Citations sur Le contraire de un (58)
Un soir, au cours d'une promenade je sentis sur mon visage l'imperceptible caresse fulgurante d'une aile de chauve-souris, le contact le plus doux qui soit passé sur mon visage. J'avais eu l'occasion les années précédentes d'oublier les caresses. Je n'eus pas le temps de mobiliser mon dégoût, sous le coup de la surprise j'éprouvais une confuse gratitude pour l'obscurité et son léger doigté. Une nostalgie instantanée me fit oublier mon alarme. Si le corps a le sens de l'exil, c'est dans la peau.
Il dit que toute la différence est entre violence d'Etat et violence du peuple, l'une est abus de pouvoir, l'autre non. (...) et la révolution ? Elle vient, si elle vient, au bout de nombreuses journées de démocratie volée.
Les meilleures choses de l'amour arrivent pas hasard, on les comprend ensuite.
Alors, une femme aux cheveux blancs et à la robe noire, douleurs et années partout sur elle, cria de tout l'air qu'elle avait retenu. Sur le premier silence de la fraîche séparation, elle lança un cri de sirène, de chienne, de mère, aux syllabes déchirées : Sal va to re e. Rien qu'un nom, appelé et perdu dans une gorge brisée, (...).
Les douleurs ont une clé de sol pour qui est musicien de l'intérieur.
Je compris pour la première fois que dans tous les tableaux on se met près de son auteur, derrière lui, au même endroit. À force de lire beaucoup de livres, de voir beaucoup de tableaux, on prend si souvent la place de l'auteur qu'on devient comme l'un d'eux. Cela dure peu, mais on garde l'impression d'une coïncidence.
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Elle s'allonge, une ombre passe sur son visage, j'ignore si c'est le ciel ou bien une pensée
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J'arrivais derrière toi sans bruit [...]. Tu avais des yeux sur ta nuque aussi, les femmes ont un don de vue sur celui qui les suit. Les hommes, eux, ont ce sens orienté uniquement vers l'avant.
Meydl, o meydl ikh'l bay dir fregn
vos ken vaksn, vaskn on regn
vos ken brenen un nit oyfhern
vos ken benken, veynen on trern ?
Narisher bohker vos darfstu regn
a steyn ken vaksn, vaksen on regn,
libe ken brenen un dit oyfhern
a harts ken benken, veynen on trern.
Hé ! Toi la fille dis-moi si tu sais
ce qui peut naître aussi sans eau,
ce qui peut brûler sans extinction,
et souffre et pleure sans les larmes.
Stupide garçon, que me demandes-tu ?
Sans eau pourra grandir une pierre,
sans extinction brûle l'amour
et sans larmes souffre et pleure un cœur.
(Chanson populaire yiddish)
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[…] Des pensées de cheval, agité, sans jockey, qui tourne en rond dans le sens contraire de la course. Je m'épuise exprès dans les heures de chantier. « Chiano, guagliò, c'amm'arriva' a stasera ancora vive », doucement, garçon, nous devons arriver à ce soir, me dit le vieux manœuvre en s'arrêtant un moment.
Mais aujourd'hui la pelle bouge toute seule dans ma main, c'est elle qui tient le bras et pousse dans le dos. Il insiste : Qu'est-ce que tu as mangé hier soir, de la poudre' à canon ? »
Et un instant après : « Tu veux aussi ma pelle ? »
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Quand ce sont les pensionnaires qui vont à l'aventure, un pays est proche de l'incandescence.