc, pour affronter une autre épreuve : celle du retour, du poids du tabou qui leur est désormais associé : celui des camps, qui les rend indésirables même aux yeux de leurs propres frères et soeurs. Un abîme s'est ouvert entre elles et ceux qui n'ont pas vécu l'expérience de la déportation.

Ditke ne se sent bien nulle part. Elle se veut libre, détachée de toute contrainte mais aussi de tout conformisme : elle ne veut plus obéir à personne, refuse tout uniforme et rejette tout sentiment de haine. Elle est par ailleurs investie d'un irrépressible besoin d'écrire, pour témoigner, et forcer les autres, enfin, à l'écouter. On la suit d'Israël (où elle refuse de faire son service militaire) en Tchécoslovaquie, De Grèce en Suisse, puis en Italie, où elle finira par se poser. Elle intègre une troupe d'artistes puis celle d'un cabaret, travaille comme serveuse, se marie puis divorce…

C'est une vie riche, de traumatismes, de désillusions, mais aussi d'aventures. le récit, direct et lucide, révèle l'extraordinaire énergie ainsi que la grande force morale de la narratrice -et donc de l'auteure- qui l'incitera à vouer une partie de sa vie à témoigner contre l'oubli.

Au fil du récit, l'écriture se fait plus ample, plus complexe, comme pour accompagner l'évolution de Ditke, et traduire la maturité qu'elle acquiert au fil de son douloureux parcours.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Il fut un temps où surveiller la levée de la pâte à pain était vital et où, s'il n'était pas cuit au bon moment, le Pain perdu représentait un drame pour les familles pauvres.
Mais en cette année 1944, dans ce petit village de Hongrie, des choses bien plus graves se produisirent. Rejetée, dénoncée, arrêtée, la famille juive de Ditke, 13 ans, est enfermée dans le ghetto de Budapest puis déportée en camp de concentration.
Commence alors un long chemin de croix pour l'adolescente, sa soeur aînée Judit, sa mère et son petit frère qui les mènera en Pologne, dans les camps d'extermination de Birkenau et d'Auschwitz.
En 1945, les deux soeurs seront transférées en Allemagne à Dachau puis à Bergen-Belsen où elles seront libérées par les russes.
Jeune femme meurtrie, Ditke va tenter de se réconcilier avec la vie. Elle va passer plusieurs années à chercher une nouvelle patrie et finira par s'installer en Italie où elle deviendra écrivain.
Ce livre raconte la vie de cette survivante « martyre des ghettos et des camps, affamée d'amour et de paix ». Exclue de sa communauté, martyrisée par des bourreaux puis rejetée pour l'ombre de l'horreur qu'elle porte, elle continue, malgré tout.
A 89 ans, elle écrit un dernier livre et s'inquiète de voir changer l'Europe « où souffle un vent pollué par de nouveaux fascismes, racismes, nationalismes et antisémitismes ».
Elle termine son récit en s'adressant à Dieu pour le remercier de n'avoir jamais éprouvé de haine.
Si le propos est superbe, le style de ce roman est assez difficile à saisir, hachuré, décousu, comme un testament que l'émotion submergerait.
Le Pain perdu a obtenu plusieurs prix littéraires en Italie et je garderai en mémoire l'essentiel, avec ce souvenir d'une femme volontaire qui a su redonner, par la parole et l'écriture, un sens à sa vie.
Merci à Babelio et aux Editions du sous-sol pour ce roman reçu dans le cadre d'une Masse Critique.
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Tout d'abord, cet ouvrage n'est pas un roman. Édith Bruck nous livre ses douloureux souvenirs et sa reconstruction dans l'après guerre.
Tout comme Primo Levi et son"si c'est un homme" que j'ai lu, il y a de nombreuses années, "le pain perdu" devrait être mis au programme de lecture dans les écoles...
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Les livres des survivants ou survivantes de l'Holocauste révèlent des personnalités fortes et très diverses. Edith Bruck est une écrivaine originale. 

Le Pain perdu débute dans un village hongrois en 1943 . La petite fille Ditke a déjà très conscience de l'antisémitisme des villageois et des lois antisémites qui s'appliquent aussi à l'école et les brimades de la part des adultes et des enfants

Le Pain perdu, c'est celui que la mère avait préparé avec la farine qu'une voisine avait offert, qui levait et qui devait être mis au four, quand les gendarmes sont venus en 1944 chercher la famille pour la déporter vers le ghetto. "le pain", " le pain", était la plainte de sa mère devant la catastrophe imminente.

Birkenau, Auschwitz, Landsberg, Dachau,  Bergen-Belsen...

Ditke et sa soeur Judit se soutiennent après avoir été séparées du reste de la famille


Quand la guerre se termine "une nouvelle vie" s'ouvre aux deux soeurs qui recherchent d'abord les survivants de leur famille à Budapest : Sara et Mirjam les soeurs ainées mariées,  David leur frère. Elles retournent au village où elles trouvent leur maison pillée et l'hostilité des voisins.

Judit persuade Ditke à la suivre en Palestine qui était le rêve de leur mère. Edith a une autre vocation : elle veut écrire. Elle pressent que la discipline qu'on exigera d'elle lui pèsera. Elle ne supportera pas "les dortoirs"

Pour suivre sa soeur et son frère Ditke essaye de s'installer à Haïfa, se trouve un mari, marin, un travail, rêve un moment d'une maison, et même d'un bébé. Fiasco, son mari est violent ; elle divorce



Pour fuir le service militaire, elle se remarie, avec Bruck qui lui donnera son  nom d'écrivaine. Mariage blanc, elle s'enfuit devient danseuse à Athènes. D'Athènes à Istanbul, à Zurich suivant sa troupe , et enfin Naples et Rome

Pour la première fois, je me suis trouvée bien tout de suite, après mon long et triste pèlerinage. “Voilà, me disais-je, c'est mon pays.” le mot “patrie”, je ne l'ai jamais prononcé : au nom de la patrie, les peuples commettent toutes sortes d'infamie. J'abolirais le mot “patrie”, comme tant d'autres mots et expressions : “mon”, “tais-toi”, “obéir”, “la loi est la même pour tous”, “nationalisme”, “racisme”, “guerre” et presque aussi le mot “amour”, privé de toute substance. Il faudrait des mots nouveaux, y compris pour raconter Auschwitz, une langue nouvelle, une langue qui blesse moins que la mienne, maternelle.

C'est donc en Italien qu'elle écrira comme elle l'avait toujours désiré. Coiffeuse des acteurs et actrices du cinéma italien, des critiques littéraires  des cinéastes, se marie avec le cinéaste Nisi. Toujours antifasciste, elle écrit :

"En fille adoptive de l'Italie, qui m'a donné beaucoup plus que le pain quotidien, et je ne peux que lui en être
reconnaissante, je suis aujourd'hui profondément troublée pour mon pays et pour l'Europe, où souffle un vent pollué par de nouveaux fascismes, racismes, nationalismes, antisémitismes, que je ressens doublement : des plantes vénéneuses qui n'ont jamais été éradiquées et où poussent de nouvelles branches, des feuilles que le peuple dupé mange, en écoutant les voix qui hurlent en son nom, affamé qu'il est d'identité forte, revendiquée à et à cri, italianité pure, blanche... Quelle tristesse, quel danger !"

Une leçon de vie!
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Je fais partie de la vieille école qui pense qu'il faut parler, encore et encore de la montée du fascisme et de l'antisémitisme en Europe dans les années 30 et de l'horreur des camps. Parce que connaitre l'histoire, la comprendre, c'est aussi une façon de limiter le risque qu'une telle chose se reproduise.

Edith Bruck fait partie de ces rescapés des camps de la mort et, après avoir émigré en Italie où elle vit encore aujourd'hui, elle a consacré sa vie à écrire sur l'indicible. Ici, elle nous dit l'avant-déportation, alors qu'elle n'était encore qu'une enfant en Hongrie qui ne comprenait pas pourquoi ses camarades de classe ne voulaient soudainement plus jouer avec elle. Elle, la juive. Puis viennent les pages décrivant l'horreur. Les camps, les séparations, les morts, la puanteur, la soumission, l'humiliation, la faim. L'horreur. La mort. Et la faim. Encore et toujours. Elle raconte la solidarité qui se met en place parfois, et l'absence de celle-ci, souvent. Parce que quand la mort est tout autour et nous guette, c'est notre instinct de survie qui se réveille, hurle et écrase les autres.

Sa soeur et elle survivront et en sortiront, de ces camps. Après cette libération, tout est à reconstruire. Marquée à vie, au propre comme au figuré, Edith Bruck raconte l'absence de racine, le sentiment de ne plus appartenir nulle part. Les départs pour la terre promise et puis elle, qui rêve d'autre chose. Qui rêve de dire, d'écrire. C'est en Italie qu'elle trouvera l'équilibre dont elle avait besoin pour tenter de poser les mots. Mais les mots manquent. Et c'est pour cela qu'elle consacrera sa vie à l'écriture, afin de tendre vers cet idéal indicible car inexistant. Indicible car il faudrait une autre langue.

Les mots sont lucides et terribles et témoignent de l'incroyable grandeur d'esprit de cette femme hors du commun. Une femme qui dit ne pas vouloir la vengeance. Car la vengeance c'est la mort et qu'il y en a déjà eu tant.

Un récit nécessaire, pour ne jamais oublier.
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Magnifique récit d'une vie, celle de l'auteure, née en 1931 en Hongrie. Ditke, qui est son diminutif, est la benjamine d'une fratrie de six enfants et de religion juive. On est en 1943 et dans son petit village hongrois, on ne parle pas encore de ce qui se passe en Europe, pas de télé, pas de radio et les quelques journaux ne sont lus que par les hommes. Un matin, quelques jours après Pâques 1944, leur vie va basculer quand deux gendarmes vont les sortir par la force de chez eux. Direction la gare, la déportation dans un ghetto, puis Auschwitz et le début du calvaire qui durera jusqu'à la libération. de sa famille, il ne lui restera que trois soeurs et son grand frère, David. Alors où aller ? Retourner dans son village qui ne voulait plus de cette famille juive, vivre chez ses grandes soeurs à Budapest ou rejoindre la terre promise, en Palestine, qui n'est pas encore Israël. Elle y partira avec sa soeur et son frère. Là-bas, elle va apprendre la lecture et la poésie. Elle n'y sera pas heureuse et après un premier mariage malheureux, elle va partir avec une troupe de danseuse et chanteuse pour Athènes, puis Istanbul, Zurich, Naples, et enfin Rome, son nouveau pays, son nouveau départ. Fini la danse, le chant, place à l'écriture, le journalisme. Elle a écrit "Le pain perdu" en 2021 à l'aube de ses 90 ans. le livre a connu succès considérable en Italie où il a reçu le prix Strega Giovani et le prix Viareggio, puis dans le monde entier. L'écriture d'Edith Bruck est à l'image de sa volonté et de sa force, claire et directe. Pas de fioriture, ni de jugement, juste ce qu'il faut d'émotions et de sentiments. Un très bon moment de lecture, l'épopée de toute une vie, un roman restituant à l'histoire sa véritable dimension sans être didactique.
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Edith Bruck est née en 1931 dans une petit village de Hongrie, avec ses diverses communautés religieuses. Sa famille est juive, et dès le début du récit la situation est difficile, en dépit de l'existence de certains villageois chrétiens les acceptant mieux. Il semblerait que jusqu'au début de 1944 les juifs, même si persécutés et tenus à l'écart, ne sont pas livrés aux nazis. En tout cas, pour Edith-Ditke, c'est brusquement que tous doivent quitter leur maison (laissant le pain lever, au grand dam de sa mère), pour un train les menant à Auschwitz Birkenau, où sa mère disparaît dès son arrivée. Durant des mois de survie, elle reste avec sa soeur Judit, frôlant souvent la mort, en plus des conditions inhumaines.

De camp en camp, elles finissent par être libérées, puis retour en Hongrie, où Edith retrouve sa famille (enfin, les survivants). Pas forcément avec enthousiasme, d'ailleurs. Pareil dans leur village, avec les anciens voisins, et elles filent vite.

Après quelque temps en Israël, elle s'installe en Italie, où elle vit toujours. Scénariste, réalisatrice, écrivain, le pain perdu est son dernier livre, une occasion de revenir sur sa vie. Certains souvenirs sont prégnants, pour d'autres ils n'y sont pas, beaucoup d'ellipses, et je trouve que c'est normal et d'autant plus fort.

Quelques passages:

"Bien sûr nous n'avions plus grand chose d'humain et nous les effrayions tout comme ils m'effrayaient, moi aussi, qui me demandais, en surmontant ma douleur, ce qu'ils deviendraient, ces enfants, une fois adultes." Il s'agit des enfants d'officiers séjournant dans un château, Edith travaille dans les cuisines...

Le cuisinier lui demande son nom

"Quelque chose d'incroyable pour moi, qui n'étais plus que le numéro 11152. (...)

S'il n'était pas Dieu en personne, qui était-il?

J'eus le sentiment de renaître. J'avais un nom. J'existais."

Avec leur soeur Mirjam, au retour en Hongrie

"Mais qu'est-ce que la vie vous réserve?

- La vie, avons-nous répondu d'une seule voix!"

A sa soeur Judit, qui projette d'aller en Palestine

"Vivons, nous verrons en vivant. Nos vrais frères et soeurs sont ceux des camps. Les autres ne nous comprennent pas, ils pensent que notre faim, nos souffrances équivalent aux leurs. Ils ne veulent pas nous écouter: c'est pour ça que je parlerai au papier."

Le livre se termine par une Lettre à Dieu, "pitié oui, envers n'importe qui, haine jamais , c'est pour ça que je suis saine et sauve, orpheline, libre et c'est ce dont je Te remercie, dans la Bible Hashem, dans la prière Adonai, et dans la vie de tous les jours, Dieu."
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Un très beau récit autobiographique d'Edith Bruck, qui tour à tour regarde la petite "Ditke" qu'elle était enfant, grandir et affronter le monde, pour ensuite l'incarner à la première personne.

Un destin tragique parmi tant d'autre dans cette seconde guerre mondiale et l'abomination des camps de concentration, où l'horreur de la Shoah est approchée ici d'une manière singulière.
Il y a l'avant, le pendant et "l'après". Cet "après" qu'on connait peu, mal, mais qui révèle pourtant la difficulté d'une reconstruction, comment vivre après cela?

La froideur est partout, tout le temps, dans la neige et le froid, mais surtout dans le coeur des hommes et des femmes, et parfois là où on ne l'attend pas.

Le pain perdu, c'est enfin le récit d'une famille, avec toute sa dureté, et en filigrane celui d'une quête, qui se termine par une magnifique lettre à Dieu, qui parle à tous, poignante d'humanité.

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Lorsque la famille se fait arrêter, la mère s'inquiète pour son pain en train de cuire. le pain perdu. Mais c'est sans se douter de ce qui les attend. Ce doigt qui d'un mouvement à droite ou à gauche les conduit vers la mort ou vers les camps de travail. Dikte, séparée de sa mère, est conduite avec sa soeur Judit à Birkenau.

« La faim, les poux, la peur d'être sélectionnées, les maladies et les suicides contre le fil barbelé et électrifié nous occupaient l'esprit jour et nuit. »
Dans un récit dépouillé, l'auteur revit ce long chemin, cet enfer de Birkenau, Dachau, Bergen-Belsen jusqu'à l'arrivée des américains. Edith Bruck a la pudeur de ne pas s'appesantir sur l'horreur des camps. Mais elle en dit suffisamment pour comprendre l'errance de celle qui ne trouve plus sa place. Plus rien n'est possible dans le village dévasté de son enfance. Elle rejoint ses frère et soeurs en Israël, sans pouvoir s'y ancrer. le rêve d'une terre promise est parti en fumée.
Après plusieurs rencontres difficiles, elle suit une compagnie de ballet. C'est finalement en Italie qu'elle trouve la paix.
A quatre vingt-dix ans, alors que la vue et la mémoire commencent à défaillir, Edith Bruck ressent le besoin d'écrire le pain perdu. Pour témoigner une fois encore.

Le dernier chapitre est une lettre à Dieu. Un Dieu que sa mère invoquait pour tout et n'importe quoi. C'est une lettre de rage envers celui qui est resté sans réaction. Mais elle le remercie de pouvoir témoigner sans haine auprès des jeunes générations. Ce récit en est un exemple marquant.
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