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La 24-7 : c'est le nom, d'après le diamètre en pieds et en pouces de son plus gros séquoia – sept mètres et demi de tour de taille pour cent douze mètres de hauteur –, de la parcelle de forêt plurimillénaire qu'à cinquante-trois ans, Rich, bûcheron comme avant lui son père et son grand-père, vient d'acquérir, en s'endettant jusqu'au cou, sur l'audacieux pari qu'une route en permettrait bientôt l'exploitation.
En cette fin des années soixante-dix, ils sont une petite communauté à dépendre exclusivement de l'exploitation des géants californiens qui subsistent encore. Dur et dangereux, le métier abat aussi régulièrement son quota d'hommes, et Rich, dont le corps marqué de cicatrices raconte la vie aussi bien que la dendrochronologie celle des arbres, s'est décidé au grand saut qui doit le rendre indépendant, assurant ses vieux jours et l'avenir de son fils Chub, bientôt en âge d'être scolarisé.


Pour la protéger, il n'a pas encore mis son épouse Colleen dans la confidence. de vingt ans sa cadette, celle qui fait office de sage-femme dans leur petite ville se désespère de ses fausses couches en série et se remet à peine de la perte d'une petite-fille à mi-grossesse. Lorsque Daniel, son amour de jeunesse, revient dans la région et, au grand dam de la population déjà exaspérée, entre manifestations hippies et création de parcs nationaux, par l'obstruction croissante à l'exploitation forestière dont tous dépendent ici, se met à jouer les lanceurs d'alerte contre l'épandage massif de défoliants facilitant le débroussaillage, elle est la première à douter face à la multiplication des malformations de nouveaux-nés dans la région.
Bientôt déchiré entre leur dramatique dépendance au découpage des derniers séquoias géants en un maximum de pieds-planches et leur prise de conscience, à la fois des impacts écologiques de cette activité – comme les glissements de terrain déboisé et la disparition des saumons incapables de frayer dans des rivières envasées – et des risques sanitaires associés, le couple se retrouve au coeur des affrontements de plus en plus violents qui opposent les défenseurs de la nature et ceux qui ont fait de son exploitation leur indispensable gagne-pain.


Jamais manichéen, le récit entrelace les points de vue dans une vaste fresque familiale et écologique, vécue à hauteur d'hommes que l'on ne quittera qu'à regret au terme de ses plus de cinq cents passionnantes pages. Dans l'imposante et splendide futaie où de minuscules humains mènent un combat herculéen et périlleux nécessitant un incomparable savoir-faire pour à peine gagner leur vie dans la boue, la sciure et la sueur, le lecteur se retrouve lui aussi écartelé : d'un côté, le partage de leurs peines et de leurs vicissitudes, de l'autre, l'effroi bien contemporain suscité par ce pillage éphémère d'un trésor naturel irremplaçable et par l'ignorante inconséquence qui les conduit à s'empoisonner littéralement.
Et, tandis que, d'un parfait réalisme, les rebondissements de leurs mésaventures s'enchaînent en une tension incessante, et que, profondément justes dans leurs ambivalences et dans leurs maladresses, les personnages se révèlent de plus en plus attachants, c'est très symboliquement à nos contradictions actuelles entre notre conscience de détruire la planète et notre incapacité à changer notre mode de vie que nous renvoie cette histoire représentative, survenue il y a un demi-siècle en Californie du Sud, région natale de l'auteur.


Ce premier roman impressionnant de justesse et de maîtrise a l'art et la manière d'immerger le lecteur dans les senteurs de sous-bois mêlées des relents âcres des herbicides pulvérisés par les exploitants forestiers, pour un chant d'agonie de tout un monde dont on peut encore espérer qu'il ne préfigure pas celui de la planète entière. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Je ne sais toujours dire pourquoi les forêts suscitent en moi autant de fascination et de vertiges. Que m'ont-elles fait ou que ne m'ont-elles pas fait encore ? Quand j'entre dans une forêt, j'attends toujours de manière presque inavouable et inespérée le déclic, la porte qui s'ouvrira vers un envers du décor enchanteresse, me délivrant à jamais du poids inextricable de la tristesse du jour et des malheurs du monde.
Les forêts sont pour moi des lieux sacrés qui font côtoyer les vivants et les morts. Je crois entendre parmi la respiration des ramures, d'autres voix qui me tendent la main.
J'imagine parfois des arbres se parler, chuchoter, s'effleurer dans le froissement du vent. Sous le secret des feuilles, il y a des territoires qui palpitent...
Je les devine citadelles imprenables, où j'aime laisser vagabonder mes anomalies et mes illusions, je sais qu'ici rien ne peut venir les perturber.
Mais aujourd'hui les forêts ont mal, pleurent, agonisent... Il faut prendre soin d'elles...
Au travers d'une fresque ample à la fois sociale et intime, Les derniers géants est un roman qui dit cela en quelque sorte et c'est peut-être pour cette raison qu'il m'a touché.
J'ai ressenti un coup de coeur pour ce récit qui m'a entraîné dans les grands espaces forestiers en Californie du nord. Nous voici plongés là-bas dans la fin des années soixante-dix.
Nous découvrons une communauté de bûcherons, d'élagueurs, affairés du matin au soir dans leurs tâches éprouvantes et souvent dangereuses. Leur territoire est dominé par ces géants plusieurs fois centenaires, des séquoias dont l'exploitation à destination de l'industrie du bois d'oeuvre fait vivre ici de nombreuses familles, depuis plusieurs générations. Ici on est bûcheron de père en fils, et fier de l'être.
Du matin au soir, c'est le bruit incessant des tronçonneuses comme le vrombissement des abeilles besogneuses, celui des haches aussi, des coups portés dans le coeur de la forêt ; parfois les cris des hommes précèdent un long bruit venu du fond des entrailles de la terre et qui accompagne cet arbre qui s'effondre à jamais au pied des siens...
Dans ces pages, viennent l'odeur de la forêt, l'odeur de la sciure, l'odeur de la sueur des hommes qui ne ménagent pas leur peine. Mais il y a aussi cette odeur âcre dans l'air, cette odeur qui flotte sournoisement pour se répandre jusque dans le cours des ruisseaux...
La jeune autrice californienne, Ash Davidson, dont c'est ici le premier roman, m'a pris la main pour me faire venir à la rencontre des personnages rudes et attachants de cette communauté. Parmi celle-ci il y a ce jeune couple, Collen et Rich Gundersen. Ils vivent là avec leur jeune fils Chub qu'ils appellent affectueusement Grahamcracker. Il y a aussi leur chien Scout. Peu à peu le drame social sous-jacent va s'entrelacer avec l'histoire intime de ce couple. Collen voudrait avoir un autre enfant, sa récente fausse-couche l'a jetée dans un profond désarroi.
Les grands parcs continuent d'étendre leurs territoires pour protéger la nature tandis que les écologistes affrontent depuis quelques temps les lobbyings puissants et les entreprises forestières, dans l'espoir de sauver les derniers séquoias, certains de ces arbres sont presque millénaires... Mais la menace ne pèse pas seulement sur les arbres, elle pèse aussi sur l'ensemble de l'écosystème, la faune, la flore, les saumons, l'eau, les femmes, les hommes, en raison des épandages intensifs d'herbicides pour rendre les routes plus accessibles et faciliter le déplacement des grumes de sequoias vers le fond de la vallée. La recherche de productivité se gagne sur tous les fronts...
C'est un monde à l'agonie que les arbres ont la pudeur de cacher.
Mais ici le texte empli de justesse et de retenue, n'oppose pas les « gentils » écolos aux « méchants » bûcherons. Avec habilité, l'autrice évite les pièges du manichéisme, car ces travailleurs forestiers sont eux-mêmes victimes des compagnies qui les exploitent, assoiffées de pouvoir et d'argent n'hésitant pas à déployer tous les lobbyings possibles auprès des figures politiques locales pour parvenir à leur fin...
Rich voudrait offrir une autre existence à sa famille, car travailler dans les conditions sociales proposées, ce n'est plus vivre, c'est survivre. Rich décide alors d'investir toutes leurs économies dans un projet ambitieux et se garde de l'évoquer à son épouse pour ne pas la tracasser...
Collen est sage-femme. Voir naître d'autres enfants parfois lui fait mal au coeur, mais voir naître d'autres enfants avec des malformations devient brusquement inacceptables. Et puis il y a aussi toutes ces fausses-couches qu'on ne peut plus attribuer au seul hasard, à la faute à pas de chance. Un jour elle aide à accoucher une jeune mère qui met au monde un enfant sans cerveau...
Et si ces herbicides qu'ils balancent depuis leurs hélicoptères dans des nuées de plus en plus immenses et frénétiques, étaient nocifs pour l'eau, les enfants à naître, la vie tout simplement... ? C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase et dresse désormais Colleen dans une révolte viscérale...
D'autres camps vont alors s'affronter au sein même de cette communauté jusqu'ici solidaire soudée comme au travers d'un pacte ancestral tacite, au sein même des couples qu'on croyait solides comme des sequoias.
La déflagration des arbres qui tombent au milieu des forêts se répercutent dans le coeur des personnages de ce livre.
C'est un roman bouleversant, puissant, tellurique.
C'est une lutte sans merci dont personne ne sortira indemne.
Ce récit haletant, à la narration très bien menée, m'a touché autant par le contexte écologique qu'il convoque que par la trame douloureuse des personnages dont certains me sont devenus subitement proches comme si nous appartenions à la même famille. Ce roman m'a emporté jusqu'à la fin de l'histoire. Un coup de coeur parmi les coups de hache !
C'est aussi le tout récent coup de coeur de ma librairie préférée qui m'a fait découvrir ce livre...
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Si la construction de ce roman reste classique, elle est efficace. En alternant les perspectives des deux moitiés d'un couple, l'autrice offre une vision plus riche de l'impact environnemental de l'industrie menuisière et décrypte les mécanismes de fracture au sein d'une famille. Engagé et rythmé, ce livre évoque aussi et surtout la lutte vaine de l'homme contre la nature (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/01/07/les-derniers-geants-ash-davidson/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Personnellement, un livre que j'ai beaucoup aimé. Il y a du suspense, de la joie, de la tristesse, de la peur, de la colère mais aussi de l'amour.

Les derniers géants de Ash Davidson est le premier roman de cette autrice, je découvrirai avec grand plaisir ses futures parutions.

La famille Gundersen, rêve depuis toujours d'acheter la parcelle 24-7 où se trouvent des séquoias géants et pluricentenaires. Après son grand-père et son père, Rick peut enfin l'acquérir en 1977. Il a investi en secret toutes ses économies. Quelle joie pour lui de posséder le plus grand arbre de la forêt et le plus haut.

La Californie du Nord, un monde de bûcherons, ils ne sont pas seuls, les écologistes viennent semer la zizanie, le partage est difficile avec les indiens.
"Les Yurok pêchaient dans la rivière depuis l'aube des temps, on leur accordait le droit de continuer, jusqu'à soixante-dix kilomètres à l'intérieur des terres, et le long des ruisseaux, sur deux kilomètres de chaque côté - dans toute la Réserve. La carte s'était gravée dans l'esprit de Colleen à force d'écouter tous les pêcheurs furax qui prenaient part aux déjeuners de poisson frit le dimanche, les mains attachées dans le dos par l'état de Californie alors que les Yurok sortaient des saumons aussi gros que des chiens. Rich semblait approuver la décision, mais on voyait maintenant des autocollants à l'arrière des voitures : protégez les poissons, mangez de l'indien en conserve."

Malheureusement pour Colleen, Rich et leur fils Chub, tout ne va pas se dérouler comme prévu.
Colleen aimerait un deuxième enfant, mais elle s'aperçoit qu'autour d'elle, il y a de nombreuses malformations chez les nouveaux-nés, elle-même a fait plusieurs fausses couches.
La compagnie d'abattage serait responsable de tous ses malheurs, suite à l'usage inconsidéré d'herbicides. Colleen est l'une des premières à les dénoncer. Cela va créer énormément de conflits, dans leur couple et dans tous les foyers. Ceux qui ont peur de perdre leur travail, ceux qui n'y croient pas et ceux qui savent.

Un très bon moment de lecture, une famille touchante, une situation qu'on peut retrouver n'importe où dans le monde. L'argent a toujours plus d'importance que les êtres humains ou la nature.

Pour ceux qui ont lu "Faire bientôt éclater la terre", pas de comparaison, très peu de termes techniques concernant le métier de bûcheron et l'abattage des arbres. Quelques petits chapitres sur leur travail puisque le récit se déroule dans ce milieu, mais l'histoire est totalement différente.
Bonne lecture à tous.
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Ash Davidson nous entraîne, dans l'immensité des forêts de Sequoias de Californie du Nord, dans un premier roman captivant.
Roman choral qui voit, tour à tour, les membres de la famille Gundersen nous conter leur quotidien.
Un an de leur vie.
1977/78.
Pas n'importe quelle année.
Celle où Rich, le père qui travaille pour le riche propriétaire exploitant Sanderson, à l'ambition de s'offrir une parcelle de ce bois qu'il aime tant, le lot 24.7. Celle où Chub, son fils va rentrer à l'école. Et celle où Colleen, sa jeune épouse.... Mais, chut !
Je ne vais pas tout vous dévoiler.
Vous entendez le bruit des tronçonneuses ?
Les "Han" sous le coups de hache ?
Dur métier que celui de bûcheron, surtout quand on affronte les géants, plusieurs fois centenaires, voire millénaires, de la planète.
Imaginez-vous, imaginez ces hommes.
Minuscules, aux pieds de ces arbres gigantesques pouvant atteindre 100m de haut pour une circonférence pouvant aller jusqu'à 30m et plus de 2 tonnes.
Vous les voyez grimper le long de ces arbres majestueux ?
Éloignez-Vous ! Plus loin... Attention !
Quel vacarme quand le monstre s'abat sur le coussin de branchage que l'homme lui a préparé pour ne pas l'abimer.
Il y a des hommes qui risquent leur vie et il y a des drames qu'on préfère taire parce qu'il faut choisir un camp.
Chez Davidson, j'ai retrouvé un peu l'écriture d'un auteur que j'adore, Ron Rash. Dans ses personnages et dans cette nature surtout.
Ceux qui l'exploitent pour vivre.
Ceux qui la pillent ou l'empoisonnent.
Et ceux qui mènent le combat de David contre Goliath pour la préserver.
Un roman puissant qui pose bien des questions, comme les protagonistes, le lecteur est partagé.
Et puis, comme dans la vie, rien ne se passe jamais comme prévu. Davidson, lentement et après un incroyable rebondissement, nous amène vers une fin émouvante. de celles qui laissent des traces bien après que le livre soit refermé.
Allez, venez, je vous paye une bière à l'Unique, c'est là qu'ils se retrouvent les bûcherons après leur journée harassante.
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Les grands séquoias de Californie, géants des forêts de la côte est auraient sans doute disparu par l'exploitation forestière, sans la création des parcs nationaux américains.
Ces arbres de forêt primaire constituent le fil rouge du roman, mettant en confrontation une société rurale vivant des métiers du bois et la prise de conscience écologiste de préservation de la nature. S'y ajoute l'aspect sanitaire des méfaits de l'épandage.

1977: Rich, propriétaire d'une parcelle de « géants », Colleen sage-femme confrontée dans son métier aux conséquences dramatiques des pesticides, leur famille, leurs voisins, un petit monde courant après chaque dollar pour vivre chichement par un métier difficile et dangereux.
Une population à la croisée des chemins, face à la disparition d'une activité aux conséquences dramatiques pour tous.

Un narratif efficace, sans recherche d'écriture, une plume rude à l'image d'une population aux rapports humains rugueux et à la déveine coriace, Une image de l'Amérique travailleuse, voire besogneuse, farouchement attachée au concept de libre entreprise.

Il y a matière à une belle adaptation cinématographique !

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Dans la première partie de son roman, Ash Davidson décrit la majestueuse beauté des" derniers géants", les immenses séquoias de Californie, mais elle le fait du point de vue d'une communauté de bûcherons qui vivent du commerce de l'abattage. Avec la description du quotidien de ces familles, elle s'attarde avec talent sur les techniques d' abattage, les différents métiers, le courage des hommes, les blessures et la solidarité. Loin de dresser un portrait idyllique de la vie dans la nature, elle n'épargne pas aux lecteurs la pluie, la boue, les glissements de terrain, la vie dans des caravanes insalubres et l'alcoolisme de certains d'entre eux.
Mais en se focalisant plus précisément sur une famille, celle de Rich, un bûcheron cinquantenaire qui vit heureux avec sa jeune femme Colleen et son fils Chub, elle choisit également de raconter une belle histoire d'amour.

Si les difficultés financières touchent toutes les familles de cette petite ville, le premier élément perturbateur concerne les femmes. On découvre que Colleen qui exerce le métier de sage-femme, a mis au monde des bébés difformes qui n'ont pas survécu et qu'elle a elle-même subi huit fausses couches. de la même manière, des animaux d'élevage ou sauvages naissent avec des caractéristiques monstrueuses.
Et puis il y a Rich, obsédé par une parcelle de terrain convoitée par son grand-père, puis son père et qui va fortement s'endetter en pensant faire un bon investissement. Sans en parler à Colleen qui elle aussi s'enferme dans son désir d'enfant. le couple est en danger, nous dévoile l'auteure en alternant les points de vue.

Lorsque Daniel, l'ancien petit ami de Colleen, apparaît, il apporte avec lui une double menace : menace pour le couple et menace pour un mode de vie mis en péril par les révélations des écologistes.
Ash Davidson connaît la méfiance, parfois la haine, entre les habitants de la région et les militants écologistes qui viennent lancer des alertes qui bousculent leurs convictions.
Ainsi Rich déclare: " Vous ne trouverez personne qui aime les arbres autant qu'un bûcheron. Si vous regardez bien, tout au fond, je vous garantis que dans chaque bûcheron il y a un" écolo ". Mais la différence entre nous et les autres, les militants, c'est que nous, on vit ici. On chasse. On pêche. On fait du camping. Eux, ils retourneront là d'où ils viennent, mais nous, on se reveillera ici demain. C'est chez nous. le bois d'oeuvre nous apporte à manger sur nos tables, des vêtements sur le dos de nos enfants. "
La confrontation ne peut être que violente. Les bûcherons croient naïvement que le gouvernement n'autoriseraient pas des pulvérisations d'herbicides sur les terrains pour débroussailler les forêts et faciliter le travail. Victimes d'une société paternaliste qui leur offre de temps à autre des repas gratuits, ils sont incapables d'imaginer que leur patron puisse menacer leur santé et celle de leur famille.

Cette prise de conscience se fera aussi d'abord par les femmes qui seront les premières à rejoindre les mouvements de contestation.
Elle passera aussi par les autochtones, les Indiens Yurok, plus attentifs à leur environnement.
" Mes enfants sont adultes. Mais si c'était moi, si c'était mes enfants qui naissaient sans cerveau, je me poserais la question : est-ce que cela en vaut la peine ? Juste pour continuer à abattre la forêt de cette manière ? Mais vous non, vous ne renoncerez pas tant que vous n'aurez pas tué tous les chevreuils, tous les saumons, tous les arbres, tant que vous n'aurez pas empoisonné toutes nos sources d'eau fraîche. Que mangerez vous alors ? de l'argent ? "

Ash Davidson décrit parfaitement ces rednecks, des Americains blancs pauvres qui vivent en milieu rural, ultraconservateurs et peu enclins à se remettre en question. Mais elle ne jette jamais de regard méprisant ou critique sur ces personnages. La plupart d'entre eux sont d'ailleurs très sympathiques, soucieux de leurs familles et plutôt attentifs à leur communauté. Éduqués dans l'idée qu'un homme doit nourrir sa famille, poursuivre le travail de ses ancêtres, respecter les patrons et organiser des barbecues alcoolisés, ils sont incapables de comprendre l'évolution du monde.
A l'inverse, elle représente les ecolos comme les rednecks les perçoivent : des hippies chevelus qui bloquent les routes en manifestant.
Elle ne leur donne jamais réellement la parole puisque, en fait, il n'y a pas besoin d'argumenter ou de faire de longs discours. Seul David servira de relais à cette parole militante, en tant que petite main qui prélève des échantillons d'eau.

Ce roman addictif appartient à la catégorie des très bons romans américains. A travers une intrigue passionnante et pleine de rebondissements, l'auteure mêle interrogations écologiques et survie économique. Avec intelligence, elle questionne nos inquiétudes pour l'avenir en donnant la parole à ceux qui refusent de s'inquiéter mais qui sont les premières victimes.
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Que j'ai aimé ce livre !
Il y a des livres qui passent des mois, voire des années dans ma liste à lire, on peut dire que je m'y prépare, que j'en vois passer des critiques...et puis il y a ce livre, que je n'avais même pas remarqué, que je décide de télécharger sur ma liseuse sur un coup de tête, parce que la médiathèque est fermée et que je vois qu'il existe en ressource numérique sur leur site.

Est ce la couverture qui m'a attirée, la lecture de la quatrième de couverture ou la note globale sur Babelio ? Je ne me suis pas trop posé de questions, allons y, je ne risquais rien.

Et bien je ne regrette pas, j'ai littéralement dévoré ce livre.

J'ai aimé suivre le destin de cette famille de bucherons à la fin des années 70, je me suis attachée à Rich, Colleen et leur petit Chub.
Rich est bucheron depuis quatre générations en Caroline du Nord, au pays des séquoias. Il rêve depuis toujours de posséder ses propres "terres".
Lorsqu'une occasion se présente, il se lance...mais les choses ne vont pas se passer comme prévu...

C'est un roman très dense, très addictif, dans lequel il se passe beaucoup de choses.
Un roman dans lequel on pleure (oui, oui, je l'avoue, le dernier quart réserve son lot de larmes), on se réjouit, on s'inquiète.
Un roman qui aborde le problème de la pollution et qui a forcement un petit côté "écolo" mais qui traite le sujet de manière très convaincante, donnant à réfléchir, abordant les intérêts divers et opposés sans jugement.
Et d'ailleurs, comment faire lorsqu'il y a conflit d'intérêts ?

Vraiment une lecture émouvante, bien construite et que je vous conseille !



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D'accord, contrairement à Idefix, je ne ulule pas à la mort quand un arbre est déraciné. Mais là il s'agit de sequoias, et la menace pèse en particulier sur le 24-7, nommé ainsi à cause de ses mensurations anglo-saxonnes, à savoir 7,50 de diamètre et 112 mètres de haut (plus que la longueur d'un terrain de foot). Rich Gundersen est élagueur, comme son père et son grand père, et travaille en équipe chez Sanderson. Un travail difficile et dangereux, alors pour préparer un meilleur futur à son épouse Colleen et son fils Chub, il s'endette en achetant justement cette parcelle 24-7.

Dans la petite communauté du nord de la Californie accrochée sur des pentes souvent boueuses (oui, il pleut pas mal), Colleen se dévoue comme sage-femme avec juste son expérience. Elle-même vient de perdre une petite fille durant une grossesse, a connu plusieurs fausses couches, et constate des naissances d'enfants handicapés.

D'après Daniel, un chercheur originaire du coin (il appartient à la communauté Yurok, des amérindiens que je découvre, fort intéressants) en sont responsables les épandages d'insecticides par avion, et le long des routes par camions citernes. Il demande à Colleen de lui fournir des échantillons de leur eau de source.

Les bûcherons et les autres ne vont pas accepter que l'on touche à leur mode de vie et leur gagne pain. Les écolos manifestent. Nous sommes en 1977/1978.

Je n'en dis pas plus. Les chapitres sont courts, se fixant sur Rich, Colleen ou Chub, j'ai vraiment aimé ces trois là. Il y aura de beaux moments, mais aussi des tensions, des drames. Un brave bon gros roman, quoi.
Lien : https://enlisantenvoyageant...
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Colleen et Rich Gundersen vivent avec leur fils unique en Californie, en bord de mer. Rich est employé par la société Sanderson pour l'abattage des séquoias géants. Il pratique un métier dangereux dont son père et son grand-père sont morts, mais qui lui permet de faire vivre sa famille. Colleen est sage femme. Depuis quelques mois, elle constate une augmentation des fausses couches et des naissances de bébés mal formés dans la région. Elle-même en est à sa huitième fausse couche. La faute aux épandages massifs d'herbicides par la société Sanderson ? Lorsqu'elle se met à dénoncer le recours aux herbicides, Rich et elle se trouvent dans deux camps séparés...

Les derniers géants est une grande fresque qui aborde le sujet de l'exploitation à outrance de la nature (ici l'abattage des séquoias géants vieux de plusieurs millénaires sans aucune notion de gestion durable.) et de son impact sur l'environnement et les hommes. Les conséquences de l'abattage des arbres sont bien expliquées : pas d'ombre donc réchauffement de l'eau et impact sur la reproduction des saumons, glissements de terrain car plus rien ne retient la terre, pollution de l'eau due aux épandages massifs de désherbants, .... Ash Davidson ne prend pas parti : elle décrit également les conditions de travail plus que difficiles des bûcherons, dont beaucoup meurent avant cinquante ans, et leur fierté de faire ce métier. Elle livre un premier roman majestueux, une fresque dans laquelle on plonge avec grand plaisir. La lecture est fluide, c'est très bien écrit, on s'attache très vite aux différents personnages. Ce monde rude des bûcherons a quelque chose de fascinant. Ash Davidson le montre bien, et ce premier roman est de ceux qui ne s'oublient pas.
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