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Jusqu'ici, je n'ai pas été déçue avec les écrits de Lionel Davoust. Sauf que les histoires centrées sur des batailles, ça a tendance à me barber, et ce roman est très court, alors que j'affectionne les longs cycles. Raisons pour lesquelles ce roman était dans ma Wishlist depuis une éternité, mais que je ne l'avais pas encore transféré dans la PAL. Jusqu'à ce que Critic propose une offre promotionnelle pour le confinement. C'était l'occasion ou jamais.



Tout bien considéré, je ne regrette pas de ne pas l'avoir lu avant, car il correspond à ce que je veux lire en ce moment : du court, mais du riche. Et c'est bien ce qu'il est. Moi qui m'attendait à une bataille s'étirant sur 160 pages…. Bon, il y a un peu de ça, mais quelle bataille !

Pour ce qui est de la bataille, sans vous spoiler, le principe est à la fois simple, mais super intéressant, d'autant que le généralissime Vasteth n'a aucun moyen de savoir si ce qu'on lui affirme est vrai ou pas. Car, la bataille se joue sur la mer, avec beaucoup de tactique, mais pas seulement. Il s'agit aussi d'un duel de croyances, de personnalités, et d'un duel contre soi-même, avec une certaine critique de la guerre.

La guerre, ce n'est pas seulement des charges sur de la musique épique. La guerre, ce n'est pas joli, et le général est censé garder à l'esprit que la moindre de ses décisions va avoir un lourd impact sur la vie et le moral de ses hommes, et que les considérer comme des pions sans âme est une erreur. La conclusion d'une bataille ne dépend pas seulement des généraux ou des armes employées, mais également des soldats. En plus, malgré le côté à priori manichéiste (un envahisseur qui cherche à coloniser un peuple libre pour le « sauver »), c'est un peu plus compliqué que ça. Vasteth se soucie de ses hommes, et on ne sait pas trop dans quelle mesure ce que prétend l'Empire est vrai ou pas (le « Dragon » est censé prédire l'avenir, donc…). D'un autre côté, on a donc Qhmarr, qui ne fait que se défendre, mais qui prend ses soldats pour des pions sans grande valeur, avec un fanatisme qui fait presque peur. Bref, une situation pas aussi simple qu'on pourrait le croire de prime abord.

A côté de ça, le personnage du généralissime Vasteth est super intéressant à suivre, et notamment son évolution entre les « négociations » et la fin de la bataille. J'étais prête à le détester dès le départ, instinctivement du côté de Qhmarr, et pourtant… Ce n'est pas un cliché de film d'action américain, il essaie de gagner vite pour éviter le maximum de perte, mais son assurance devant un adversaire aussi fragile le rend paresseux (comme dirait Béterlgeuse Romanée Conti). Il est tellement persuadé de sa victoire qu'il ne cherche même pas à comprendre pourquoi ses adversaires ne craignent absolument pas sa formidable armée, partant du principe qu'ils doivent être un peu idiots, quant aux soldats, eux aussi persuadés de leur force, ils laissent un temps leurs compétences et leur réflexion au placard. Il va pourtant falloir faire amende honorable pour espérer renverser le cours de la bataille. Et quand en plus le mysticisme s'en mêle…

Dernier bon point et pas des moindres : l'univers. J'y ai découvert l'Empire d'Asreth, dont on parle dans les Dieux Sauvages (je suis bien contente d'avoir commencé par les romans, du coup), et j'ai eu un bon aperçu de leur technologie avancée basée sur la magie, dont il ne reste que d'anciens artefacts dans le cycle. A côté de cet Empire avancé, on a Qhmarr, plutôt centré sur la spiritualité et la magie « sauvage », non domestiquée en quelque sorte. Je regrette juste de ne pas en avoir appris plus sur la culture et le savoir de Qhmarr, mais bon, on ne peut pas tout avoir^^.
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Pour celui ou celle qui a envie de prolonger le séjour à Evanégyre, le choix de lire La Volonté du Dragon s'impose. Avant de se lancer dans l'écriture de sa grande saga, Lionel Davoust avait déjà tâté le terrain en proposant des textes plus courts. Des récits postérieurs qui donnent une chronologie historique à son univers, tout en lui conférant une légitimité.

La Volonté du Dragon est donc un court récit qui s'inscrit en amont des Dieux Sauvages, dans l'Ancien Temps.

Conduite par le généralissime D'éolus Vastech, l'armada impériale arrive aux portes de Qhmarr. Ils s'imaginent une reddition immédiate des Qhmarri qui semblent sans défense face à leur puissance de feu. Pour l'empire d'Asreth, c'est la première étape pour conquérir le Sud. Imbu de lui-même, Vastech pense avoir déjà gagné face à ce très jeune souverain. Car comment un roi qui n'a même pas dix ans, pourrait lui voler la victoire, à lui, l'homme d'expérience. Or, le Qasul lui propose un étrange défi, celui de jouer la bataille aux échecs. En effet, la puissance du lâh a ensorcelé les pièces représentant les deux camps. Chaque pièce jouée aura donc une conséquence sur le terrain. Sensible au challenge, le généralissime accepte de jouer la partie mais aurait-il pu réellement faire un autre choix ?

Dans ce roman, l'auteur a misé sur un élément fort en littérature fantasy, la conquête. Seulement, il a pris des libertés dans la narration des combats inhérents à cette thématique. Bien entendu, on retrouve des descriptions de batailles avec les deux armées qui s'affrontent sur l'eau. Entre la flotte de voiliers Qhmarri, d'un côté, et l'armada impériale, de l'autre, on imagine l'affrontement vite réglé. Mais avec Lionel Davoust aux commandes, n'en soyez pas si sûr ! Il a ajouté une donnée qui pourrait faire la différence. N'oubliez pas qu'il nous relate les événements par le prisme d'une partie d'échecs. Or, si la victoire dépend du meilleur stratège, qui peut savoir qui va l'emporter.

L'auteur donne ainsi une autre dimension à son récit qui n'a plus rien de conventionnel. Voilà une manière bien originale de nous conter les minutes d'une bataille. le récit n'en est que plus dynamique et trépident.

Quant aux personnages qui habitent les pages de ce livre, Lionel Davoust nous brosse toutes sortes de portraits. Les plus singuliers reviennent surtout à ce généralissime, sûr de lui qui vient se frotter à au très jeune souverain Qhmarri, semblant être continuellement dans la lune.Taiseux, les yeux fixes, le Qasul est le héro le plus énigmatique de ce roman. Ainsi, avec tous ses protagonistes, l'auteur donne la matière aux lecteurs pour s'interroger et/ou s'attacher.

Finalement peu importe dans quel sens on lit ses livres, ils méritent tous notre attention pour assouvir la soif de curiosité que l'auteur a semé chez tous ses lecteurs... plus d'infos sur Fantasy à la Carte
Lien : https://fantasyalacarte.blog..
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A ma droite, une bataille navale, à ma gauche, une partie d'échecs, miroirs l'une de l'autre. Elles mettent aux prises l'empire d'Asreth et Qhmarrr, petit pays arriéré. C'est du point de vue des impérialistes que nous approchons cette histoire. Nous l'appréhendons à différents niveaux de la hiérarchie : généralissime, amiral et capitaine, salle des machines, canonnier ; évoqués plutôt brièvement vu la taille du livre, les personnages sont tout de même individualisés. Mais nous n'avons pas l'équivalent du côté des Qhmarrs dont la mentalité et la magie resteront mystérieuses jusqu'au bout.
Avec ce texte court sont pourtant évoquées des questions importantes : celle de l'impérialisme et de sa justification versus l'indépendance et la stagnation, la technologie contre la magie, le libre-arbitre ou la soumission au destin. El le livre montre que les réponses à ces questions/dualités ne peuvent pas être simples, blanches ou noires.
C'est prenant et mystérieux et ça donne envie d'en savoir plus sur ce monde.
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Lionel Davoust est un auteur que j'ai d'abord découvert grâce à son blog passionnant où il parle de techniques et d'outils d'écriture. Je l'ai donc connu d'abord pour ses conseils très utiles sur l'écriture avant de le découvrir comme auteur. La Volonté du dragon est le premier roman que je lis de lui, et cela tombe bien puisque sauf erreur de ma part il s'agit de son premier roman publié, en 2010.

Ce roman se déroule dans l'univers imaginaire d'Evagényre, un monde dominé par un empire à vocation hégémonique qui dispose d'une arme dont la puissance surpasse celle de tous ses adversaires. C'est en quelque sorte un Empire romain avec la bombe atomique, comme Lionel Davoust l'a décrit lui-même dans une conférence aux Utopiales 2017.

Dans ce premier roman se déroulant dans ce monde fictif, nous assistons à la tentative de conquête d'un petit royaume isolationniste par l'Empire dominant. La victoire aux promise aux conquérants mais tout ne va évidemment pas se passer comme prévu, sinon il n'y aurait pas forcément besoin d'un roman pour nous raconter cette conquête. le récit est passionnant, oscillant entre narration de batailles navales impressionnantes et réflexions philosophiques sur la société, le mode d'exercice du pouvoir, et en général la liberté individuelle et collective. L'auteur nous permet de suivre plusieurs personnages participants à cette conquête et leur regard est chaque fois intéressant. L'univers imaginé par Lionel Davoust m'a bien plu, avec ce régime impérialiste doté d'une technologie très steampunk face à un royaume mystique et mystérieux.

Je dois dire que j'ai beaucoup aimé cette première découverte de l'univers d'Evanégyre et que que j'ai hâte de suivre les aventures dans ce monde dans les autres oeuvres de Lionel Davoust, à commencer par La route de la conquête, et autres récits, un recueil de nouvelles se déroulant dans le même univers imaginaire.
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B2-C2-D2-E2 : ROYAUME COULÉ !

Et c'est ainsi que (presque) tout débuta !
Bien qu'ayant déjà donné un peu à découvrir de ce qu'était l'Empire dans une nouvelle alors précédemment publiée au sein d'une anthologie (la très belle «Bataille pour un souvenir» que l'on retrouvera quelques années plus tard dans le recueil "La Route de la Conquête: Et autres récits"), La Volonté du Dragon peut-être considéré comme le premier bloc véritablement consistant consacré à l'Evanégyre et à ces temps très anciens de l'Empire d'Asreth. Pour la petite histoire éditoriale, ce volume fut aussi l'un des tout premiers d'une courageuse et jeune maison d'édition rennaise, le second pour être précis : Les Editions Critic (par ailleurs excellente librairie du même nom).

Entrons cependant dans le vif du sujet : L'Empire, dont nous découvrons alors presque tout, s'est construit sur une supériorité technologique démesurée. Sous l'influence bienveillante de Dame Mordranth, l'Oracle-Dragon qui guide plus qu'elle ne dirige pratiquement cet Etat en constante expansion, les asriens ont conquis, par la diplomatie autant que par le fer, une large partie nord de l'Evanégyre. Cependant, s'ils veulent poursuivre leur marche triomphale vers le sud - dont le but premier est d'apporter paix universelle et progrès matériel à tous les peuples -, il va leur falloir assujettir le petit mais néanmoins redoutable royaume de Qhmarr, baignant dans une sorte d'ère post-médiévale figée, emprunte de magie, mais qui, cependant, semble être demeuré mystérieusement imprenable depuis des siècles.

L'affrontement entre l'ogre et le petit Poucet, entre David et Goliath semble inéluctable. D'un côté, cet Empire sûr de sa force tout autant que de son bon droit, de sa philosophie - on ne peut que songer à cette Amérique triomphante des années Bush vendant à qui voulait l'entendre ses guerres préventives et sa théorie du domino démocratique -. de l'autre, une vieille nation totalement inféodée à son jeune roi - un enfant visiblement fou à moins qu'il ne soit simplement attardé - et à sa philosophie du lâh, sorte d'émanation fantasy du Tao, mi animiste, mi religieuse qui est, pour aller vite, et selon une définition donnée assez involontairement par le Généralissime de l'Empire, une sorte de pressentiment des «grands mouvements de l'histoire. Ses lignes de force, ses courants...»

On va alors suivre une espèce de partie double et terrifiante, tout à la fois grandeur réelle sur la largeur d'un delta commandant l'accès à la capitale et par ailleurs confiné sous un dôme étrange, revêtant la forme d'une sorte de jeu d'échec magique. D'un côté, la flotte impériale, dotée de croiseurs hiératiques et surpuissants, de l'autre une flotte en sous-nombre composée de bons vieux navires à voile, souples mais sans protection. Pourtant, malgré le déséquilibre évident, malgré l'asymétrie patente entre les deux armées, les ressortissants du Royaume de Qhmarr ne paraissent rien éprouver de la crainte légitime vécue par tant d'autres peuples avant eux. Bien au contraire, les malheureux promis à une mort pourtant certaine semblent attendre leur destinée fatale de pied ferme et sans aucune peur.

De son côté, le gouverneur du pays, un homme roué et intelligent mais entièrement dévoué au jeune "Qasul", Ehal Hamfaa, ne semble guère plus inquiet lorsque, après plusieurs mois de négociation, la diplomatie semblant avoir échoué, le Généralissime D'eolus Vasteth décide d'engager ses troupes navales dans une guerre qu'il promet courte et meurtrière à son adversaire.

Le Généralissime va très vite comprendre qu'il ne faut jamais sous estimer son adversaire, que l'orgueil et la suffisance sont les meilleurs moyens de perdre, surtout lorsqu'on a rien voulu savoir de ce qui avait pu protéger l'autre durant tant de siècles, tant d'ennemis avant lui. Alors, bien entendu, les premiers affrontements semblent parfaitement donner raison à la suprématie technologique absolue des navires impériaux, tout particulièrement de son vaisseau amiral, le Volonté du Dragon, dont Lionel Davoust se sert avec grande finesse pour nous faire comprendre toute la symbolique, les sens multiples et interpénétrés que revêt ce navire aux intentions, au fonctionnement tellement représentatif de ce qu'est La Volonté du Dragon elle-même. Car ce navire est bien plus qu'un navire amiral, même si l'on suivra l'essentiel des combats navals à son bord, que l'on y sympathisera avec ce jeune aspirant artechnicien, doué mais mort de trouille, qu'un assujetti de longue date de race Dokri, un vaillant et rugueux canonnier, prendra sous sa coupe et défendra même jusqu'à la mort. Il n'est jusqu'à la tête bicéphale de ce fier emblème de l'Empire qui représente ce qu'il peut s'avérer de plus ambigu, de plus libre à travers deux personnalités que tout oppose - pour mieux se rejoindre lorsque surgissent les décisions fatidiques, irréversibles -, le sage capitaine du Volonté du Dragon, ravalé le temps d'un conflit au rang de second du vieillissant mais encore fougueux amiral Xarkos àn Urvayd. Car si l'Empire assujettit nations et peuples, il n'en demeure pas moins un fervent défenseur du libre- arbitre et un promoteur de l'individualisme face à l'homogénéité servile et fanatisée du peuple Qhmarr.

Jouant avec brio des deux combats se déroulant sur deux terrains n'ayant aucune commune mesure - le plateau holistique et le delta -, passant de l'un à l'autre sans rupture franche afin d'en prouver l'imbroglio, d'en montrer les imbrications, s'amusant à perdre les repères de genres entre hyper technologie et pure magie, Lionel Davoust ne se laisse pas perturber par les liens inextricables qui en découlent au gré des avancés des tactiques et des pertes, effroyables, des uns et des autres. Bien qu'en aussi peu de pages et autant d'action - n'oublions pas les ressorts quasi philosophiques ou relevant du domaine de la science politique que l'auteur égrène, sans lourdeur ni emphase, au fil des dialogues entre chacun des adversaires - il était inconcevable de pouvoir dresser des portraits psychologiques complets, ce que l'on perçoit de chacun des hommes (peu de femmes dans cette lutte pour la conquête, à trois exceptions près, mais elles y ont des rôles d'arrière-plan ou subalternes. On y croisera ainsi la future héroïne de la première nouvelle de la Route de la Conquête, mais avec trente années de moins et bien des choses à apprendre encore).

Cependant, et c'est tout à l'honneur de l'auteur, ces profils psychologiques, ces parcours individuels, ces entames de biographies sont suffisamment complets et denses pour rendre crédibles et attachant la plupart des personnages principaux. On regrettera peut-être que l'angle d'attaque de la narration se place quasi exclusivement du point de vue des impériaux et qu'un seul des Qhmarr, le gouverneur, s'exprime en quelque sorte au nom de tous les siens, de leur vision du monde, donnant encore un peu plus cette impression de déséquilibre en faveur de l'Empire, mais la contradiction est suffisamment forte, les doutes plombent assez le camp de l'Oracle-Dragon pour que le lecteur puisse à son tour être plongé dans les siens propres quant aux justifications philosophiques, intellectuelles, politiques, collectives et individuelles de ce que l'Empire a décidé de réaliser, quel qu'en puisse être le coup humain, moral, éthique.

On se retrouve ainsi face à ces dilemmes posés à nos sociétés contemporaines hautement technologiques, qui se veulent, souvent sincèrement, bienveillantes à l'égard des peuples et des nations ne bénéficiant ni de notre niveau de vie, ni de nos libertés individuelles, ni de notre confort matériel mais qui s'enlisent depuis plusieurs décennies dans des guerres qui, souvent, finissent par nous dépasser voire par se retourner contre nous. (On pourrait même remonter aux guerres coloniales pour "désauvagiser" les "sauvages" et même à Bonaparte amenant la révolution chez les peuples asservis par leurs puissants mais asservissant à son tour). Car ces interventions, dont on n'affirmera pas naïvement qu'elles ont ce seul but d'imposer "le bien" (encore faudrait-il n’avoir qu'une seule définition universelle de ce qu'est le bien) quels qu'en soient les moyens, ne cessent de s'enferrer dans des paradoxes insolubles, des oxymores éternels et dignes d'Orwell - la guerre, c'est paix, etc -. Pendant ce temps-là, des hommes se battent, souffrent, meurent au nom de principes dont on ne sait trop s'ils sont justes, injustes ou se situent sur un autre terrain, celui de la foi en l'autre, cet autre proche, le compagnon, loin, très loin des pensées et des intentions d'ordre quasi messianique ou magiques que leurs dirigeants se sont données de réaliser... Si les victoires successives de l'Empire suivies de la paix promise semblent avaliser le bien fondé de ces conquêtes, n'oublions pas qu'elles s'achèvent (voir La Route des Conquêtes) dans ce que le jeune "Qasul" prophétisera : [...] vous précipiterez le monde dans une ère de ténèbres telle qu'il n'en a jamais connue !» Le ver était-il dans le fruit ?

Pour un premier coup lancé en direction de ce monde imaginaire complexe, l'Evanégyre, cette fantasy très inspirée où l'on retrouve une certaine antiquité impériale, un moyen-âge fantastique, des questionnements intemporels et de la technologie SF c'est un joli coup au but que Lionel Davoust donne-là. Et si nous savons aujourd'hui que l'essai est très largement transformé avec les suites qu'il a dores et déjà données au monde de l'Evanégyre, rien ne le présageait il y a encore six ans, mais c'était un peu prévisible, ne serait-ce qu'avec un tel style - qu'il serait injuste de ne pas signaler ici - efficace mais capable de développements syntaxiques riches, puissants, imagé afin que le régal sa fasse autant sur l'intrigue que par la narration !
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La Volonté du Dragon se situe lors de l'apogée de l'Empire d'Asrethia et se déroule quelques décennies avant la novella de la Route de la Conquête. Nous retrouvons donc Stannir Korsova alors qu'elle secondait le Généralissime de l'époque. Elle est plus jeune, moins réfléchie, plus formatée par l'armée... tout comme l'est sa propre aide de camp dans La Route de la Conquête. On ne la voit finalement que très peu, c'est un personnage secondaire.

Dans ce court récit, nous suivons le Généralissime qui débarque avec toute sa force et son sentiment du supériorité. Pour connaître mon ressenti sur cet Empire et ses méthodes, je vous invite à lire mon avis sur La Route de la Conquête. L'homme se confronte donc à un dirigeant étrange, un enfant qui semble perdu dans son monde, épaulé par un gouverneur. L'invasion va se jouer autour d'une table, un peu à l'image d'un jeu d'échec. Une façon bien cruelle d'envisager les choses puisque sur le terrain, la bataille navale implique de véritables êtres humains qui meurent.

Justement, sur les bateaux, nous découvrons un aspirant artech attendrissant, dont on partage aisément la peur de se retrouver au combat et de devoir être responsable de tant de vie. Nous faisons connaissance avec l'amiral, un personnage qui inspire peu de sympathie, à l'inverse du capitaine, mais dont il faut reconnaître les compétences de stratège.

On pourrait croire qu'il ne se passe pas grand-chose et que l'histoire va être vite réglée, mais des rebondissements et les différents points de vue nous maintiennent en alerte. le vent tourne vite et il s'avère très difficile de deviner qui des asriens (envahisseurs) ou des Qhmarri vont l'emporter. Certaines scènes sont difficiles à supporter, c'est la guerre et c'est bien moche.

Grâce à ce petit roman, j'ai eu des réponses à certaines interrogations soulevées pendant ma lecture de la Route de la Conquête, en particulier sur l'état d'esprit des peuples confrontés à l'Empire. Les Qhmarri posent les mêmes questions que moi au sujet de la démarche abusive et violente de l'Empire sous couvert de pacifisme.

La fin est amère à bien des égards. Définitivement, je n'aime pas du tout cet Empire, même si je dois bien avouer qu'il est redoutable. Par contre, ne vous méprenez pas, j'ai aimé ma lecture !
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Nous avons ces fiers militaires forts de leur Empire d'Asreth tout-puissant et respecté – qu'il soit craint ou honoré – au niveau mondial, d'après ce qu'on nous en comprend, qui abordent un petit royaume îlien et paisible dans le seul but de l'annexer. Dès le début j'ai été agréablement surprise de la mise en place tout en subtilité des personnages – je n'aime ni les militaires ni les armées (ça c'est dit :D) mais pourtant l'auteur nous dépeint très en détail des hommes et des femmes au service de principes qui les dépassent un peu mais qui y croient pour de bonnes raisons, et qui désirent sincèrement remplir leur mission avec le minimum de pertes possible des deux côtés, en commençant par argumenter avec le pays en voie de conquête sur tous les avantages qu'apporteraient leur simple reddition. En effet l'Empire, tout envahisseur qu'il soit, semble intégrer les populations annexées avec pas mal de bienveillance et semble-t-il un succès qu'on ne peut nier. le lecteur suivra d'ailleurs un soldat d'un peuple « étranger » à l'Empire qui renforcera ce point de focalisation.

D'un autre côté les dirigeants du Qhmarr n'ont aucune espèce d'envie d'accepter cette annexion, même si poliment, voire gentiment, imposée. le gouverneur en particulier se montre particulièrement fielleux envers ces envoyés de la Reine (dont on entend en fait assez peu parler dans le texte) qui viennent s'emparer sans vergogne en son nom d'un morceau de terre qu'ils occupent et chérissent depuis des siècles. Je dois dire que de tous les antagonistes c'est le seul qui me soit apparu comme antipathique à certains moments, bien que je comprenne tout à fait ses motivations.

Au grand désespoir du général asrien le Qhmarr ne se rend pas ; à son grand agacement ils le convainquent même de prendre part à un jeu qui s'apparente à un jeu d'échecs à première vue, et dont le résultat désignera le vainqueur de la bataille rangée qui s'annonce dehors. C'est en tous cas ce que comprend le général, avant de réaliser, au cours de la partie contre le jeune roi, que les deux évènements seraient plus liés intimement qu'il ne l'imaginait de prime abord. En effet il semblerait que le lâh, dont le gouverneur lui rabâche les oreilles depuis qu'il a posé le pied sur cette maudite terre, soit plus qu'une croyance locale d'autochtones primitifs ou même un système social.

A partir de là le texte s'équilibre entre deux points de vue narratifs : la partie de lâh jouée en huis-clos, et à laquelle assiste (et commente) le conseiller du roi dont je vous parlais ci-dessus, qui a tendance à tourner au combat d'esprits au fur et à mesure que le général prend la pleine mesure du pouvoir du lâh et au gré de ses doutes, souvenirs et divagations ; d'autre part la bataille navale, assortie de technologie steampunk très sympathique (mais je n'ai que peu d'expérience en lectures steampunk donc je ne détaillerai pas plus).

Je ne recherche pas spécialement de récits de bataille mais j'ai beaucoup apprécié lire ces passages également (heureusement parce qu'il y en a beaucoup dans le livre), car j'ai trouvé qu'ils étaient très bien écrits, bien que j'aie eu un peu de mal à suivre une ou deux actions racontées en détail (le navire contourne l'aiguille et ensuite il se passe quoi en face ??), et j'étais très satisfaite de l'équilibre entre immersion dans la psychologie de chaque personnage – nous avons droit à plusieurs portraits très différents – et scènes d'action. J'ai aussi retrouvé un beau style littéraire, entre poésie et efficacité, qui me donne envie de continuer à lire cet auteur, notamment dans son univers d'Evagényre introduit ici.
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J'ai adoré l'univers esquissé ici (et étais heureux de le retrouver dans La Route de la Conquête), le fait que les deux systèmes politiques et philosophiques aient leurs bons et mauvais côtés si bien qu'il n'y a ni gentils ni méchants, la technologie asrienne mêlée de magie et la magie qhmarri plus brut aux effets redoutables pour les deux, la diversité des personnages même si je regrette fortement qu'on n'ait jamais le point de vue adverse, il y a un tas d'idées intéressantes, des retournements bien sentis, des passages très prenants...
... Et d'autres qui le sont bien moins, avec des passages qui m'ont paru un peu répétitifs (le comportement et les répliques de l'amiral, certaines manoeuvres maritimes, le comportement et les répliques du gouverneur pendant la partie), et un style parfois un peu en-deçà. La fin n'est pas très clair de prime abord, même si on finit par en venir aux mêmes conclusions que l'auteur souhaitait sans doute.

Un bon moment, dont j'espérais pourtant un peu plus. Ce plus que j'ai trouvé dans La Route de la Conquête.
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Un petit bouquin bien sympa, même si la fin m'a laissée un peu amère.

L'idée de base est vraiment intéressante : une civilisation éclairée et avancée technologiquement, les Asriens, qui, pour préserver le monde des ténèbres, décide d'unifier et pacifier tous les autres peuples, se retrouve confrontée aux croyances qhmaris, peuple barbare auquel on entend bien faire entendre raison.

Less Asriens, au nom de leur idéal, son dotés de la meilleure volonté du monde. Une fois les peuples pacifiés, ils intègrent la culture étrangère à la leur, en retour, on propose à ces peuples de bénéficier des connaissances asriennes en matière de science des arcanes et de technologie.

C'est donc en conquérant sûr de sa victoire de Vasteth, généralissime de la Septième Légion, se présente au Qasul et à son second. Devant leur non-soumission, il décide de lancer l'offensive. C'est alors qu'il est invité à disputer, contre le Qasul, ce qui ressemble à une partie d'échec censée refléter et décider de l'issue de la bataille.

L'idée est vraiment pas mal, et la plume de Lionel Davoust est agréable. On navigue entre la lutte arrogante et conquérante des deux chefs de guerre, autant verbale que "ludique", et la bataille apparemment gagnée d'avance que les Asriens sûrs de leur supériorité vont mener. Entre monde "diplomatique" et batailles navales, puisque l'essentiel de l'armée asrienne consiste en de gigantesques navires alimentés par des cristaux vapeurs et à la puissance de feu remarquable. Parmi lesquels figure leur navire amiral, le Volonté-du-Dragon, et sur lequel le lecteur croisera les traces de Jael l'aspirant artechnicien, Krell, le Dokri musculeux, Syaldron, une maîtresse artechnicienne que la raison semble avoir désertée.

L'entrée dans le livre est un peu difficile, l'espace de quelques lignes, on est un peu perdu, le temps que la pose des éléments se fasse. Mais une fois entré dans le vif du sujet, difficile de lâcher le morceau. D'un bout à l'autre, on se demande de quel côté va basculer la victoire. En revanche, si elle est loin d'être décevante, la fin m'a laissée un peu froide. D'une part parce que je la trouve un peu attendue, d'autre part parce que d'un point de vue de principes, les gagnants n'étaient pas ceux que j'attendais, quoique Lionel Davoust prenne bien soin de ne montrer aucune des factions comme plus ou moins mauvaises que l'autre, mais comme défendant des convictions, une civilisation et une manière de vivre totalement à l'opposé de l'autre.

Dans tous les cas, un très bon petit bouquin, que je ne peux que conseiller.
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J'ai pénétré dans l'histoire lentement, mais dès que la bataille a commencé, je n'ai plus pu lâcher le bouquin.

Pourquoi cette bataille ? L'Empire d'Asreth a pour vocation de mettre la planète Evanégyre sous sa domination mais avec l'idée qu'ainsi aucune guerre ne sera plus possible (c'est la même idée qui est attribuée à l'empereur Qin dans le film Heroes). Loin de se comporter en empire colonial type français, il attribue immédiatement la citoyenneté Asreth entière au vaincu et prépare la sauvegarde de la culture intégrée (cela semble facilité par une absence de « racisme » à l'intérieur de l'Empire, du moins le thème n'a pas encore été abordé par l'auteur). le petit pays de Qhmarr refuse l'allégeance, malgré les tentatives diplomatiques répétées de la part d'Asreth. La bataille entre ses forces navales et celles de la septième Légion de l'Empire aura donc lieu.

Il faut imaginer un conflit asymétrique mettant face à face les forces marines US de Midway pendant la 2ème guerre mondiale (sans l'aviation) et une partie de l'invincible armada espagnole du 16ème siècle. Evidemment l'Empire est sûr de la victoire et sous-estime carrément son adversaire. Mais plus curieusement, les maîtres de Qhmarr sont également sûrs de leur coup, et eux aussi sous-estiment l'Empire. Car Qhmarr a gardé un atout dans sa manche. Il est d'ailleurs curieux d'un point de vue diplomatique qu'il n'ait pas essayé d'avertir même indirectement son adversaire de sa puissance. La carte de la dissuasion aurait certainement porté la discussion plus loin et retardé l'emploi de la force.

L'essentiel du récit nous emporte au milieu de la bataille, à travers les points de vue de plusieurs membres des forces d'Asreth, de l'amiral au simple canonnier. La morgue, la surprise, la peur, le courage, l'esprit de sacrifice, toutes ces sensations colorent la guerre vue de l'intérieur. Malgré la faible longueur du roman (c'est moi qui dit ça, alors que je regrette la tendance au pavé dans laquelle on est tombé de nos jours ?) on arrive à s'attacher énormément aux personnages ; dans la fureur ambiante leur humanité n'en paraît que plus vibrante. J'ai été également ravi de retrouver la générale Korvosa de « la Route de la Conquête », qui n'est encore ici que lieutenant. On comprend mieux comment le personnage a pu évoluer entre les deux récits vers plus de désir de comprendre l'autre et moins de l'anéantir. Elle a beaucoup pris au généralissime Vasteth qu'elle accompagne.

D'ailleurs en parallèle de la bataille géographique, c'est à un affrontement d'ordre idéologique que l'on est convié, qui est mené par Vasteth et le premier ministre de Qhmarr. Asreth veut conquérir pour apporter la paix, la connaissance, une grande liberté sociale ; dans l'Empire la liberté de l'individu est importante. Qhmarr ne veut régner sur personne ; il veut seulement suivre l'Ordre imposé par le divin. Mais l'individu n'existe pas vraiment à Qhmarr ; il lui faut accepter sa place même si c'est celle d'un intouchable, vision révoltante pour un citoyen d'Asreth.
Traiter le problème en noir et blanc est impossible ; on se plaît à reprocher des comportements aux deux camps et à en applaudir d'autres. Cette complexité relative ajoute de l'intérêt au récit.

Pour l'instant je trouve que l'univers d'Evanégyre est un sans-faute. Mais il reste tellement à découvrir. J'attends avec impatience le roman « Port d'âmes » qui nous dévoilera un autre pan de cette magnifique fresque.
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