Citations sur Un jour viendra couleur d'orange (188)
Mais la misère, c’est pas de savoir le prix des choses, c’est de ne pas pouvoir se les payer.
Ainsi qu’un esprit, le vent hantait maintenant toute la forêt, se cognait aux troncs, ricochait, tel un grand orgue dont les tuyaux d’écorce renvoyaient des plaintes musicales. Les feuillages murmuraient une élégie. Le chant d’une mère. Et puis soudain, le bruit du tonnerre. Comme une explosion. La colère de la Pachamama.
On disait ici, au cinquième étage de l’hôpital, que la douleur concernait le corps et la souffrance l’âme. Au corps, les médecines, les équations chimiques. Les soulagements. À l’âme, la douceur, la musique des mots, l’empathie. Le corps lâche le premier. L’âme s’accroche. Toujours. À cause d’un souvenir d’enfance. Un grain de peau aimée. Un rire étouffé. Une odeur de pluie poussiéreuse. Louise aidait ceux qui partaient. Et quand un sourire se posait sur les visages chiffonnés, elle savait qu’elle trouvait les mots justes, mené les moribonds à cette joie insaisissable qui permet le lâcher-prise. Sa main s’est contractée au souvenir de toutes celles qui c’étaient figées dans la sienne.
Depuis toutes petites on nous a bassinées avec l'idée que la meilleure rime à amour, c'était toujours. C'est une immense connerie. La vraie rime d'amour, c'est chaque jour.
On disait ici, au cinquième étage de l'hôpital, que la douleur concernait le corps et la souffrance l'âme. Au corps, les médecines, les équations chimiques. Les soulagements. A l'âme, la douceur, la musique des mots, l'empathie. Le corps lâche le premier. L'âme s'accroche. Toujours. A cause d'un souvenir d'enfance. Un grain de peau aimée. Un rire étouffé. Une odeur de pluie poussiéreuse.
(...) Hagop Haytayan, fils et petit fils de migrants arméniens arrivés à Marseille en 1922, Djamila Zeroual, elle aussi fille et petite-fille de migrants berbères, débarqués dans le même port six ans avant les Haytayan, et Geoffroy Delattre dont la famille avait dû migrer d’une centaine de kilomètres en deux générations, se retrouvaient ensemble, en paix sur la Terre, et cet échantillon bigarré du monde était beau, et rare.
La vague jaune grondait. La fumée blanche des lacrymogènes dessinaient des brouillards d’où jaillissaient des fantômes, des larmes sur les joues. Les kendokas et leurs boucliers étaient couverts de coulures acryliques citron. Comme des crachats. Des petits tableaux de Pollock. Paris étaient assiégé. L’Arc de triomphe avait été saccagé. (...) La tombe du soldat inconnu piétinée. La colère beuglait, déchirait les tympans. Les hommes se battaient.
C’était un beurre au goût d’enfance. Au goût d’avant. Quand le monde s’arrêtait au village voisin. À la coopérative. Ou à la grande ville. Quand le bureau de poste était encore ouvert. Quand l’assureur venait à la maison. Et le docteur. Quand le bus passait deux fois par jour et que le chauffeur, parce que vous marchiez le long des champs ou que les nuages menaçaient, stoppait ailleurs qu’à l’arrêt. Le temps où le monde avait la taille d’un jardin.
C'est vrai qu'ici l'horizon c'était le bout de la rue. 70% des rues du village étaient des impasses.
Quand on s’aime le corps de l’autre n’est plus une île lointaine une impossibilité au contraire il devient un port où s’accrocher poser son cœur.