Court commentaire ( si je peux ) , pour cet ouvrage lu d'une traite , car tout a été dit déjà , sans doute .
« Être anonyme, ta vie entière s'est construite autour de cette menace , Mais tu étais comme un enfant , Et tu as fait n'importe quoi » .
« Tu t'es prétendu agent double, Un brave faufilé dans les rangs collaborationnistes pour leur soutirer des renseignements ? » .
Deux extraits de ce livre choc après «
La-legende-de nos pères » et « -
Profession du père » lus il y a un moment .
L'auteur se mesure pour la troisième fois au « pater familias » .
Le « salaud » du titre n'est autre que son propre père.
SORJ -Chalandon durant le premier confinement réussit à récupérer un extrait de son casier judiciaire.
Il y apprend successivement son jugement du 18 août 1945 puis son incarcération entre décembre 1944 et février 1946.
Le choc violent ——-la vue de l'enveloppe brûlante , grise,posée sur la table par son ami Alain ——-qui savait que le passé de son père torturait l'auteur , l'incite à entreprendre les démarches afin de récupérer l'entièreté du dossier .
Ce sera chose faite en mai 2020 .
Stupeur , colère , chagrin , peine ,douleur, tels sont les pensées lancinantes, les cris silencieux , infinis du narrateur.
« Papa, pourquoi tu ne m'as pas raconté ?
« Juste raconté ? ! »
« Ce que j'ai lu dans le dossier , c'est Zelig ! Un homme caméléon ….
« le mec qui est partout à la fois , qui a porté cinq uniformes en quatre ans : armée française armée d'armistice , légion française vichyste , maquis du Nord et même armée américaine avant de s'enfuir à nouveau » !! .
En fait le lecteur découvrira pourquoi , au fond , la figure immense du traître hantera , sera en quelque sorte le pivot , la matrice de toute l'oeuvre de
Sorj Chalandon.
Des traîtres qui font presque partie de lui,….
Le roman est traversé par le procès de Klaus Barbie qui donne un relief particulier , auquel le fils journaliste assiste en tant que journaliste accrédité , le père , lui y est confronté à ses errements ….
Blessures , imposture , mensonges ! Fourvoiement , orgueil , brouillage de pistes , patriote d'occasion, SS de pacotille,….quel roman !
« J'ai passé mon enfance à croire passionnément tout ce qu'il me disait et le reste de ma vie à comprendre que rien de tout cela n'était vrai .
Il m'avait beaucoup menti . Martyrisé aussi ! »
Cette phrase ,à mon sens contient , résume à elle seule la blessure intime, la faille , le manque criant, ,la cohabitation insincère , mensongère sous forme d'imposture ignoble auprès de ce père mythomane , violent, menteur pathologique qui finira sa vie en hôpital psychiatrique ! .
En vérité Sorj. Chalandon ne découvrira le rôle de son père durant la deuxième guerre qu'après sa mort.
Un livre poignant , une vie entière à tricher, pétri d'émotions violentes , dont on ne sort pas indemne : ce père : ce guignol insaisissable, fuyant, désordonné , salopard, pitoyable , tragique .
« le salaud c'est le père qui m'a trahi » .
Merci à mon libraire .