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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
24 juin 1987. A force de se côtoyer, ils étaient devenus le portrait l'un de l'autre. Telles deux gouttes d'eau inséparables. On les appelait les jumeaux. Alfredo et Beatrice, Beatrice et Alfredo. Comment vont-ils l'appeler, elle, maintenant que son jumeau est mort ?
Les années de plomb en Italie. Un quartier infect d'immeubles délabrés. Des rues sales et poussiéreuses. Des antennes illégales. C'est dans cette terrible cité, la Forteresse, qu'a grandi Bea, entourée de ses parents et son frère, Francesco. Une famille pauvre mais aimante. Au-dessus de leur appartement vivent Alfredo, ses deux frères et son père. Alcoolique dépressif depuis la mort de sa femme, il ne cesse de battre ses enfants. Les cris et les larmes résonnent dans tout l'immeuble. Les deux gamins se rencontrent en 1974. Elle a 9 ans, lui 8. Salement amoché par les coups de son père, Alfredo trouve refuge chez Bea. Une forte amitié se noue aussitôt entre eux. Inséparables, ils font tout ensemble, se disputent aussi mais ne restent jamais bien loin l'un de l'autre, s'aimant plus qu'ils ne le pensent...

De quelle nature est la relation qui unit Bea et Alfredo ? de l'amitié ? de l'amour ? de la passion ? Ce qui est sûr, c'est que chacun est lié à l'autre. Etroitement. Inexorablement. Beatrice, la narratrice, nous raconte les années passées avec son jumeau. Les petits bonheurs, les disputes, les déchirures et les retrouvailles qui rythment leur quotidien dans cette Forteresse, cité plus que jamais sombre et déchue. Avec cette impression d'être enfermé et réduit à peu de choses, chacun tente de s'en sortir. Valentina D'Urbano nous livre un roman social intense et poignant et nous décrit avec force cette jeunesse vulnérable mais volontaire. Bea et Alfredo, désireux d'une autre vie, sont terriblement touchants. Porté par une écriture à la fois amère et poétique, ce roman d'une grande justesse dresse avec noirceur le portrait d'une société miséreuse.

J'entends encore et toujours le bruit de tes pas...
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Une prison.
La Forteresse, cette cité délabrée, décatie, squattée par les laissés-pour-compte de la société italienne, où il n'y a ni école, ni pharmacie, ni commerces. Seulement une église, parce qu'on y prie parfois. En vain. Et un cimetière parce qu'on y meurt. Souvent. Et vite. Et violemment.

Une prison.
Celle de la violence: le père d'Alfredo bat ses enfants comme il boit. A fond, à mort. Parce qu'ils ressemblent à leur mère, si blonde, disparue si tôt. Pour s'évader de cette prison -là, il faut une telle violence qu'on y retourne, en prison.

Une prison.
Celle de la drogue où se perdent les enfants battus, où se débattent les enfants perdus. La blanche qui ronge la peau, qui mange les bras, qui étrécit les pupilles, qui dilue la volonté, qui détruit la confiance, qui corrode l'amitié. Et même l'amour.

Une prison.
Celle de l'amour. de l'amour-amitié qui triche avec les mots et les sentiments. de l'amour-haine qui est la seule façon d'aimer dans un monde sauvage, la seule façon de respirer dans un monde asphyxié.

Une prison emprisonnée dans une prison.

Bea aime Alfredo
qui aime la blanche
qui anesthésie la violence
qui enferme dans la cité
qui isole du dehors.

Dans une mise en abyme vertigineuse, Valentina d'Urbano, en cercles concentriques, trace le portrait d'une génération perdue, d'un ghetto social tellement implacable que les années de plomb, si pesantes pour l'Italie, n'eurent aucun effet sur lui.

Une seule lueur d'espoir: l'amour de ses parents, de son frère, de cette famille pauvre mais généreuse, aimante, confiante, courageuse, qui permet à Bea, jumelle amputée de son ombre, de fuir loin de la Forteresse dans une ville normale, auprès d'une amie normale, vivre une vie normale.

Ou du moins le tenter. Loin d'eux.

Un beau récit, poignant et vibrant de colère, où la tendresse se cache derrière les coups de poing ou les coups de gueule.

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Il y a maintenant deux ans, je me rappelle être allée au cinéma pour voir un film qui n'avait pas encore tout emporté sur son passage, d'y être allée parce que l'affiche m'avait attirée, moi qui ne leur fait pourtant que rarement confiance.
Passé les bandes annonces, le choc, la déflagration, l'uppercut, le coup de foudre. Celui qui fascine et qui frappe.

Ce film c'était "Shéhérazade" de Jean-Bernard Marlin. A la fois drame social dans concession et récit d'une passion aussi sublime que violente, il met en scène la rencontre et la vie de deux adolescents, deux enfants perdus de la banlieue marseillaise. Lui, il deale, elle, elle se prostitue et ils s'aiment envers et contre la misère, la violence et leur milieu.

J'ai retrouvé l'incandescence de ce film intense et déchirant dans "Le bruit de tes pas". J'ai lu comme j'avais vu le film: dans l'urgence, tiraillée entre l'envie de me sortir de là très vite et le désir de savoir ce qu'il advient des personnages, quitte à souffrir.

C'est un fait, le premier roman de Valentina d'Urbano -dont le talent et la singularité de l'univers m'avait déjà percutée de plein fouet avec "Acquanera"- prend aux tripes.

L'Italie se débat avec ses années de plomb et l'histoire se passe à la Forteresse, un quartier violent et misérable situé -comme souvent- à la périphérie d'une grande ville.
La Forteresse est miséreuse, les murs sont lézardés, les rues ne sont pas sûres, on squatte les appartements plutôt que les louer.
La Forteresse est une prison dont on ne sort pas. Jamais. On y naît, on y meurt dans la poussière et le béton.
On y étouffe en été, on y crève de froid en hiver, on y zone sans perspectives ni envie d'avenir.

Beatrice, la narratrice a grandi là avec sa famille et avec Alfredo surtout, le voisin du haut, celui dont le père boit trop. Les deux enfants grandissent ensemble, comme frère et soeur jusqu'à ce que le désir s'en mêle.
Ils auraient pu s'aimer et vivre leur vie. Bea, d'ailleurs, n'attend que ça. Et puis, elle veut voir la mer, et partir loin.
Ils auraient pu mais ils ne savent pas: alors ils s'aiment avec violence, avec des coups, avec des cris et en cherchant à se dominer l'un l'autre.
Si Bea se révèle d'une force peu commune au fil du roman, ce n'est pas le cas du bel Alfredo, fragile et sur le fil, désespéré.
Lui qui ne rêve pas de voir la mer s'évade autrement à coups de blanche et de seringues et toute la passion du monde n'y changera rien.

Roman social et histoire d'amour fou, "Le bruit de tes pas" est un texte singulier, dont l'amertume confine au tragique porté par une écriture précise, percutante qui met en scène la jeunesse dans ce qu'elle a de plus fougueux, de plus excessif.
Incandescent comme "Schéhérazade" et le jeu de Dylan Robert et Kenza Fortas. Comme James Dean un peu aussi.
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Un livre cru, violent, heurtant, saisissant !
Ayant adoré son dernier livre Acquanera, je me suis plongée dans son premier roman.
On y découvre Béatrice qui nous narre l'histoire de son "jumeau" d'adoption venant de mourir.
Éduqués dans une région italienne pauvre, violente où l'alcool et drogue circulent facilement, ces deux jeunes grandissent sous le regard, de chacun, qui peut-être violent, tendre et aimant.
Un livre très bien écrit et qui ne laisse pas le lecteur sans heurt.
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Beatrice et Alfredo. Une tragédie ordinaire écrite de façon percutante. le lieu? une banlieue italienne sordide, l'envers (l'enfer?) de l'Italie qui plaît tant aux visiteurs. Squats, précarité, addictions, vie en marge. Et volonté de vivre malgré tout, sans cesser d'aimer même ceux qui apparemment n'en valent pas la peine. Une recherche d'humanité sans complaisance ni bons sentiments. Et en plus un livre joliment édité aux éditions Philippe Rey. Une belle découverte.
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Il rumore dei tuoi passi.

La "Forteresse" ,quartier déshérité d'une grande ville qui n'est pas nommée, lieu de poussière où chaque chose a un surnom.
Les familles squattent les appartements d'immeubles délabrés.
C'est là que sont nés et ont grandi Béatrice et Alfredo. Pour tous, ils sont "les jumeaux" ,ils ne sont pas frères de sang mais liés par quelque chose de plus profond.
Ils partagent tout, dorment dans le même lit, et ont fini de se ressembler dans leur manière d'être.
Ils ne quittent pas leur quartier prison mal famé, sans joie et sans espérance.
Au dehors, c'est le terrorisme des années quatre-vingt, les années de plomb, dont ils n'ont pas conscience, qui ne concerne pas leur quotidien si difficile.

Ce roman, à la grande qualité narrative mais au réalisme douloureux est pessimiste. Peut-on échapper à son milieu?
Ces jeunes sont le reflet de la dégradation dans laquelle ils vivent, entre les murs d'un quartier dangereux , oublié de tous où la faim et la malavita règnent en maître.

Les chapitres numérotés sont brefs et concis.
Le style est net, incisif.
C'est une lecture difficile à lâcher, non pas pour en découvrir l'issue puisqu'on la connaît depuis le début, mais pour savoir ce qui arrivera le jour, l'heure, la minute suivante.
Un roman qui révèle une réalité perturbante qu'on ne doit pas ignorer.
Et que je ne pense pas oublier de si tôt.
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Alfredo est accueilli petit dans la famille de Beatrice et ces deux-là grandissent en "jumeaux", entretenant une relation sauvage, pesante, dans une atmosphère qui laisse peu d'ouverture.
Est-ce qu'on s'échappe du lieu où l'on est né (ici, un quartier urbain nommé la Forteresse, refuge de familles squatteuses vivant dans le désoeuvrement, les lois de la survie, l'exclusion ; dans Aquanera, le 2e roman de Valentina d'Urbano que j'ai lu en premier, c'est un village perdu tout aussi sombre) ? Est-ce qu'on échappe à la violence familiale ? Comment les relations peuvent être des liens toxiques ou bien des ailes ?
Valentina d'Urbano écrit l'Italie des petites gens, c'est brut, physique, sombre mais pas complètement sans issue. J'espère qu'une édition française continuera à faire exister les romans de cette autrice italienne. J'aime passer du temps avec ses personnages, même lorsqu'ils ne sont pas complètement aimables, et les univers - pas du tout carte postale - dans lesquels elle nous plonge, dans une écriture d'émotions et de sensations.
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Si ce premier roman n'est pas d'une originalité folle, je l'ai trouvé "habité" par deux personnages qui marquent, Beatrice et Alfredo, à la fois jumeaux, c'est ainsi qu'on les nomme, et pourtant complètement opposés par leur caractère et leur manière de gérer le fait de vivre dans un lieu aussi sordide. le roman s'ouvre sur l'enterrement d'Alfredo qui met en colère Beatrice. Dans cette première scène, les deux personnages sont campés: tandis que l'agressive -mais touchante car entière- Beatrice se bat pour sortir de là, le doux Alfredo a sombré. Dans ce premier roman qui a d'ailleurs été sélectionné parmi les 30 romans de la rentrée repérés par la FNAC, l'auteure a trouvé une belle voix et une force qui fait de cette lecture une réussite.

Lien : http://vallit.canalblog.com/..
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Le décor, nommé "La forteresse", un ensemble d'immeubles jamais terminés et squattés par leurs habitants, est décrit avec un réalisme qui est le mot venant immédiatement à l'esprit en parlant de ce roman. Il est dans le même registre que D'acier de Silvia Avallone, il va même encore plus loin dans la noirceur et le délitement dramatique des vies.
Beatrice a toujours vécu dans cette banlieue oubliée de tous, dans une famille très pauvre, mais qui tente de garder quelque dignité. A l'étage au-dessus vient s'installer un père alcoolique, violent, et ses trois garçons. Beatrice, au seuil de l'adolescence, va se lier avec Alfredo, au point qu'on les surnomme « les jumeaux ». Ils vont être trop vite catapultés dans les troubles de la jeunesse, les tentations de la liberté, sous toutes ses formes, même les pires… Des deux, Beatrice reste la plus forte, mais que peut-elle faire pour parvenir à son rêve de faire quelque chose de sa vie ?
Ce roman est un des plus rudes que j'ai lu récemment, et pourtant, je ne suis pas spécialement adepte de la guimauve ! Les dialogues comme les situations sont âpres, ça cogne, ça remue, on reçoit tout en pleine figure ! J'ai admiré l'écriture et la traduction qui rendent si bien l'atmosphère qu'on a l'impression de les avoir vraiment côtoyés, cette bande de jeunes romains… Des lignes d'introduction à la dernière page, grâce à une construction très maîtrisée, l'émotion court, et quelques scènes percutantes me resteront en mémoire…
Lien : http://lettresexpres.wordpre..
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"Le bruit de tes pas, ton odeur qui s'évapore sur l'oreiller, la lumière du jour où tu m'as abandonné.". C'est le cri de douleur de Bea l'Italienne, née et élevée dans la terrible cité baptisée La Forteresse, Bea la jumelle qui vient de perdre son jumeau Alfredo, emporté par un des fléaux qui suit la misère et un avenir bouché.

Le temps de 275 pages, Bea revient sur ce que fut sa vie avec Alfredo, leur rencontre à 9 ans, leurs combats, leurs déchirures dans un environnement qu'ils habitent et qui les habitent, au point de leur être fatal. Car il n'est pas facile de grandir sans espoir d'avenir, d'intégration à la vie moderne : "On était des individus peu recommandables, que personne n'acceptait d'embaucher, les rebuts de la société. Tous les désespérés avaient afflué ici, donné vie au quartier et mis au monde des enfants à l'avenir encore plus sombre." Ces individus dont on a peur, qui sont les fruits d'une société dévoyée qui rejette ses pauvres à sa marge, ces individus vivent, travaillent (parfois), aiment, mangent … et meurent.

C'est cette vie que veut nous faire découvrir Valentina d'Urbino dans son premier roman. Sans pathos, sans apitoiement grâce à la voix originale de Bea qui se raconte et nous raconte, avec humour parfois, et sans s'appesantir sur des situations qui nous paraîtraient invivables. Et c'est cette presque indifférence, cette banalité de la misère et de la violence qui rend ce texte encore plus fort.

Et puis il y a la relation entre les « jumeaux », dénommés ainsi car Bea et Alfredo ne se quittent jamais : "Alfredo et moi étions inséparables depuis des années, même si on passait nos journées à se disputer, se mordre, se tirer les cheveux. [...] Les gens de la Forteresse disaient qu'on était drôles. Originaux. Ils nous appelaient les jumeaux." Un attachement loin de tout romantisme, fait de disputes incessantes, de baffes mutuelles, de trahisons, et pourtant aussi d'un amour plus fort que tout, mais étouffé par une vie sans soleil, sans avenir, sans saveur. "Nous aurions dû vivre notre vie. Au lieu de nous efforcer, agrippés l'un à l'autre, de ne pas mourir."

Si Bea est attachante malgré son franc parler et son laisser aller, Alfredo est plus insaisissable, presque plus caricaturale de cette faune des cités que l'on imagine :"Sa faiblesse, son je-m'enfoutisme, sa paresse, sa résignation face au monde qui l'avait produit m'insupportaient. Les filles qui lui plaisaient, nos copains quand ils tentaient de le détourner de moi, tout ce qui risquait de me l'enlever m'insupportait. [...] Je pensais que les éléments se liguaient pour nous éloigner et, Alfredo n'ayant aucune volonté, je lui imposais la mienne. Je n'avais pas compris qu'il cherchait autre chose, qu'il voulait me fuir. Et se fuir lui aussi."

Et pourtant c'est peut-être celui qui souffre le plus, qui se cherche le plus au milieu d'une vie qu'il n'a pas demandée et qu'il déteste.

En bref, sans être exempt d'imperfections, un roman d'une grande simplicité de style qui prend aux tripes, qui nous ouvre un univers peu connu et, raconté sur un ton original, nous parvient avec une force renversante. Un texte à découvrir.
Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
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