Citations sur Les chroniques saxonnes, tome 3 : Les seigneurs du Nord (25)
J’avais envie de ténèbres. En cette nuit d’été, le clair de lune qui ne cessait de glisser entre les nuages me rendait nerveux. J’avais envie de ténèbres.
-Ne se lave-t-il point? grimaça-t-elle.
-Au moins une fois le mois, et probablement plus souvent. Il est fort sourcilleux de cela. Mais il pue tout de même. Et moi, je pue?
-Comme un porc, sourit-elle.
- Tout est écrit, ici, remarqua Ragnar. Tout. Sais-tu lire ?
- Je sais lire et écrire.
- Est-ce utile ? demanda-t-il, impressionné.
- A moi, cela ne l'a jamais été, admis-je.
- Alors pourquoi le faire ? s'étonna mon ami.
- Leur religion est écrite, expliquai-je. La nôtre, non.
- Une religion écrite ?
- Ils ont un livre où tout est écrit.
- Pourquoi ont-ils besoin qu'elle soit écrite ?
- Je l'ignore. C'est ainsi. Et bien sûr, ils écrivent les lois. Alfred adore en faire de nouvelles, et toutes doivent être consignées dans des livres.
- Si un homme ne peut se rappeler les lois, c'est qu'il en a de trop nombreuses.
En mer, parfois, si l’on éloigne trop un navire de la côté, que le vent se lève et que les vagues dépassent de leurs crêtes blanches la ligne des boucliers, on n’a d’autres choix que de se laisser aller à la volonté de dieux. Il faut amener la voile avant qu’elle ne se déchire. Les rames sont inutiles : alors on les rentre, on livre le navire à lui-même en murmurant ses prières, le regard tourné vers un ciel noir, pendant que le vent hurle dans la pluie cinglante. Et l’on espère que la mer ne précipitera pas le navire sur les rochers.
-Mon père, son père et le sien avant lui étaient tous des Vikings. Nous voguions là où nous pouvions prendre des richesses. Nous avons connu la fortune. Nous avions le rire, l'ale, l'argent et la bataille. Si je devais être roi, je devrais protéger tout ce que je possède. Au lieu d'être un Viking, je serais un berger. Je veux être libre. J'ai trop longtemps été otage et je veux la liberté. Je veux mes voiles dans le vent et mes épées dans le soleil, sans être accablé par des devoirs. (Il avait pensé comme moi, mais il s'était exprimé avec plus d'éloquence. II sourit soudain, comme soulagé d'un fardeau.)