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EAN : 978B003BPJO0I
Tallandier (30/11/-1)
4.5/5   2 notes
Résumé :
La "révolution parisienne" animée par Étienne Marcel au milieu du XIVe siècle apparaît bien l'acte de naissance politique d'une capitale. Immensément peuplée pour l'époque, auréolée d'un prestige inégalé grâce à son université, et dirigée par une bourgeoisie puissante, Paris, en effet, ne pouvait rester indifférente aux malheurs de la France : une nouvelle dynastie (les Valois), sans grand prestige encore, un personnel politique fréquemment corrompu ou incompétent é... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Raymond Cazelles (1917-1985) fut un spécialiste incontesté du XIV ème siècle français et des rapports de pouvoir entre : monarchie, noblesse et bourgeoisie durant les règnes de Philippe VI de Valois, de Jean le Bon et de Charles V ainsi que pendant la lieutenance que ce dernier exerça en l'absence de son père, fait prisonnier par le Prince Noir sur le champ de bataille de Poitiers-Maupertuis en septembre 1356, et cette biographie d'Étienne Marcel (publiée chez Tallandier en 1984) en est la preuve la plus parlante.

Cazelles a fait ce travail avec tout le sérieux que l'on attend d'un historien, mais aussi avec passion. Car l'on sent, tout au long du livre l'empathie (mieux, la sympathie) qu'il éprouve pour le personnage.
Cet a priori favorable ne l'empêche pas de dire le vrai, de relever les points forts et les points faibles du personnage, de faire justice des mauvais procès qui ont longtemps été faits à ce "prévôt des marchands de l'eau" à Paris, et qui est probablement né entre 1302 et 1310, sous Philippe IV le Bel, tout en ne cachant pas les traits de caractère ou certains défauts de l'homme public, comme de l'homme tout court.
Raymond Cazelles décrit scrupuleusement l'ascension de Marcel, telle qu'on peut la reconstituer, la création d'un réseau d'influence et la politique matrimoniale de sa famille, qui s'enrichit et gagne en notoriété par certaines alliances : le mariage d'Étienne Marcel avec Jeanne de Dammartin, fille d'échevin, et plus encore sa seconde union, cette fois avec Marguerite, fille de Pierre des Essarts, riche bourgeois et conseiller financier de Philippe V le Long et de Philippe VI de Valois, tombé en disgrâce après la défaite De Crécy, bataille remportée par Édouard III d'Angleterre et le Prince Noir en 1346, lui permettent de se hisser encore un peu plus dans l'échelle sociale parisienne. Il demeure au coeur de la capitale, dans l'Ile de la Cité, rue de la Vieille-Draperie, ce qui nous indique quel était son métier. Ses alliances familiales et "amicales" le font s'approcher des hommes qui manipulent les monnaies, depuis Philippe le Bel, en vue de faire rentrer plus d'argent dans les caisses du monarque. Cela n'est évidemment pas bien vu et cela est risqué, et Marcel, qui ne s'y intéresse encore que de loin, constate avec le sort de Pierre des Essarts combien l'on peut vite monter et tout aussi rapidement chuter. D'autant que l'héritage de Pierre des Essarts, qu'il laisse échapper, par peur des dettes, va finalement profiter à un autre gendre de ce dernier, Robert de Lorris, qui remonte dans l'estime de Jean II le Bon, successeur de Philippe VI de Valois sur le trône de France.
A cela s'ajoute la préférence accordée par le roi aux drapiers flamands, aux dépens des drapiers parisiens, dont Étienne Marcel fait partie. Cela explique sa rupture finale d'avec le milieu dont il avait voulu se rapprocher.

Devenu prévôt des marchands de Paris en 1354, à la suite de Jean de Pacy, il va avoir comme seul objectif de privilégier les intérêts des marchands, artisans et ouvriers parisiens attachés à leur pré carré et, porté par l'estime de tous, il va les représenter brillamment quand s'ouvriront le 8 mai 1355, les États généraux pour décider des calculs d'impôt, ce qui n'empêche nullement la couronne de recourir à une nouvelle dévaluation (système qui ne peut que lui valoir un grande hostilité de la part de ses sujets, à tous les niveaux ou presque). Surtout que les résultats ne sont pas au rendez-vous pour Jean le Bon, qui a beau engranger les espèces sonnantes et trébuchantes, mais ne parvient pas à redresser la situation militaire, bien au contraire. La désastreuse défaite de Poitiers en septembre 1356 et la capture du roi sont un désaveu pour la jeune monarchie valoisienne (installée sur le trône seulement depuis 1328).
Le Dauphin, Charles (futur Charles V le Sage), qui tente de tenir le gouvernail en l'absence de son père, et qui doit en outre lui rendre des comptes, a bien du mal à s'opposer au pouvoir renforcé de la municipalité parisienne qui a quitté la Halle aux Marchands pour s'installer dans la Maison aux Piliers, située sur l'emplacement de l'actuel Hôtel de Ville de Paris. Il semble de bonne composition, en apparence, et ne pas s'opposer systématiquement à tout esprit de réforme, car les États veulent avoir leur mot à dire sur l'emploi des impôts, puisque les bourgeois en acquittent une bonne partie, et qu'ils voudraient que l'argent soit effectivement employé pour une action qui porte ses fruits, sur le plan militaire comme sur le reste.
Et c'est loin, bien sûr, d'être le cas. Comme il y a des freins, et que les choses n'avancent pas assez vite, aux yeux de Marcel et de ses alliés, malgré la nouvelle convocation des États généraux le 17 octobre 1356 et la mise sous tutelle provisoire de la monarchie et du conseil du roi, la colère et la violence vont rapidement prendre le pas sur l'esprit de négociation, d'autant que l'ordonnance de 1357 bien qu'approuvée pour la forme devient rapidement lettre morte dans l'esprit du roi qui oblige son fils à la vider de toute substance. L'assassinat des deux principaux conseillers du Dauphin, Lieutenant du roi, Jean de Conflans, maréchal de Champagne, et Robert de Clermont, maréchal de Normandie, sous les yeux du jeune Charles, sont la goutte d'eau (ou de sang) qui va avoir raison de tout esprit de conciliation. le Dauphin réussir à fuir un peu plus tard et renversera la situation, reprenant Melun, fermant les voies d'issue fluviale pour la capitale et gênant ainsi le commerce des bourgeois parisiens encore fidèles à Étienne Marcel. Ce dernier perdit petit à petit bien des appuis et, s'étant appuyé maladroitement sur Charles de Navarre, qui briguait la couronne de France dans ces temps de trouble, et sur ses partisans, et ayant essayé de rallier à sa cause d'autres villes du royaume dans l'espoir de former une ligue, il finit par s'aliéner des pans entiers des représentants de la bourgeoisie parisienne. L'annonce que des soldats anglais allaient pénétrer dans Paris avec les Navarrais entraînèrent la mort de Marcel, lâché par l'échevin Jean Maillart, , le 31 juillet 1358, près de la porte Saint-Antoine.
C'est la fin d'un grand homme, qui avait sans doute vu trop grand, alors que le pouvoir monarchique restait encore tout-puissant.

Raymond Cazelles trouve beaucoup de circonstances atténuantes à Étienne Marcel et explique pourquoi il ne faut pas trop vite s'empresser de le condamner, ce que ne manquèrent pas de faire les serviteurs de la monarchie valoisienne et les chroniqueurs, en le chargeant à bloc.
Nous serons donc plus mesurés, après avoir lu ce très bel ouvrage de Raymond Cazelles.

François Sarindar, auteur de : Jeanne d'Arc, une mission inachevée (2015)

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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Dans le grand enthousiasme pour la réforme qui caractérise la fin de l'année 1355 et qui se soutient jusqu'au printemps de 1357, au moins, les cités de la langue d'oïl sont nombreuses à appuyer le prévôt des marchands et ses alliés.
Dans les mois difficiles de 1358, beaucoup ont pris leurs distances et l'influence d'Étienne Marcel et des autorités parisiennes se restreint sérieusement. La carte des villes qui ont manifesté, à un moment ou un autre, leurs sympathies s'inscrit sur un tracé géographique irrégulier qui retient les parties majeures des bassins de la Seine et de la Loire. Cela est loin de comprendre la totalité de la langue d'oïl. La Bretagne, le Maine, le Perche, une partie de la Beauce en sont exclus, comme les duchés de Bourbon et de Bourgogne. La Normandie n'est touchée par le mouvement parisien que dans son étroite partie de la basse Seine, liée à la marchandise de l'eau ; tout le reste échappe. L'Artois et la Flandre sont atteints grâce à certaines villes qui, comme Arras ou Ypres, se considèrent comme assez émancipées de la tutelle de leurs comtes pour se permettre une politique personnelle.
Les pays de la langue d'oc ne sont pas intéressés par le mouvement issu de Paris. Ils éprouvent pourtant des sentiments de même nature à l'égard de la royauté.
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