« Lettre à Dieu: « Je t'écris à TOI qui ne liras jamais mes gribouillis, ne répondras jamais à mes questions, à mes pensées ruminées pendant toute une vie » ….
« Argent! Or! Objets précieux . Maudits chiens puants ! , insultes, injures qui me blessaient comme des coups de couteau » ..
« La faim, les poux, la peur d'être sélectionnées, les maladies et les suicides contre le fil barbelé nous occupaient l'esprit jour et nuit. Des jours et des nuits qui nous semblaient des mois, des années » .
« Nous étions des sortes d'épouvantails, flottant dans nos haillons, leur visage creusé, livide, nos genoux , nos chevilles, nos pieds crevassés d'engelures »
Quelques extraits de ce récit épuré, écrit en urgence par l'auteure , six décennies après son premier livre, elle revient, pressée , à près de 90 ans avec une sorte d'urgence sur son expérience douloureuse de la déportation .
Lu d'une traite, en apnée, elle écrit à DIEU , voir plus haut , pleine de colère à la fin de son récit, ….. si longtemps après …épouvantée par ses problèmes de mémoire ..
Née en 1932 , « petite fille avec ses tresses blondes » il lui faut revenir , à tout prix , sur ce long chemin qui « à elle même lui semble invraisemblable, ce conte obscur du XX ° siècle avec sa très longue ombre sur le millénaire d'après.
Ce récit stylisé, tranchant , dépouillé , émouvant , poignant , profond, entêté, sans illusion, vrai, humain , lucide , emporte le lecteur dans le sillage de cette petite fille qui s'appelait Edith Steinschreiber , née en Hongrie orientale , benjamine nommée « Boulette » dont sa mère disait « Cette petite morveuse, dernière née qu'elle avait chiée au monde » , au sein d'une famille juive , très pauvre, en proie à un racisme contagieux ' déjà ! , persécutée au quotidien par tous les antisémites du village .
Or, un jour de 1944 , au lendemain de Pâques , les juifs de Tsiszabercel furent brutalement réveillés dès l'aube , jetés sauvagement hors de chez eux, : « L'enfant le plus petit pleurait——— désespéré , et ces pleurs contenaient une douleur pure , universelle . Une douleur et un cri pareils à ceux des cochons de Noël sous les longs coutelas » .
Edith conte sa malheureuse survie : le train , Auschwitz, où l'on marchait sur les cendres » , puis les camps successifs : Dachau, Kaufermg, le Landsberg, Bergen - Belsen . …..
Elle avait treize ans seulement lorsque le camp fut découvert , quand elle rencontre enfin le monde des vivants! .
À dix - sept ans , elle tenta de s'implanter en Israël , vingt - deux ans lorsque , après plusieurs années d'errance : séjours à Budapest , Bratislava, Haïfa, Athènes , elle choisit l'Italie et sa langue, « ..Alors, je me réconciliais presque avec la vie , pas la mienne, mais avec le soleil et la mer » .
Elle s'installe alors à Rome, raconte l'enfance , la déportation , toutes les séquelles morales et physiques « Je voudrais dire , je voudrais dire encore , je voudrais parler de l'inutilité de dire » …
Nostalgie douloureuse de la petite fille aux pieds nus, devoir de mémoire , message d'espoir , questions à Dieu , récit afin d'éclairer encore quelques jeunes consciences dans les écoles , comme elle l'a écrit, pardon du mal en qualité de témoin, expérience depuis une vie entière …
Récit chargé de douleurs et d'espoir, de faim , d'inhumanité, de pleurs, de survie , de mémoire vive à l'image de son ami
Primo Levi , que je ne suis pas prête d'oublier.
Un ouvrage acheté hier que chacun devrait lire, peut - être .
« Dans cet endroit , on apprenait tout sur l'homme et le monde » .