... les valeurs de gauche se délitent... cette gauche française qui a déjà enterré l'espérance révolutionnaire et qui finira, il le prédit, par se rallier à l'économie de marché.
Mai, c'est d'abord la crise d'une génération qui n'a pas trouvé une vision du monde qui lui apporte une raison de vivre.
... pour tous ces petits arrangements magiques de la vie quotidienne, les garçons sont vraiment nuls.
Les filles et les garçons : deux mondes irréconciliables.
Il ne trouvera jamais une fille pareille. Lorenzo est triste. Il dit à ses copains qu'il est le Poulidor de l'amour...
Poulidor on l'aime. Ce n'est pas Anquetil. Anquetil il gagne tout le temps et pourtant les Français ne l'aiment pas.
Michèle en a assez de toutes ces interdictions, de ces restrictions, de ces brimades à l'encontre des femmes.
― Il y a des musiques, des chansons qui nous touchent au plus profond et celles qui nous permettent de dire : voilà, on appartient à cette génération. Le twist, le madison font partie de cette deuxième catégorie.
― C’est exactement ça, acquiesce Lorenzo. Exactement.
― Et les autres, tu as des nouvelles ?
― Perdus de vue, répond Michèle sans hésiter.
― J’ai longtemps pensé que la vie était une ronde. Que les gens se croisent et se recroisent en vertu d’un plan secret qui nous échappe. Que parfois ils se frôlent, sont à quelques mètres l’un de l’autre et ne s’en apercevant pas repartent chacun de son côté.
« Liberté », voilà un mot que Michèle aime particulièrement. L’utilisant parfois à tort et à travers. Mais n’est-ce pas le privilège de son âge de pouvoir utiliser des mots à tort et à travers, comme pour structurer ses phrases bancales ? Le temps se chargera bien un jour ou l’autre de remettre les mots à l’endroit…
Avant de se quitter, ils se serrent longuement dans les bras. Ils savent que les vacances vont les séparer de longs mois. Qu’il y aura entre eux, lien ténu mais tenace, l’écoute de cette chanson. Que c’est ça aussi l’adolescence. Que c’est ça devenir adulte. Lentement. Apprendre de chaque moment. De chaque joie. De chaque tristesse. Apprendre qu’on passe sans cesse du silence au bruit, de la paix à la guerre, que rien n’est jamais acquis.