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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Acheté pendant les Étonnants Voyageurs de Saint-Malo 2018, après avoir écouté Sabrina Calvo parler de son livre et défendre ses convictions, Toxoplasma a en l'occurrence reçu le Grand Prix de l'Imaginaire, ce qui attire forcément l'attention.

De l'anticipation politique
Pour débuter ce roman, l'autrice ne nous facilite pas la vie et, en même temps, tant mieux. Les premiers paragraphes s'enchaînent dans un tourbillon étrange où on ne sait pas toujours ce qu'on doit penser de ce qu'on lit. le lecteur découvre au fur et à mesure que Montréal est désormais organisé en une Commune libre, que le monde entier semble avoir subi un effondrement du réseau Internet, voire d'une partie du réseau électrique. Sur le modèle du moment, l'Islande, La Commune libre de Montréal met en contrepartie un régime politique davantage tourné vers la subsistance, l'anarchie et l'entraide. La vie quotidienne locale s'y organise désormais par d'autres manières que le néolibéralisme devenu habituel, à commencer par le fait qu'il n'y ait plus de monnaie unique. Toutefois, il semble évident que ce nouveau régime politique ne soit pas du goût de ses voisins fédéraux qui cherchent à le faire tomber, manu militari s'il le faut.

Du cyberpunk à Nanarland
Dans ce contexte un brin tendu, nous suivons Nikki, « conservatrice de VHS d'horreur », c'est-à-dire qu'elle cherche à refourguer à des clients très occasionnels des nanars de série Z dont elle connaît les moindres détails (et sa culture en la matière est gargantuesque). L'intrigue se centre sur l'enquête pittoresque de Nikki qui s'improvise détective privée pour retrouver des chats perdus et élucider l'énigme du raton laveur éviscéré dans le parc à côté de chez elle. On part donc très bien ! Dans son enquête, on croise tout ce qui fait son petit monde montréalais : des gens un peu perdus, des voisins plutôt étranges, des activistes politisés. Ainsi, sa copine, Kim, fait partie d'un groupe de hackeurs communiquant par un réseau informatique inaccessible au commun des citoyens ; son employeur au vidéo-club semble tout à fait hors du monde ; enfin, Mummy, sa voisine vieillissante, semble bien renseignée sur la vie montréalaise avant l'« apocalypse politique ». Chacun et chacune à leur manière sont des punks, des gens volontairement en marge de la société, qui cultivent un mode de pensée hors des poncifs imposés. Cette étude des marges mise à la fois sur la contre-culture de ces « nanars », ces films de genre sous-financés, sur la construction d'alternatives politiques ou économiques et enfin sur le militantisme pour partager ces réflexions.

Un thriller décalé qui questionne la réalité
Dans Toxoplasma, on croise des mondes virtuels, des actes antispécistes et la menace dystopique fasciste. Rien que ça ! Au fur et à mesure que Nikki déroule son enquête, chaque sujet vient ajouter à sa perplexité, elle qui finalement est une héroïne qui n'a pas d'avis préconçu sur la situation qui lui est offerte, mais qui s'éveille doucement sur la réalité, qui se politise progressivement finalement. Cette progression se construit à chaque petite découverte, chaque « bris » dans la réalité que Nikki peut rencontrer de manière plus ou moins brusque pour elle. C'est l'occasion pour elle de se questionner sur sa propre condition (ce qui semble être un thème récurrent chez cette autrice). Là-dessus, Sabrina Calvo ajoute aussi des éléments qui peuvent franchement paraître burlesques dans ce cadre, mais qui constituent une couche mytho-poétique – comme dirait Jean-Claude Dunyach – qui mise à la toute fin par petites touches sur une mythologie nord-amérindienne. Forcément, il y a aussi des chats, puisqu'on parle de toxoplasmose, mais dans son trip, il y aussi des crapauds-taureaux, des marionnettes qui sont conscientes et plein d'autres choses encore… Certains lecteurs trouveront ce livre trop barré, mais il est surtout très réflexif, n'ayez donc pas d'inquiétudes.

En somme, il est souvent détestable de voir les adjectifs s'amonceler sur la quatrième de couverture pour décrire un roman, mais là, en l'occurrence, ce « thriller proto-cyberpunk, déclaration d'amour aux nanars d'horreur » et « roman poétique et politique, qui réussit à allier le burlesque à la tension d'une intrigue fantastique » remplit son contrat et tient toutes ses promesses.
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Alors qu'une formidable révolution a éclaté, l'île de Montréal est assiégée par l'armée fédérale. Une Commune y a éclos tandis qu'Internet a disparu et que l'électricité n'est plus une valeur très sûre. Tous les insulaires attendent une hypothétique fin du monde. Parmi ceux-ci, vit Nikki qui mène une enquête pour tenter d'élucider d'atroces meurtres d'animaux. Elle va être aidée par des adeptes de course dans les bois du cyberespace et une marionnette. Sa vie devient peu à peu un fil tendu entre rêves et réalité, alors qu'elle commence à entrevoir l'essence d'une conspiration.

« Toxoplasma » est le neuvième roman de David Calvo, paru en 2017, et salué par le Grand Prix de l'Imaginaire 2018. Ce long roman mêle habilement différents genres et thèmes, l'auteur aimant surfer aux lisières des styles de l'imaginaire.
Pour entrer dans l'oeuvre et poursuivre la lecture jusqu'à son terme, il faut accepter de suivre David Calvo dans ses escapades tout à la fois débridées, fantasques et en même temps tenues par un fil d'intrigue solide ; accepter de suspendre une compréhension entière pour entrevoir quelques parcelles de sens, çà et là, suffisamment nourrissantes pour continuer le chemin. Et quel chemin ! L'auteur nous promène entre comique et drame, spiritualité et réflexions politiques, mythologie et cyberpunk, origines et tension vers un avenir, l'ensemble étant servi par une plume merveilleuse.
David Calvo sait créer des images fortes, poignantes dans un style poétique, n'hésitant pas à détourner des mots de leur sens pour leur donner un autre envol, un souffle créatif. La conspiration devient ainsi cette respiration avec l'autre.
Car au fil de l'enquête portée par trois femmes, c'est une conspiration qui peu à peu est mise à jour, la forêt devenant lieu des origines et de la clôture, en un Ouroboros scellant un renouveau.
Une oeuvre fantasque et une expérience aussi exigeante que bouleversante, dont on ressort conquis.
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Dans une utopie uchronique où l'île de Montréal se révèle l'un des derniers bastions encore libres d'un futur proche parallèle, David Calvo tisse un roman cyberpunk sans l'être (le net s'est effondré, il a été remplacé par l'alternative de la Grille où tous les termes informatiques d'un passé encore chaud sont remplacés par des dénominations mythologiques).

L'écrivain y superpose enquête policière riche (on part de petits cadavres mutilés d'animaux pour déboucher sur du plus vaste), quête initiatique et références cinéphiliques d'autant plus exactes qu'elles transpirent une authentique tendresse du fantastique et de l'horreur, de la série B comme des productions plus fauchées mais non sans idées.

Et ça marche puisqu'on se retrouve littéralement transporté de bout en bout. le dépaysement du Québécois mêlé souvent à des termes techniques, la description de cette Commune qui fait singulièrement écho à celle de 1871, les nombreuses pistes scientifiques (voires mystiques) qui fonctionnent par couches sans jamais altérer la portée du roman, laissant le lecteur choisir suivant son humeur (même la fin reste d'ailleurs volontairement ambigüe pour ça), un certain sens de l'action et du rythme, un mystère soigneusement entretenu (non pas un, plusieurs même vu la richesse de ce gros livre), de l'humour, de l'onirisme (tous les rêves de Nikki) et un certain bestiaire allant du raton-laveur au ouaouaron font le reste.

Le titre Toxoplasma en lui-même est une nouvelle piste narrative soutenant l'un des mystères du livre que Calvo n'explicite qu'à moitié, évoquant la Toxoplasmose causée par le parasite Toxoplasma Gondii. Cette dernière, propagée le plus souvent par les chats (hôte final) peut toucher les humains tout en restant bénin. Les cas les plus dangereux restent toutefois pour les femmes enceintes, les personnes séropositives ainsi que celle dont le système immunitaire s'avère affaibli. Dans le roman, la toxoplasmose participe d'un système de transmission dont les chats seraient le vecteur. Mais on n'évoque pas tant que ça de chats dans cette commune qui verse lentement en fin du monde, curieusement.
Ou plutôt fin d'un monde.
Ou sa renaissance en bout de course ?

Au lecteur justement de se faire une idée !

Très vivement recommendé, surtout si vous êtes cinéphile et mordu de SF et d'horreur : là vous allez y reconnaître vos petits.
Lien : http://dvdtator.canalblog.co..
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J'avoue ne pas avoir compris grand chose à ce livre qui me semble toutefois très intéressant. Je n'avais pas du tout les références des nanars qui passionnent tant Nikki, l'une des héroïnes de Toxoplasma. Pourtant, je me suis laissée embarquer dans les rues sombres de Montréal, j'ai été transportée par l'intrigue, je me suis accrochée à ce qui m'était familier, j'ai adoré Finn, j'ai surkiffé l'humour et surtout le rythme de la narration. J'ai adoré lâcher prise et accepter de ne pas tout comprendre, de ne pas tout saisir. Il s'agit d'un livre riche et dense qu'il faut sans doute lire et relire pour pouvoir en comprendre les tenants et les aboutissants. Malgré mes a priori sur la SF, ce livre fut une très grande et belle découverte !
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