Les nains qui ne sont pas sagement cantonnés dans un cirque ont toujours tendance à embarrasser les gens.
Des ombres grisâtres, des ondes de doute et de gêne, apparurent soudain sous la surface de ses yeux pales.
Le peu de vie qui me restait encore fondait sous la flamme vorace d'un chalumeau de souffrance.
- (...) Je ne crois pas que la vérité puisse faire du mal
à ceux qui ne le méritent pas.
Je réprimai la tentation de lui dire à quel point il se trompait.
En dépit –ou à cause- de ma gueule de bois, j’eus envie d’un autre drink dans l’avion. Estimant que ça ne m’avancerait à rien de devenir alcoolique, je me bornai à prendre deux Alka-Seltzer et beaucoup de jus de tomate.
Quelques années plus tôt, un psychiatre m’avait expliqué que le besoin de découvrir les choses que les autres voulaient garder secrètes correspondait chez moi au désir de faire jeu égal avec une société remplie de gens plus grands que moi. Cette remarque avait été faite dans le but de causer un choc, de m’inciter à l’introspection – et, à terme, de modifier mon comportement. Au lieu de quoi j’avais découvert que j’étais totalement d’accord avec lui, et j’étais allé me procurer une licence de détective privé.
Cinq minutes plus tard, j'aurais été parti. Il était cinq heures et quart de l'après-midi en ce jeudi de la fin du joli mois de mai : ce qui voulait dire que j'en avais marre des cours, marre de corriger des copies, et particulièrement marre des étudiants. Outre un enseignement à plein temps, j'avais consacré les trois derniers mois à une enquête qui ne s'était pas bien terminée : ce qui voulait dire trop de cadavres, beaucoup de crasse et quelques innocents dont l'existence avait été irrémédiablement brisée. J'étais mûr pour de longues vacances.
Nous avions effectué un voyage de milliers de kilomètres
rien qu'en franchissant une porte ;
c'était un voyage de l'esprit et du courage.