Sur la petite côte, avec le développement du tourisme sexuel et pédophile, les jeunes gens rôdaient aux abords des hôtels et cherchaient à partir avec leurs clients ou clientes. Beaucoup y réussissaient. Peu importait l'âge, l'essentiel était de partir hors du pays. les jeunes gens se faisaient pousser des rastas ou se tressaient les cheveux. Ils portaient des colliers et des boucles d'oreilles pour faire Chaka Zoulou authentique, et attirer les toubabesses en quête d'exotisme et de sensations fortes.
Bigué avait besoin de parler à quelqu’un pour retrouver « sa tête » qu’elle avait arrachée au Général, lors de la confronta- tion. Celui-ci ne voulant pas s’avouer vaincu, usa de sortilèges normands, bretons ou lorrains et Bigué égara « sa tête ». Ce fut son ami, son frère, Abdou Salam Kane, paix à son âme, qui lui conseilla d’écrire au lieu de parler, et lui remit ce jour-là un billet de mille francs Cfa. Avec cette somme, Bigué acheta un cahier et un Bic noir dans une petite boutique tenue par un Peul du Fouta, sur l’avenue Albert Sarraut. Il lui restait de la mon- naie avec laquelle elle acheta des bonbons au gingembre.
"Elle portait une robe en légos, mot déformé de la ville de "Lagos" au Nigéria, où le colonisateur britannique déversait ce tissu aux couleurs vives, destiné au nègres, au détriment de leurs propres tissus faits main, brodés ou teints à l'indigo. D'autres colonisateurs fabriquaient des tissus "WAX", inspirés des techniques de batik de leurs lointaines possessions d'Asie du Sud Est. Ils les déversaient de même sur le marché des nègres à travers des sociétés coloniales de distribution, avant que les dynamiques femmes du Golfe de Guinée ne s'accaparent une grande partie du marché."
L’écriture pouvait l’aider à retrouver « sa tête ». Et depuis, elle avait son cahier et son Bic avec elle où qu’elle se trouve. Sur la couverture du cahier elle faisait des gribouillis, dans les cafés, les bars ou sur les genoux, assise sur un banc public. L’abstraction de ces gribouillis reflétait son état général.
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