Harry Bosch est de retour, et cela fera plaisir à ses fans.Il m'a semblé apaiser – ou presque. Il a noué des liens avec sa fille Maddie, dont il a la garde depuis la mort de sa mère (voir
Les neuf dragons à ce sujet : celle-ci envisage de devenir policier, un moyen de rébellion comme un autre contre son père, qui veille étroitement sur elle. La vie personnelle d'Harry est remplie de relations inachevées, d'occasion manquée – et il le sait, ne s'attendant plus trop à un changement. Sa carrière – pas sûre qu'il aimerait ce mot – touche à sa fin, plus qu'un an à tirer, plus qu'un an avant que l'on trouve le moyen de ne pas lui verser l'intégralité de sa pension, un grand classique dans la police. Il a aussi le privilège de devoir former une jeune enquêtrice, qui s'est retrouvée à ce poste non en gravissant les échelons, mais grâce à un acte de bravoure qui a permis de la promouvoir. En France, on aurait parlé de « minorité visible ». Atout pour la brigade: elle parle espagnol, langue qu'Harry Bosch ne maîtrise pas vraiment.
Je me suis demandée comment cette affaire serait qualifiée en France. En effet, il est rarissime d'enquêter sur un « cold casse » dont la victime vient de décéder, des suites de ses blessures reçues dix ans plus tôt, ce qui n'est pas vraiment une belle promotion pour la médecine. En revanche, Orlando Merced était devenu l'image même des minorités victimes des guerres de gang, et l'ancien maire n'hésitait pas à l'exhiber, pardon, le faire participer à ses campagnes.
Si Harry Bosch devait rédiger le manuel du parfait enquêter, il parlerait tout d'abord d'acharnement : il ne compte pas ses heures, et Lucia, sa nouvelle équipière, non plus. Il ne prend pas toujours le temps de respecter les règles – la paperasserie, les rapports à ses supérieurs ne sont pas ses priorités, et il déplore que cela le soit devenue. Je ne parle même pas du budget à respecter, ou des fonds à trouver dès qu'Harry veut suivre une piste – pas sûre qu'en France, de telles démarches seraient possibles, mais, en même temps, les Etats-Unis sont tellement vastes. Un bon rapport qualité/prix est exigé, et un hébergement bon marché, un restaurant peu coûteux font partie des éléments que les enquêteurs doivent connaître, au point que l'on se demande quand ils peuvent vraiment se concentrer sur leurs enquêtes.
D'abord, s'appuyer sur ce qu'ont fait leurs prédécesseurs. Harry Bosch n'a pas l'arrogance de se croire meilleur que les autres, il est un, parmi d'autres, et je ne résiste pas au plaisir de citer ses préceptes : Les bons flics ont tous comme un espace creux en eux-mêmes. Un vide où la flamme ne cesse de brûler. Pour quelque chose. Appelons ça la justice. Ou le désir de savoir. le besoin de croire que les tenants du mal ne sauraient profiter des ténèbres à jamais.
Puis, être patient. Enquêter est un travail de fourmi, entre lectures de rapport, d'articles de journaux, interrogatoires de témoins qui ont déjà tout dit, qui pensent avoir tout dit, ou qui ne veulent surtout pas tout dire. C'est aussi faire le lien avec d'autres enquêtes, liens que le recul des années permet d'établir – et de montrer que, si les nouvelles technologies ont du bon, rien ne vaudra jamais la communication entre les services de police – il faut simplement s'en donner la peine. Pas toujours facile, pas toujours possible. Au passage, les journalistes en prennent aussi pour leur grade, si prompts sont-ils à écrire ce qui les arrange. Quant aux hommes politiques, ils pensent d'abord aux élections, au pouvoir, et tout ce qui peut leur être utile est bon à prendre. Mais Harry Bosch le savait déjà, son équipière s'en doutait largement aussi. Ajoutons qu'Harry ne lui cache pas que faire équipe avec lui n'est pas sans risque (voir presque tous les tomes précédents) mais il n'est pas de policiers sans faille.
Mariachi plaza ravira les fans de Connelly, et plaira aux amateurs de romans policiers.
PS : le titre anglais est The burning room. A la lecture du roman et à la façon dont Harry Bosch considère le rôle du policier, je le trouve plus parlant.
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