Un roman de Jack Taylor, on ne le lit pas, on ne le dévore pas : on le boit. Cul-sec ! Avec un peu d'eau à la rigueur, mais sans glaçons.
Jack Taylor, ancien de la Garda Síochána (Gardiens de la paix, en Irlande), a réussi à se faire licencier de cette institution (un véritable exploit) et depuis, il est devenu un espèce de détective privé imbibé d'alcool.
Ok, pour ce qui est de l'alcool, non, non, rien n'à changé ! Il se pochetronnait déjà sévère du temps qu'il était à la Garda.
Jack Taylor n'a rien d'un Sherlock Holmes – loin de là – et pourtant, je l'aime bien. Limite un anti-héros vu le nombre de pages où il est dans le cirage le plus total. Même une éponge est moins imbibée que lui, c'est dire.
Jack Taylor est un détective atypique, comme il n'en existe pas deux dans la littérature, un privé bordeline toujours en pleine révolte sur tout le monde (sa mère notamment) et en train de regretter son père qui lui offrit sa première carte de bibliothèque. Sa seule constante dans son alcoolémie furent les livres.
Sa vie est une véritable soulographie, il se détruit à petit feu – et ça fait mal de voir qu'un alcoolo ne retient jamais les leçons du passé – et malgré tout, j'adore suivre ses enquêtes.
Jack Taylor résoudre une enquête ?? Oui, il y arrivera, avec un peu de chance et avec l'aide d'autres personnes (mais pas avec celle de la dive bouteille).
Ici, c'est une mère qui ne croit pas au suicide de sa fille de seize ans (retrouvée noyée) qui l'engage, alors qu'il est assis à sa table de pub préféré. Alors, notre Jack va réouvrir l'enquête et on dirait que ça ne plait pas à tout le monde…
Durant ses « enquêtes », Jack nous raconte ses souvenirs, son enfance, son Irlande, sa ville de Galway, son pub préféré, celui tenu par le vieux grincheux de Sean.
On peut critiquer Jack et son alcoolisme galopant, mais contrairement à ses compatriotes sobres lui au moins a de l'empathie et de la sympathie pour les clochards de tout poil qui vivent en marge de la société, exclus qu'ils sont.
Par contre, des amis, il n'en a pas beaucoup et certains ont même tendance à le tirer vers le bas…
L'écriture de
Bruen, c'est de la poésie cynique, noire, vacharde. Et j'en redemande. Lire
Bruen, c'est lire de l'Irlande et la respirer à plein poumons.
Je ne sais s'il trempe sa plume dans de l'alcool à 90° ou dans un encrier rempli d'amertume, mais il nous brosse un portrait de son pays peu flatteur, mais l'ambiance est là.
À sa manière de planter des mots comme ça, l'un en dessous de l'autre, ça me fait penser à celle de
Michael Mention, comme si Mention s'en était inspirée.
Un roman noir qui se boit plus vite qu'une Guiness… C'est drôle, incisif, bourré de répliques acerbes, des citations comme s'il en pleuvait, des références aux grands noms du Roman Noir, de la chanson, le tout mitonné aux petits oignons dans des chapitres et des phrases courtes qui donnent du rythme au roman.
(4,5/5)
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