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sur 82 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Avec la Russie, l'Ukraine, la vie de tous ces gens pris dans une tourmente effroyable, Nicolas Delesalle, fort de son expérience familiale et professionnelle, m'emmène au plus près de cette guerre qui ravage l'est de l'Europe, dans Valse russe.
C'est en effet une Valse russe que l'auteur, grand reporter à Télérama puis à Paris Match, maîtrise bien, variant les époques et les lieux.
Tout d'abord, c'est un train qui l'emmène vers Kiev puis voici Sacha qui creuse un trou pour pêcher dans un lac gelé. Ce dernier vit à 500 mètres d'une frontière invisible entre Russie et Ukraine. Sacha parle russe, est Ukrainien, a 73 ans et, malgré son âge, a tenu à s'engager pour défendre son pays envahi par les chars russes. Après quelques mois, on lui a demandé de rentrer chez lui afin de rendre service autrement à la défense de son pays. Son voisin, Volodia, pêche aussi mais c'est la présence du jeune Vania qui intrigue. Est-ce le début d'une partie du jeu d'échecs ?
Nicolas Delesalle raconte bien. J'aime son style simple, efficace, intéressant et surtout la sincérité dont il fait preuve tout au long de ce livre que j'ai du mal à appeler roman.
D'un chapitre à l'autre, l'auteur m'emmène au coeur des combats puis revient en 1986 alors qu'il a 14 ans. C'est là que sa mère entre en scène car il fait partie d'un voyage scolaire qu'elle organise. Elle qui est née à Paris de parents russes blancs ayant fui la Révolution de 1917, enseigne la langue de ses parents, langue que l'auteur n'a pas réussi à apprendre vraiment. D'ailleurs, il n'hésite pas à appeler sa mère pour lui demander de servir d'interprète si nécessaire.
Avec ces retours en arrière expliquant bien le dilemme auquel est confronté l'auteur, c'est quand il fait partager son vécu de journaliste au plus près des combats, qu'il décrit la mécanique infernale du groupe Wagner, ou encore lorsqu'il voyage dans un train bondé fuyant la guerre, que son récit devient de plus en plus poignant. Voilà un bon moyen de prendre un peu plus conscience du drame que vivent tous ces gens menacés par les bombes et devant tout abandonner pour échapper à la mort.
Nicolas Delesalle fait de très intéressantes rencontres comme, par exemple, Igor, Constantin, Svetlana… Cette dernière demande : « de quoi sommes-nous coupables ? » et elle pleure avec la mère de l'auteur, au téléphone.
Avec son vécu en Russie ou en Ukraine, Nicolas Delesalle fait bien comprendre toute l'ineptie d'une guerre voulue par Poutine qui, après modification de la Constitution, restera au pouvoir jusqu'en 2036, soit plus longtemps que Staline ! Il aura 84 ans.
Si, victime de la désinformation, les Russes – pas tous - soutiennent la guerre contre l'Ukraine, il ne faut pas oublier le goulag que Viktor Antonovitch Boulgakov (86 ans) - rencontré par l'auteur - a vécu ou les démêlés de la mère de l'auteur avec le KGB. Ces rencontres, ces souvenirs, ces anecdotes font partie de cette Valse russe qui se termine avec Boris, reporter suisse, autour d'une grillade de brochettes d'agneau, les fameux chachliks.
Malgré ce clin d'oeil sympathique, je souligne encore toute l'importance de ce livre dont la lecture permet de prendre un peu plus conscience du drame touchant le peuple ukrainien. Ce drame est relégué au second plan, presque oublié depuis plusieurs semaines. La lecture de Valse russe m'a permis une prise de conscience salutaire menée de façon originale par Nicolas Delesalle.
Ce livre fait partie de la sélection pour le Prix des Lecteurs des 2 Rives 2024, à lire assurément

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Je vous présente « Valse Russe » un Livre de Nicolas Delesalle (Français, né en 1972) ; 208 pages ; éditons J. ;-C. Lattès sorti le 23/08/2023. 3.78/5 ; 65 notes (Babelio !).
« Avant, les Russes venaient eux aussi pêcher ici, sur le même lac, sur la même glace. Tout le monde se foutait de savoir qui pêchait. Aujourd'hui, les Russes ne viennent plus. Ils ne viendront plus jamais. »
Comme le mot revient à la mode « page Turner » je dis toujours que ce qui importe c'est la façon de raconter une histoire, et je valide celle-là !
La Russie et l'Ukraine, qui entretenait des relations très cordiales, eh bien… La Russie a pris de court l'Ukraine, presque une attaque surprise. Alors que les jeunes « riaient au nez » quand on parlait de la guerre…
« Les Ukrainiens en parlent comme d'une invasion d'insectes géants. Ils surnomment les Russes, les « Orques », tandis que les Russes parlent de « nazis ukrainiens ». »
« le soir, à la télévision, Vladimir Poutine brandit la menace nucléaire pour punir les alliés de l'Ukraine. Je suis sorti sur le balcon de ma chambre d'hôtel pour fumer une cigarette lorsque les sirènes se mettent à hurler. Mais leur cri strident ne parvient pas à gâcher la beauté cristalline des ruelles enneigées. »
Un beau Livre regorgeant de bons passages comme ceux-ci.
C'est drôle quand j'étais petit mon chien s'appelait « Babou » ; Certains personnages ont honte d'être russes, d'autres en sont fiers…
Ça dépend des « croyances » politiques je pense.
« Soit ce type est 100 % naïf, soit il est 100 % calculateur, avait pensé Sacha en contemplant le désastre sur l'échiquier. »
« — J'y comprends rien. Pourquoi on vous fait la guerre, alors ?— Parce qu'on est de dangereux nazis, ironise Sacha avant de reprendre son sérieux. Parce que vous refusez qu'on ne soit pas russes. »
« — Un jour, à la radio, un type paniqué a annoncé l'arrivée d'un projectile inconnu qui battait des ailes. C'était… un oiseau ! »
« Les Russes ne naissent pas russes, ils le deviennent. »
J'ai beaucoup aimé que l'auteur joue sur les deux tableau, le côté « reportage » et le côté « aventures » du coup ça me convenait parfaitement !
« Vania porte un toast que nous reprenons tous en choeur, « Aux mères ! », tandis que la vodka gicle jusqu'aux étoiles. »
Phoenix
++
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Selon que l'on soit un vieux militaire ukrainien comme Sacha, un jeune mercenaire russe comme Vania ou un reporter français d'origine russe comme le narrateur, on ne verra pas la même guerre dans celle qui vient d'éclater en Ukraine en février 2022.

Trois personnages pour une valse à trois temps sur fond d'un conflit fraternel qui va défaire bien des certitudes sur la notion d'identité sociale

Sacha, fort de ses 73 ans, se souvient d'un pays autrefois uni qui lutta contre les dégâts de l'explosion de la centrale de Tchnernobyl et refuse malgré son grand âge, d'abandonner ceux qu'il a passé sa vie à protéger.

Vania n'est qu'un jeune délinquant, sorti des prisons russes par la milice Wagner pour combattre des ukrainiens qui ne représentent rien d'autre pour lui qu'un ennemi désigné par son état-major.

Quant au narrateur, il a toujours été, jusqu'à ce conflit en Ukraine, fier de son appartenance maternelle au peuple russe. Mais plongé « au coeur de la tragédie », il trouve sa place du côté des ukrainiens pour témoigner au monde de « l'injustice qui foudroie ce peuple et de la force qui l'anime quand son univers s'écroule ».

Entre la certitude de l'un, l'inconscience de l'autre et les doutes du dernier, cette valse russe explore les questionnements identitaires, le besoin de témoigner et le poids des liens humains.

Sous des airs de légèreté et dans un style très fluide, ce roman est en fait d'une grande profondeur. Nicolas Delesalle se sert de ses trois personnages, pour s'interroger sur le sentiment d'appartenance à un peuple et affirme qu'au-delà d'un héritage ancestral « on ne nait pas russe, on le devient ».

Un beau roman qui redéfinit l'attachement à ses origines comme un équilibre entre un héritage culturel et un choix engagé. Et c'est tout à fait passionnant.

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Reporter de guerre pour Paris Match, Nicolas Delesalle part en Ukraine couvrir le conflit qui a éclaté en Février 2022. C'est son métier, me direz-vous. Oui, à ceci près que Nicolas Delesalle est d'origine russe, par sa mère, farouchement fière de ses origines, professeure de russe, qui s'est engagée toute sa vie à prouver aux français, et à son fils, que les Russes sont des gens comme les autres, des gens bien, malgré les idées préconçues. Alors quand il voit de ses propres yeux un quartier détruit par l'aviation russe, les corps des habitants ukrainiens innocents éparpillés sous les décombres, quand il entend sa mère sangloter au téléphone avec une femme qui vient de perdre sa belle-fille, c'est tout le mythe fondateur de ses origines qu'il voit s'effondrer. Lui qui était si fier d'être russe, qui revendiquait son côté slave, qui s'est construit sur cet héritage du sang pour légitimer sa différence, tout d'un coup a honte d'être du côté de l'ennemi, de se sentir appartenir à une nation capable d'un tel carnage inhumain.

Dans ce témoignage bouleversant, Nicolas Delesalle documente avec précision les dessous de cette guerre si proche et pourtant déjà largement reléguée à l'arrière plan dans nos médias. Mêlant son histoire personnelle aux observations qu'il fait sur le terrain, il nous montre l'absurdité de cette attaque entre peuples frères, ordonnée par un dictateur mégalomaniaque manipulant ses concitoyens. Il est poignant de voir comme ce conflit vient affecter ce qu'il y a de plus profond en lui, ses racines, son héritage, l'identité même qu'il s'est construit au fil des années, jusqu'à l'amener à se déconstruire entièrement, à se dissocier de cette notion romantique de « l'âme russe ».
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L'auteur est un grand reporter, auteur de recueils de nouvelles.

Dans ce roman, on suit le parcours d'un journaliste français, qui a des origines russes par ses deux parents, qui se rend en Ukraine au début du déclenchement de la guerre en Mars 2022.

On suit également le parcours d'un vieil ukrainien, Sacha, qui a décidé de s'enrôler dès le début pour défendre son pays. Ancien pilote d'hélicoptère, il ne partira pas sur le front en raison de son âge mais sera chargé de surveiller un « mercenaire de la compagnie Wagner, un salaud qui avait probablement commis des crimes de guerre, ça le répugnait. » Son commandant lui ayant rappelé la valeur de ces prisonniers de guerre en cas d'échange. « Les Wagner étaient peut être des fils de pute, mais chacun valait la vie d'un soldat ukrainien ».

Vania, le jeune mercenaire, semble plutôt bête et Sacha va finalement s'habituer à lui et des liens vont se créer entre les deux hommes.

A la fin du livre, les trois hommes vont finir par se rencontrer.

Le reporter raconte sa mère, traductrice et organisatrice de voyages scolaires en Russie, dans les années 80, son rapport plutôt faible avec la langue russe, ses interrogations quant à son identité : il a peut être des traits physiques du visage slaves, il se sent profondément français dans son comportement.

Ce que j'ai aimé dans ce roman : son rapport avec l'actualité récente. Ce qu'il nous apprend sur le fonctionnement de la milice WAGNER (chaque prisonnier échangé était tué à coups de masse sur le crâne dès leur retour sur le sol russe. Pour l'exemple.)

Ce qu'il nous apprend de la psychologie russe : ceux qui sont partis à la guerre sans remettre en question les balivernes servies par le pouvoir russe, où ils se sont faits tuer, persuadés de sauver la mère patrie, la Sainte Russie.

« Aux yeux du peuple russe, Eltsine était un peu le premier garçon du village, courageux, qui sait boire et va protéger tout le monde, alors que Poutine est le magicien d'Oz. Il est l'incarnation de leurs désirs, il répond à leurs complexes. Ils croient qu'il va rendre sa grandeur à la Russie. »

« Poutine est conseillé par d'ex-kagébistes qui ont l'obsession paranoïaque du secret. Ils croient toujours que si l'on n'annonce pas une mauvaise nouvelle, elle n'existe pas. Poutine raisonne toujours comme un bolchevique, il n'y a que deux façons de voir les choses : la sienne et celle qui est fausse ».

« Poutine a agi par de lentes manoeuvres d'étranglement de la presse et de tous les opposants. »

Un roman extrêmement intéressant qui fait presque oeuvre de documentaire.

Je remercie Cultura et les Editions JC Lattès pour cette découverte.
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"Je me laisse bercer par les trois temps de la valse. Un, deux, trois, la Russie, l'Ukraine, la guerre. Un, deux, trois, les origines, le désenchantement, le renoncement. Un, deux, trois, tout avoir, tout perdre et devenir ce qu'on n'était pas." (p.200)

De ces trois temps, Nicolas Delesalle crée un récit qui nous fait voyager entre passé et présent, entre la Russie, la France et l'Ukraine, de l'intimisme des souvenirs personnels à l'universalité d'une réflexion sur l'identité.
Longtemps "fier d'être russe" par sa mère, l'auteur interroge la notion d'appartenance à un pays, à une patrie, lorsque l'actualité le conduit sur le front de la guerre russo-ukrainienne pour des reportages. le rythme de cette "Valse russe" se construit dans l'alternance entre l'horreur des scènes de guerre et la grâce espiègle des souvenirs qui émergent. La noirceur de la guerre actuelle apparaît comme enchâssée entre deux sources de lumière et d'espoir : d'un côté, l'amour profond d'un homme pour sa mère et, de l'autre, l'histoire de Sacha et de Vania, son “prisonnier”, creuset d'humanité dans une situation qui en est dépourvue.

Résumer davantage ce si beau roman me paraît inutile, voire infructueux, car il faut le lire pour en goûter toutes les facettes, toutes les richesses et nuances. La limpidité de l'écriture, aussi souple et évocatrice dans l'observation et la description des faits que précise et affûtée dans les cheminements intérieurs, fusionne avec une construction en parfaite cohérence avec le titre. Cette "Valse russe" est un concentré d'humanisme, d'une intelligence et d'une sensibilité bouleversantes. Entre rire et larmes, entre horreur et tendresse, entre révolte et renoncement, entre rêverie et réalisme, le roman de Nicolas Delesalle m'a emmenée aux confins de ce qui fait la beauté et l'abjection du monde humain et m'y a fait discerner la fragile lueur d'une indéracinable foi en l'humanité.
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L'auteur, grand reporter d'origine russe par sa mère, fait endosser son costume au narrateur qui nous entraine au coeur du conflit en Ukraine et nous livre ainsi un témoignage de l'intérieur.
Ce roman est une histoire d'origines, de racines. L'auteur se trouve face à de multiples interrogations : qu'en fait-on ? mais également, que font-elles de nous ? A quel point est-on emprisonné par ce qu'on croit être bien par rapport à ses gênes ? mais aussi, les gênes russes sont-ils dangereux ?
Jusqu'alors fier de ses origines russes, c'est en couvrant la guerre en Ukraine, que l'auteur se met à en avoir honte. Il écrit cette honte, non pas pour la libérer mais pour la partager.
Ce livre, telle une valse est traité en trois temps :
Le premier temps est celui de la guerre vue au travers du regard du reporter qui se demande pourquoi se confronter à ces évènements extérieurs à soi, pourquoi aller vers ce risque ? Il veut raconter ce qu'il voit, témoigner de ce que vivent les Ukrainiens et de toutes les atrocités dont sont coupables les russes.
Le deuxième temps est celui de sa mère, professeur de russe qui nous plonge dans les racines russes du narrateur. Elle évoque ses parents, russes blancs émigrés de la révolution de 1917. Elle essaie de convaincre les français que les russes sont des gens comme les autres mais va être confrontée à la brutale réalité lors du conflit et restera bouleversée par les atrocités qui y sont commises.
le troisième temps est la partie fictionnelle qui repose néanmoins sur des faits réels que lui a rapporté un reporter suisse. Sacha septuagénaire Ukrainien qui s'est engagé dès le début du conflit se retrouve être le geôlier de Vania, un jeune mercenaire du groupe Wagner qui ne comprend rien à cette guerre mais se retrouve piégé dans l'étau créé par Prigogine. Cette partie témoigne de la fraternité au-delà de la guerre, au-delà de la violence. Malgré la haine entre ces deux hommes que tout semble séparer, un sentiment fraternel va naître entre le vieil ukrainien et ce jeune russe qui vient remplacer son fils décédé.
L'auteur nous livre ici une petite leçon de géopolitique qui nous aide à comprendre que cette guerre était inévitable. L'Ukraine résolument tournée vers l'Europe mettait la Russie de Poutine en danger. Il nous offre également une analyse très fine de la personnalité de Poutine, de son fonctionnement intellectuel et de la façon dont il a assis son pouvoir en détruisant les oligarques les spoliant leurs entreprises et de leurs comptes en banque, en échafaudant une prison mentale où les mensonges qu'il rabâche au peuple deviennent une réalité, même pour lui, et enfin en ayant la main mise sur les médias.
Ce livre qui traite d'un fait d'actualité est édifiant et extrêmement instructif. Il traite des origines, de désenchantement, de renoncement, de la guerre, de tout avoir et de tout perdre mais aussi au final de devenir ce qu'on n'était pas.
C'est un livre, d'une grande sincérité, qui parle de cette quête intime et universelle des origines et offre un regard unique sur le conflit ukrainien.


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Correspondant de guerre, Nicolas Delesalle accompagné d'un photographe expérimenté (qui a fait le Vietnam) rejoint le Donbass par le train avant de se diriger vers Kiev. Nous suivons sa traversée de l'Ukraine en guerre.
En parallèle, nous suivons la vie de Sacha, vieil ukrainien, témoin de la première seconde de l'invasion russe. A plus de 70 ans, il s'engage pour sa patrie puis démobilisé en raison de son âge, dans sa cabane isolée, il est chargé de surveiller Vania, un jeune russe « Wagner » capturé par un bataillon ukrainien. Comment un jeune homme de 23 ans a-t-il pu dire oui à « Wagner » ? L'histoire de deux hommes que tout oppose.
Et autre parallèle, nous suivons les souvenirs du reporter, ses premiers émois en Russie lors de ses voyages scolaires organisés par sa mère, professeur de russe excentrique, lorsqu'il avait quatorze ans en pleine guerre froide. Il se raconte adolescent : c'est la première fois qu'il se sent chez lui à l'Est, il se sent ukrainien ou russe, peu importe, c'est la même chose à l'époque. L'héritage russe prend le dessus sur toutes ses origines. Mais avec cette guerre, pour la première fois il a honte.
Ces trois histoires et tous ces êtres humains vont se croiser au fil des chapitres.
Le journaliste côtoient des militaires hier boulangers, des civils effrayés, des femmes qui rejoignent leurs frères ou leurs maris en Pologne, en Slovaquie, des enfants qui se demandent quand ils pourront recommencer à faire leurs devoirs. Il rencontre Maksim, photojournaliste ukrainien, qui les emmène sur le front au Donbass, une rencontre forte.
« Et alors il attend quelques secondes, il gagne un peu de temps, il fige le montre, il vole à la mort un peu d'avant, un peu de vie tout court ».
« Dans ses yeux danse une lueur étrange, quelque chose d'irréparable, propre à ceux qui ont vu la guerre de trop près – c'est un peu terrifiant, on ne voudrait pas attraper cette douleur-là ».
Le journaliste raconte ces hommes et ces femmes rencontrés sur le front et leurs dépouilles aussi. Il raconte les tirs de roquette évités de justesse.
Il raconte aussi sa mère avec humour et tendresse. Il cherche à comprendre l'âme russe. Il raconte des histoires humaines, malgré la guerre, la misère, le KGB et Poutine, il raconte l'humain et tout cela sans pathos, avec les mots justes. Ce n'est pas un documentaire, c'est un roman coup de coeur.
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Voici ce qu'écrit du livre son auteur sur sa page X: "Celui-ci, il me tient à coeur. Il parle de la guerre en Ukraine, de ma mère russe, de la force des origines, de ce qu'on échoue à en faire, des rencontres qui font de nous ce qu'on n'était pas. Une valse qui, je l'espère, vous filera le tournis."

Au hasard de mes lectures, je découvre ce tres beau livre de l'écrivain-reporter Nicolas Delesalle apres avoir lu avec un certain ennui le dernier roman d'un écrivain-star qui a récemment failli devenir "immortel". Comme quoi, il ne suffit pas d'avoir du bagout et de l'imagination pour écrire, il y faut aussi du coeur et du vécu et Nicolas Delesalle en a assurément. Les pages notamment sur Sacha le retraité ex-pilote militaire ukrainien et son "prisonnier" le gamin Vania devenu malgré lui mercenaire Wagner ou les aventures a travers la France des musiciens russes Piotr et Vadim accompagnés de la maman de l'auteur - "la troika infernale" - amenent le lecteur au bord des larmes ou au contraire a sourire béatement ou meme a rire de bon coeur.

Il est dommage que les éditions Lattes publient ce livre en tant que roman car on se rend compte en lisant que tout y est vrai, y compris l'histoire extraordinaire de Sacha et de Vania. Ce n'est pas un roman, mais un récit autobiographique, un carnet de route (l'auteur est grand-reporter) et aussi un livre de réflexion, non d'un intellectuel habitué a se triturer les méninges pour en sortir des choses "intelligentes" mais d'un homme sensible et intelligent qui nourrit ses réflexions d'un riche vécu personnel. Si vous vous fiez a l'étiquette "roman" sur la couverture et que vous vous attendez a lire une intrigue haletante bien linéaire avec un début et une fin ainsi que des personnages qu'on peut "adorer" (un verbe a la mode completement vidé de son sens) ou détester, alors vous risquez d'etre décu(e). Or donc, oyez oyez braves gens: ceci n'est pas un roman de guerre, pas un roman d'amour, pas un roman d'aventure, pas un roman psychologique, non ce n'est pas un roman du tout.

Souvenirs d'enfance savoureux imprégnés de la nostalgie d'une Russie idéalisée dans laquelle plongent les racines familiales de l'auteur, images bouleversantes de la guerre en Ukraine, personnages russes et ukrainiens immergés dans cette guerre qui sont autant de rencontres réelles dans une Ukraine qu'une guerre absurde rend par moment presque irréelle, c'est une lecture non-seulement passionnante et émouvante mais surtout enrichissante, de celles dont on sort avec l'impression d'etre devenu un peu meilleur. Meilleur car Nicolas Delesalle nous fait comprendre que les hommes ne sont ni bons ni mauvais mais tout cela a la fois selon les vents qui font tourbillonner leurs "petites" destinées dans la "grande" Histoire.

Ce livre se lit en gourmet des sentiments et émotions authentiques, de ceux qu'on ne peut imaginer mais seulement reconnaitre. C'est le livre d'un homme qui a vécu ce a propos de quoi il écrit et qui a passé du temps dans sa vie a essayer d'y reconnaitre les pépites de ce qui est essentiel. C'est probablement pour ca que l'auteur trouve a chaque fois les mots justes sans meme essayer de "faire du style". Pour savourer un tel livre, le lecteur doit donc aussi avoir vécu et passé du temps a tamiser les pépites...
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Trois récits se mêlent dans ce texte: celui de l'auteur sous forme de flash-back dans son enfance, celui de l'auteur faisant son travail de journaliste aujourd'hui, en Ukraine, et un troisième récit qui évoque l'histoire de Sacha et Vania. Les trois histoires finiront par se rejoindre de manière assez étonnante et positive, en contraste avec le récit très sombre du conflit en Ukraine.
Le récit autobiographique, dans lequel l'auteur évoque sa quête de l'âme russe mais aussi sa famille haute en couleur et surtout sa mère est particulièrement savoureux. Cela donne un roman humain qui résonne avec l'actualité. J'ai particulièrement aimé les observations très fines sur la nature humaine et la guerre...
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